Le Centre de Visionnage : Films et débats

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groil_groil
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Un galeriste parisien tombe sur un lot comprenant un Cézanne, mais le vendeur ne semble au départ pas se rendre compte de la valeur du tableau. Finalement les enchères montent, et le galeriste est obligé de s'endetter fortement pour acquérir le tableau, un moindre mal puisqu'il le revendra au moins dix fois son prix d'achat. Sauf qu'une fois acheté, et alors qu'il avait été expertisé, le tableau s'avère faux. Disons qu'il a acheté un vrai, mais qu'on lui a livré un faux. Ruiné, le galeriste va remonter la piste de l'arnaque et découvrir la bande de malfrats qui l'a mise en place. Sauf qu'au lieu de les dénoncer, il va commencer à faire affaire avec eux. C'est le début d'embrouilles encore plus grosses. Magnifique film noir à la française, ce film exploité sous deux titres différents, "Reproduction Interdite" et "Meurtre à Montmartre" est l'une des plus grandes réussites de Gilles Grangier, un cinéaste hautement estimable qui ici rivalise avec ses modèles américains (Dassin, Walsh...), pouvant s'appuyer sur deux comédiens de génie, Paul Frankeur, qu'on a peu vu en premier rôle, et Michel Auclair, génial de bout en bout, sans oublier la fabuleuse Annie Girardot, bien évidemment.

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Alors ce n'est jamais difficile à regarder, ça se suit sans souci comme le film de vieux du dimanche quand t'es vraiment claqué, mais purée qu'est-ce que c'est fait par dessus la jambe alors qu'on voit vraiment très facilement comment faire un meilleur film que ça. Sans revenir sur Duris, qui est un acteur très limité, il y a un problème énorme dans le film. Il se déroule pour moitié à un instant T, et pour autre moitié, dans de longues séquences de flashback 26 ans plus tôt. En fait, Eiffel retrouve et retombe amoureux d'un amour de jeunesse, il y a 26 ans. On peut imaginer Duris 26 ans plus tôt, même si il a peu ou prou la même tête dans les deux, mais sa compagne, une actrice nommée Emma Mackey, est castée uniquement parce que c'est une comédienne à la mode, mais elle est beaucoup trop jeune pour jouer un rôle aussi étalé dans le temps. Je suis allé vérifier durant le film tellement ça me choquait. Elle a 26 ans ! C'est à dire qu'au moment des flashes backs où elle est déjà femme, et elle tombe amoureuse de Duris, elle a en fait 0 an ! Comment croire à cela deux secondes, franchement ? Pourquoi en France on refuse de donner un premier rôle à une femme de 50 ans pour un rôle de femme de 50 ans et on préfère la remplacer par une gamine à la mode qui a la moitié de cet âge et qui rend le film totalement impossible à appréhender ? Cette histoire d'amour est d'ailleurs doublement problématique parce qu'elle monopolise plus des deux tiers du film (et qu'on s'en branle complètement d'ailleurs) et qu'elle fait passer l'histoire passionnante de l'érection de la Tour au second plan, alors que c'est ça qui est intéressant. Les rares moments où ça parle technique, sont d'ailleurs les meilleurs du film. Sinon, ben le film est monté à la truelle, un plan par seconde, éclairé en deux teintes, bleu quand c'est froid, orange quand c'est chaud, et surtout les acteurs jouent comme des gens de 2022 et pas du tout comme des gens de la fin du 19ème siècle, à croire que la notion de diction liée à l'époque est le dernier des soucis des gens qui monopolisent l'industrie du cinéma en France.
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cyborg
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@asketoner : Oui je comprends. J'étais aussi plus modéré en sortant de la salle, mais en y repensant il me restait surtout la musique, ce qui n'est pas très bon signe, et j'étais un peu agacé contre le film d'être tombé dans de si gros pièges. "L'étude" reste intéressante néanmoins, bien sur.

@sokol : merci pour ton retour. Non ce n'est pas un grand film c'est certain. J'imagine que c'est son exotisme pour moi, que tu n'avais pas, qui m'a fait tenir.
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sokol
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cyborg a écrit :
lun. 4 avr. 2022 12:56
@sokol : merci pour ton retour. Non ce n'est pas un grand film c'est certain. J'imagine que c'est son exotisme pour moi, que tu n'avais pas, qui m'a fait tenir.
C'est exact. Et c'est incroyable comment cet exotisme, inexistant dans tous les films albanais d'avant 1990 (on va dire) est installé de suite, dès 1991, 92... . Ce film en est la preuve. Et depuis, il n'y a que 2 sujets (exotiques, une fois de plus !) dans le cinéma albanais post '90 (à peine 2-3 films par an, et encore) : soit le sujet de la dictature communiste (qui n'a duré que 40 ans or, cela fait 30 ans que le système a changé !) soit la vendetta (des montagnes albanaises : 0.05% de la population, et encore !). Mais le public-occidental-des-festivals-des-films adore donc, rien n'y fait :(
Modifié en dernier par sokol le lun. 4 avr. 2022 15:37, modifié 1 fois.
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asketoner a écrit :
lun. 4 avr. 2022 10:43
d'ailleurs les spectateurs dans la salle où j'étais hier soir étaient choqués.
Comment tu sais ça ? (just curious)
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asketoner
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sokol a écrit :
lun. 4 avr. 2022 13:38
asketoner a écrit :
lun. 4 avr. 2022 10:43
d'ailleurs les spectateurs dans la salle où j'étais hier soir étaient choqués.
Comment tu sais ça ? (just curious)
à la sortie, les gens discutaient :
"c'est bien mais au bout d'un moment on a compris"
"il se masturbe beaucoup, non ?"
"quand même c'est crade"
et j'en passe
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sokol
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asketoner a écrit :
lun. 4 avr. 2022 14:06
"il se masturbe beaucoup, non ?"
:lol: :lol:
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cyborg
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@sokol quand je te vois parler des Straub au sujet de Reidal sur l'autre forum (j'oublie toujours d'aller lire la bas, vous pouvez pas tout poster au même endroit non ? :D ) je suis vraiment extrêmement surpris. Surtout de la part d'un Straubien aussi pressant que toi.
Je n'avais pas leur nom en tête mais en regardant le film, dès qu'à surgit la première note de musique (très vite, donc...) j'ai pensé à la formule de JMStraub sur la musique (dans Ci-git votre sourire je crois ?) ou il dit que c'est une colle pour faire tenir des images faibles ensemble.
Pour moi c'est exactement ça ici, et en cela le film est "anti-straubien" (comme dans sa recherche de la belle image, la durée de ses plans etc). Et devient un simulacre de radicalité dans sa mise en scène.
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cyborg a écrit :
mar. 5 avr. 2022 09:35
@sokol quand je te vois parler des Straub au sujet de Reidal sur l'autre forum (j'oublie toujours d'aller lire la bas, vous pouvez pas tout poster au même endroit non ? :D ) je suis vraiment extrêmement surpris. Surtout de la part d'un Straubien aussi pressant que toi.
Je n'avais pas leur nom en tête mais en regardant le film, dès qu'à surgit la première note de musique (très vite, donc...) j'ai pensé à la formule de JMStraub sur la musique (dans Ci-git votre sourire je crois ?) ou il dit que c'est une colle pour faire tenir des images faibles ensemble.
Pour moi c'est exactement ça ici, et en cela le film est "anti-straubien" (comme dans sa recherche de la belle image, la durée de ses plans etc). Et devient un simulacre de radicalité dans sa mise en scène.
Oui et non. Oui en ce qui concerne le respect du texte initial, au sens du cinéma comme une l'exploration. Mais le film n'est pas dans sa totalité staubien, bien sur que non.

ps: quant à la musique du film : j'étais bien vigilent (puisque je suis très très sensible à son utilisation, en général, au cinéma) mais pour moi, ce n'est pas "une colle" (comme tu le dis très justement). Je crois que cela est un ressenti, chacun a sa sensibilité vis à vis de cette utilisation
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groil_groil
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Un bandit en fuite (ce petit collabo de Pierre Fresnay) est pris en stop par un homme ayant fait fortune en Amérique, et ayant sa fortune sur lui. Ils ont un accident de voiture, le bandit est le seul à s'en sortir, récupère les valises de billets, et se rend dans le petit village de l'homme décédé, se faisant passer pour lui car parti il y a plus de 25 ans. Blessé, il est soigné par le médecin (Fernand Ledoux) qui tout de suite comprend son petit manège et va le manipuler pour peu à peu lui soustraire toute sa fortune et en faire bénéficier la communauté. Au sein d'icelle, une jeune fille orpheline, qu'on nomme la fille du diable, manipule une bande de jeunes desoeuvrés qui tous ensemble vont accélerer la chute de l'usurpateur d'identité. J'ai déjà connu Decoin plus inspiré, le film souffre d'un manque de clarté d'enjeux et, s'il part pourtant d'une bonne idée, peine toujours à captiver tant le cinéaste semble ne pas savoir par quel bout prendre son film, et pire, semble ne pas savoir quel film il a envie de faire.

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La Lune est "habitée" par une entité extaterrestre qui la fait d'un coup dévier de son orbite, et cette dernière va irrémédiablement entrer en collision avec la Terre. La nouvelle directrice de la NASA, un astronaute déchu et un geek vont monter à bord de la navette Challenger qu'ils réactivent pour l'occasion (je vous laisserai comprendre pourquoi de vous-même) et vont tenter de sauver la Planète. Alors oui, c'est gros comme du Emmerich (ça tombe bien, c'en est), c'est du pur cinéma pop-corn, bourré d'incohérences, de clichés, de choses faciles, de quotas, de bourrinades, mais j'avoue avoir pris un gros plaisir coupable en regardant Moonfall, dont je n'attendais absolument rien, mais dans lequel Emmerich, en signant un de ses meilleurs divertissements, prouve qu'on peut encore faire du cinéma des années 80 en 2022. C'est regressif et ça ne mène à rien, mais ça fait beaucoup de bien.
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A plein temps de Eric Gravel

Si on le voit de manière littérale (et je pense malheureusement que le réalisateur l'a voulu ainsi), ce film est désespérant, que ce soit dans sa mise en scène qui ne va jamais au bout de ce qu'elle veut faire et surtout dans son histoire qui se conclue sur une fin affligeante. "A force de volonté, de travail, on peut arriver à tout", voilà ce que semble dire le film comme un slogan présidentiel, sans recul sur ce monde qui entoure la protagoniste qu'on aimerait nous faire passer pour une héroïne d'un film d'action. On part d'un postulat de base : une mère courage qui se démène pour rejoindre son travail pendant la grève des transports et on en reste là jusqu'au bout, la mise en scène restant constante, calculée et hermétique au monde extérieur. Tous les autres qu'elle croise brièvement, ces grévistes qu'on ne voit jamais, deviennent de simples obstacles disséminés sur son chemin : on reste focus sur l'héroïne, faudrait surtout pas déborder.
Le film devient néanmoins intéressant (à son insu ?) quand on comprend qu'en cherchant à améliorer sa situation, l'héroïne empire celle des autres, sans qu'elle ait le temps d'y penser (et le spectateur avec) puisqu'elle est toujours dans l'action, le mouvement. Cela dit quand même quelque chose sur une société tellement rapide et absorbée par les problèmes du quotidien qu'elle n'a plus le temps pour penser ce qu'elle fait, tout juste pour communiquer mécaniquement avec les autres (ou pour négocier constamment, comme si le pragmatisme du travail devait se retrouver dans tous les aspects de la vie). Plus d'étonnement alors à voir un mélange entre film social et film d'action pour intéresser du monde, mais sans prendre de risque sur l'un ou l'autre, histoire que le public ne soit pas trop dérouté non plus. Ainsi, nettoyer la merde des riches au karcher devient juste un exploit héroïque et non plus une aberration qui pousse à la réflexion et à la révolte. Cette acceptation fait mal jusqu'à la fin qui aurait pu tout éclairer, mais à moins qu'il s'agisse d'une maladresse de mise en scène, cela dit juste que l'héroïne a accompli sa mission et... c'est tout. Une fin qui paraît plutôt positive donc (et qui se veut positive surtout), comme la récompense attendue de tous ses efforts. Mais aussitôt sorti de la salle, il suffit de s'arrêter un long moment, regarder un peu autour de soi, de penser aux inégalités profondes qu'aucun travail ou volonté ne peut résoudre, d'imaginer tous ceux qui n'ont pas la maîtrise de ce qui leur arrive, balloté dans un système inhumain, artificiel. La fin du film revient alors en mémoire avec une infinie tristesse, parce qu'elle sonne comme un retour en arrière : soit de nouvelles tâches ingrates, un prochain licenciement, de nouvelles galères et courses entre les gares, les taxis... jusqu'à se retrouver encore à un pas des rails.

