Le Centre de Visionnage : Films et débats
- groil_groil
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L'homme tiraillé entre deux femmes, et l'artiste-maudit (le même), sculpteur qui perd la vue. Un peu cliché, ce petit Guitry, qu'on a connu plus inspiré.
Un coupe décide de se séparer, mais tous les deux sont d'accord, et décident d'organiser une fête pour célébrer ça, afin que cette séparation se fasse dans la joie et soit le moyen de remercier tous les amis que le couple fréquente. Bien évidemment, ils sont les seuls à trouver ça normal et tout le monde est surpris de cette célébration. Je considère Jonas Trueba comme l'un des meilleurs cinéastes actuels, vous finissez par le savoir, mais ça fait deux fois qu'il me déçoit. Ici la presse est souvent dithyrambique, à grands coups de références bergmaniennes, mais il ne faut quand même pas exagérer, et savoir raison garder. Le film est agréable, bien filmé, bien joué (Itsaso Arana est comme d'habitude absolument extraordinaire et magnétique), mais son souci c'est qu'il passe son temps à faire du sur place. Les protagonistes passent leur temps à annoncer à tout le monde la situation (on se sépare, mais c'est cool, et on fait une fête), mais chaque séquence semble être la répétition de la précédente avec un nouveau surpris. C'est un peu léger. La fête finale a bien lieu, mais malheureusement durant le générique de fin. Elle semble très chouette (elle est bien filmée en superposant au moins 3 images différentes à chaque fois), mais comme elle se déroule sur le générique, on dit clairement au spectateur qu'il n'y est pas convié. Dommage, surtout après nous l'avoir teasée pendant près de deux heures.
Film d'aventures à l'ancienne, qui mélange studio, décors réels et effets spéciaux, qui a tout de même pris un sacré coup de vieux. L'ensemble est assez cliché, souvent ringard et misogyne, Charlton Heston n'ayant pas à beaucoup se forcer, même si le charme finit par opérer sur certaines séquences, notamment pour tout ce qui est extérieur.
Je ne suis pas loin d'avoir trouvé ça nul. OK il y a une idée, deux visiteuses de prisons, d'univers radicalement différents, qui deviennent amies, la riche hébergeant la pauvre, parce qu'elle s'ennuie, et qu'elle a les moyens, et l'autre qui finit par la trahir, parce que tu comprends son milieu social la rattrape tu vois. C'est déjà un affreux cliché, tellement affligeant que je ne pensais plus voir ça dans le cinéma français, en tout cas d'une cinéaste de renom comme Mazuy (bon son film précédent était déjà une catastrophe). Le souci c'est que le reste ne va pas non plus. Le scénario est assez mal écrit, les situations sont téléphonées, rien ne semble naturel à tel point que les deux actrices sont mauvaises et semblent réciter, hésitant souvent, butant sur les répliques. Bon Huppert a arrêté de jouer il y a une dizaine d'années, depuis qu'elle a été érigée en star internationale en gros, mais Herzi qui est une actrice géniale n'est vraiment pas à son niveau habituel. La mise en scène, ça ne va pas non plus, tout est plan plan, pépère, sans inventivité, Mazuy se contentant d'illustrer un scénario (qui d'ailleurs ne semble pas lui plaire). Content de la voir continuer à faire des films (ce qui n'est pas le cas d'une Hélène Angel par exemple), mais il faudrait avec un peu plus d'ambition quand même.
D'ailleurs Sokol, je suis très étonné de ton enthousiasme, rarement j'ai autant senti un scénario filmé comme ici (j'ai même pensé à me barrer c'est dire, en hommage à toi mais je suis allé jusqu'au bout en me forçant).
Le Bonheur de ma Soeur - Das Glück meiner Schwester - Angela Schanelec - 1995
Un homme aime deux femmes, qui se trouvent être demi-soeurs, et va devoir finir par faire un choix, toutes deux étant au courant de la situation. Premier long-métrage d'une des chefs de file de la Nouvelle Vague Allemande (malheureusement quasiment tous les cinéastes de ce courant ultra stimulant (le dernier vraiment marquant du cinéma moderne à mes yeux) ont quasiment tous disparus, ou en tout cas n'ont pas eu la carrière internationale qu'ils auraient du avoir), et qui comporte déjà toutes les caractéristiques de l'oeuvre en devenir. Une écriture sèche, aride, tranchée et parfois à la limite de l'abstraction, inspirée par Akerman notamment. Le film est comme tout le reste de la filmo, pas facile, pas toujours accueillant, mais d'une grande intégrité, et d'une grande intelligence.
Belle Couleur Jaune - Schöne gelbe Farbe - Angela Schanelec - 1991
Tout premier court de la cinéaste, film de 5 minutes seulement, entre abstraction, art abstrait, mais contenant des bribes de fiction arrivant essentiellement par le texte-off.
Second court de la cinéaste, où le narratif arrive peu à peu, même si de manière encore embryonnaire, et qui a comme qualité principale de se dérouler quasi entièrement chez un disquaire. On sent pas mal l'influence de Chantal Akerman, notamment période Saute ma ville, ou Je, tu, il, elle.
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La fin est terrifiante non ? Ca fait quelques années de l’avoir vu (dans une salle de ciné en plus ! le pied) mais ce cul de sac à la fin de ce chemin et après toutes ces péripéties, c’est quelque chose !!
Ah oui, ça y est, ça me revient : Moullet était présent à la fin du visionnage. J’avais évoqué «Stalker », la Zone. Je me souviens qu’il était un peu surpris et emu par le constat. Du coup il s’est mis à parler un peu de la fin (il n’est pas très bavard en tout cas). C’était carrément la fin de la discussion (assez peu de monde si je me souviens bien)
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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@groil_groil j’étais sûr que tu n’allais pas aimer le dernier Mazuy. 100% même . (la preuve : je n’ai pas fait de pub auprès de toi pour que tu ailles le voir)
Je développerais demain
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- groil_groil
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Ca y est, ca me reviens : tu sais la raison pour laquelle j’étais convaincu que tu n’allais pas l’aimer ? C’est « Le Gang des Bois du Temple » de Rabah Ameur-Zaïmeche que tu ne l’avais pas aimé non plus. La preuve : Le film de Mazuy a la meme position que celui de RAZ
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groil_groil a écrit : ↑dim. 8 sept. 2024 09:51mais son souci c'est qu'il passe son temps à faire du sur place. Les protagonistes passent leur temps à annoncer à tout le monde la situation (on se sépare, mais c'est cool, et on fait une fête), mais chaque séquence semble être la répétition de la précédente avec un nouveau surpris. C'est un peu léger
Pendant une partie de la projo, je pensais penser comme toi, mais finalement, à force de constater que le film était avant tout ce geste de répétition, j'ai fini par adhérer.
J'ai toujours aimé chez ce cinéaste la façon dont il arrive à saisir "la vraie vie", les petits riens comme dirait Lewis. Bref, du quotidien sans que cela sonne débile ou chiant pour autant, ce qui n'est pas une mince affaire. D'ailleurs, c'est quand il s'éloigne de ce postulat que je l'aime moins (ici, pas trop fan du concept du film dans le film, on aurait pu s'en passer, même si heureusement c'est assez léger)
Cette idée de répétition, qui est quelque chose qu'on vit tous, marche très bien ici. Evidemment qu'il n'y a pas trente six mille facons d'annoncer une séparation, mais c'est l'accumulation qui fait récit. D'ailleurs : moi qui vit actuellement dans Un jour sans fin (un proche par jour me rend visite pour rencontrer ma fille fraichement née, et je répète plus ou moins les mêmes infos à chaque fois), je trouve le geste encore plus fort qu'à ma séance d'il y a deux mois
Le problème n’est pas ‘le jour sans fin’ en lui-même car Hong San-soo fait exactement ça depuis qu’il est né. Le problème est comment on le fait. Or, le dernier film de Trueba c’est : du Hong Sang-soo (l’idée est de Emmanuel Burdeau, mais j’y avais pensé aussi) mais du HSS … gras !Tamponn Destartinn a écrit : ↑dim. 8 sept. 2024 12:02
Pendant une partie de la projo, je pensais penser comme toi, mais finalement, à force de constater que le film était avant tout ce geste de répétition, j'ai fini par adhérer.
J'ai toujours aimé chez ce cinéaste la façon dont il arrive à saisir "la vraie vie", les petits riens comme dirait Lewis. Bref, du quotidien sans que cela sonne débile ou chiant pour autant, ce qui n'est pas une mince affaire. D'ailleurs, c'est quand il s'éloigne de ce postulat que je l'aime moins (ici, pas trop fan du concept du film dans le film, on aurait pu s'en passer, même si heureusement c'est assez léger)
Cette idée de répétition, qui est quelque chose qu'on vit tous, marche très bien ici. Evidemment qu'il n'y a pas trente six mille facons d'annoncer une séparation, mais c'est l'accumulation qui fait récit. D'ailleurs : moi qui vit actuellement dans Un jour sans fin (un proche par jour me rend visite pour rencontrer ma fille fraichement née, et je répète plus ou moins les mêmes infos à chaque fois), je trouve le geste encore plus fort qu'à ma séance d'il y a deux mois
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- Tamponn Destartinn
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C'est beau, car HSS a longtemps été celui qui était comparé (le "Rohmer coréen") et maintenant il est devenu celui à qui on compare !
J'entends, cela dit. L'art de la répétition, mais avec moins de minimalisme.
Je serais 100% d'accord pour son précédent Venez Voir. Pour le dernier, je le suis moins.
J'entends, cela dit. L'art de la répétition, mais avec moins de minimalisme.
Je serais 100% d'accord pour son précédent Venez Voir. Pour le dernier, je le suis moins.
En fait, on réalise que HSS a peu à voir avec Rohmer (jamais un seul rêve dans ses films). À croire que HSS a bien plus à voir avec un certain… Lynch !Tamponn Destartinn a écrit : ↑dim. 8 sept. 2024 19:07
C'est beau, car HSS a longtemps été celui qui était comparé (le "Rohmer coréen") et maintenant il est devenu celui à qui on compare !
J'entends, cela dit. L'art de la répétition, mais avec moins de minimalisme.
Je serais 100% d'accord pour son précédent Venez Voir. Pour le dernier, je le suis moins.
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Que tu le dis bien !
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Oui, je précise d'ailleurs n'avoir jamais été fan de cette régulière comparaison HSS / Rohmer.sokol a écrit : ↑dim. 8 sept. 2024 23:14En fait, on réalise que HSS a peu à voir avec Rohmer (jamais un seul rêve dans ses films). À croire que HSS a bien plus à voir avec un certain… Lynch !Tamponn Destartinn a écrit : ↑dim. 8 sept. 2024 19:07
C'est beau, car HSS a longtemps été celui qui était comparé (le "Rohmer coréen") et maintenant il est devenu celui à qui on compare !
J'entends, cela dit. L'art de la répétition, mais avec moins de minimalisme.
Je serais 100% d'accord pour son précédent Venez Voir. Pour le dernier, je le suis moins.
Je disais juste que HSS a longtemps été comparé à lui, et que maintenant on commence à comparer de plus jeunes cinéastes à HSS
le rapport de force s'inverse
Tamponn Destartinn a écrit : ↑lun. 9 sept. 2024 00:18
Oui, je précise d'ailleurs n'avoir jamais été fan de cette régulière comparaison HSS / Rohmer.