Qui sait, on aura peut-être droit à un "A plein temps 2", avec un peu plus d'action, un peu plus de social (mais pas trop non plus, il ne faudrait surtout pas changer les choses).
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Une déesse accouche de deux enfants, qui ne sont pas jumeaux, à quelques minutes d'intervalle, et confie leur éducation au Diable. Une fois adultes, les deux enfants choisissent de vivre différement. Atarrabi quitte la foyer diabolique pour faire le bien et réjoindre l'Eglise, Mikelats reste avec son père d'adoption. C'est un vrai bonheur de voir Eugène Green retourner à la puissance fictionnelle qui fait le fort de ses meilleurs films et qu'il avait abandonné, ou perdu, depuis qu'il s'intéresse à la langue et au pays basques. Car Atarrabi & Mikelats est l'adaptation d'un conte basque célèbre, que Green semble respecter à la lettre, dans la langue en tout cas, tout en posant dessus sa grille cinématopraphique si identifiable et qui en fait l'un des cinéastes contemporains les plus singuliers et les plus précieux.
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A la vue d'un patient blessé, une bonne soeur infirmière se remémore son passé : Elle était chanteuse danseuse dans un cabaret, elle est tombée folle amoureuse d'un homme, ils voulaient se marier (c'est le patient qu'elle retrouve à l'hopital des années après), mais une ancienne relation toxique pousse son nouvel amoureux à le tuer puis à filer en tôle, avant d'être libéré. Mais la belle Anna se sent fautive, et s'interdit de vivre cet amour, préférant fuir et entrer dans les ordres. Lorsqu'elle le revoit par le plus grand des hasards, elle se remet à douter... Bon, il faut être franc, le début de ce film est hyyyper chiant, poussif, vieillot, poussiéreux, et ne donne franchement pas envie de continuer. En gros tout le début à l'hopital est assez abominable. Qui plus est, le dvd édité fraichement par Gaumont à la demande est pourrissime. La copie est à chier (je sais bien que le principe de cette collec est de présenter des films non restaurés, mais souvent la copie est tout de même meilleure que ça), et qui plus est il ne présente que la VF (le film est une coproduction franco-italienne et visiblement ils n'ont retrouvé que la version française. Mais entendre Mangano ou Gassmann avec des pauvres voix françaises certifiées 1951 et ne collant absolument pas, ça fait mal au cul). Mais, Dieu merci, le film s'arrange au bout d'un moment, dès qu'on commence à rentrer dans les flashes back en fait, et qu'on quitte hopital et soutane. Et puis, Silvana Mangano est la plus grande actrice et la plus belle femme du monde, et il faut dire qu'à cette époque elle est au-delà du sublime... Enorme cerise sur le pompon, si vous êtes comme moi un fan inconditionnel de Nanni Moretti et que vous considérez comme moi Journal Intime comme l'un des 4 ou 5 plus beaux films du monde, vous vous souvenez avec évidence de cette scène sublime à la fin du film, où Nanni (enfin Michele Apicella) est dans un bar, et voit à la télé un vieux film avec la Mangano en train de danser un mambo endiablé, et se met à danser avec elle. Eh bien cette séquence de Mambo Mangano vient de là ! Elle est issue de Anna, et lorsque je l'ai vue débarquée sans m'y attendre, j'ai eu envie de me lever comme Michele et de me mettre à danser devant ma télé !
https://www.youtube.com/watch?v=KH3Zx9BJYpQ
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groil_groil
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@teklow13 pourquoi n'écris-tu plus rien sur les films que tu voies, c'est tellement dommage...
ça prend deux minutes par film, pas besoin de rattraper ton retard, pas besoin de vouloir écrire un truc construit, mais ça manque...
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teklow13
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groil_groil a écrit :
jeu. 7 avr. 2022 10:55
@teklow13 pourquoi n'écris-tu plus rien sur les films que tu voies, c'est tellement dommage...
ça prend deux minutes par film, pas besoin de rattraper ton retard, pas besoin de vouloir écrire un truc construit, mais ça manque...
coucou :hello:
oui je sais...je me dis souvent que je m'y remets mais je ne prends pas le temps, et je n'arrive plus à écrire comme avant car j'ai perdu l'habitude du coup je me dis que je n'ai rien d'intéressant à dire. Il faut que j'essaye de m'y remettre !
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groil_groil
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teklow13 a écrit :
jeu. 7 avr. 2022 12:12
groil_groil a écrit :
jeu. 7 avr. 2022 10:55
@teklow13 pourquoi n'écris-tu plus rien sur les films que tu voies, c'est tellement dommage...
ça prend deux minutes par film, pas besoin de rattraper ton retard, pas besoin de vouloir écrire un truc construit, mais ça manque...
coucou :hello:
oui je sais...je me dis souvent que je m'y remets mais je ne prends pas le temps, et je n'arrive plus à écrire comme avant car j'ai perdu l'habitude du coup je me dis que je n'ai rien d'intéressant à dire. Il faut que j'essaye de m'y remettre !
justement, commence modestement, petit à petit, en disant deux mots, une ligne, comme je le fais parfois, c'est comme le vélo ou supporter l'OM, ça ne s'oublie pas ;)
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Tyra
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En effet, on est en plein dans la qualité française du film d'époque et du film de patrimoine littéraire, parfois un peu au dessus de la moyenne (les scènes assez vivantes et drôles au journal ou chez l'éditeur), mais souvent didactique, et noyé sous une voix of (c'est le Scorsese des Affranchis ou de Casino qui sert de modèle, il parait) qui fait office de béquille à la mise en scène, même lorsqu'il n'y a pas besoin de béquille et que l'image est suffisamment explicite. Et puis, quitte à inonder le film de voix of, autant nous faire entendre l'écriture de Balzac, mais non, par orgueil probablement, Giannoli réécrit tout à sa sauce, et c'est peu dire qu'il n'a pas le même talent. Le récit est de plus constamment grossis, outré, et alourdi par un symbolisme lourdaud (typiquement le plan de l'affiche). C'est le genre de film qui a le mérite de poser la question des limites du cinéma, de ce qu'il peut et ne peut pas (à mon avis pas grand chose), dans ce genre d'adaptation des grands romans de la littérature française.
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teklow13
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groil_groil a écrit :
ven. 8 avr. 2022 09:22
teklow13 a écrit :
jeu. 7 avr. 2022 12:12
groil_groil a écrit :
jeu. 7 avr. 2022 10:55
@teklow13 pourquoi n'écris-tu plus rien sur les films que tu voies, c'est tellement dommage...
ça prend deux minutes par film, pas besoin de rattraper ton retard, pas besoin de vouloir écrire un truc construit, mais ça manque...
coucou :hello:
oui je sais...je me dis souvent que je m'y remets mais je ne prends pas le temps, et je n'arrive plus à écrire comme avant car j'ai perdu l'habitude du coup je me dis que je n'ai rien d'intéressant à dire. Il faut que j'essaye de m'y remettre !
justement, commence modestement, petit à petit, en disant deux mots, une ligne, comme je le fais parfois, c'est comme le vélo ou supporter l'OM, ça ne s'oublie pas ;)
:lol: c'est vrai tu as raison :)
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Tyra
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Je ne connais pas très bien Edouard Molinaro, sa filmographie aurait d'ailleurs tendance à me rebuter, mais ça c'est vraiment très bien. Scénario de Boileau-Narcejac, auréolés des succès des Diaboliques et de Vertigo. Ici pas de grande machination à twist mémorable, mais une histoire simple et concrète, celle d'un homme (Ventura) qui tue le meurtrier de sa femme, mais qui se fait surprendre sur le lieu du meurtre par un témoin gênant, un chauffeur de taxi qu'il va prendre en chasse dans la nuit parisienne. Celui-ci sera aidé par ses collègues de profession qui prendront à leur tour en chasse le tueur, le chasseur devenant chassé. Un vrai bon polar du dimanche soir, sec, tendu et prenant, sans psychologie superflue.
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Tyra a écrit :
ven. 8 avr. 2022 11:05
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Je ne connais pas très bien Edouard Molinaro, sa filmographie aurait d'ailleurs tendance à me rebuter, mais ça c'est vraiment très bien. Scénario de Boileau-Narcejac, auréolés des succès des Diaboliques et de Vertigo. Ici pas de grande machination à twist mémorable, mais une histoire simple et concrète, celle d'un homme (Ventura) qui tue le meurtrier de sa femme, mais qui se fait surprendre sur le lieu du meurtre par un témoin gênant, un chauffeur de taxi qu'il va prendre en chasse dans la nuit parisienne. Celui-ci sera aidé par ses collègues de profession qui prendront à leur tour en chasse le tueur, le chasseur devenant chassé. Un vrai bon polar du dimanche soir, sec, tendu et prenant, sans psychologie superflue.
MERVEILLE :love: :love2:
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Tyra a écrit :
ven. 8 avr. 2022 11:05
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Je ne connais pas très bien Edouard Molinaro, sa filmographie aurait d'ailleurs tendance à me rebuter, mais ça c'est vraiment très bien. Scénario de Boileau-Narcejac, auréolés des succès des Diaboliques et de Vertigo. Ici pas de grande machination à twist mémorable, mais une histoire simple et concrète, celle d'un homme (Ventura) qui tue le meurtrier de sa femme, mais qui se fait surprendre sur le lieu du meurtre par un témoin gênant, un chauffeur de taxi qu'il va prendre en chasse dans la nuit parisienne. Celui-ci sera aidé par ses collègues de profession qui prendront à leur tour en chasse le tueur, le chasseur devenant chassé. Un vrai bon polar du dimanche soir, sec, tendu et prenant, sans psychologie superflue.
C'est le meilleur film que j'ai vu de Molinaro jusqu'ici. Autant j'ai toujours trouvé étrange l'immense succès de ses films comiques pas très drôles comme la cage aux folles ou l'emmerdeur, autant je ne comprends pas que ce film-là ne soit pas plus connu. C'est même plus intense que bon nombre de polars américains à 500 milliards de dollars qui ont été réalisés bien après. Ça me donne envie de fouiller un peu dans sa filmographie, peut-être qu'il a réalisé le plus grand polar de tous les temps et que personne le sait.
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Ah, je ne suis pas le seul a avoir flashé dessus ! :love2:
Je ne parle pas souvent des "vieux" films que je vois ici, mais comme celui-ci est assez méconnu, il méritait un petit coup de pouce.
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Tyra
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len' a écrit :
ven. 8 avr. 2022 14:33
Ça me donne envie de fouiller un peu dans sa filmographie, peut-être qu'il a réalisé le plus grand polar de tous les temps et que personne le sait.
Visiblement dans la même période il a réalisé plusieurs polars dont deux sont bien notés sur allociné : La Mort de Belle et Le Dos au mur. A creuser donc.
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JanosValuska
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:hello:

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Dark star - John Carpenter

Il s’agit du tout premier long de Big John dont on pourrait déjà dire qu’il est plutôt un court métrage gonflé pour être long, que c’est un film de fin d’études et qu’il doit autant à Carpenter (réalisateur, producteur, compositeur) qu’à Dan O’Bannon qui s’occupe des effets visuels, du montage, du scénario et qui interprète le personnage central. Dan O’Bannon qui fera partie du projet Alien, dont on sent les lointaines influences ou prémisses ici. Je signale que j’ai vu le director’s cut (qui fait 1h11) et non la version cinéma (qui fait douze minutes de plus) c’est peut-être important, à vérifier.

Dès le pré-générique le film nous plonge dans la vie d’un croiseur spatial, chargé de la destruction de planètes instables. On comprend qu’ils sont plus ou moins abandonnés par les politiciens qui ne feront rien pour cet équipage sans commandant (qui est cryogénisé dans une soute : la plus belle scène du film lorsqu’ils refont appel à lui) qui serait mort plus tôt à cause d’un court-circuit. Equipage qui s’en remet à dialoguer avec ses bombes et ordinateur. On apprend qu’ils sont là depuis vingt ans à pulvériser des planètes qui menacent de se transformer en supernovas. Ils n’ont rien de héros spatiaux, il s’agit plutôt d’une équipe de prolos un peu désenchantés à l’image de cet astronaute qui reste dans sa bulle-vigie en solitaire. Jusqu’au moment de la découverte d’une toute nouvelle constellation où une panne entraîne la dysfonction d’une bombe et de l’ordinateur de bord.

Alors ce n’est évidemment pas 2001, l’odyssée de l’espace mais je l’aime bien, malgré tout, cet ovni fauché comme les blés, bricolé par des universitaires barrés, qui parodient Kubrick et Corman, tout en annonçant un peu Alien. C’est une SF complètement déglamourisée, une sorte d’anti avant Star Wars, en somme. Les effets sont ultra cheaps mais il y a quelques plans assez chouettes, dans la cabine du vaisseau notamment. C’est un film qui lance Carpenter, ce qui n’est pas rien. Une version farce d’Alien, à l’image de cet alien justement, qui ressemble à un gros ballon de plage, mais qui déjà se cache dans les entrailles du navire.

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Rocky - John G. Avildsen

On avait beau me certifier que Rocky était un grand film sur les bas-fonds de Philadelphie, l'histoire d'un de ses pauvres types, ouvrier et boxeur raté, mais aussi une superbe histoire d'amour, au fond de moi j'ai toujours pensé que c'était l'histoire d'un héros, une apologie de la réussite et du combat, mais aussi un film un peu bourrin. J'imagine qu'on pense aussi cela de Rambo avant de constater que c'est une merveille. L'effet Stallone probablement et comment le cinéma l'a globalement récupéré par ricochet, héros massif et brutal, de Cobra à Expendables, en passant par les suites de Rambo et Cliffhanger. L'effet "Gonna fly now" aussi, sans doute.

Il faut savoir que le scénario de Rocky est intégralement pensé et écrit par Stallone lui-même, auteur inconnu et acteur alors raté, qui vend son script à la United Artist sous condition qu'il campe lui-même le rôle titre que le studio aurait préféré donner à des acteurs d'envergure, tel Ryan O'Neal, Burt Reynolds, Robert Redford ou James Caan. La prod ne prend cependant pas trop de risques allouant un budget d'un million de dollars et vingt-huit jours de tournage. Un succès critique et public et trois Oscars (dont celui du meilleur film) plus tard, le film engrange 225 fois sa mise et reste aujourd'hui l'un des meilleurs retours sur investissement de l'histoire du cinéma.

Il faut savoir aussi que le script, écrit sur trois jours, est né un soir, le 24 mars 1975, lorsque Stallone assiste au combat entre Mohamed Ali & Chuck Wepner. Combat déjouant tous les pronostics puisqu'un simple challenger inconnu tient quinze rounds contre le champion du monde, l'envoie même au tapis au neuvième et s'il finit par s'incliner, Stallone - et par la même occasion Rocky, le film - ne retient que le génie de cette anomalie, la victoire de l'inattendu, pour se l'approprier et en dresser le portrait d'une Amérique démunie montée sous le feu des projecteurs pour un simple caprice de star.

Identifié très vite, avec son feutre et sa veste en cuir, une balle qu'il fait régulièrement rebondir sur le bitume, Rocky vit de petits boulots et parfois dispute des combats de boxe locaux sous le surnom "L'étalon italien" pour quelques dollars. Et s'il accepte de disputer ce match qu'au préalable il refuse, c'est en grande partie par respect pour le vieux Mickey, qui a toujours vu en lui un grand boxeur qui n'a cessé de se saborder. Et bien sûr par amour pour Adrian. Et avant d'en arriver là, le film est une somme de scènes (dans l'esprit du Nouvel Hollywood) d'une douceur, d'une puissance jamais vu. Celle de la patinoire évidemment. Celle du premier baiser entre Adrian & Rocky. Celle de la longue dispute / réconciliation entre le coach (lui aussi ancien boxeur raté) et son boxeur. Et bien entendu celle de l'entraînement sur les docks jusque sur les marches de la façade sud du Philadelphia Museum of Art.

Si la boxe tient peu de place dans Rocky - deux minutes d'un match amateur en ouverture, dix minutes pour le combat final - il s'agit d'une toile de fond essentielle, puisque Rocky s'en sert pour courtiser Adrian en lui racontant des blagues et ses exploits, mais aussi en en faisant son gagne-pain, travaillant en tant qu'homme de main pour un usurier. Rocky, très souvent, sert les poings, quand il est seul et effectue quelques petites danses de boxeur dans la rue. Sur les télévisions on ne parle que d'Apollo Creed - le Mohamed Ali fictionnel - champion du monde poids lourds à la recherche d'un adversaire d'un soir, pour le compte d'un show plus que d'un combat.

C'est l'histoire d'une rencontre des bas-fonds sur le devant de la scène, de deux immigrés au statut alors opposé : le noir afro américain installé se jouant du rêve américain qu'il parodie (imitant pour l'ouverture du show Georges Washington, l'oncle Sam...) face au blanc immigré italien qui ne sait pas trop ce qu'il vient faire là. Le match de boxe, d'une rare intensité et les derniers secondes, d'une rare émotion achèvent de faire de Rocky un grand film romantique. Un combat de boxe qui célèbre le perdant. Qui célèbre l'amour.

Rocky est bien le grand film populaire que l'on vante, sur les quartiers populaires et un beau document sur le Philadelphie des années 70. On y voit les docks, les quartiers tristes et ses maisons délabrées. La réalisation d'Avildsen est d'une totale maîtrise, crue et fluide à la fois, qu'elle se déploie dans les appartements, dans la rue, sur le ring, dans les rayons d'un petit commerce animalier ou entre les viandes d'un abattoir. Il était temps que je voie enfin ça.

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Gemini man - Ang Lee

Il y a quelque chose d'un peu absurde à découvrir Gemini man un dimanche soir sur la Une puisque l'intérêt majeur du film est d'être tourné en haute fréquence. Mais déjà lors de sa sortie peu de salles permettaient de l'apprécier dans le format adéquat. Alors même à la télé le film impressionne par ses scènes d'action, en effet, on sent qu'on n'a jamais vu ça : Tout va très vite mais c'est super lisible. Un peu trop à mon goût, c'est trop fake, trop proche du jeu vidéo je trouve, les impacts et les chutes notamment sont trop nettes, trop brutes, pour être encaissés par des humains. Mais oui la scène de la moto puis celle des catacombes, sont réjouissantes. L'autre point réussi c'est le rajeunissement de Will Smith car hormis dans la séquence finale sur le campus (complètement foirée c'est bizarre, comme si c'était quelqu'un d'autre qui s'en était chargé ) ça fonctionne vachement bien. Après le récit est tout à fait banal, c'est une sorte de Mission impossible avec un héros traqué par son clone augmenté et plus jeune, et ils vont finir par faire équipe ensemble contre les vrais méchants. Super content de revoir Mary Elizabeth Winstead (géniale dans la série Fargo) qu'on voit trop peu et c'est bien dommage.

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La légende du roi crabe - Re Granchio - Alessio Rigo de Righi & Matteo Zoppis

Un drôle de film italien, qui emprunte de prime abord, aussi bien à Pasolini qu’à Frammartino dans le drame rural qu’il déploie hors du temps, et qui se permet de plonger, au moyen d’une ellipse brutale, dans une seconde partie, un second chapitre, où il s’en va fouler le récit d’aventure façon Herzog aux accents de western. La grande idée du film est de reposer son récit sur une (vraie) légende, racontée ici par des chasseurs dans une auberge, avant de laisser vivre la légende, abandonnée de leurs narrateurs. Vraie victoire de la fiction.
Et si le premier chapitre est tourné dans la région de Tuscie, dans le village de Vejano en Italie, le second chapitre file en Terre de feu, rappelant les paysages argentins déployés dans le très beau Jauja, de Lisandro Alonso. Au même titre que les précédents courts des auteurs (Balvanera & Il solengo) La légende du roi du crabe s’inspire de légendes racontées par des chasseurs locaux. Gabriele Silli, l’acteur qui joue Luciano, le héros de cette légende, est une révélation, une gueule, une voix, une carrure, une démarche, une présence sauvage. Il semble arriver d’une autre planète. Et c’est aussi l’histoire de cet homme, Luciano, qu’on découvre revenant dans son verdoyant village natal avant de le voir se perdre en chercheur d’or dans l’immensité aride de la Terre de feu. C’est l’histoire d’un homme qui s’évapore, aussi bien dans le village qui l’a vu naître que dans ces confins rocheux qui le verront mourir. Avec un dénominateur commun à ces deux histoires, apparemment sans aucun lien (le personnage lui-même change de nom : Luciano est devenu le père Antonio) : Une histoire d’amour fou. La belle Maria Alexandra Lungu en est le cœur fantôme, magnifique.

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Bruno Reidal - Vincent Le Port

Quelque part entre le Bresson d’Un journal d’un curé de campagne et le Allio de Moi Pierre Rivière. Soit l’autopsie de l’histoire d’un jeune criminel au moyen de ses mémoires, principalement écrites, devant un comité de psychanalystes. Véritables confessions qui s’appuient sur les faits de septembre 1905.
Il y évoque son enfance difficile dans le Cantal puis son année au séminaire de St Flour et toutes les pulsions de suicide et de meurtre qui l’habitent, depuis tout petit, qu’il parvient à refréner par la masturbation.
C’est un film froid, austère, au diapason de ce personnage. Qui ne s’appuie sur aucun suspense, dans la mesure où la scène d’ouverture le montre en train de tuer puis de se rendre avec ces mots « J’ai tué François Raulhac, je viens me constituer prisonnier ».
Ces confessions nous permettent de constater que Bruno est un excellent élève, pieux, timide, chétif. Qu’il est très silencieux, introverti, qu’il se tient en permanence vouté, jusque sur la photo de classe. Trois acteurs jouent le jeune Reidal à six, dix et dix-sept ans.
On apprend peu à peu que Reidal est un enfant battu, violé très jeune par un paysan, peut-être même homosexuel refoulé et qu’il est infiniment jaloux de l’aisance financière des autres élèves. Il y a des embryons d’explication à ces pensées et ce geste final mais jamais le film ne statuera sur quoi que ce soit, laissant Reidal emporter le mystère de son mal.
Le film ne cesse de dire qu’il n’y a pas d’explication psy, quand bien même le comité cherche à en donner une et quand bien même le spectateur préférerait lui aussi en trouver une. C’est simplement une affaire de confusion à l’intérieur d’un être.
L’histoire d’un garçon qui confond le désir sexuel et le désir meurtrier. Et qui préfère finalement tuer que se tuer, puisqu’il aura la possibilité d’une rédemption au bout.
C’est un premier film impressionnant.

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Ambulance - Michael Bay

Je comprends que ça puisse être l'enfer pour certains, Ambulance. À vrai dire le premier quart d'heure j'ai trouvé ça horrible aussi. Je pense que le cinéma de Bay n'a d'intérêt que lorsqu'il bouge, surtout pas quand il pense ou qu'il installe ses pions. Le début du film est infect en ce sens que tout va déjà trop vite pour ce qu'il y a à l'écran : Pas grand chose si ce n'est l'histoire d'un type, ancien militaire, qui fait appel à son frère, voyou notoire, pour lui prêter les deux cent mille dollars qui lui permettraient d'accéder aux soins requis pour le cancer de sa femme. Et en parallèle, on est dans une patrouille de police, avec deux flics qui se lancent des vannes et citent Bad boys puis Rock. Véridique. Le film est déjà complètement en sur régime, un plan par seconde, toujours en mouvement, latéral ou circulaire. C'est imbitable. Sauf que les deux heures suivantes nous plongent dans un braquage foireux et une course poursuite sans temps mort. Et là franchement on n'a jamais vu ça. Alors peut-être qu'il faut être d'humeur, je n'en sais rien, mais j'ai pris un pied d'enfer, comme si j'avais vu un super épisode de Fast & Furious mais avec des idées de plans qui sortent de nulle part sinon en grande partie de quelqu'un qui a découvert le drone et qui va l'utiliser à outrance. Le film a engagé des spécialistes, des dronistes FPV afin d'avoir les plans les plus dingues possibles, en chute libre le long des buildings, sous les bolides, à travers des impacts. Et c'est totalement gratuit (enfin façon de parler car ils ont dû en péter plusieurs) c'est juste là pour faire exploser le rythme du film. D'un film de Michael Bay, faut-il le rappeler ! Alors évidemment dit comme ça on a l'impression qu'on va voir un truc complètement barré, abstrait, expérimental, mais ce n'est évidemment pas le cas : Ambulance ne sera jamais Miami Vice ou Fury Road, car Bay n'est ni Mann ni Miller. Mais dans le registre qui est le sien, celui de Fast & Furious je le répète, c'est à dire du cinéma beauf et bourrin, le film fait un bien fou. Bay n'a peut être pas le droit de pousser à fond les potards ou bien il croit bon de raconter des trucs, mais si on enlève tout le côté guimauve, bien pensant, explicatif et quelques gimmicks dans l'ère du temps, ce serait un caviar d'1h30, un truc à la Speed, très serré, réjouissant. En l'état je choisis de garder ce qui m'a plu : l'impression d'être dans une partie de GTA avec les flics au cul pendant deux heures. Avec des saillies tellement drôles comme la scène de la rate, la baston entre frères, le changement de peinture, la scène dans l'entrepôt du cartel. Dommage que les acteurs n'aient pas beaucoup de charisme hormis Jake Gyllenhall totalement en roue libre. Plaisir coupable assumé. Je me rends compte que je réhabilite de plus en plus le cinéma de Michael Bay. J'ai toujours dit que c'était de la merde parce que j'avais jamais autant souffert au cinéma que devant le premier Transformers. Mais j'ai revu et pris à nouveau du plaisir devant Rock. Bien aimé Six underground. Ambulance ce serait peut-être même bien meilleur...