Je disais juste que HSS a longtemps été comparé à lui, et que maintenant on commence à comparer de plus jeunes cinéastes à HSS
le rapport de force s'inverse
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En fait, même si "Le Gang des Bois du Temple" et "La prisonnière de Bordeaux" propose deux cinéma différents (Rabah Ameur-Zaïmeche et Patricia Mazuy sont des cinéaste différents, exemple : le premier filme beaucoup la ville, celle de Bordeaux - drôle de coïncidence d’ailleurs, la deuxième pas du tout !), il s'agit du même film : un film sur l'amitié (le premier, sur l'amitié masculine; le deuxième, féminine). De surcroit, non seulement dans les deux il y a un MacGouffin mais ils sont quasiment similaire : dans le premier, le braquage du convoi d'un richissime prince arabe; dans le deuxième, le braquage d'une bijouterie. Dans le premier, il y a un prince qui fout la merde; dans le deuxième, Yacine. Tous les deux sont paranos d'ailleurs : le premier veut remettre la main sur des papiers confidentiels (pour lesquels le gang n'a rien à cirer !), dans le deuxième, Yacine croit que le mari de Mina a caché les montres cambriolées.
Tu vois que ça n'a rien à voir avec un scénario filmé ? Car, si on va par là, tu ne sauverais pas un seul film de Hitchcock, n'est ce pas ? (dans lesquels, tout est une histoire de prétexte, pour aller ailleurs)groil_groil a écrit : ↑dim. 8 sept. 2024 09:51et l'autre qui finit par la trahir, parce que tu comprends son milieu social la rattrape tu vois.
...
D'ailleurs Sokol, je suis très étonné de ton enthousiasme, rarement j'ai autant senti un scénario filmé comme ici
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Je comprends que tu veuilles défendre un film que tu as aimé, c'est tout à fait légitime, mais tu planes complètement. Déjà parce que tous les points communs que tu tisses entre le RAZ et le Mazuy sont des points de scénario, et ensuite, car les films d'Hitchcock sont tout sauf des films de scénario, ce cinéaste est la quintessence même de ce qu'on nomme la mise en scène dans son statut ontologique. Et le Mac Guffin, que tu évoques à mon avis à mauvais escient pour les deux films français - il n'y a pour moi aucun Mac Guffin dans ces deux films -, et la preuve que le cinéma d'Hitchcock est un pur cinéma de mise en scène : le Mac Guffin étant un truc qui n'existe pas, ou dont on se fiche royalement dans la construction du film, qui n'a donc aucun intérêt scénaristique, et qui sert seulement à faire avant la mise en scène, à mettre en branle les personnages et le metteur en scène pour aller d'un point A à un point B.sokol a écrit : ↑lun. 9 sept. 2024 12:04En fait, même si "Le Gang des Bois du Temple" et "La prisonnière de Bordeaux" propose deux cinéma différents (Rabah Ameur-Zaïmeche et Patricia Mazuy sont des cinéaste différents, exemple : le premier filme beaucoup la ville, celle de Bordeaux - drôle de coïncidence d’ailleurs, la deuxième pas du tout !), il s'agit du même film : un film sur l'amitié (le premier, sur l'amitié masculine; le deuxième, féminine). De surcroit, non seulement dans les deux il y a un MacGouffin mais ils sont quasiment similaire : dans le premier, le braquage du convoi d'un richissime prince arabe; dans le deuxième, le braquage d'une bijouterie. Dans le premier, il y a un prince qui fout la merde; dans le deuxième, Yacine. Tous les deux sont paranos d'ailleurs : le premier veut remettre la main sur des papiers confidentiels (pour lesquels le gang n'a rien à cirer !), dans le deuxième, Yacine croit que le mari de Mina a caché les montres cambriolées.
Tu vois que ça n'a rien à voir avec un scénario filmé ? Car, si on va par là, tu ne sauverais pas un seul film de Hitchcock, n'est ce pas ? (dans lesquels, tout est une histoire de prétexte, pour aller ailleurs)groil_groil a écrit : ↑dim. 8 sept. 2024 09:51et l'autre qui finit par la trahir, parce que tu comprends son milieu social la rattrape tu vois.
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D'ailleurs Sokol, je suis très étonné de ton enthousiasme, rarement j'ai autant senti un scénario filmé comme ici
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C'est exactement le cas des films de RAZ et Mazuy. AMHAgroil_groil a écrit : ↑mar. 10 sept. 2024 09:22le Mac Guffin étant un truc qui n'existe pas, ou dont on se fiche royalement dans la construction du film, qui n'a donc aucun intérêt scénaristique, et qui sert seulement à faire avant la mise en scène, à mettre en branle les personnages et le metteur en scène pour aller d'un point A à un point B.
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Evidemment, ce n'est pas un bon film, la mise en scène est au ras des pâquerettes et le scénario présente un gros creux en plein milieu du film, d'autant plus dommage qu'il n'exploite pas la situation qu'il met en place au départ. Mais malgré ça, et pour une comédie populaire qui cartonne autant que ça, c'est un film assez réjouissant car c'est un film digne et honnête, qui n'a rien de putassier, et surtout, qui ne rit jamais des trisomiques qu'il filme, mais rit avec eux, toujours. Le succès est énorme, c'est disproportionné mais ça devient un phénomène de société, donc ça dépasse tout raisonnement, mais tant mieux pour lui. Le film est 100 coudées au-dessus de merdes infâmes comme Bienvenue chez les Ch'tis, Intouchables, ou Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu ?, films au succès comparable, mais totalement abjects, chacun à son niveau. Content pour Artus aussi, que je ne connaissais que via Le Bureau des Légendes, et curieux de voir comment il va enchaîner après ça.
Filmée de manière "embarquée", la vie quotidienne et tumultueuse de deux infirmiers de nuit dans les quartiers les plus difficiles de New York, combo classique du vieux briscard (Sean Penn qui commence à prendre des faux airs de Vincent Lindon) et du tout jeunot qui débute sa carrière et découvre la difficulté (c'est peu de le dire) du métier (Tye Sheridan, le gamin de Mud et de Ready Player One, excellent). Je n'attendais rien de spécial de ce film américain même si réalisé par un Français (qui réside à New York depuis des lustres), et c'est une belle et grosse claque. C'est un film hyper fort, aussi bien visuellement qu'émotionnellement, qui met le spectateur à mal au moins autant que ses personnages (certaines scènes sont difficiles à soutenir, dont celles des Black Flies qui donnent leur titre français au film), mais qui n'utilise à mon sens jamais de moyens indignes pour nous balances ces uppercuts émotionnels. Le film est très sombre et on en ressort vraiment dérangé, secoué, mais aussi bouleversé par l'émotion et la beauté de ce qu'on vient de voir, comme un épisode ultra dark d'Urgences réalisé conjointement par James Gray et les frères Safdie.
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Le film se fait démonter par les puristes, parfois à raison, et il vrai que l'on peut y trouver beaucoup de défauts. Mise en place laborieuse et incohérente (pourquoi personne -la compagnie, ou une autre entité- ne s'intéresse t-il à cette station spatiale en orbite en dehors des protagonistes ?), acteurs lisses et beaux sensés représenter la classe ouvrière, multiples clin-œil pas toujours très fin pour les fans... Mais au delà de ça, j'aime le retour à une certaine simplicité thématique et narrative, le film étant très concret, cherchant à créer des situations qui tiennent sur l'architecture des lieux (les sas, les portes, les couloirs, les tunnels, les vitres), ou sur la physique (l'apesanteur, jamais montrée dans la saga, le sang acide des créature)... Une façon de s'éloigner avec succès des errements philosophiques des deux derniers volets de Ridley Scott, bavards mais sans chair.
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La vie du peintre Louis Wain, à la fois schizophrène et allumé, persuadé de ressentir une énergie électrique en permanence, qui passera sa vie à peindre des portraits de chats, deviendra célèbre avec ça, mais finira tout de même ruiné, veuf, en asile, et à moitié fou. Le film est tout à fait correct, et se suit sans déplaisir, Cumberbatch incarnant parfaitement le peintre, mais est sans doute, comme beaucoup de biopics, un peu trop sage, dans les clous, pour un personnage aussi fantasque et barré. Ce qui m'a fait m'intéresser à ce film est que Louis Wain est le peintre préféré de David Tibet, leader de Current 93, groupe que j'affectionne tout particulièrement, et j'aurais aimé que Tibet soit impliqué d'une manière ou d'une autre dans le film, notamment via la musique, pour insuffler un peu d'étrangeté dans ce biopic qui le méritait. Mais, et c'est à l'honneur du film, à la toute fin, dans le rôle de HG Wells, on découvre Nick Cave dans une courte séquence. Or, Nick Cave est l'autre gros fan mondial de Louis Wain avec Tibet, et d'ailleurs c'est par l'amour commun de ce peintre qu'ils se sont rencontrés et sont devenus amis, et que Nick est venu chanter sur deux albums de Current 93, et, pour finir, c'est pas l'intermédiaire de Nick Cave que David Tibet a rencontré sa femme. C'est donc une super idée de faire apparaitre Nick Cave dans ce film, mais il aurait fallu tirer ce film d'Ariane jusqu'au bout.
Une jeune femme Corse, photographe documentaire, se tue dans un accident de voiture. Par le biais d'une voix-off chantante via son accent et littéraire de par son texte - qui se trouve être celle d'un des protagonistes de l'histoire, nous le comprendrons plus tard, le film revient sur la vie de cette femme depuis l'enfance, et sur le fait qui va changer sa vie : le fait qu'adolescente elle soit tombée amoureuse d'un jeune homme qui s'engage au FLNC et débute des interventions d'une grande violence à l'époque où les émeutes indépendantistes corses sont légion (en gros les années 90, le long flash back du film débutant mi-80's). Le film propose alors une longue plongée dans les arcanes des mouvements terroristes corses de l'époque, nous donnant l'impression de vivre le FLNC au quotidien, embarqué avec ces jeunes gens dont le cinéaste prend soin à nous décrire dans les moindres détails, avec leur ambigüité et une approche parfois qui frôle l'aspect documentaire, mais toujours ancré dans une entreprise fictionnelle. Le film est intéressant, mais beaucoup moins percutant que le précédent de Peretti, l'excellent Enquête sur un Scandale d'Etat. Ce qui pêche ici, c'est que malgré l'apparente proximité que le cinéaste a avec ses personnages, il conserve une distance, une pudeur, presque trop importantes qui font que le spectateur ne se sent pas forcément toujours impliqué. Il est parfois comme laissé à l'écart, et peut être amené à ressentir un ennui poli. Malgré ça, ça reste un bon film, toujours digne.
Mes grands-parents m'avaient emmené voir ce Sautet à sa sortie, j'allais sur mes douze piges, et j'avais quand même bien l'impression d'être face à un film de vieux. 40 ans plus tard, c'est toujours le cas. C'est un film à part pour Claude Sautet, et même si on le retrouve quand même, même si la manière dont il fait vivre ce restaurant, son personnel et ses clients, est aussi généreuse que d'une ampleur incroyable, c'est quand même l'un de ceux où l'on sent le cinéaste le moins à l'aise. Et par rapport à ma position de gamin, mais qui en fait est la même aujourd'hui, c'est un film avec lequel, et c'est rare chez Sautet, le cinéaste arrive le moins à m'intéresser à la destinée de ses personnages.