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Moonfall - Roland Emmerich

J'adore les films catastrophe. Bon, pas ceux de Roland Emmerich (quand bien même je garde un bon souvenir du Jour d'après) mais par curiosité un brin maso je manque rarement les rattrapages de ses films. J'avais même vu 2012 en salle, c'est dire. Alors si en plus la catastrophe se pare d'un soupçon de science fiction, je dis banco, même si ça donne aussi Independance day. Ici la lune dévie de son orbite et s'apprête à plonger sur la Terre. Un trio d'astronautes embarque plus ou moins clandestinement avec une idée derrière la tête afin de sauver la Terre de la Lune. En réalité, ce bon vieux satellite est contrôlé par une intelligence artificielle un poil récalcitrante. Je ne saurais dire ce qui m'a le plus ennuyé. Est-ce la laideur des effets numériques ? Est-ce le nombre hallucinant d'incohérences narratives ? Est-ce l'antipathie de (presque) chaque personnage ? Est-ce Le twist / flashback explicatif le plus laid, torché et ridicule de l'histoire des twist / flashbacks explicatifs ? Je sais en revanche ce qui m'a le plus agacé : Comment est-il possible d'offrir une introduction aussi claquée au sol que celle là ? J'ai mal à mon Gravity. Car c'est clairement la référence. Sauf que Bay n'est pas Cuaron. Sauf qu'il faut se coltiner Africa, de Toto et se coltiner Patrick Wilson en train de chanter Africa, de Toto. Et pour cloturer cette intro, l'apparition de "la bête" est un sommet de nullité. Pourtant j'avais pile envie de voir ça. Je venais de sortir de l'excellent Ambulance, de Michael Bay. La lune en plein crash, la promesse d'une gravité détraquée et d'inondations homériques suffit à attiser ma curiosité, très vite anéantie par une laideur visuelle et un gigantisme fake, cent quarante patates invisibles pour moi tant je ne crois jamais à rien et les interprètes non plus car tout est trop gros pour leurs réactions. La première vague par exemple est un raté absolu, rien ne fonctionne. Je sauve le décollage de la navette de la vague de gravité. Et John Bradley aka Samwell Tarly dans Game of thrones, qui apporte une touche d'humour dans ce rôle improbable de nerd improvisé ingénieur NASA. Reste un mystère : Emmerich parvient à refaire un Independance day vingt-cinq ans plus tard, ayant exactement la même tronche. On dirait un film de 1996. Un film à l'ancienne, complètement daté.
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robinne
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weird

JanosValuska a écrit :
ven. 8 avr. 2022 22:56
:hello:
:hello:
Gemini man - Ang Lee

Il y a quelque chose d'un peu absurde à découvrir Gemini man un dimanche soir sur la Une
C’était sur france2 :D
Sinon, tu aurais eu des pubs en plein milieu d’une scène d’action :o
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JanosValuska
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^^

Hahaha :lol:
Exact, pas de pub pendant le film :D
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groil_groil
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Si j'ai bien tout suivi, ce film a bénéficié d'une technologie de pointe à la fois pour ses scènes d'action, ainsi que pour ses effets spéciaux, permettant à Will Smith de jouer face à Will Smith avec 30 ans de moins. Ca donne un chouette film d'action, efficace, où on ne voit pas le temps passer, mais dont la fin, décevante, n'est pas du tout à la hauteur des enjeux soulevés par un sujet pareil. Petit plaisir immédiat, mais qui s'oubliera vite.

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Le Patient - Christophe Charrier - 2022

C'est un film pour Arte, qui sera diffusé en octobre sur la chaine, et qui est l'adaptation de la bande dessinée Le Patient de Timothé Le Boucher. Je n'ai pas le droit d'en parler, mais en plus de 20 de métier, c'est la première fois qu'une bande dessinée que j'ai éditée devient un film, et c'est très émouvant en soi.
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JanosValuska a écrit :
ven. 8 avr. 2022 22:56
:hello:

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Dark star - John Carpenter

Il s’agit du tout premier long de Big John dont on pourrait déjà dire qu’il est plutôt un court métrage gonflé pour être long, que c’est un film de fin d’études et qu’il doit autant à Carpenter (réalisateur, producteur, compositeur) qu’à Dan O’Bannon qui s’occupe des effets visuels, du montage, du scénario et qui interprète le personnage central. Dan O’Bannon qui fera partie du projet Alien, dont on sent les lointaines influences ou prémisses ici. Je signale que j’ai vu le director’s cut (qui fait 1h11) et non la version cinéma (qui fait douze minutes de plus) c’est peut-être important, à vérifier.

Dès le pré-générique le film nous plonge dans la vie d’un croiseur spatial, chargé de la destruction de planètes instables. On comprend qu’ils sont plus ou moins abandonnés par les politiciens qui ne feront rien pour cet équipage sans commandant (qui est cryogénisé dans une soute : la plus belle scène du film lorsqu’ils refont appel à lui) qui serait mort plus tôt à cause d’un court-circuit. Equipage qui s’en remet à dialoguer avec ses bombes et ordinateur. On apprend qu’ils sont là depuis vingt ans à pulvériser des planètes qui menacent de se transformer en supernovas. Ils n’ont rien de héros spatiaux, il s’agit plutôt d’une équipe de prolos un peu désenchantés à l’image de cet astronaute qui reste dans sa bulle-vigie en solitaire. Jusqu’au moment de la découverte d’une toute nouvelle constellation où une panne entraîne la dysfonction d’une bombe et de l’ordinateur de bord.

Alors ce n’est évidemment pas 2001, l’odyssée de l’espace mais je l’aime bien, malgré tout, cet ovni fauché comme les blés, bricolé par des universitaires barrés, qui parodient Kubrick et Corman, tout en annonçant un peu Alien. C’est une SF complètement déglamourisée, une sorte d’anti avant Star Wars, en somme. Les effets sont ultra cheaps mais il y a quelques plans assez chouettes, dans la cabine du vaisseau notamment. C’est un film qui lance Carpenter, ce qui n’est pas rien. Une version farce d’Alien, à l’image de cet alien justement, qui ressemble à un gros ballon de plage, mais qui déjà se cache dans les entrailles du navire.
Je te conseille de voir aussi l'excellent documentaire : "Let there be light : the odyssey of dark star" qui revient sur les aléas de tournage et de production (sachant que c'était encore la belle époque où on mettait les mains dans la maquette), les tensions entre les deux stars en devenir, O'Bannon et Carpenter, ainsi que l'influence sur Alien ou Star wars.
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groil_groil
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La pièce rapportée, c'est Ava, jouée par la toujours sublimissime Anaïs Demoustier qui n'en finit plus de rayonner, jeune femme modeste travaillant à la RATP, qui vient d'être séduite par un fils à maman d'aristocrate, Katerine, attendu mais super, qui souhaite l'épouser. En faisant cela il attire les foudres de sa môman, une vieille bourgeoise acariatre et colérique (Josiane Balasko qu'on n'avait pas vue aussi hilarante depuis au moins 40 ans), maintenue dans un fauteuil roulant devant l'accident de chasse le plus drôle jamais vu au cinéma. Persuadée qu'Ava veut lui dérober sa fortune, elle va lui faire vivre un enfer. Ne tournons pas autour du pot, c'est de loin le film le plus drôle et le plus réussi d'Antonin Peretjatko, à la fois parce qu'il ne renonce jamais à son humour à deux balles, complètement surréaliste et / ou grotesque et / ou pipi/caca et / ou burelesque, mais que ce coup-ci, à l'inverse de La Loi de la Jungle, le film ne se noie pas dans son humour et son bricolage omniprésent, qui le poussait à la saturation et empêchait totalement de suivre un récit au premier degré. Ici, l'équilibre est parfait, et permanent, et le film en tire une grâce et une légereté qui élèvent son humour vers des hautes sphères. Ajoutons enfin que la musique signée Mathieu Lamboley est une merveille absolue, une relecture des meilleurs moments de Vladimir Cosma passé à la moulinette electro-humoriste, le résultat ayant la même saveur que celle du film.

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Si vous me lisez ici, vous avez fini par comprendre que je ne porte pas Jacques Audiard dans mon coeur, et que je redoutais ce virage stylistique que j'appréhendais surtout comme opportuniste. Eh bien je suis heureux d'annoncer que mes préjugés étaient faux et que ce film est vraiment très bien, l'un de ses meilleurs, haut la main, et que ce changement de braquet lui va très bien, c'est peut-être son seul film dans lequel on sent de l'humilité. J'avais peur de le voir adapter Adrian Tomine, auteur que j'adore, mais son adaptation est la plus intelligente possible et qu'il ait transposé les enjeux de ces trois nouvelles dans le quartier parisien des Olympiades est une très belle idée, et ça fonctionne. Je trouve que le film parle bien de son temps, parle bien des jeunes de son temps et qu'il dégage un optimisme malgré tout qui est assez salutaire. Les comédiens sont excellents, le noir et blanc est beau, Audiard parvient à relier des histoires séparées et à créer un tout qui fonctionne (c'est parfois un peu au forceps mais ça passe) et surtout, je crois que jamais il n'a aussi bien filmé les corps, et filmer le désir. C'est simple ce que je détestais chez Audiard, c'était de toujours filmer des corps dans le conflit et la testostérone permanents, deux corps ensemble c'était toujours une question de dominant / dominé, de prise de pouvoir sur l'autre, et ça m'est insupportable. Ici pour la première fois il filme le désir, les carresses, des corps qui se cherchent, se trouvent, se réconfortent, dans un principe égalitaire et avec une issue optimiste, qui est celle de l'incarnation du désir, ou de la tendresse. Je ne pensais pas cet homme capable de ça, et c'est plus qu'appréciable.
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Ambulance de Michael Bay

Le cinéma de Michael Bay, c'est un peu comme de voir un gamin jouer dans son bac à sables : on ne peut s'empêcher de sourire et de ressentir avec nostalgie cette période d'insouciance. Je garde toujours de l'affection pour ce cinéaste, malgré le patriotisme exacerbé, malgré les plans d'une demi seconde qui donnent un fichu mal de crâne, malgré la bêtise grasse des scénarios, malgré tout ça et parce que tout ça. C'est tellement exagéré, tellement assumé - ça se sent qu'il prend plaisir à tout faire péter -, presque naïf que ça en devient attachant.
Ambulance ne déroge pas à la règle, Michael Bay s'essayant en plus à ses nouveaux joujoux (les drones) pour nous donner encore plus mal à la tête. Dans son genre, c'est aussi un gamin génial, parce que mine de rien il filme Los Angeles comme on ne l'a encore jamais vu. Et ça tombe tellement juste, cette hystérie de l'image et des personnages reflétant celle d'un pays rempli d'extrêmes, de contradictions. De la verticalité des immeubles à la platitude des autoroutes, en passant par ces quartiers délaissés, c'est un paysage urbain qui se dessine sous une tension constante. De là à dire que la surprenante opération chirurgicale pilotée à distance par des gars qui jouent tranquillement au golf, solutionnée avec les moyens du bord, c'est à dire une pince à cheveux et tout cela dans une ambulance lancée à pleine vitesse, est une représentation de ce qui se passe dans nos hôpitaux, il n'y a qu'un pas. L'histoire des personnages, leur passé, leur filiation, remonte aussi, comme s'il s'agissait d'un horizon indépassable dans une société court termiste qui laisse peu de chance aux changements profonds. Bien sûr, ce n'est certainement pas ce que Bay a en tête mais je ne peux m'empêcher d'y penser alors que je trouve ça d'une lourdeur affligeante dans d'autres films dits sociaux.
Il y a aussi un savoir-faire chez Bay, très souvent moqué, mais qui peut se prétendre encore aujourd'hui d'offrir des scènes d'action aussi exaltantes ? Emmerich ? Certainement pas. Et les autres, dont la réalisation n'a de furieux que le titre de leur film, on ne sait même plus qui ils sont. Un cinéma qui en met plein les mirettes, peut-être trop par moments, comme le sable, quand un enfant le pétrit à pleines mains, fait des projections jusque dans les yeux. Mais ça fait sourire, ça réconforte, et ça fait du bien par moments.
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J'aime bien parfois revoir des films récents, et je ne les choisis pas, ils s'imposent. J'ai adoré certains films que je n'ai pas besoin de revoir. Et certains films qui ne sont pas mes préférés nécessitent d'eux-même un nouveau visionnage assez rapidement. Hier soir, j'avais une envie folle de revoir déjà Nightmare Alley, pourtant sorti en 2022, mais un problème technique m'en a empêché, alors je me suis précipité sur un autre film que j'avais très envie de revoir, le très controversé Under the Silver Lake de David Robert Mitchell qui, après avoir convaincu tout le monde avec It Follows, avait beaucoup divisé avec celui-ci, malgré son ampleur et son ambition assez phénoménales, en tout cas sur le papier. Personnellement j'avais adoré le film le premier coup, malgré ses défauts assumés, et quelques outrances que je ne comprends toujours pas au second visionnage. Mais ce second coup a plus que confirmé mon sentiment : Under the Silver Lake est un film immense, d'une ambition rare, celle de faire un Privé (de Robert Altman) sous acide, un croisement parfait entre Mulholland Drive et Body Double, une variation cinématographique de grands livres tels que la Conspiration des Ténèbres de Rozsak ou Intérieur Nuit de Marissa Pessl, ou plus encore un Pendule de Foucault en pleine junk culture, un grand film millénariste, qui traite des théories du complot et de l'effondrement de la société de divertissement que nous avons tous contruite avec autant de déconne que de sérieux, et qui personnellement me passionne du premier au dernier plan. Le fait d'avoir situé le film à LA, et d'avoir fait un film si beau plastiquement, contribue aussi à mettre Hollywood, donc le cinéma dans son ensemble au centre même de cet effondrement et rend le film encore plus vertigineux. Alors je ne comprends toujours pas deux ou trois écarts, le plan sur l'étron, la diatribe anti-clochards, mais ces détails ne coupent en rien l'immense souffle qu'il y a dans ce film, un film qui ne peut que diviser tant les risques qu'il prend sont énormes mais qui est impressionnant de maitrise et d'ampleur. L'avoir revu m'en fait encore plus prendre conscience, et je crois bien que ce sentiment s'intensifera encore d'avantage lors des prochains visionnages, car il y en aura.
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Toute une nuit sans savoir, Payal Kapadia