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J'ai pensé la même chose. A mon opinion, cela vient du fait que le cinéaste ne veut pas prendre parti, politiquement parlant je veux dire. C'est un choix. Il en allait de même avec "Enquête sur un scandale d'état" : je ne sais plus détailler mais si la mémoire est bonne, à la fin, on ne sait toujours pas trop si l’infiltré dit la vérité, si le journaliste se la joue un peu trop et si le commissaire a fait exprès de créer un trafic pour mieux le dépister. Plein de cinéaste procède ainsi. Le problème est que, les grands films (et celui -ci, n'en est pas un) qui parlent politique, ont été sauvé soit pas la poésie (Napoléon, La ligne générale, Rome ville ouverte, Les cheyennes, La société du spectacle, Salo ou les 120 journées de Sodome, Notre musique, Buongiono notte, Le fossé, Bamako, Dernier maquis... ) , soit par l'humour (Soupe au canard, L'extravagant Mr. Ruggles, Le dictateur, Roger et moi, ...).groil_groil a écrit : ↑lun. 16 sept. 2024 16:24e qui pêche ici, c'est que malgré l'apparente proximité que le cinéaste a avec ses personnages, il conserve une distance, une pudeur, presque trop importantes qui font que le spectateur ne se sent pas forcément toujours impliqué.
Autrement dit, à ce genre de film comme "A son image" (il y en a plein à nos jours !!) il manque ça :
ou ça :
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
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Revu avec de plus en plus de plaisir ce polar français écrit par Manchette, qu'on a longtemps assimilé à tort à un film de facho à la Bronson à cause de son titre, mais qui, à l'instar de La Nuit des Juges, de Peter Hyams, est en fait une critique acerbe de la loi du talion. Le film sent bon les 80's, dans la mise en scène les décors comme les dialogues, un peu trop appuyés, malheureusement, Brasseur est comme d'hab énorme, et il y a toute une flopée de seconds rôles savoureux.
La Soirée (inachevé) - Jean Eustache - 1963
Je viens de me lancer dans une intégrale Eustache (avec une rétrospective Jean Rollin et une intégrale Mocky) et voici donc son tout premier court-métrage, inachevé, non-sonorisé, qui raconte une soirée parisienne dans un appartement dans une ambiance très Nouvelle Vague.
Premier véritable film d'Eustache, il raconte la déambulation de deux Parisiens, glandeurs comme pas permis, voleurs et roublards, qui tentent de draguer sans succès et qui sont comme punis par leurs propres défauts. Eustache est déjà un cinéaste aguerri dès ses débuts, il filme Paris de manière merveilleuse, tellement libre, et ses deux types sont aussi attachants que détestables.
A Narbonne, un jeune homme veut se payer un duffle-coat avant l'hiver et pour cela accepte toute sortes de petits boulots dont celui de Père Noël de rue pour un photographe. Quelques années après Les 400 Coups, Léaud est déjà devenu le héros de la Nouvelle Vague (on le voit même s'arrêter dans la rue devant une affiche du film de Truffaut) et donne au film immédiatement un cachet. C'est un film libre et dense tout en étant modeste, une épopée du pas grand chose. Eustache raconte qu'il cherchait à acheter des chutes de pellicules à rabais pour tourner son film, et qu'il avait contacté Godard pour lui acheter les chutes des pelloches de Masculin Féminin. Godard les lui avait non seulement offert, mais l'avait aussi aidé bénévolement à produire son film en lui filant toute la thune qui lui manquait. La classe.
Chaque année depuis des temps ancestraux, la ville de Pessac, fief d'Eustache, élit sa Rosière, une sorte de miss mais qui est élue sur ses valeurs morales et non sur son physique. D'ailleurs les votants ne connaissent pas forcément les candidates en amont. Le film documentaire d'Eustache suit méthodiquement toutes les étapes de cette élection, depuis la réunion du conseil municipal qui va voter jusqu'aux célébrations. C'est assez génial de voir cette France d'un autre temps faire d'un événement cette toute petite chose. La jeune fille, qui à l'air un peu de se demander ce qu'elle fait là, est de tous les plans, mais on ne lui donne jamais la parole. Les mâles de l'ancien monde pérorent, font les beaux, essaient d'obtenir un maximum de bises, et lâchent quelques réflexions à la limite du graveleux "ah, et en plus elle est jolie cette année." C'est aussi pathétique que touchant, car Eustache filme ça avec beaucoup de tendresse, et une pointe d'ironie nécessaire.
Merveilleux, méconnu et terrible film de Granier-Deferre, sans doute son meilleur, qui raconte avec méthode comment un homme peut être broyer par son travail et sa direction. Film imparable, sur comment l'entreprise et le charisme maléfique (incroyable Piccoli qui livre ici une des ses plus inquiétantes performances) d'un chef d'entreprise peut totalement broyer un individu subordonné en lui ôtant progressivement toute parcelle de vie privée. Lanvin et Baye sont eux aussi extraordinaires dans ce film froid, clinique, et totalement déstabilisant. Une belle analyse d'une époque malade, dont toutes les craintes du cinéaste n'ont fait, avec le temps, que se confirmer.
11 ans plus tard, Eustache filme une nouvelle élection de Rosière à Pessac. Il joue la répétition comme il le fera plus tard avec les deux volets d'Une Sale Histoire, mais ici, quelque chose est cassé. Déjà on connait le process, les gens sont moins impliqués, le maire moins charismatique, c'est encore plus le bordel pour l'élection, et l'heureuse élue est encore plus paumée. L'ensemble est donc assez décevant, mais ce que montre parfaitement Eustache et qui fait l'intérêt du film, c'est qu'entre les deux films, sur ces 11 ans qui les sépare, la France a littéralement changé et est entrée dans une autre époque. Ce folklore qui passait encore à la fin des années 60, dans un film en noir et blanc, parait complètement obsolète, ridicule, à la fin 70's, et dans un film en couleurs. Le monde a changé, Eustache nous le montre avec évidence.
Plan séquence immobile de deux heures, on cut juste le temps de changer de bobine, Eustache est de dos, et il interviewe sa grand-mère maternelle qui raconte toute sa vie, depuis sa tendre enfance, une vie, forcément à cette époque, mais particulièrement pour elle qui a perdu sa mère à 7 ans et 4 de ses 5 enfants très tôt, qui est pleine de malheurs et de souffrances. La confrontation grand-mère / petit-fils et cinéaste / sujet est doublement bouleversante et magnifique, d'une profondeur abyssale sur la puissance du cinéma documentaire et sa possibilité d'ainsi capter et retranscrire la parole.
Version courte (raccourcie de moitié) de Numéro Zéro, que Eustache, qui n'avait alors jamais montré le premier film à part une projection privée chez lui à moins de 10 personnes dont Straub et Huillet, a accepté de remonter pour une diffusion à la télévision dans le cadre d'une série de docs sur les grands-mères.
Le Dernier des Hommes, postface - Jean Eustache - 1969
Eustache filme les critiques André S. Labarthe, Jean Domarchi et le cinéaste Marc'O en train de débattre du Dernier des Hommes de Murnau, sans doute pour être diffusé à la télévision après le film. Les analyses sont intéressantes.
La Petite Marchande d'Allumettes, postface - Jean Eustache - 1969
Eustache filme Jean Renoir sur la scène du théâtre où il a filmé son merveilleux La Petite Marchande d'Allumettes 40 ans plus tôt. Oui c'est filmé dans un théâtre, bien malin qui l'aurait deviné, tout simplement parce qu'il n'avait pas les moyens de le faire en studio. Le génie de Jean Renoir fait qu'il transforme immédiatement cette interview en masterclass absolument passionnante pour quiconque s'intéresse un minimum au cinéma. Et dans une vieille interview d'Eustache, j'ai appris que ce qu'il préférait aussi était la première période, muette, de Renoir. J'imagine donc son excitation au moment d'enregistrer ces images.
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Film hyper marquant de mes vertes années, que j'ai vu et revu, et que j'adorais par sa violence, son esthétique très - trop ? - marquée, et cette sorte de jusqu'au boutisme qui n'avait pas peur d'aller jusqu'au bout, de renverser les clichés en les prenant à bras le corps. Je redécouvre ce film - dont je me souvenais très bien - après avoir lu le livre de Goodis et il se trouve que l'adaptation de Béhat est incroyablement fidèle, dans une très belle copie bluray qui rend - enfin - hommage au film, en espérant que cela achève de le réhabiliter, car il a longtemps été conspué des cinéphiles établis à cause de son aspect visuel outrancier. Le temps passant, on se rend compte que c'est bel et bien un grand film, avec ses défauts, avec ses tics, d'une grande violence et d'une grande noirceur, et qu'il décrit parfaitement son époque tout en charriant avec lui une forme d'intemporalité qui fait que le film n'en finit plus de se bonifier.
On ne saurait trop rendre grâce à Carlotta d'être enfin parvenu à trouver un accord avec Boris Eustache permettant de restaurer, rééditer et sortir sur support l'oeuvre complète d'Eustache (à part Le Cochon, film coréalisé) et notamment et surtout son film le plus célèbre, le plus connu, couronné à Cannes et resté aujourd'hui à la hauteur de quelques merveilles absolues comme A Bout de Souffle, Les 400 Coups, Jeanne Dielman, de ces rares films piliers qui ont changé l'histoire du cinéma. Je ne reviendrais pas sur le contenu du film, tout le monde le connait et tout a déjà été écrit, mais quelle joie de revoir ce chef d'oeuvre absolu dans des conditions idéales. Le film dure 3h38 mais il pourrait durer une heure, deux, trois de plus, durer 12 ou 13 heures comme le Out One de Rivette, ce serait pareil, je veux dire par là, que c'est un film sur le temps, et qu'au bout d'un moment le temps finit par ne plus compter. C'est Tarkovski qui disait qu'il faisait du cinéma dont la durée ne se mesurait plus en secondes, mais en plans, et là c'est exactement ça, le film finit par avoir sa temporalité propre qui ne dépend plus de l'écoulement des heures, et parvenir à ça est le signe des plus grands. Sinon, je ne me souvenais pas que le film était à ce point autobiographie, Léaud, c'est Eustache, c'est flagrant et souvent assez déstabilisant. Et enfin, comme je fais en ce moment une intégrale Eustache, je revois tout dans l'ordre et je viens de capter un truc que je savais pourtant mais sans pour autant l'avoir formalisé. Avant La Maman et la Putain, Eustache a réalisé deux premiers courts métrages de fiction, puis ensuite, uniquement des documentaires. C'est à dire que la Maman et la Putain est en fait son premier long-métrage de fiction. Et réaliser un tel film, si long, si ample, si ambitieux, si complexe tout en étant si évident, si littéraire et si cinématographique à la fois, si révolutionnaire à tous les sens du terme, est tout simplement prodigieux.