Dès le début, le ton est inédit, on a envie de tout voir, tout entendre. Il y a des films comme ça, qui inventent absolument leur sensibilité, et qui la laissent se déployer, sans que ce soit parfait, mais toujours aussi vibrant d'un bout à l'autre. Ce sont des fêtes d'étudiant, des lettres d'amour, une révolution contre le castisme et la répression du mouvement par les nationalistes. Le film reste politiquement très humble, sans surplomb. Les étudiants en cinéma deviennent révolutionnaires parce qu'ils aiment Eisenstein. Et ils veulent combattre l'injustice des castes parce qu'ils sont amoureux. C'est tout, pas plus, pas moins. Rien ne viendra détruire ce qu'il y a de sensible en eux. Et si jamais le pouvoir parvenait à éradiquer tout cela, le film serait là, toujours, pour témoigner de ce qui a été si beau, si vivant.
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Dans les années 90, la première année en école de commerce d'une jeune femme d'origine algérienne issue d'un milieu aisé et vivant à Neuilly, tiraillée entre ses premières amours sans lendemain et la pression des parents qui souhaitent la marier à un fils de bonne famille, qui la violera le jour de leur premier rendez-vous. Un voyage en Algérie au moment où le pays entre à feu et à sang, remettra pas mal de choses en ordre dans les tourments de la jeune femme. Sur le papier, le film est pas mal, dans ses intentions aussi, mais ça a du mal à dépasser l'exercice scolaire dans les faits, et dans l'écriture du scénario et, pire encore, dans la mise en scène, tout est soit sage, soit maladroit, mais ne parvient jamais à s'identifier, à prendre corps; c'est d'autant plus dommage que le corps est le sujet central du film.
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groil_groil a écrit :
jeu. 14 avr. 2022 17:11
Dans les années 90, la première année en école de commerce...
Moi je suis allé le voir parce que j'avais lu Karim Aïnouz sur l'affiche. Il s'avère que c'était Kamir Aïnouz :lol:
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yhi a écrit :
jeu. 14 avr. 2022 19:09
groil_groil a écrit :
jeu. 14 avr. 2022 17:11
Dans les années 90, la première année en école de commerce...
Moi je suis allé le voir parce que j'avais lu Karim Aïnouz sur l'affiche. Il s'avère que c'était Kamir Aïnouz :lol:
et qui Karim Aïnouz ? :D
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Contes du hasard et autres fantaisies, Ryusuke Hamaguchi

L'art de laisser le spectateur sur la joie. La joie de ce que l'imaginaire peut venir réparer, de ce que les erreurs disent à notre place.
Ryusuke Hamaguchi n'a vraiment pas besoin de grand chose. Un petit espace suffit. L'arrière d'un taxi, un bureau avec une porte ouverte (génie de cette histoire de porte dans le deuxième segment du film : c'est le troisième personnage du récit, et tout le rapport entre les deux humains se fait en fonction de cette porte), un petit salon avec une baie vitrée ou bien un escalator. Le petit espace devient grand, parce que Hamaguchi, avec ses personnages, l'habite aussitôt, le charge de mille affects, lui donne la dimension d'un lieu : le lieu où. On s'en souvient ensuite de cette façon : le lieu où il dit ça, le lieu où elle fait ça.
Les trois films qui composent l'ensemble sont comme trois esquisses, légèrement inachevées malgré les ellipses qui viennent nous donner le sentiment d'avoir fait le tour (mais c'est un peu artificiel - d'ailleurs le plus beau des trois récits est sans doute le troisième, et celui-ci se passe d'ellipse). Esquisses de relations, dans lesquelles surgit, par la mise en scène (ou par le jeu), l'inattendu. C'est-à-dire : la reconfiguration des données préalables à l'échange entre deux êtres humains. Et la dystopie que propose le troisième segment témoigne de cet espoir : que quelque chose, entre les gens, change enfin, se révèle, se métamorphose.
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yhi
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groil_groil a écrit :
ven. 15 avr. 2022 09:47
et qui Karim Aïnouz ? :D
Un réalisateur brésilien (La vie invisible d'Euridice Gusmao)
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groil_groil
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Evidemment, j'adore. Comment un type comme moi peut ne pas adorer un film mettant en avant un jeune homme s'occupant d'une émission de radio electro coldwave au début des 80's, au moment de l'explosion des radios libres, et qui adore bidouiller le son façon musique concrète ? C'est un régal bien sûr, surtout que la BO est la meilleure qui soit, on y entend Throbbing Gristle, Front 242, Joy Division, Turquoise Days, The Undertones, etc... et surtout, surtout, "Mit Dir" de Robert Görl, soit ma chanson préférée de tout l'étang, même si un petit peu trop pitchée. J'étais aux anges, évidemment. Le film m'a malgré tout un peu déçu, mais pas de là à gacher mon plaisir, parce que je vois trop le regard d'un jeune cinéaste de 2022 sur 1981 et pas une plongée dans l'époque. Pourtant tout ce qui est déco, costumes, bande son, ça fonctionne bien, pas d'anachronisme, mais je trouve que le regard est trop contemporain. En 1981 on écoutait rarement TG dans sa bagnole, en faisant autre chose. Disons que si on écoutait TG on était un activiste, on écoutait ça de manière engagée, comme si on appartenait à une secte, il y avait un engagement communautaire autour de la cold wave ou de l'industriel qui a disparu aujourd'hui mais qu'on ne sent pas assez dans le film, où la musique semble accessible comme à l'époque d'internet. Eh bien non, à l'époque, écouter TG ou même Joy Division relevait de l'exploit, de l'activisme, les disques ne se trouvaient pas comme ça, il fallait aller en Angleterre, chopper des imports... bref, c'est un peu trop facile et accessible dans le film, c'est un regard contemporain. Autre chose, le mec est tellement bon, de manière innée sur la manipulation du son, le traitement de bandes, que si il avait été comme ça à l'époque, il atterissait directement au GRM à travailler avec Bayle et consorts. C'est encore une lecture contemporaine du truc, ou le traitement du son peut être considéré comme un divertissement grâce à l'apport des machines et du numérique, mais qui a l'époque était un sacredoce, un choix de vie. Bref, comme je disais, ne boudons pas ce beau plaisir qui pour une fois dans un film français, met vraiment la musique (et pas n'importe laquelle) et le son au coeur même de son récit.
I like your hair.
Kahled
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Don't Look Up : Déni cosmique, Adam McKay (2021)

La lourdeur made in Netflix, avec tout le cynisme qui va avec… C’est un film qui n’a ni la folie et la drôlerie d’Anchorman, ni l’exigence de The Big Short. Ça veut tirer à boulets rouges sur toutes les facettes actuelles de la société mais Adam McKay le fait avec une telle grossièreté et avec un tel simplisme que la malhonnêteté du projet n’en est que plus criante (et en plus, ça sort sur Netflix). Seul avantage du film : le jeu de Jennifer Lawrence, alors que c’est une actrice que je n’aime pas d’habitude.

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Scream, Matt Bettinelli-Olpin et ‎Tyler Gillett (2022)

Bon, je suis un fan ultime des précédents opus, y compris du troisième qui est décrié par quasiment tout le monde alors qu'il est d’une force théorique dévastatrice. Ici, forcément, il n’y a plus Wes Craven à la caméra et donc la tâche d’adapter ce cinquième volet qui ne dit pas son nom est confié à deux yes-man qui font de leur mieux pour respecter et faire honneur à l’univers initié il y a maintenant plus de 25 ans par Craven et Kevin Williamson. Ce qui frappe le plus ne se situe pas tant au niveau de l’horreur et de sa mise en scène, ni même au niveau de son discours méta (tellement attendu pour un Scream qu’il en devient anecdotique) que dans sa manière de dérouler minutieusement tout son univers, que ça soit en réintroduisant les uns après les autres les trois acteurs principaux de la saga ou de convoquer une à une toutes les figures majeures de l’univers et notamment du premier film : que ça soit ses deux tueurs (dont l’un aura une fois de plus le droit à une nouvelle sous-intrigue), l’hommage à un personnage phare (« le gardien des règles ») jusqu’à la maison du premier massacre comme terrain de jeu dans un climax copie conforme de ce premier volet. Sans même parler de cette abondance de références par la réintroduction minutieuse de personnages plus ou moins secondaires ou tertiaires de la saga (Marley Shelton, Heather Matarazzo) ou cette velléité quasi tentaculaire de tisser un fil générationnel entre Scream 1996 et Scream 2022 (la moitié des nouveaux personnages aura un lien de sang avec les anciens, vivants ou morts). Bref, la générosité de ce nouvel opus se situe dans la maîtrise avec laquelle il se réfère en permanence à ses prédécesseurs pour développer sa propre synergie et si l’exercice en tant que tel est parfois gratuit, il se révèle aussi particulièrement stimulant pour tout initié. En revanche, là où ça commence à faire mal, c’est dans la mise en scène. Wes Craven était un vrai cinéaste, inégal certainement, mais qui savait faire preuve de véritables fulgurances dans sa réalisation, trouvait systématiquement de nouvelles idées, créait des images marquantes en oscillant entre l’horrifique et le comique pour donner vie à cette saga. Ses deux successeurs ont beau faire de leur mieux, malheureusement à leur niveau ils ne parviennent pas à faire preuve d’autant de générosité (et d’inventivité encore moins), les scènes d’attaques et de meurtres manquant de dynamisme, tant dans le registre comique que dans le registre horrifique, cet aspect étant le plus décevant ici. Le slasher est un sous-genre qui met en scène des corps en mouvement (le tueur, la victime) qui doivent être filmés évoluant dans un cadre et ici, malheureusement, le film est beaucoup trop statique dans sa mise en scène pour que cette figure de style puisse trouver tout son épanouissement. La scène d’ouverture, à ce niveau, est particulièrement criante : outre son manque d’originalité (c’est l’ouverture la plus faible de la saga puisqu’elle ressasse des motifs déjà vus sans rien offrir de neuf – là où le quatrième volet, par exemple, se jouait de son propre univers avec une ouverture en trompe-l’œil) et son acte manqué (se servir de manière ludique de son idée de maison connectée), la tension est incroyablement faible, les deux réalisateurs ne faisant aucun effort pour investir l’espace qu’ils filment et déployer tout son potentiel horrifique. Et la plupart des scènes ressembleront à ça, scènes molles tant en termes d’idées qu’en termes de réalisation (le troisième volet avait parfois cette limite mais Craven s’en sortait parce que si sa mise en scène était devenue un peu plus aseptisée elle était en contrepartie compensée par de fulgurantes idées de cinéma qui ne lui faisaient, in fine, rien perdre de son ludisme). Dernière chose : son côté méta. Si le film a une vraie force théorique, celle-ci est quand même beaucoup moins affinée que ses prédécesseurs, tant au niveau du discours que de sa mise en pratique. Et surtout, là où les précédents volets faisaient preuve de modernité et savaient parler de leur époque par le prisme du film d’horreur, celui-ci a un côté conservateur voir ronchon-réac un peu agaçant : « Au diable les films d’intello à la Jordan Peele, c’est avec les vieilles ficelles qu’on fait les meilleurs films d’horreur ». Alors ça n’est peut-être pas faux, mais c’est dommage que les deux réalisateurs n’aient pas su appliquer cet adage : malgré un film qui se révèle tout de même agréable à regarder, il reste malheureusement trop engoncé dans son discours et la faiblesse de sa réalisation pour pleinement convaincre.