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Et comment !groil_groil a écrit : ↑sam. 21 sept. 2024 16:46Sinon, je ne me souvenais pas que le film était à ce point autobiographie
https://sofilm.fr/la-maman-et-la-putain ... -eustache/Marie, le personnage interprété par Bernadette Lafont, est la transposition de Catherine Garnier, avec qui Eustache vit à cette époque, et qui tient une boutique de mode rue Vavin en face de La Coupole. Non seulement elle travaille dans le film en tant que directrice artistique, mais elle cède aussi son appartement pour en faire le domicile de Marie dans la fiction. Veronika, le personnage interprété par Françoise Lebrun, est dans la vraie vie Marinka Matuszewksi, maîtresse d’Eustache, une infirmière dont les habitudes et la façon de parler fascinent le réalisateur. Finalement, Gilberte, l’ex d’Alexandre interprétée par Isabelle Weingarten, n’est que la transposition de la vraie Françoise Lebrun, ancienne compagne du cinéaste
https://lintervalle.blog/2017/02/09/la- ... uc-beraud/Directement touchée par la façon dont Jean Eustache a mis en scène dans son film l’échec de leur union, sa compagne Catherine Garnier se suicide quelques jours après la première projection de cette œuvre, en laissant ce mot : « Le film est sublime, laissez-le comme il est. »
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
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Quelle tristesse.sokol a écrit : ↑lun. 23 sept. 2024 12:28Et comment !groil_groil a écrit : ↑sam. 21 sept. 2024 16:46Sinon, je ne me souvenais pas que le film était à ce point autobiographie
https://sofilm.fr/la-maman-et-la-putain ... -eustache/Marie, le personnage interprété par Bernadette Lafont, est la transposition de Catherine Garnier, avec qui Eustache vit à cette époque, et qui tient une boutique de mode rue Vavin en face de La Coupole. Non seulement elle travaille dans le film en tant que directrice artistique, mais elle cède aussi son appartement pour en faire le domicile de Marie dans la fiction. Veronika, le personnage interprété par Françoise Lebrun, est dans la vraie vie Marinka Matuszewksi, maîtresse d’Eustache, une infirmière dont les habitudes et la façon de parler fascinent le réalisateur. Finalement, Gilberte, l’ex d’Alexandre interprétée par Isabelle Weingarten, n’est que la transposition de la vraie Françoise Lebrun, ancienne compagne du cinéaste
https://lintervalle.blog/2017/02/09/la- ... uc-beraud/Directement touchée par la façon dont Jean Eustache a mis en scène dans son film l’échec de leur union, sa compagne Catherine Garnier se suicide quelques jours après la première projection de cette œuvre, en laissant ce mot : « Le film est sublime, laissez-le comme il est. »
je viens de revoir Mes Petites Amoureuses, quel film autobiographique aussi celui-ci, et quel chef-d'oeuvre.
Sinon j'ai vu le Fillières, loin d'avoir aimé comme toi, mais contrairement au Mazuy, je vois ce qui t'a plus, il a un côté très HSS. j'en parlerai bientôt.
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Pour moi, maintenant que je l'ai (re, re)vu au ciné, c'est un des 2 plus beaux films autobiographiques au monde (exæquo avec "Le miroir" de Tarkovski). Eustache est très probablement l'unique grand cinéaste d'avoir parlé que de lui dans ses longs métrages (ou, si on peut dire, un Godard interrompu - un Godard qui n'a pas réussi à ne pas se suicider).groil_groil a écrit : ↑lun. 23 sept. 2024 15:55
je viens de revoir Mes Petites Amoureuses, quel film autobiographique aussi celui-ci, et quel chef-d’œuvre.
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A propos du film de Mazuy (une marée de films faits par des éalisatrices en ce moment !) j'avais écrit dès que je suis sorti du ciné :groil_groil a écrit : ↑lun. 23 sept. 2024 15:55
Sinon j'ai vu le Fillières, loin d'avoir aimé comme toi, mais contrairement au Mazuy, je vois ce qui t'a plus, il a un côté très HSS. j'en parlerai bientôt.
Donc, reste le fond (puisque on revoit un film pour la forme) : dans son "Le livre d'image" Godard avait dit que, les filles magrébines (avec lesquelles/laquelle il est sortie) avait quelque chose de très différente par rapport aux autres filles (c'est dans le chapitre "L'Arabie heureuse", à mes yeux le plus beau chapitre du film). Donc, j'ai du aimer le regard de Hafsia Herzi et surtout, SURTOUT, la façon comment Mazuy la filme (je suis catégorique : aucun.e cinéaste peut filmer une femme magrébine comme elle. Rabah Ameur-Zaïmeche ou Tariq Teguia savent magistralement filmer plutôt les hommes magrébins mais pas forcement les femmes - que ce soit dit). D'ailleurs, je viens de faire un petit post sur le top 2024 avec des photos de personnages féminins
et je me rend compte que quasiment la totalité d'elles sont des blondes ! Je sais bien que le cinéma est une histoire de lumière et que les blondes prennent bien mieux la lumière mais justement, le génie de Mazuy est de savoir filmé une non-blonde. Et qu'elle prenne la lumière.
Et toujours coté fond, je n'étais pas d'accord avec ton commentaire selon lequel "le personnage joué par Huppert a les moyens, et l'autre qui finit par la trahir, parce que tu comprends son milieu social la rattrape et que cela est un affreux cliché".
Ce n'est pas un cliché. Tu veux une preuve hyper récente ? il a fallu que Darmanin quitte son post de ministre pour qu'il nous dise:
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Je m'endors toujours à un moment de ce film, à force de le voir, je crois que ça y est je le connais enfin en entier. C'est pas mal, mais question film à complot Pollack n'est pas Pakula et encore moins De Palma (même s'il avait plutôt réussi le Condor).
Ma fille ne l'avait jamais vu et elle a beaucoup aimé.
Enfant, j'adorais ce film, je le mettais au niveau des Leone, et je ne l'avais pas revu depuis. Bonne nouvelle c'est toujours super bien, le croisement parfait entre film de samouraï et western, film quasi silencieux donc basant tout sur la mise en scène, pas loin de Leone en effet, ou du Sierra Torride de Siegel, et en tout cas de loin le meilleur Terence Young, avec un casting 4 étoiles.
Suite de l'intégrale Eustache avec ce chef-d'oeuvre absolu (encore un), le film le plus solaire du cinéaste, même s'il n'enlève rien à sa cruauté intrinsèque. Là encore un film incroyablement autobiographique, même s'il dit que c'est le moins autobiographique de ses films, ce que j'aime c'est que c'est un mélange entre sa vie et celle de sa grand-mère (on le comprend quand on voit Numéro Zéro). On lui avait reproché un film trop bavard avec La Maman, alors il fait le contraire, un film quasi muet. Une sorte de croisement entre Pialat - qui joue dans le film - et Bresson - celui d'Une Femme Douce, mais en plus solaire. Absolument bouleversant.
Film globalement assez anecdotique, mais qui prend toute sa valeur quand on sait qu'il est posthume et que la cinéaste savait qu'elle allait mourir lorsqu'elle le tournait, et que ce serait son dernier. Du coup, ce portrait de la dépression profonde, et sans solution, devient en creux une sorte d'autoportrait de la cinéaste en malade assez bouleversant par sa sincérité et la frontalité avec laquelle elle aborde son sujet.
Un groupe de paysans tue un cochon, le découpe, pièce par pièce, prépare la charcuterie et termine en festoyant. Eustache filme toutes les étapes de cette mise à mort et de cette transformation d'un animal en nourriture, sans effet de spectaculaire, sans non plus ni dénoncer ni cautionner quoique ce soit, il se contente de filmer des hommes au travail. Très vite, l'action de mise à mort s'échappe pour montrer simplement des hommes qui travaillent et qui travaillent pour vivre. Il y a dans ce documentaire d'apparence très simple, très frontal, quelque chose de beaucoup plus large sur la question de la place de l'individu, et de l'animal, dans une chaine qui n'est pas vraiment celle de la société, mais juste du cours des choses, de la vie telle qu'elle est.
Un homme, joué par Lonsdale magnifiquement, raconte à un groupe d'amis sa perversion : dans les toilettes d'un bar, il observe par un trou dans la porte, le sexe des femmes qui viennent pisser dans le toilette d'à-côté, passion qui devient vite obsession. Lorsque le film semble terminé, il recommence, mais avec de nouveaux acteurs, qui disent mot à mot le même texte, jouent les mêmes situations. Sauf que l'on comprend très vite, que cette seconde partie est documentaire, qu'Eustache a enregistré la vraie confession de son ami Jean-Noël Picq, devant quelques un.e.s de ses ami.e.s médusé.e.s d'en prendre connaissance. Le génie absolu d'Eustache est double : déjà d'avoir fait rejouer mot à mot cette confession documentaire pour la transformer en fiction, mais plus encore de montrer les deux côte à côte en commençant par le volet fictionnel. Le trouble est total lorsque débute la seconde partie, on a l'impression de les voir rejouer un texte que l'on connait déjà alors que c'est l'inverse. Eustache brouille totalement les frontières entre cinéma de fiction et documentaire, ce qu'il aura fait durant toute sa carrière (La Maman et la Putain ce n'est que ça) tout en nous faisant voir l'immensité du monde, et sa complexité, par un trou au fond des chiottes d'un bar. Chef-d'oeuvre absolu et indépassable.
Eustache filme une nouvelle fois son ami JN Picq devant un parterre de quelques amis, cette fois en train d'analyser, ou plutôt de commenter les détails du tableau si célèbre de Bosch. Le film est super, même si Picq se contente d'aiguiller notre regard, mais plus encore si on connait Une Sale Histoire, comme si après nous avoir dévoilé ses perversions, Picq mettait désormais au jour celles d'un autre.
Une photographe montre certaines de ses photos à l'un de ses amis, mais au fil du film la description qu'elle fait de ses photos se met à ne plus rien à voir avec les photos qu'elle décrit, sans que son ami semble s'en rendre compte. J'aimerai beaucoup savoir si c'est un film de pur montage ou pas. C'est à dire, est-ce que les acteurs avaient vraiment conscience de ce qu'ils faisaient, ou si elle décrivait de vraies photos, et qu'Eustache, au montage, les a tout simplement remplacées par d'autres pour créer cet abysse vertigineux. Je penche pour la seconde option, car les photos montrées ne le sont qu'en gros plan, et que les acteurs jouent trop juste pour décrire des choses qu'ils ne verraient pas vraiment. J'opte donc pour le film de montage, et donc le film théorique, ou Eustache joue encore sur la question de frontière entre vrai et faux et crédulité, et ses limites, du spectateur.
Un homme recherche un emploi et passe un entretien. Sa sélection, ou son rejet, ne se fera que par des analyses graphologiques n'ayant plus rien à voir avec ses compétences propres, pour qu'on nous annoncent finalement que ce type de sélection est déjà dépassé et qu'on l'a remplacé désormais par un autre, celui de l'analyse des phonèmes, c'est à dire du son pur du candidat, et non plus du sens de ce qu'il dit. Court relativement anecdotique, mais dans lequel Eustache fait passer pas mal de choses, à la fois critiques et théoriques.
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J'ai regardé hier soir "Le retour d'Afrique" (il est sur Arte replay) et je me disais qu'aujourd'hui, on ne peut plus faire (financer, je veux dire) un film pareil. Impossible de vendre à un producteur un scénario qui est composé à 2/3 par l'histoire d'un couple qui reste confiné chez eux en attendant une lettre d'un ami en Algérie.
Ce n'est pas un hasard que parmi les plus beaux films de 2021 étaient ceux qui parlaient confinement (Journal de Tûoa - Miguel Gomes; Guermantes -Christophe Honoré) : c'était l’ultime occasion, cinématographiquement parlant, de pouvoir faire un film basé uniquement sur l'attente : au siècle des séries télévisées, c'est à dire, au siècle du scénario-à-fond-la-caisse, une telle occasion était inespérée !
Exemple : regardez le dernier film de Trueba : ne pouvant pas vendre un scénario sur l'attente (l'attente d'une séparation), le cinéaste fait un film bien scénarisé sur la 'fin-de' qui vire vers une probable comédie de remariage. Du coup ça devient du Hong Sang-soo mais ... gras ! (ce dernier peut bien se permettre de faire ses films comme il les entend, puisqu'il les produit lui-même, ayant trouvé une économie de cinéma propre à lui).
Puis, il y a des phrases plus que visionnaire dans le film de Tanner : un des personnage dit que son enfant connaitra que la pollution, réchauffement climatique etc. En 1973 !!
Incroyable !
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Oui bof, Hollywood à bien fait en 2010 un film d'1h30 avec un type coincé dans un cercueil et la même année sur un type coincé dans un ravin lors d'une rando.
Je n'ai vu aucun des deux et n'en ai pas envie, mais ça me semble un bon contre exemple
Tout ceci pour dire que le Tanner est bien, comme bon nombre de ses films !
Je n'ai vu aucun des deux et n'en ai pas envie, mais ça me semble un bon contre exemple
Tout ceci pour dire que le Tanner est bien, comme bon nombre de ses films !
Oui sauf que les deux films, sur le plan de la mise en scène (surtout le Danny Boyle), fuyaient constamment la question du confinement.cyborg a écrit : ↑dim. 29 sept. 2024 12:33Oui bof, Hollywood à bien fait en 2010 un film d'1h30 avec un type coincé dans un cercueil et la même année sur un type coincé dans un ravin lors d'une rando.
Je n'ai vu aucun des deux et n'en ai pas envie, mais ça me semble un bon contre exemple
Tout ceci pour dire que le Tanner est bien, comme bon nombre de ses films !
On ne s’est pas compris. Je parle d’une attente comme prétexte de mise en scène. Les attente que tu évoque (cercueil, ravin) sont de pur scénariocyborg a écrit : ↑dim. 29 sept. 2024 12:33
Oui bof, Hollywood à bien fait en 2010 un film d'1h30 avec un type coincé dans un cercueil et la même année sur un type coincé dans un ravin lors d'une rando.
Je n'ai vu aucun des deux et n'en ai pas envie, mais ça me semble un bon contre exemple
Tout ceci pour dire que le Tanner est bien, comme bon nombre de ses films !
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Du cinéma anglais qui veut aller sur des territoires de la schyzophrénie, de la paranoïa et de la manipulation mentale, un peu à la Seconds de Frankenheimer, mais qui est incapable de transformer ses intentions en acte cinématographique et qui échoue complètement.
Je pense juste que ce n'est plus l'époque pour faire un film pareil, Mégalopolis arrive tout simplement trop tard. C'est raté, mais c'est ce ratage qui fait paradoxalement sa flamboyance, car cela lui donne un côté décalé, presque bouffon, donnant l'impression de naviguer en permanence entre Don Delillo et Alfred Jarry. Ce que j'aime en tout cas dans le film c'est son ambition. Malgré tout, Coppola y croit jusqu'au bout, et livre une farce qui n'est pas sans rappeler certaines extravagances (on pense à Néron, Héliogabale...) de la Rome Antique qu'il essaie de retranscrire ici dans un New York futuriste. Et c'est justement parce que Coppola y croit jusqu'au bout qu'on finit presque par s'y habituer et s'y sentir bien : si la première heure est plus difficile, le film finit par trouver un équilibre, certes instable, mais c'est ce qui fait son charme, sur sa seconde heure nettement plus réussie et assumant sa monstruosité.
Après une intégrale Eustache, et avant une intégrale Mocky (ça s'appelle un grand écart), je reprend une rétrospective Jean Rollin que j'avais jadis entamée puis mise de côté pour des raisons que les cinéphiles connaissent bien, on suit souvent des chemins non prévus au départ. Je vais revoir certains films, en découvrir d'autres. Je recommence avec La Rose de Fer, que j'ai beaucoup plus aimé que la première fois. Le film est très réussie et tire sa force de ses défauts et de son peu de moyen. C'est une longue déambulation nocturne dans un cimetière de deux amoureux qui fait la part belle à la mise en scène et laisse pour une fois le décorum un peu ridicule de côté. A réhabiliter d'urgence.
Excellent polar politique, avec beaucoup du tension, jouant merveilleusement la contrainte du huis clos, tout en l'explosant ensuite, c'est un polar italien de première classe et l'un des plus beaux films de Damiano, où tout se raconte par la mise en scène. Magnifique.
C'est pas nul, c'est plutôt beau, et c'est un vrai film d'auteur, mais je lui reproche essentiellement deux choses : Premièrement, le film se passe intégralement à Hong-Kong mais la caméra ne sort quasiment jamais de l'hôtel de luxe où il se déroule. Nous n'avons alors rien de l'exotisme pourtant extraordinaire qui pourrait se dégager d'un tel lieu, et qui est l'une des grandes forces du film initial, et là, on dirait presque un remake de Lost In Translation avec des scènes de boule (assez prudes) au milieu. Il y a vers la fin du film, une seule scène d'extérieur, où l'héroïne s'aventure à l'extérieur, à la poursuite de l'homme qui la fascine, et on la voit déambuler les marchés couverts pour finir dans un tripot où les habitués jouent au mahjong dans d'épaisses volutes de fumée. Eh bien, comme par hasard, cette scène est la plus belle du film et on regrette qu'il n'y en ait pas d'autres avec cette ambition. Deuxième truc : le film se veut politique, une vision féministe de l'érotisme, et un film sur la disparition du désir, devenu une marchandise, etc. Très bien cette intention, mais dans les faits, il n'en est rien, c'est un film érotique soft où les tenants et les aboutissants sont les mêmes que d'habitude, c'est l'homme qui mène le bal, notamment en refusant de s'offrir à elle, et qui dirige, même en creux les opérations. Dommage car il y a avait pourtant un sujet intéressant mais qui n'est pas traité, celui de la femme maitresse de son désir et qui dicte aux autres, notamment aux hommes, la marche à suivre.
Des naufrageurs violent et tuent (ou croient tuer) deux gamines rescapées d'un bateau qu'ils viennent de faire couler. Mais le fantôme des deux jeunes femmes vont les hanter et les persécuter à leur tour, jusqu'au dernier. Un Rollin que je connaissais déjà, un peu poussif et exacerbé dans le mauvais sens du terme, mais bon... on sait ce qu'on vient chercher chez le bonhomme.
Troisième volet, et peut-être le plus réussi, en tout cas le plus complet, de la trilogie Ti West / Mia Goth. Un jeu génial sur le cinéma de genre des 80's, convoquant De Palma, Schrader et tant d'autres, mais sans jamais sombrer non plus dans un maniérisme gênant comme peut parfois le faire Tarantino. Ce film est une ouverture de la trilogie vers un aspect plus grand public, tout en gardant son énergie et ses atouts premiers, et c'est une très bonne chose.
Hanté par la photo d'une ruine qu'il semble avoir fréquenté dans son enfance, un homme va tout faire pour retrouver l'endroit en question et les événements et personnages qui y sont liés. Encore un Rollin étonnant, loin des clichés qu'on accole systématiquement à son cinéma. Ici, et même si c'est toujours dans une économie de moyen qui frôle souvent l'amateurisme, Rollin se fait très atmosphérique et étrange, et, toutes proportions gardées évidemment, ferait presque parfois penser à du Rivette de l'époque. Je suis certain que Rivette, grand et curieux cinéphile, devait aimer son cinéma d'ailleurs, j'aimerais bien savoir s'il en déjà parlé.
Revu pour le faire découvrir à mon gamin, et laissez-moi vous dire que ça fonctionne encore à 400% ! Quel film génial.
L'adaptation du roman de Vanessa Schneider racontant la vie de Maria Schneider, et surtout centré sur le tournage traumatisant du Dernier Tango à Paris et la malheureusement célèbre scène de la sodomie, préparée en douce par Bertolucci et Brando sans qu'elle soit au courant pour obtenir plus de vérité, et qui a brisé littéralement sa vie. C'est une belle surprise, car le film est vraiment très réussi, dans sa mise en scène, son écriture, ses choix, son interprétation, vraiment dommage qu'il soit, j'ai l'impression un peu passé sous les radars. Anamaria Vartolomei est géniale en Maria Schneider, notamment parce qu'elle ne cherche pas à tout prix à lui ressembler mais plutôt à faire son métier d'actrice en créant un vrai personnage, et puis putain, quelle idée de génie, Matt Dillon en Marlon Brando est totalement exceptionnel. C'est dingue, troublant, mais quel coup de génie. Je rêve qu'il vienne chercher un César du Meilleur Second Rôle Masculin en février prochain, il le mériterait tellement et ça aurait tellement de gueule !!!
Un des Rollin que je connais le mieux, son pitch vous fera sans doute comprendre pourquoi : une pluie acide tombant sur des vignes, transforme en sorte de zombies tout ceux qui boivent le vin qui en est tiré. C'est aussi jouissif que débile et branque, avec Brigitte Lahaie au milieu de tout ça, un régal absolu, chef-d'oeuvre du bis.
Il est en ce moment en replay sur arte, je l'ai lancé juste pour revoir le générique, et puis je me suis laissé prendre et je l'ai revu alors que je connais pourtant chaque plan par coeur
Un adolescent fait difficilement face à la mort de son père, tout en tentant d'accepter et de faire accepter aux autres et à lui-même son homosexualité. Un très beau Honoré, très personnel, je pense qu'il met beaucoup de souvenirs personnels dedans (pas forcément envie de vérifier, le sentiment est présent), et qui a, comme dans son plus beau film, Plaire, Aimer et Courir Vite, de très beaux moments de grâce, notamment les deux scènes bouleversantes, je n'en dirai pas plus, où deux comédiens différents, jouent leur version guitare / voix de Conchiglie, le plus beau et émouvant morceau d'Andrea Laszlo de Simone. Il faut maintenant que je rattrape Marcello Mio, raté en salle.
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Arf, j'ai perdu mes textes après les avoir tapé.
Le programme du film semble à peu près celui-ci : les personnes handicapées peuvent être aussi beaufs et dégueulasses que les valides. L'égalité par la vulgarité grasse. Pas facile de se sentir autant en décalage avec les 10 millions de Français qui on vu et pour beaucoup aimé ce film.