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Nightmare Alley, Guillermo Del Toro (2021)

Bof. Le film ne m’a pas impressionné outre mesure. Je n’avais pas vu la BA, ne savais pas trop de quoi ça parlait et en général je n’attends pas grand-chose d’un cinéaste aussi médiocre que Del Toro. Donc je n’ai pas été spécialement déçu. Le film est beaucoup trop long, ça c’est évident (gros soucis sur le montage, il a eu du mal à gérer son rythme). Le côté film noir est très attendu, c’est franchement ultra fétichiste à ce niveau. Le seul truc qui m’a un peu perturbé c’est que je savais que Cate Blanchett jouait dedans et ²ne pas la voir en une heure de film j’ai trouvé ça bizarre, surtout que Toni Collette lui ressemble un peu (en moins sophistiquée). Du coup, j’ai cru que je m’étais gouré et que c’était elle la vraie actrice principale du film (avec Rooney Mara). Et puis il y a eu la seconde partie qui m’a surpris par son changement de décor et sa manière de faire dévier le film du chemin qu’il avait emprunté pendant la première heure. A part ça, le reste est bof quoi. La toute fin, très noire, on la voit arriver à 100 kilomètres (en fait, dès le début du film quand Willem Dafoe explique longuement la combine à Bradley Cooper, je m’étais dit que son personnage allait finir comme ça, d’une manière ou d’une autre). Les films actuels veulent à tout prix verser dans le cynisme, la cruauté et l’ironie pure mais ne se rendent pas compte que, quel que soit le chemin qu’ils empruntent, même le plus tortueux (ici, par exemple, le changement de trajectoire du film), les spectateurs ont une longueur d’avance sur eux à force de bouffer les mêmes schémas narratifs.

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Les Promesses, Thomas Kruithof (2022)

Alors pour le coup, agréablement surpris ! On sent à quel point le côté sériel est présent mais c’est ce qui donne au film sa dynamique et sa force narrative (et donc politique), en lançant plusieurs intrigues qu’il arrive habilement à faire cohabiter afin de donner une cartographie cohérente du milieu politique, avant tout à petite échelle (s’intéressant particulièrement au microcosme politique d’une ville de la Seine-Saint-Denis avec ses guerres intestines, ses calculs politiciens et ses enjeux sociaux) mais en n’occultant pas pour autant la dimension nationale de la politique qui se joue davantage en hors champ et de manière quasi-occulte (c’est quelque chose de marquant). A ce titre, les rapports de force et les alliances sont bien dessinés, remis en question, déconstruits et reconstitués. Le film aurait gagné à s’inscrire davantage dans la durée, à développer davantage son sens du détail (déjà très précis) afin de gagner une ampleur qui lui manque de peu pour vraiment marquer de manière durable. Ce n’est pas totalement le cas mais en l’état, le film est déjà d’une efficacité redoutable, en prenant l’enjeu de l’insalubrité des immeubles de banlieue pour mettre en lumière les coulisses de l’exercice du pouvoir. J’ai parfois penser à The Wire (sans les flics et sans le trafic de drogue) notamment dans sa manière de ne pas diaboliser les différents acteurs en jeu dans cette mécanique politico-sociale, avec toute la médiocrité dont ils peuvent faire preuve mais aussi toute la force de conviction dont ils peuvent aussi témoigner pour mener un combat, quitte à contourner certaines règles.

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L’Enfer du devoir, William Friedkin (2000)

La honte.

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Enquête sur un scandale d'État, Thierry de Peretti (2022)

Ouais… C’est pas mal, on sent qu’il y a une vraie volonté esthétique (par ce choix de format qui resserre le cadre sur ses personnages notamment) et une réelle ambition narrative pour ce récit, qui se veut engagé, d’un infiltré dans le milieu des stupéfiants qui souhaite dévoiler les arcanes de la corruption policière / politique,les deux semblant étroitement liées, avec toute l’ambiguïté et la nuance qui va avec. Malheureusement, et c’est l’une des faiblesses du cinéma français actuellement, le film manque beaucoup trop de rigueur dans son développement, en multipliant les ellipses, en bâclant progressivement ses scènes d’investigations malgré de belles idées de cinéma, pour que l’on se sente réellement impliqué dans le processus de cette enquête journalistique. C’est dommage parce qu’il y a un véritable enjeu qui mène le récit entre volonté sincère d’engagement et intérêts plus personnels (tant pour le journaliste que pour son indic). Disons que le film a le cul coincé entre deux chaises finalement : d’un côté une volonté de rigueur narrative typiquement américaine qu’il n’arrive pas à atteindre (et qui lorgne du côté des films d’enquête outre-Atlantique les plus édifiants dans leur genre, disons pêle-mêle Erin Brockovich, Spotlight, Dark Waters, Zodiac, ou même Les Hommes du Président) et d’un autre côté, le film est aussi très français dans cette manière qu’il a d’aborder son sujet puis de le délaisser en adoptant une narration volontairement lacunaire afin d’adopter un nouvel angle, plus introspectif sur les motivations de ses personnages. Le fait de ne pas trancher le rend donc bancal, fragile, mais en même temps, il y a une vraie mélancolie qui finit par naître de cette étrange hybridation et qui trouve son éclat le plus tragique avant tout sur le personnage de Roschdy Zem, acteur absolument génial ici et qui me donne envie de creuser un peu plus sa filmographie. A noter aussi que les 20 dernières minutes du film, dont le climax est une longue scène d’audience filmée au plus près des personnages (Lindon est génial aussi et je commence à revoir mon appréciation sur cet acteur que je détestais auparavant) représentent un moment de cinéma qui vaut à lui seul le déplacement.

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Massacre à la tronçonneuse, David Blue Garcia (2022)

C’est tellement nul que ça n’a même pas la force d’être une insulte au film original.

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Aya et la sorcière, Goro Miyazaki (2021)

C’est assez malheureux de se dire que ce nouvel opus du Studio Ghibli est sorti dans l’indifférence générale sur Netflix (au-delà du fait qu’il ait été pensé comme un téléfilm). Et pour cause, c’est assez catastrophique. Je pense que cette tentative d’explorer de nouvelles voies n’est pas tant à considérer comme un film mais plutôt comme un essai, une ébauche de film qui n’est donc pas sortie en salles ni en France ni au Japon et qui n’est qu’un prétexte à s’essayer à une nouvelle technologie, la 3D et les images de synthèse comme outil principal dans la conception d’un film d’animation, pour éventuellement la perfectionner dans les prochains films que le studio réalisera par la suite. A ce niveau d’ailleurs, il n’y a que des progrès qui pourront être faits tant l’animation est rigide, froide et désincarnée avec un sens du détail complètement bâclé voir absent alors que c’est ce qui fait toutes la force des films du studio dont le visuel est presque toujours admirablement travaillé, de sorte à donner une représentation du monde dans laquelle sa beauté profonde provient justement de ses détails les plus banals, ceux qu'on ne remarque pas au quotidien et que l'animation parvient à sublimer. Bref, c’est bien simple, en l’état actuel, ce film-là est incroyablement laid visuellement, semble avoir 25 ans de retard au bas mot et on sent que le studio (et, de manière plus générale, le Japon) n’est pas du tout à l’aise avec cette technologie, que l’animation est pour lui avant tout traditionnelle, effectuée à la main, par des artisans et, jusque-là, c’est bien ce qui donne toute son authenticité à ses films qui vieillissent visuellement bien mieux que ceux du Studio Pixar (à titre de comparaison). Cela étant précisé sur le plan visuel, le scénario est quant à lui incroyablement lacunaire, avec un sens du montage ni fait ni à faire et confirme bien le qualificatif « d’ébauche » évoqué plus haut. Il manque bien 40 minutes de film pour avoir un résultat à peu près équilibré. Le script est de Miyazaki père visiblement mais j’ai lu que n’étant pas du tout à l’aise avec cette technologie il semble avoir laissé le champ libre à son fils pour faire ce qu’il voulait en se concentrant sur la réalisation de son prochain film qui lui sera, Dieu merci, entièrement dessiné à la main (mais du coup, Suzuki est responsable d’avoir laissé passer ça en tant que producteur / directeur artistique). Je pense que ce script était justement une ébauche qui n’a pas été retravaillée et que Goro Miyazaki a reproduit en l’état pour donner ce résultat bancal (pour rester gentil), paresseux et sans ampleur aucune. Un comble quand on sait que Le Château Ambulant, film génial par sa démesure visuelle et narrative (qui compense largement ses défauts), est un film adapté du même auteur et avec lequel ce dernier né mal aimable partage un certain nombre de caractéristiques thématiques, par exemple dans sa volonté de faire d’un groupe au départ dysfonctionnel un foyer familial recomposé, uni et consolidé par l’entre-aide, notamment dans les tâches du quotidien qui représentent ici la partie la plus importante du film.

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The Batman, Matt Reeves (2022)

Je crois que je n’ai pas grand-chose à en dire à part que… j’ai bien aimé. Bien sûr, 3h00, c’est assez long. Mais le film finit quand même par tirer avantage de cette longueur en reconstituant toute une mythologie qu’il entreprend d’abord, au préalable, de déconstruire pour donner sa propre représentation d’un personnage et d’une ville dont il insiste de manière peut-être plus précise que les précédentes adaptations sur ses bas-fonds, son système politico-mafieux rance avec l’impression, qui semble transpirer à chaque plan, que le monde qu’il met en scène (reflet du notre) est à la limite de s’effondrer sur lui-même.

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Ambulance, Michael Bay (2022)

Mais… c’est vraiment pas mal en fait ! :D

Bon, il y a 50 invraisemblances à la minutes mais osef, c’est un film qui fonctionne sur l’énergie qu’il déploie et qu’il maintient quasiment jusqu’au bout avec une générosité incroyable, multipliant les scènes, les séquences et les plans ultra burnés, en alternant scènes d’intérieur (l’ambulance) et d’extérieur (Los Angeles, qui est filmée quasiment comme un personnage à part entière) ! Michael Bay est un réalisateur que j’ai toujours méprisé jusqu’ici mais j’ai bien envie de voir (ou revoir) ses précédentes réalisations pour me faire un avis définitif sur ce cinéaste populaire, auteur de films bas du front mais qui me semble, justement, être un vrai auteur et non pas un simple yes-man médiocre (statut que j’ai toujours eu envie de lui coller avec pas mal de mauvaise foi). Sinon, je suis complètement d’accord avec les critiques de JanosValuska et ‘len, juste au-dessus, ils parlent vraiment SUPER BIEN du film ! :jap:

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Contes du hasard et autres fantaisies, Ryūsuke Hamaguchi (2022)