La rage du film me fait beaucoup penser à Leila et ses frères, même charge contre le patriarche de la famille, même fin amenant la mort libératrice de celui-ci. J'aime beaucoup la première partie, en presque hui-clos pendant la révolte étudiante, entre-aperçue par les réseaux sociaux. Puis la deuxième qui voit le père reproduire le système d'interrogatoire de la police sur sa famille. Engrenage qui conduit à une dernière partie plus contestable à la Shining (influence revendiquée) qui pousse à bout la logique meurtrière du père. Quoi qu'il en soit le film est très fort, même si bien sûr il ne déstabilise pas et conforte le spectateur dans son opinion sur un sujet qui pour nous, occidentaux, porte peu à polémiques (comment ne pas être du coté des deux filles).
Le personnage de la mère est un des plus beaux et forts vus récemment, et l'actrice est fantastique.
Le programme du film semble à peu près celui-ci : les personnes handicapées peuvent être aussi beaufs et dégueulasses que les valides. L'égalité par la vulgarité grasse. Pas facile de se sentir autant en décalage avec les 10 millions de Français qui on vu et pour beaucoup aimé ce film.
La rage du film me fait beaucoup penser à Leila et ses frères, même charge contre le patriarche de la famille, même fin amenant la mort libératrice de celui-ci. J'aime beaucoup la première partie, en presque hui-clos pendant la révolte étudiante, entre-aperçue par les réseaux sociaux. Puis la deuxième qui voit le père reproduire le système d'interrogatoire de la police sur sa famille. Engrenage qui conduit à une dernière partie plus contestable à la Shining (influence revendiquée) qui pousse à bout la logique meurtrière du père. Quoi qu'il en soit le film est très fort, même si bien sûr il ne déstabilise pas et conforte le spectateur dans son opinion sur un sujet qui pour nous, occidentaux, porte peu à polémiques (comment ne pas être du coté des deux filles).
Le personnage de la mère est un des plus beaux et forts vus récemment, et l'actrice est fantastique.
C'est toujours un plaisir de voir un film qui réfléchit constamment à sa mise en scène sans se contenter des sempiternels champs/contre-champs. Peut être que le film n'avait pas besoin de cette voix-of explicative et sur-écrite, mais j'imagine que le cinéaste a eu peur de perdre le spectateur dans un film déjà assez libre, dans sa forme et des carcans narratifs.
Le film me frustre un peu à l'endroit du personnage principal : impression de ne pas en avoir fait le tour, de ne faire que l'effleurer. Et en même temps, ce mystère est peut être la force du film.
Salut les amis,
L'été fut pauvre en visionnage et ma rentrée hyper chargée n'a pas trop changé la donne... octobre devrait être plus calme avec plus de films, du moins je l'espère !
Depuis fin aout j'ai tout de même vu :
Paru en 1994, Johnny Mnemonic semble à l'équilibre entre la série B d'action des années 80 et les futurs films de SF technocritiques qui apparaitront à la fin de la décennie. Ici un tout jeune Keanu Reeves joue un agent secret dont la mémoire boosté sert à transporter des messages cryptés d'un bout à l'autre d'un monde dominé par des réseaux cybernétiques... Oui vous l'aurez sans doute reconnu : on dirait un proto-Matrix... il parait même que ce film fut montré comme exemple par les Wachoski cherchant des investisseurs... Ce film n'a malheureusement ni leur ambition ni la finesse de pensée du 1er volet, finissant par ne plus savoir quoi faire de son propre univers pourtant riche en promesse. Une curiosité !
Je l'ai découvert il n'y a pas si longtemps et l'ai revu un soir un peu par hasard... J'avais aimé le film tout en ayant l'impression d'être passé à côté (comme une confirmation qu'il faut toujours voir un Godard deux fois...). Ce n'est qu'à ce visionnage que j'ai découvert à quel point Notre Musique était passionnant, immense presque malgré sa simplicité d'apparence, et peut-être ce que JLG à fait de mieux dans sa période post-2000 (?).
Il y a d'ailleurs quelque chose d'assez troublant, dans son rapport à l'époque : le film se clôt sur une dernière partie nommée "Paradis", dans laquelle Godard semble se regarder lui-même et singe sa période année-60. Plus particulièrement le génial Week-End et sa scène des hippies-révolutionnaires vivant dans les bois, déclamant Lautréamont face à un étang, hurlant l'incroyable "Je te salue vieil océan"...
Si ici le film se clôt sur une image proche, composée de branches et d'eau, elle est néanmoins silencieuse. Les voix, les mots, la parole semblent avoir disparus dans les 40 ans séparant les deux œuvres. Inflexion pessimiste, aveu tu d'un échec ? Il y a bien quelque chose de morose dans "Notre musique", comme une perte de croyance autour de l'éternel question godardienne du "montage" comme forme émancipatrice.
Car c'est bien ici, dans l'usage de nos mots, de nos syllabes, de nos langages que se cachait la fameuse "musique" du titre : la langue comment étant avant tout musique (par ses sonorités, pour toute oreille qui ne la comprends pas) plutôt que communication, échange, transmission réussie. Ce renversement surprenant est la dorsale principale du film, venant s'incarner dans ces nombreux écrivains internationaux réunis dans un colloque au milieu des Balkans, région se déchirant elle-même sur des revendications culturelles et linguistiques. Le filmage de la reconstruction en cours du pont de Mostar en est le magnifique penchant symbolique, la tentative de retrouver et de classer toutes ses pierres pour à nouveau faire lien : quête impossible, ou presque.
En plus de ce programme chargé, Godard à la bonne idée d'ouvrir encore son champ de réflexion. D'une part en intégrant un propos sur les images (son langage à lui et donc "sa musique" également), par la conférence qu'il se fait donner, mais aussi par la jeune femme réalisant des prises de vue en DV, qu'elle finira par lui donner sur un CD (apparition du numérique : nouveau paradigme visuel à comprendre). D'autre part en faisant surgir des conflits de territoires et d'époques diverses : les natifs américains, ou encore le conflit palestinien, par la sublime interview de Mahmoud Darwich par une journaliste israelienne. Le langage, et sa tâche impossible, semble décidément la source de bien des maux.
Ces quelques phrases ne sauraient résumer la puissance de Notre Musique, pierre supplémentaire et absolument pas secondaire dans l'édifice de la passionnante carrière de Godard.
Sherman's March: A Meditation on the Possibility of Romantic Love In the South During an Era of Nuclear Weapons Proliferation - Ross McElwee - 1985
Bien qu'ayant obtenu une bourse pour réaliser un documentaire sur la célèbre campagne du général Sherman ayant décimé le sud des USA durant la guerre de sécession, Ross McElwee préfère faire dévier son sujet sur ses propres déboires sentimentaux et amoureux. Si la traversé du sud du pays est toujours la trame de fond générale, le réalisateur narre plutôt ses rencontres avec de jeunes femmes, ses tentatives de se reconnecter avec sa famille, ou ses retrouvailles avec d'anciennes amourettes d'enfance, toujours sans succès ou presque. Bien que très long (2h30), le film n'est jamais redondant ou ennuyeux, par un sens certain de l'autodérision, par les portraits incessants de personnages pittoresques, mais aussi l'esprit suffisamment affuté de l'auteur pour se poser les bonnes questions et reconnaitre les propres limites de son expérience, évitant au film d'être devenu avec le temps un objet malaisant et daté.
Si l'idée de mélanger grande Histoire d'un carnage militaire et petite histoire de difficultés relationnelles est amusante, le film est aussi intéressant cinématographiquement parlant. Nous sommes en effet face à un film étant avant tout un road-movie, mais dans lequel l'auteur retourne la caméra vers lui-même, dans une sorte de geste narcissique annonçant peut-être déjà un nouveau rapport à l'image et au documentaire encore balbutiant. Dans le même ordre d'idée, je songe aussi à No Sex Last Night de Sophie Calle (bien que paru 10 ans plus tard), qui elle aussi détournait par le biais d'une histoire d'amour performative, la forme du road-movie. L'héritier le plus flagrant de ces exercices du journal intime-autothérapique est d'ailleurs sans aucun doute John Wilson et ses géniaux "How To", produit pendant 3 saisons par HBO, à qui la forme sérielle convient à la perfection.
Mati Diop s'attaque frontalement à l'un des sujets les plus brulants et importants de notre début de XXIème siécle : les suites de la décolonisation et la rétribution des œuvres pillées à leurs pays d'origines. Si Atlantique, son précédent film, m'intéressait par de nombreuses idées, je le trouvais beaucoup moins convainquant par ses tentatives cinématographiques plus convenue (l'histoire policière, par exemple).
Diop à ici la bonne idée de laisser toute approche fictionnelle de côté. A l'inverse elle donne à voir, de façon très anti-spectaculaire, les "coulisses" du retour des œuvres sur leur terre d'origine : les gestes, les outils, les techniques, les observations, les classements. Il y a quelque chose de très germanique dans cette approche -je ne suis presque pas surpris que la récompense vienne du festival de Berlin...- tant l'esprit de Farocki semble planer tout au long du film. Mieux encore, elle ne se pare pas de discours politiques, et tous les personnages de ce types sont absents du film. Toute la place est laissé d'une part à une voix fantasmée de l'esprit de la statue "N°26" et d'autres parts à des étudiants débattant sur les causes et effets de cette restitution, dans une somme foisonnante de questionnements et de points de vues encore loin de faire consensus. La toute fin du film, ne se concluant audacieusement pas dans les nouvelles ténèbres du musée, réinscrit ces mots et ces corps dans l'espace de la ville et de la vie, prônant de la sorte une culture vivante et tournée vers demain. Et tout ceci en à peine plus d'une heure : chapeau.
Dernier film de Ameur-Zaimeche qu'il me restait à voir. Je suis ravi que cela ait pu se faire sur grand écran. Il s'agit en effet de son film ou l'attention à l'image, à sa plasticité, à l'espace du dialogue entre corps et paysages, est le plus présent.
Cette adaptation très libre des derniers jours de la vie de Jésus, par l'angle réinventé du quotidien de Judas, ne manquera pas de surprendre et désorienter - en bien.
Les connaisseurs de son cinéma remarqueront néanmoins certains de ses thèmes typiques (notamment la question "du groupe", et peut-être plus encore du groupe masculin, mais aussi de la foi et du renouveau possible) ainsi que son approche par un discours très théorique sur ce qu'il raconte et sur la façon dont il le raconte.
La scène essentielle du film est le saccage par le feu des textes du scribe par Judas, qui lui coûtera la vie. Il y a ici la question de la liberté qu'il est possible de prendre ou non par rapports à la forme écrite et ce qu'on peut lui faire dire ou non (c'est in-fine la question du fondamentalisme, et sans doute dans notre cas la jointure entre le script et la mise en scène,). L'écho avec les documents que brulent les braqueurs amateurs dans "Le gang du bois du temple" est bien sur flagrant, RAZ confirmant encore ici sa préférence pour la réinvention et la vie que le décalquage stricto-sensu. Plutôt que filmer consciencieusement Jésus il préfère donner de l'espace à son double-foutraque qu'est Carabas, ou digresser sur la mère de la jeune femme lynchée... La foi est peut-être plus forte dans ses à côtés que dans ses éléments centraux. Autant de questions que nous pose le réalisateur, sans - fort heureusement - nous en donner de réponse définitive.
L'été fut pauvre en visionnage et ma rentrée hyper chargée n'a pas trop changé la donne... octobre devrait être plus calme avec plus de films, du moins je l'espère !
Depuis fin aout j'ai tout de même vu :
Paru en 1994, Johnny Mnemonic semble à l'équilibre entre la série B d'action des années 80 et les futurs films de SF technocritiques qui apparaitront à la fin de la décennie. Ici un tout jeune Keanu Reeves joue un agent secret dont la mémoire boosté sert à transporter des messages cryptés d'un bout à l'autre d'un monde dominé par des réseaux cybernétiques... Oui vous l'aurez sans doute reconnu : on dirait un proto-Matrix... il parait même que ce film fut montré comme exemple par les Wachoski cherchant des investisseurs... Ce film n'a malheureusement ni leur ambition ni la finesse de pensée du 1er volet, finissant par ne plus savoir quoi faire de son propre univers pourtant riche en promesse. Une curiosité !
Je l'ai découvert il n'y a pas si longtemps et l'ai revu un soir un peu par hasard... J'avais aimé le film tout en ayant l'impression d'être passé à côté (comme une confirmation qu'il faut toujours voir un Godard deux fois...). Ce n'est qu'à ce visionnage que j'ai découvert à quel point Notre Musique était passionnant, immense presque malgré sa simplicité d'apparence, et peut-être ce que JLG à fait de mieux dans sa période post-2000 (?).
Il y a d'ailleurs quelque chose d'assez troublant, dans son rapport à l'époque : le film se clôt sur une dernière partie nommée "Paradis", dans laquelle Godard semble se regarder lui-même et singe sa période année-60. Plus particulièrement le génial Week-End et sa scène des hippies-révolutionnaires vivant dans les bois, déclamant Lautréamont face à un étang, hurlant l'incroyable "Je te salue vieil océan"...
Si ici le film se clôt sur une image proche, composée de branches et d'eau, elle est néanmoins silencieuse. Les voix, les mots, la parole semblent avoir disparus dans les 40 ans séparant les deux œuvres. Inflexion pessimiste, aveu tu d'un échec ? Il y a bien quelque chose de morose dans "Notre musique", comme une perte de croyance autour de l'éternel question godardienne du "montage" comme forme émancipatrice.
Car c'est bien ici, dans l'usage de nos mots, de nos syllabes, de nos langages que se cachait la fameuse "musique" du titre : la langue comment étant avant tout musique (par ses sonorités, pour toute oreille qui ne la comprends pas) plutôt que communication, échange, transmission réussie. Ce renversement surprenant est la dorsale principale du film, venant s'incarner dans ces nombreux écrivains internationaux réunis dans un colloque au milieu des Balkans, région se déchirant elle-même sur des revendications culturelles et linguistiques. Le filmage de la reconstruction en cours du pont de Mostar en est le magnifique penchant symbolique, la tentative de retrouver et de classer toutes ses pierres pour à nouveau faire lien : quête impossible, ou presque.
En plus de ce programme chargé, Godard à la bonne idée d'ouvrir encore son champ de réflexion. D'une part en intégrant un propos sur les images (son langage à lui et donc "sa musique" également), par la conférence qu'il se fait donner, mais aussi par la jeune femme réalisant des prises de vue en DV, qu'elle finira par lui donner sur un CD (apparition du numérique : nouveau paradigme visuel à comprendre). D'autre part en faisant surgir des conflits de territoires et d'époques diverses : les natifs américains, ou encore le conflit palestinien, par la sublime interview de Mahmoud Darwich par une journaliste israelienne. Le langage, et sa tâche impossible, semble décidément la source de bien des maux.
Ces quelques phrases ne sauraient résumer la puissance de Notre Musique, pierre supplémentaire et absolument pas secondaire dans l'édifice de la passionnante carrière de Godard.
Sherman's March: A Meditation on the Possibility of Romantic Love In the South During an Era of Nuclear Weapons Proliferation - Ross McElwee - 1985
Bien qu'ayant obtenu une bourse pour réaliser un documentaire sur la célèbre campagne du général Sherman ayant décimé le sud des USA durant la guerre de sécession, Ross McElwee préfère faire dévier son sujet sur ses propres déboires sentimentaux et amoureux. Si la traversé du sud du pays est toujours la trame de fond générale, le réalisateur narre plutôt ses rencontres avec de jeunes femmes, ses tentatives de se reconnecter avec sa famille, ou ses retrouvailles avec d'anciennes amourettes d'enfance, toujours sans succès ou presque. Bien que très long (2h30), le film n'est jamais redondant ou ennuyeux, par un sens certain de l'autodérision, par les portraits incessants de personnages pittoresques, mais aussi l'esprit suffisamment affuté de l'auteur pour se poser les bonnes questions et reconnaitre les propres limites de son expérience, évitant au film d'être devenu avec le temps un objet malaisant et daté.
Si l'idée de mélanger grande Histoire d'un carnage militaire et petite histoire de difficultés relationnelles est amusante, le film est aussi intéressant cinématographiquement parlant. Nous sommes en effet face à un film étant avant tout un road-movie, mais dans lequel l'auteur retourne la caméra vers lui-même, dans une sorte de geste narcissique annonçant peut-être déjà un nouveau rapport à l'image et au documentaire encore balbutiant. Dans le même ordre d'idée, je songe aussi à No Sex Last Night de Sophie Calle (bien que paru 10 ans plus tard), qui elle aussi détournait par le biais d'une histoire d'amour performative, la forme du road-movie. L'héritier le plus flagrant de ces exercices du journal intime-autothérapique est d'ailleurs sans aucun doute John Wilson et ses géniaux "How To", produit pendant 3 saisons par HBO, à qui la forme sérielle convient à la perfection.
Mati Diop s'attaque frontalement à l'un des sujets les plus brulants et importants de notre début de XXIème siécle : les suites de la décolonisation et la rétribution des œuvres pillées à leurs pays d'origines. Si Atlantique, son précédent film, m'intéressait par de nombreuses idées, je le trouvais beaucoup moins convainquant par ses tentatives cinématographiques plus convenue (l'histoire policière, par exemple).
Diop à ici la bonne idée de laisser toute approche fictionnelle de côté. A l'inverse elle donne à voir, de façon très anti-spectaculaire, les "coulisses" du retour des œuvres sur leur terre d'origine : les gestes, les outils, les techniques, les observations, les classements. Il y a quelque chose de très germanique dans cette approche -je ne suis presque pas surpris que la récompense vienne du festival de Berlin...- tant l'esprit de Farocki semble planer tout au long du film. Mieux encore, elle ne se pare pas de discours politiques, et tous les personnages de ce types sont absents du film. Toute la place est laissé d'une part à une voix fantasmée de l'esprit de la statue "N°26" et d'autres parts à des étudiants débattant sur les causes et effets de cette restitution, dans une somme foisonnante de questionnements et de points de vues encore loin de faire consensus. La toute fin du film, ne se concluant audacieusement pas dans les nouvelles ténèbres du musée, réinscrit ces mots et ces corps dans l'espace de la ville et de la vie, prônant de la sorte une culture vivante et tournée vers demain. Et tout ceci en à peine plus d'une heure : chapeau.
Dernier film de Ameur-Zaimeche qu'il me restait à voir. Je suis ravi que cela ait pu se faire sur grand écran. Il s'agit en effet de son film ou l'attention à l'image, à sa plasticité, à l'espace du dialogue entre corps et paysages, est le plus présent.
Cette adaptation très libre des derniers jours de la vie de Jésus, par l'angle réinventé du quotidien de Judas, ne manquera pas de surprendre et désorienter - en bien.
Les connaisseurs de son cinéma remarqueront néanmoins certains de ses thèmes typiques (notamment la question "du groupe", et peut-être plus encore du groupe masculin, mais aussi de la foi et du renouveau possible) ainsi que son approche par un discours très théorique sur ce qu'il raconte et sur la façon dont il le raconte.
La scène essentielle du film est le saccage par le feu des textes du scribe par Judas, qui lui coûtera la vie. Il y a ici la question de la liberté qu'il est possible de prendre ou non par rapports à la forme écrite et ce qu'on peut lui faire dire ou non (c'est in-fine la question du fondamentalisme, et sans doute dans notre cas la jointure entre le script et la mise en scène,). L'écho avec les documents que brulent les braqueurs amateurs dans "Le gang du bois du temple" est bien sur flagrant, RAZ confirmant encore ici sa préférence pour la réinvention et la vie que le décalquage stricto-sensu. Plutôt que filmer consciencieusement Jésus il préfère donner de l'espace à son double-foutraque qu'est Carabas, ou digresser sur la mère de la jeune femme lynchée... La foi est peut-être plus forte dans ses à côtés que dans ses éléments centraux. Autant de questions que nous pose le réalisateur, sans - fort heureusement - nous en donner de réponse définitive.
Megalopolis de Francis Ford Coppola
Je me demandais ce que serait devenu Apocalypse now sans intempérie et tourné entre quatre murs verts avec pour seul souffle celui du climatiseur. Je crois que j'ai une forme de réponse maintenant et c'est déjà bien. Le premier plan indique "terminal", comme la phase dans laquelle le cinéma d'auteur à gros budget se trouve depuis plusieurs années avec des scénarios surchargés d'effets qui se voudraient plus libres. Seuls quelques réalisateurs venant des années 70, comme Spielberg et Scorsese, y échappent encore un peu, eux qui sont restés dans une veine classique parce qu'ils ont bien conscience qu'ils ne peuvent pas surfer sur une certaine vague avec les paquebots qu'ils dirigent. Coppola vient aussi des années 70, mais lui s'essaie quand même à surfer et fait forcément plouf. Cela dit, il s'agit d'un gros plouf assumé et c'est toujours plus stimulant qu'un autre qui se contenterait de péter timidement dans l'eau en claironnant que ça ne vient pas de lui.
Mais au-delà de la curiosité, ce n'est pas que le film est cassé ou qu'il menace de basculer constamment dans le vide à force d'emprunter des passerelles bringuebalantes (si seulement, il faudrait déjà qu'il y ait un vide), c'est au contraire qu'il est rigidifié comme une plante confinée dans un bocal illuminé par des leds. C'est une sorte d'apothéose d'un cinéma qui s'asphyxie lui-même à force de vouloir s'élever au sens strict du terme, c'est à dire comme une fusée. Ces films-là sont toujours fascinants d'un point de vue sociologique avec les réactions que ça suscite, ou d'un point de vue mythologique (toujours le sempiternel mythe d'Icare) mais cinématographiquement ça finit par me laisser globalement indifférent. Il y a des beaux plans parce que Coppola sait toujours filmer, il y a même parfois des jaillissements qui semblent provenir de ses plus grands films, il y a aussi des bons acteurs, ça suffit pour ne pas s'endormir, moins pour s'éveiller. Les plus belles séquences sont finalement quand le temps s'arrête, parce le film épouse ce qu'il est vraiment.
Ces fameux fonds verts omniprésents et pourtant invisibles, je me demande si ce ne serait pas mieux de les filmer en tant que tels, c'est à dire ce que les acteurs voient, à l'instar d'un Lars Von Trier qui supprimait les décors dans certains de ses films. Peut-être que ça permettrait de commencer à entrevoir ce qu'il y a derrière le mur du terminus.