Ce film-là, je l’ai vu le dimanche 10 avril, soit le jour des élections. J’avais le choix entre me morfondre devant les résultats du premier tour ou voir ce nouveau film de Ryūsuke Hamaguchi, cinéaste japonais génial que je suis, un peu comme tout le monde, depuis la sortie de Senses. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que j’ai gagné au change ! Hamaguchi est donc définitivement l’un des cinéastes les plus précieux, précis et passionnants qu’on ait aujourd’hui. Le film est composé de trois segments, trois courts-métrages qui mettent en avant, chacun à leur manière, la communication comme force motrice de l’émancipation des personnages que le film met en scène et dépeint, par le biais du dialogue (Hamaguchi est ici à son sommet), avec une telle justesse qu’il arrive systématiquement, en quelques dizaines de minutes à peine, à nous donner la sensation qu’on les connaît tous profondément et intimement, comme si on les avaient toujours côtoyés, comme si leurs tourments nous concernaient personnellement, chacun d’eux étant emprisonné soit dans une relation toxique, soit dans un comportement difficilement assumé ou dans un souvenir impérissable, et que le poids d’une société faite de non-dits tend à écraser. Et Hamaguchi a ici l’intelligence suprême de prendre à contre-courant le poids de cette société en remettant le dialogue au centre du film et, surtout, en le faisant de la manière la plus cinématographique qui soit, en déployant ses idées de mise en scène ou ses concepts narratifs de manière ludique, avec espièglerie ou ironie : ici la psyché d’un personnage visualisant un rencard qui tourne mal, là un piège qui se retourne contre son auteur après que celui-ci ait renoncé à le concrétiser (après une discussion d’une profondeur désemparante avec sa cible), et ailleurs un jeu théâtral qui se met en place entre deux inconnues. Bref, c’est un film profondément généreux là aussi, dans l’émotion qu’il procure, au-delà des procédés qu’il utilise, et dans la justesse avec laquelle il filme ses acteurs. Justesse, d’ailleurs, qui est telle que chacun de ses rebondissements est amené avec un naturel déconcertant (à ce niveau, le troisième segment est un putain de cas d’école), l’écriture ne paraissant jamais forcée (défaut que pouvait parfois avoir Drive my car par exemple), notamment dans sa capacité à ancrer ses personnage dans un espace géographique que Hamaguchi arrive à rendre palpable, rassurant et réconfortant, aussi banal et trivial soit-il, de l’intérieur d’une voiture à l’escalator d’une gare (escalator qui sera d’ailleurs filmé deux fois et qui va donner lieu, en forme d’écho, à deux des plus belles séquences du film dans ce qui est peut-être le segment le plus émouvant) en passant par un bureau encombré, une salle de classe, le salon d’une jolie maison où l’intérieur d’un bus. Bref, en replaçant chacun de ses personnages et des échanges qu’ils entretiennent dans un espace bien dessiné, Hamaguchi soutient visuellement son art du dialogue, celui-ci étant le vecteur narratif avec lequel il fait se confronter intimement ses personnages dans la mesure ils ne seront jamais plus de deux au sein d’une même scène, d’un même échange. Dès que la pluralité entre en jeu, il y a systématiquement conflit ou rupture et, en cela, c’est un film avec une noirceur sous-jacente, ne manquant pas d’une ironie parfois féroce mais il est aussi et surtout un appel à la vie absolument merveilleux. J’en suis ressorti profondément satisfait et à partir de là, même les résultats du premier tour n’avaient plus d’importance pour moi.

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Les Animaux Fantastiques : Les Secrets de Dumbledore, David Yates (2022)

Du coup, après le Hamaguchi, j’en oublierais presque oublié de parler de ça. C’est plutôt bon (même si visuellement c’est parfois immonde, Yates n’a décidément aucun sens esthétique) et scénaristiquement ça tient plus la route que les deux précédents films, c’est plus fluide dans le déroulement avec quelques saillies de mise en scène assez réjouissantes. Bon, après, Yates oblige, c’est un film qui aurait pu être plus généreux que ça encore même, si en l’état, c’est peut-être ce qu’il a fait de plus convaincant. Mais franchement, quel gâchis de confier cet univers a un tâcheron qui a aussi peu de vision de cinéma. Je suis systématiquement bluffé par sa capacité à voir en permanence petit et à n’avoir aucune ambition. Et sinon, pas compris la non-présence de Katherine Waterston dans le film (alors qu’elle est la meilleure actrice de cette saga) qui se contente de n’apparaître que furtivement à la toute fin. J’ai lu qu’elle avait plus ou moins boudé la promotion et quelque chose me dit qu’avec la production chaotique de ce troisième volet (avec tous les reports, les écarts, les polémiques et les scandales qui ont lieu), il n’est pas impossible qu’elle ait boycotté aussi sa participation au tournage…
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Narval
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Vortex - Gaspar Noé
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Aïe. Vu avec ma mère. On est sortis complètement sonnés, en larmes, terrassés. Pas un mot prononcé pendant dix minutes. Sans rien dire on s'est dirigé vers un bar. Il fallait se poser.
Je ne m'attendais pas du tout à être aussi ému, je crois que ça a beaucoup à voir avec la maturité que Noé a pris depuis Lux Aeterna. Le côté prétentieux, petit malin et cinéphile de comptoir m'énervait souvent (regardez mes posters de Kubirck, mes VHS de Zulawski) mais c'était tellement assumé qu'on s'y était habitué à force. Heureusement, dans ce Vortex, il n'y a pas de héros masculin insipide où Noé se projetait directement (Love et Enter the Void), il n'est plus au centre de la narration. A présent c'est clair dès le générique : le nom de Noé n'est plus scandé en grosses lettres capitales comme une marque de fabrique, il est listé (les listes, toujours des listes) parmi un grand nombres d'autres noms, même pour la "fabrication" et la "réalisation" du film auxquelles il participe pourtant beaucoup. Il n'y a qu'une seule phrase accrocheuse pour ouvrir le film, très belle par ailleurs, et surtout il y a un minimalisme formel qui va à l'encontre total de tous ses films précédents et qui est totalement cohérent et en phase avec le récit. J'apprécie beaucoup la volonté d'avoir aussi laissé de côté les conflits artificiels gonflés aux insultes et la violence physique totalement gratuite de ses films précédents (il faut voir l'acharnement sur les femmes enceintes qui semble le fasciner et être son relais émotionnel principal). Vortex parvient très facilement à émouvoir, sans pour autant sacrifier les personnages à l'autel de l'horreur et des conflits d'égos. Comprenez :"Fini le temps des gamineries, je vais faire mon Amour" (celui d'Haneke), sauf que je vais aller un peu plus loin (il va jusqu'au bout, sans tricheries, là où l'autrichien s'arrêtai en cours de route). L'évidence, et elle fait très mal.

Cette commande carte blanche à priori anecdotique qu'était Lux Aeterna avait mine de rien amené Noé à réinventer son cinéma avec une utilisation superbe du split-screen et une scène de dialogue improvisée géniale entre Gainsbourg et Dalle (clairement la meilleure partie du film, comme quoi). La question était de savoir comme cette technique pourrait être encore repensée pour une prochaine tentative et clairement, le choix d'avoir conservé le split-screen pour Vortex était la meilleure idée possible. C'est simple, autant je trouvais que Lux Aeterna aurait pu s'en passer, autant ce nouveau film me paraît inenvisageable sans. Tout le rythme tient grâce à cette double hélice temporelle (le vortex du titre pourrait être ce tourbillon de médicaments dans les chiottes), enfermant chaque personnage dans sa bulle personnelle, le déphasant avec les autres, le scellant dans son propre film dans le film (ou rêve dans le rêve). Noé interroge directement le format du cinéma (pourquoi 1 seul photogramme et pas 2, la paire, le couple, le double mythe ?), et cela en permanence. Si l'un part, que faire de l'autre ? Si les acteurs se retrouvent, quid des doublons ? Comment faire dialoguer les vies alors qu'elle fonctionnent sur des régimes d'image, des colorimétries différentes ? Et si l'on ne regardait qu'un seul écran, lequel ça serait ? Faut-il seulement choisir ? Quelle moralité derrière ce choix ? Bref, les questionnements sont infinis et directement articulés par la mise en scène et l'écran partagé (ou justement, non partagé ?). C'est passionnant et d'une simplicité quasi diabolique, sans côté m'as-tu-vu de ses précédentes œuvres, et le provoc facile qui pointait souvent son museau.

Il y a simplement la faiblesse, l'absence de communication, les tristesses infinies et une possibilité de compréhension, tardive certes, incomplète oui, mais sincère et profonde. Cette scène de réunion où enfin les propositions sont lancées, avec cette phrase très dure du père à son fils : "Le seul qui mériterait de voir un psychiatre, ça serait toi" (ou quelque chose comme ça), montrant toute l'instabilité psychique de chacun, l'absurdité de la situation familiale, et ouvrant sur la perspective d'un monde malade, où tout le monde est sous médoc et n'assure plus de son côté. C'est peut-être le film le moins violent mais c'est certainement le plus tragique de ce point de vue là. La pandémie n'est pas montrée dans le film, mais la vague de troubles mentaux, de pertes de confiance et de moral qui en a suivi est clairement sensible. Pour aller plus loin, tout l'arrière-plan autour des consommateurs de cracks à Stalingrad (les extérieurs sont tournés juste à côté du métro aérien) est vraiment excellent et aurait presque mérité d'être un peu étiré. Le parallèle avec l'appartement est vraiment intéressant et permet d'offrir un ancrage temporel (ces dispositifs d'encadrement des doses de crack sont tout récents) et social qui est inédit.

Mais le volet le plus émouvant déployé par le film est certainement sa capacité à sonder les habitudes et les errements des personnes qui tombent dans la sénilité et à en faire le centre de toute la narration. Il faut bien 15 minutes pour introduire quelque chose comme un enjeu, et encore plus pour avoir la première réelle scène dialoguée digne de ce nom car tout le début n'est qu'une course poursuite sans aucune rythmique classique, simplement une dame qui se perd dans un magasin et l'autre qui suit ses traces tant bien que mal. Il y a toutes ces habitudes prises, incohérentes pour nous, sensées et importantes pour elle et lui, auxquelles ils s'adonnent la journée entière. Toutes les tentatives pour remettre de l'ordre dans cette appartement gigantesque, pour subsister. Tous ces rituels de la vie quotidienne (pisser, se doucher, regarder la télé) supplémentés par des égarements très forts (tester les stylos, trier les fiches de patients vérifier les boîtes de médicaments...), le film est rempli de ces éléments accumulés dont on ne sait plus ni l'utilisé ni la raison d'être (cette maladie qui est de ne pouvoir rien jeter, de vouloir tout conserver), et qu'il faut traiter d'une façon ou d'une autre, c'est fascinant.
La beauté du film vient aussi de la fragilité de Françoise Lebrun, icône de La maman et la putain bien sûr, mais également regard et visage superbe d'émotion qui, à bientôt 78 ans continue d'émouvoir après avoir traversé tellement de films et d'époques. Quelle difficulté se doit être pour elle, jouer cette femme constamment en alerte, prise de paranoïa, toujours dans l'insécurité, jamais sereine, et de se tenir à un rôle quasi muet ; ou plutôt à un rôle de murmures, à un rôle de paroles avortées par endroit, ou tout d'un coup d'une phrase entière qui lui échappe et glace tout le monde. Si Françoise perd la mémoire de ceux qu'elle aime, Dario ne s'en retrouve que seul et, inconsciemment ou non, s'éloigne encore plus d'elle pour échapper à l'horreur de ne plus être regardé en tant qu'homme, créant ainsi une spirale d'isolement qui fonctionne très bien. Tout le monde est seul, et on a jamais le temps ni la patience de s'occuper réellement des autres, de progresser, de s'entraider.
A cet égard, j'admire également la place que prend l'appartement (fruit d'1 mois de travail, supervisé par le génial Jean Rabasse), superbement décoré et filmé, rempli de détails (affiches "CRSS SS" et compagnie, toutes au générique), où mêmes les références cinématographiques sont plus subtiles (il y a Solaris qui passe à un moment à la télé il me semble, quand Dario tombe à terre, mais c'est la surface de la planète qui est montrée). L'appartement a vécu, et comme tous les appartements de personnes très âgées on peut y retracer l'histoire familiale ainsi que l'Histoire du pays. Il vit et il meure lui aussi par ailleurs, dans une séquence très émouvante (Noé va jusqu'au bout), où les vibrations inquiétantes accompagnent le progressif dépeuplement, l'hémorragie fatale du lieu qui se convertit en espace impersonnel et désincarné.

J'adore le rythme très différent qui saisit le film sur ses dernières minutes. On a eu droit à 2h de presque aucun geste assuré, aucune progression narrative, aucun réel avancement scénaristique classique, et puis tout à coup sur la fin, les plans séquences sont remplacés par des flashs de quelques secondes à peine. Alex Lutz récite un petit discours, il y a ce diaporama tout simple balancé à la figure des gens avec la musique de Delerue, l'urne enfin, et la mise à mort de l'appartement. Bref tout va très vite : le monde des vivants ne s'encombre plus, ni des biens ni des personnes. C'est magnifique et terrible à la fois.
Très hâte de savoir ce qu'il compte faire après un film pareil.
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asketoner
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Le Nid familial, Bela Tarr, 1977

Un film d'horreur domestique, un peu comme Le Bonheur de Varda, mais l'approche est très différente : les racines du mal, ici, sont purement sociales. Bela Tarr était déjà radical (les très longues scènes de repas dans la toute petite cuisine où le patriarche lance des reproches, des menaces et des insultes partout autour de lui, pourraient être le pendant des épluchages de pomme de terre en silence dans Le Cheval de Turin), mais il cherchait encore où l'être.
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sokol
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Kahled a écrit :
dim. 17 avr. 2022 16:59
Contes du hasard et autres fantaisies, Ryūsuke Hamaguchi (2022)
Le premier chapitre est sacrément Rohmerien non ? (ce n'est pas un critique mais c'est un constat).
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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groil_groil
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Un bon film de "lanceur d'alerte", dans le sillage des Norma Rae, Erin Browovick, Promised Land ou Dark Waters, mais à la française, ça donne un petit mélange de Zone Rouge de Robert Enrico et de la bande dessinée Les Algues Vertes. Sinon Sami Bouajila et Zita Hanrot, sont deux des meilleurs acteurs qu'on ait dans notre pays, et c'est super de les voir jouer ensemble.

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Super ! Un vrai vent de liberté, un souffle permanent qui nous fait découvrir une Russie qui semble vrai, on a l'impression d'être embarqué avec l'actrice dans ce long voyage vers elle-même. J'ai beaucoup pensé à deux films : An Elephant Sitting Still, mais en plus joyeux, et Où est la maison de mon ami ?, notamment pour la fin qui est quasi un copier-coller.

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Je l'avais découvert en salle à sa sortie en 87, et c'est l'un des films, il doit y en avoir une petite dizaine, qui a façonné mon amour du bis, et du film d'horreur. Un pied total à revoir dans sa version magnifiquement restaurée par Carlotta, je n'étais évidemment pas emporté comme la première fois, mais qu'est-ce que ça fait du bien de voir des réals croire autant à ce qu'ils filment, surtout quand ce qu'ils filment est branque comme ça. C'est l'un des trucs que j'aime le plus au cinéma. J'avais oublié que la bande son regorge de groupe supers : Dead Can Dance, The Smiths, The Cult, Art of Noise et Peter Murphy.

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Un Risi que je ne connaissais pas encore et qui vient d'être réédité en bluray (très belle copie), et verdict : RISI c'est (vraiment) le patron ! Magnifique triangle amoureux, assez proche dans mon souvenir du Drame de la Jalousie que Scola réalisera deux ans plus tard, car oui, ce Risi est de 1968 et sa mise en scène est si moderne qu'on dirait un film de la fin des 70's. Comédiens fabuleux, ça va de soi, et une vision de l'époque pleine d'acidité et de malice, j'adore.

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La suite d'Intervention Divine, près de 20 ans plus tard. Ce coup-ci, le personnage Suleiman, le réal jouant son propre rôle, mais de manière muette comme un Charlot des temps modernes, voyage, et après une première partie de film en Palestine, visite Paris dans la seconde et New York dans la troisième. Sa vision des deux est réjouissante, hilarante, dans un humour à froid, posé, très bande dessinée, qui rappelle aussi bien Jacques Tati que Luc Moullet ou Otar Iossellani. Bref, c'est du grand art, de parvenir à dire autant de choses, sans utiliser - ou presque - la parole, c'est avoir une confiance absolue en la mise en scène.
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asketoner
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Compartiment + It must be heaven = joie double !
:love2:


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A Chiara, Jonas Carpignano

Je me suis tiré au bout de vingt minutes, il n'y a pas de chef op, pas de montage, pas de mise en scène : rien. Je ne comprenais pas qui était qui, pourquoi on passait dix minutes dans une fête pourrie, que venait foutre les ralentis glauques et les musiques lourdes au milieu de ce néant, ni comment on pouvait nous infliger des pauvres rêves à la Lynch où l'héroïne fait du moonwalk dans un couloir dans un halo de lumière bleue...
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JanosValuska
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Apollo 10½, A space age childhood - Richard Linklater

Difficile de savoir jusqu'à quel point Apollo 10 est autobiographique mais Stan, le jeune héros du film, est né en 1960 à Houston. Tout comme Richard Linklater. Pour son retour à l'animation par rotoscopie (quinze ans après A skanner darkly) le réalisateur de Boyhood joue sur un terrain proche de celui de PTA et Tarantino, respectivement pour Licorice Pizza et Once upon a time in Hollywood : il retrouve l'atmosphère de son enfance et livre un pur film-fantasme, à travers le portrait d'un garçon de dix ans engagé par la NASA pour intégrer la mission Apollo. C'est du pur Linklater donc moins un film sur Apollo et les projets lunaires que sur le quotidien d'une famille des suburbs de Houston dans les années 60. Une chronique à la fois documentée et fantasmée. Une collection de petits instants, de souvenirs, de gestes, de films, de chansons, de programmes télé. Fétichiste mais jamais passéiste tant la voix off (Celle du garçon, d'aujourd'hui) y évoque sans cesse le Vietnam et la surconsommation, entre autre. Un régal.

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Apollo 11 - Todd Douglas Miller

Documentaire inouï réalisé à partir de matériaux bruts, images d'archives et milliers d'heures d'enregistrements audios, Apollo 11 retrace, sans voix off ni commentaires ni interviews, la semaine la plus importante de la conquête spatiale, aux côtés des trois astronautes mais aussi dans les bureaux de la NASA mais aussi avec le public venu de partout pour assister au lancement. Les images sont tellement dingues, inédites (dans cette qualité) qu'on se demande au préalable si ce n'est pas un fastidieux travail de reconstitution. Or non il s'agit bien d'images d'époque : les longues focales dans la foule, les travellings dingues dans le centre de contrôle et bien sûr l'immersion dans le module aux côtés de Neil Armstrong, Buzz Aldrin & Michael Collins. Rien d'étonnant au fait que ces heures d'images existent et de cette qualité là tant on sait combien le projet dans son ensemble est doté d'un budget astronomique. Ce qui a fonc permis cette restauration démentielle. Il s'agit donc de capter l'atmosphère de juillet 1969 de Houston à la Lune et donner chair au rêve de JFK, pour le cinquantième anniversaire de l'alunissage. Et franchement on y est.

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First man - Damien Chazelle

Sincèrement il y a peu de films qui me terrassent autant que celui-ci, d'une tristesse sans nom. On attend un biopic heroique sur le premier homme ayant foulé le sol lunaire, on reçoit ce mélo fulgurant, l'histoire d'un père meurtri qui va sur la Lune pour y laisser son deuil, y jeter un bracelet dans un cratère. Et tout le film est habité par la mort. First man me hantait depuis sa sortie. Je rêvais de le revoir tout en craignant de le revoir. C'est un film immense.
Kahled
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sokol a écrit :
mar. 19 avr. 2022 16:27
Kahled a écrit :
dim. 17 avr. 2022 16:59
Contes du hasard et autres fantaisies, Ryūsuke Hamaguchi (2022)
Le premier chapitre est sacrément Rohmerien non ? (ce n'est pas un critique mais c'est un constat).
Hello !

Alors je ne sais pas si ça répond à ta question, mais j’ai trouvé cette interview d’Hamaguchi dans Le Monde qui dit justement qu’il s’était entretenu avec la monteuse d’Eric Rohmer et que c’est elle qui lui a donné l’idée de ce format de film à sketches. :saint:

https://www.lemonde.fr/culture/article/ ... _3246.html
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groil_groil
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Fait Divers - Claude Autant-Lara - 1923

Hallucinant d'imaginer que le premier film de Claude Autant-Lara, ce chantre de l'académisme pompier, ce cinéaste fustigé, plus que d'autres encore, par les jeunes turcs des Cahiers au moment où ils instaurent la Nouvelle Vague, accusé de collaboration pendant la guerre, et qui finira proche du Front National dans les 80's, puisse être un chef-d'oeuvre de cinéma expérimental, très proche des premiers René Clair ou de Germaine Dulac. Mettant en scène sa propre mère ainsi qu'Antonin Artaud, dans un triangle amoureux abstrait et clairement influencé par le surréalisme, le cinéaste qui n'a alors que 22 ans fait montre d'une acuité de mise en scène hallucinante, parvenant à créer un univers qui n'a rien à envier à Man-Ray ou à Buñuel. On imagine mal comment en commençant ainsi, le cinéaste a ensuite tourné L'Auberge Rouge ou La Traversée de Paris.
A noter que ce film est visible jusqu'au 13 mai sur le replay d'Arte, et que dans le genre c'est inratable.
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robinne
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weird

groil_groil a écrit :
jeu. 21 avr. 2022 11:19
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Fait Divers - Claude Autant-Lara - 1923

Hallucinant d'imaginer que le premier film de Claude Autant-Lara, ce chantre de l'académisme pompier, ce cinéaste fustigé, plus que d'autres encore, par les jeunes turcs des Cahiers au moment où ils instaurent la Nouvelle Vague, accusé de collaboration pendant la guerre, et qui finira proche du Front National dans les 80's, puisse être un chef-d'oeuvre de cinéma expérimental, très proche des premiers René Clair ou de Germaine Dulac. Mettant en scène sa propre mère ainsi qu'Antonin Artaud, dans un triangle amoureux abstrait et clairement influencé par le surréalisme, le cinéaste qui n'a alors que 22 ans fait montre d'une acuité de mise en scène hallucinante, parvenant à créer un univers qui n'a rien à envier à Man-Ray ou à Buñuel. On imagine mal comment en commençant ainsi, le cinéaste a ensuite tourné L'Auberge Rouge ou La Traversée de Paris.
A noter que ce film est visible jusqu'au 13 mai sur le replay d'Arte, et que dans le genre c'est inratable.
Merci pour l'information :jap: Ca donne envie.
A découvrir ici : https://www.arte.tv/fr/videos/098026-002-A/fait-divers/ ;)
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Kahled a écrit :
mer. 20 avr. 2022 18:46

Hello !

Alors je ne sais pas si ça répond à ta question, mais j’ai trouvé cette interview d’Hamaguchi dans Le Monde qui dit justement qu’il s’était entretenu avec la monteuse d’Eric Rohmer et que c’est elle qui lui a donné l’idée de ce format de film à sketches. :saint:

https://www.lemonde.fr/culture/article/ ... _3246.html
C'est tout à fait ca : mon constat état exactement sous cet angle là
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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Mouchette de Robert Bresson

Douleur d'être au monde
Douleur des autres
Silence du moi
La force de l'image, c'est celle de l'âme fragile emporté par le poids du corps... des corps. Les maux comme horizon indépassable, indescriptible, insurmontable, c'est la brûlure du temps sur la chair. La vie dans les crevasses, salie par la terre, éraflée par le vent, c'est le mouvement perpétuel et invisible de l'écorchée.
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sokol
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groil_groil a écrit :
jeu. 21 avr. 2022 11:19
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Fait Divers - Claude Autant-Lara - 1923

Hallucinant d'imaginer que le premier film de Claude Autant-Lara, ce chantre de l'académisme pompier, ce cinéaste fustigé, plus que d'autres encore, par les jeunes turcs des Cahiers au moment où ils instaurent la Nouvelle Vague, accusé de collaboration pendant la guerre, et qui finira proche du Front National dans les 80's, puisse être un chef-d’œuvre de cinéma expérimental, très proche des premiers René Clair ou de Germaine Dulac. Mettant en scène sa propre mère ainsi qu'Antonin Artaud, dans un triangle amoureux abstrait et clairement influencé par le surréalisme, le cinéaste qui n'a alors que 22 ans fait montre d'une acuité de mise en scène hallucinante, parvenant à créer un univers qui n'a rien à envier à Man-Ray ou à Buñuel. On imagine mal comment en commençant ainsi, le cinéaste a ensuite tourné L'Auberge Rouge ou La Traversée de Paris.
A noter que ce film est visible jusqu'au 13 mai sur le replay d'Arte, et que dans le genre c'est inratable.
:jap: :jap: :jap: :jap:

Je suis tombé de très haut, mais vraiment de très haut car j'ai trouvé ça s p l e n d i d e ! Je le préfère au Chien andalou de Buñuel, c'est dire (de toute façon, il est intérieur à Buñuel donc, automatiquement, il est plus authentique). Et tout ce qui est authentique, n'a pas de prix. Après, je suis honnête, j'ai rien vu de René Clair ou de Germaine Dulac de la même époque (par contre, je connais les films de Jean Epstein et ils sont magnifiques aussi).

Et je me dis : si on appelle ça du cinéma poétique (je sais, c'est pénible de trouver le nom juste mais on va rester sur celui-ci), dans l'histoire du cinéma, seul Godard a pu faire (sans doute, sur un malentendu bien entretenu par lui) du "cinéma poétique" durant toute sa carrière de 60 ans (60 ans quand même !!) sinon, comment expliquer que, Autant-Lara faisait ça quand il avait 20 ans puis, après, il a fait ce qu'on sait tous... . Autrement dit, ce n'est pas "la faute" des cinéastes mais... du cinéma.
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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