Je me demandais ce que serait devenu Apocalypse now sans intempérie et tourné entre quatre murs verts avec pour seul souffle celui du climatiseur. Je crois que j'ai une forme de réponse maintenant et c'est déjà bien. Le premier plan indique "terminal", comme la phase dans laquelle le cinéma d'auteur à gros budget se trouve depuis plusieurs années avec des scénarios surchargés d'effets qui se voudraient plus libres. Seuls quelques réalisateurs venant des années 70, comme Spielberg et Scorsese, y échappent encore un peu, eux qui sont restés dans une veine classique parce qu'ils ont bien conscience qu'ils ne peuvent pas surfer sur une certaine vague avec les paquebots qu'ils dirigent. Coppola vient aussi des années 70, mais lui s'essaie quand même à surfer et fait forcément plouf. Cela dit, il s'agit d'un gros plouf assumé et c'est toujours plus stimulant qu'un autre qui se contenterait de péter timidement dans l'eau en claironnant que ça ne vient pas de lui.
Mais au-delà de la curiosité, ce n'est pas que le film est cassé ou qu'il menace de basculer constamment dans le vide à force d'emprunter des passerelles bringuebalantes (si seulement, il faudrait déjà qu'il y ait un vide), c'est au contraire qu'il est rigidifié comme une plante confinée dans un bocal illuminé par des leds. C'est une sorte d'apothéose d'un cinéma qui s'asphyxie lui-même à force de vouloir s'élever au sens strict du terme, c'est à dire comme une fusée. Ces films-là sont toujours fascinants d'un point de vue sociologique avec les réactions que ça suscite, ou d'un point de vue mythologique (toujours le sempiternel mythe d'Icare) mais cinématographiquement ça finit par me laisser globalement indifférent. Il y a des beaux plans parce que Coppola sait toujours filmer, il y a même parfois des jaillissements qui semblent provenir de ses plus grands films, il y a aussi des bons acteurs, ça suffit pour ne pas s'endormir, moins pour s'éveiller. Les plus belles séquences sont finalement quand le temps s'arrête, parce le film épouse ce qu'il est vraiment.
Ces fameux fonds verts omniprésents et pourtant invisibles, je me demande si ce ne serait pas mieux de les filmer en tant que tels, c'est à dire ce que les acteurs voient, à l'instar d'un Lars Von Trier qui supprimait les décors dans certains de ses films. Peut-être que ça permettrait de commencer à entrevoir ce qu'il y a derrière le mur du terminus.
- groil_groil
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- Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12
super texte, et avis que je partage globalement.len' a écrit : ↑lun. 7 oct. 2024 12:35Megalopolis de Francis Ford Coppola
Je me demandais ce que serait devenu Apocalypse now sans intempérie et tourné entre quatre murs verts avec pour seul souffle celui du climatiseur. Je crois que j'ai une forme de réponse maintenant et c'est déjà bien. Le premier plan indique "terminal", comme la phase dans laquelle le cinéma d'auteur à gros budget se trouve depuis plusieurs années avec des scénarios surchargés d'effets qui se voudraient plus libres. Seuls quelques réalisateurs venant des années 70, comme Spielberg et Scorsese, y échappent encore un peu, eux qui sont restés dans une veine classique parce qu'ils ont bien conscience qu'ils ne peuvent pas surfer sur une certaine vague avec les paquebots qu'ils dirigent. Coppola vient aussi des années 70, mais lui s'essaie quand même à surfer et fait forcément plouf. Cela dit, il s'agit d'un gros plouf assumé et c'est toujours plus stimulant qu'un autre qui se contenterait de péter timidement dans l'eau en claironnant que ça ne vient pas de lui.
Mais au-delà de la curiosité, ce n'est pas que le film est cassé ou qu'il menace de basculer constamment dans le vide à force d'emprunter des passerelles bringuebalantes (si seulement, il faudrait déjà qu'il y ait un vide), c'est au contraire qu'il est rigidifié comme une plante confinée dans un bocal illuminé par des leds. C'est une sorte d'apothéose d'un cinéma qui s'asphyxie lui-même à force de vouloir s'élever au sens strict du terme, c'est à dire comme une fusée. Ces films-là sont toujours fascinants d'un point de vue sociologique avec les réactions que ça suscite, ou d'un point de vue mythologique (toujours le sempiternel mythe d'Icare) mais cinématographiquement ça finit par me laisser globalement indifférent. Il y a des beaux plans parce que Coppola sait toujours filmer, il y a même parfois des jaillissements qui semblent provenir de ses plus grands films, il y a aussi des bons acteurs, ça suffit pour ne pas s'endormir, moins pour s'éveiller. Les plus belles séquences sont finalement quand le temps s'arrête, parce le film épouse ce qu'il est vraiment.
Ces fameux fonds verts omniprésents et pourtant invisibles, je me demande si ce ne serait pas mieux de les filmer en tant que tels, c'est à dire ce que les acteurs voient, à l'instar d'un Lars Von Trier qui supprimait les décors dans certains de ses films. Peut-être que ça permettrait de commencer à entrevoir ce qu'il y a derrière le mur du terminus.
I like your hair.
- groil_groil
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Un pêcheur / chasseur d'orques pour reventes à parcs aquatiques tue une femelle en voulant la capturer. Le mâle décide alors de se venger. J'avais déjà vu ce film étant gamin, et j'avais oublié que c'était aussi bien. C'est un film dur, âpre, engagé, et dont l'intention, nous ne sommes pourtant qu'en 1976, est de dénoncer la souffrance animale au sens large du terme. Un vrai film militant. Et beau qui plus est, ce qui ne gâche rien. Et superbement mis en musique par Morricone. Ce film c'est en fait l'anti-Jaws, et celui qui remet les pendules à l'heure. Jaws fait de l'animal l'ennemi, et celui qu'il faut détruire; il a d'ailleurs fait énormément de mal aux populations mondiales de requin, qui est devenu un animal haï, ou a minima craint, par l'ensemble des populations mondiales. Orca fait de l'animal l'ami, et surtout celui qui souffre, et qui est martyrisé par l'homme. ça fait du bien de remettre les pendules spielbergiennes à l'heure.
Film aussi bâtard que grandiose, aussi désuet qu'ambitieux, aussi raté que parfois passionnant, Reflets dans un oeil d'or a comme principal défaut d'arriver bien après l'âge d'or hollywoodien (nous sommes en 1967) tout en en reprenant les codes, forcément devenus désuets, et les stars, mais qui ne sont plus que l'ombre d'elles-mêmes, les deux étant bouffis, sous cachetons, dépendant à tellement de substances que par exemple Liz Taylor n'arrive même plus à dire son texte et donne l'impression qu'elle va se casser la gueule à chaque fois qu'elle se déplace. Le début du film est donc pathétique, et difficile à suivre. Mais Huston est un malin, et joue de ces défauts pour y introduire de la perversion, du SM, de l'homosexualité refoulée, du désir morbide et frelaté, et plein d'autres déviances qui font de ce film un sorte d'objet unique et sans comparaison possible, entre le pathétique et le flamboyant.
I like your hair.
Sauf que LVT est un européen. Coppola un américain. Au sens du cinéma (cinéma européen vs. cinéma américain). Frères Lumière vs Georges Méliès.
Ab aeterno
Modifié en dernier par sokol le mar. 8 oct. 2024 12:28, modifié 1 fois.
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Jean-Marie Straub
N'est ce pas Carax dans Holy Motors qui filme des fonds verts vides ? Et sans doute d'autres que j'oublie (et tellement de photographes ont fait des séries d'images à ce sujet : c'est très beau un cyclo vide...)
(je n'ai pas lu ton texte Ien', n'ayant pas vu le film - juste les réactions à son sujet ici)
(je n'ai pas lu ton texte Ien', n'ayant pas vu le film - juste les réactions à son sujet ici)
Et c'est précisément pour cela que le film est, à mon sens, insauvable ; et que la soi-disant grande liberté artistique du film, pseudo-expérimentale, ne tient pas.len' a écrit : ↑lun. 7 oct. 2024 12:35Megalopolis de Francis Ford Coppola
Mais au-delà de la curiosité, ce n'est pas que le film est cassé ou qu'il menace de basculer constamment dans le vide à force d'emprunter des passerelles bringuebalantes (si seulement, il faudrait déjà qu'il y ait un vide), c'est au contraire qu'il est rigidifié comme une plante confinée dans un bocal illuminé par des leds. C'est une sorte d'apothéose d'un cinéma qui s'asphyxie lui-même à force de vouloir s'élever au sens strict du terme, c'est à dire comme une fusée.
“Le cinéma existe en soi, c’est un langage. Il doit devenir une fin en soi".
Francis Ford Coppola
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Jean-Marie Straub
Exactement ça.
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
len' a écrit : ↑lun. 7 oct. 2024 12:35Megalopolis de Francis Ford Coppola
Je me demandais ce que serait devenu Apocalypse now sans intempérie et tourné entre quatre murs verts avec pour seul souffle celui du climatiseur. Je crois que j'ai une forme de réponse maintenant et c'est déjà bien. Le premier plan indique "terminal", comme la phase dans laquelle le cinéma d'auteur à gros budget se trouve depuis plusieurs années avec des scénarios surchargés d'effets qui se voudraient plus libres. Seuls quelques réalisateurs venant des années 70, comme Spielberg et Scorsese, y échappent encore un peu, eux qui sont restés dans une veine classique parce qu'ils ont bien conscience qu'ils ne peuvent pas surfer sur une certaine vague avec les paquebots qu'ils dirigent. Coppola vient aussi des années 70, mais lui s'essaie quand même à surfer et fait forcément plouf. Cela dit, il s'agit d'un gros plouf assumé et c'est toujours plus stimulant qu'un autre qui se contenterait de péter timidement dans l'eau en claironnant que ça ne vient pas de lui.
Mais au-delà de la curiosité, ce n'est pas que le film est cassé ou qu'il menace de basculer constamment dans le vide à force d'emprunter des passerelles bringuebalantes (si seulement, il faudrait déjà qu'il y ait un vide), c'est au contraire qu'il est rigidifié comme une plante confinée dans un bocal illuminé par des leds. C'est une sorte d'apothéose d'un cinéma qui s'asphyxie lui-même à force de vouloir s'élever au sens strict du terme, c'est à dire comme une fusée. Ces films-là sont toujours fascinants d'un point de vue sociologique avec les réactions que ça suscite, ou d'un point de vue mythologique (toujours le sempiternel mythe d'Icare) mais cinématographiquement ça finit par me laisser globalement indifférent. Il y a des beaux plans parce que Coppola sait toujours filmer, il y a même parfois des jaillissements qui semblent provenir de ses plus grands films, il y a aussi des bons acteurs, ça suffit pour ne pas s'endormir, moins pour s'éveiller. Les plus belles séquences sont finalement quand le temps s'arrête, parce le film épouse ce qu'il est vraiment.
Ces fameux fonds verts omniprésents et pourtant invisibles, je me demande si ce ne serait pas mieux de les filmer en tant que tels, c'est à dire ce que les acteurs voient, à l'instar d'un Lars Von Trier qui supprimait les décors dans certains de ses films. Peut-être que ça permettrait de commencer à entrevoir ce qu'il y a derrière le mur du terminus.
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »