Le Centre de Visionnage : Films et débats

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B-Lyndon
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sokol a écrit :
lun. 17 oct. 2022 13:46
B-Lyndon a écrit :
lun. 17 oct. 2022 12:30
Comment Desplechin a pu faire une chose pareille ?
Oui, on s'était posé cette question ici même, il n'y a pas très longtemps. Perso, je suis fan absolu (c'est son plus beau film, je suis catégorique). Maintenant, quand je fais un top 30 ou top50 ever, je me bats pour qu'il y figure :D
(je l'ai découvert très tôt, je crois que c'est même le tout premier Desplechin que j'ai vu de ma vie. mais j'ai du le revoir 4-5 fois. Il est inépuisable ce film).
Oui ça m'a sidéré...C'est un vrai chef-d'oeuvre quoi, un vrai de vrai.
Je crois que j'aime encore plus Comment je me suis disputé (peut-être parce qu'Amalric est encore au-dessus de Salinger) mais honnêtement ça se vaut.
Quel bande d'acteurs ils étaient quand même, c'est bouleversant.
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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groil_groil
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Au début on s'y perd, on s'y agace, et puis le spectateur finit par se faire son chemin dans ce faux film de procès suivant un homme qui, pour sauver sa peau, a choisi de dénoncer tous les membres influents de la mafia, mettant au jour une galerie de guignols et de pauvres types comme rarement un film sur la mafia avait oser nous montrer, et c'est tout le sel de ce beau film tardif du maitre Bellocchio.

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A cause de son titre, j'ai toujours cru, à tort, que ce film proposait une vision quelque peu bouffonne de la Guerre du Vietnam, un peu comme celle de Good Morning Vietnam par exemple. En effet il n'en est rien, c'est un vrai et beau film de guerre, à rapprocher des films de Walsh ou d'Antony Mann et qui se glisse haut la main au milieu d'un Outrages ou d'un Platoon, comme l'un des grands films sur le Vietnam des 80's.

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J'en gardais le souvenir d'un petit Duvivier, c'est le cas, le film n'est pas passionnant hormis pour la figure de Gabin et le côté couleur locale de certains décors et quelques figurants, qui font vrai, mais qui sont malheureusement filmés comme des indigènes.

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Plus le temps passe et plus je me dis que Mia Hansen Love ne retrouvera jamais la grâce de ses trois premiers films, et ce, même si ce dernier est réussi. Ce qu'il y a de génial dans ce film c'est avant tout Léa Seydoux, qui n'a jamais été aussi juste et aussi belle (c'est dingue comme elle semble être réelle dans ce film, on a l'impression de la connaitre, et fou aussi comme les cheveux courts lui vont bien), Pascal Greggory, lui aussi merveilleux et papa universitaire qui perd la boule, et le traitement de la question de la maladie, qui est juste et émouvant, avec toujours la bonne distance. Ce qui est moins bon, c'est tout ce qui tourne autour du personnage joué par Melvil Poupaud, je n'y crois jamais. Le personnage en lui-même n'est pas bien dessiné, les répliques des deux amants sonnent faux, parfois c'en est même vraiment gênant, et je ferais là-dessus le même reproche qu'au dernier film de Mouret : si c'est pour ignorer à ce point l'existence de l'épouse (le néant total) ce n'est pas la peine de créer un personnage qui est soi-disant marié. Et gros point fort final : le film se termine sur une sublime chanson de Bill Fay.

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Une jeune musicienne tente de remettre en scène une ancienne star de la musique (un profil à la Brigitte Fontaine) en enregistrant un nouvel album en duo mais cette dernière meurt dès le début de la collaboration. Elle va tenter de finaliser l'album seule, mais elle a besoin de retrouver l'ayant-droit, un petit neveu loulou et opportuniste, placeur sur les marchés. Les liens entre ces deux personnages que tout oppose va constituer le fil d'un film que je n'étais pas loin d'aimer mais qui pêche à cause de la musique. Il y en a tout le temps, normal vu le sujet, mais elle a été confiée à des compositeurs / paroliers qui n'ont absolument pas le niveau et qui créent une soupe inodore à laquelle il est impossible d'adhérer, nous faisant ainsi nous priver de la quasi-totalité des émotions que souhaite provoquer le film.

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Pour son dernier film, le russe Kalatozov cède aux sirènes très en vogue à l'époque de la superproduction internationale, italo-russo-anglo-saxone pour un film ambitieux, aidé par le score de Morricone plutôt habile mais assez pompier, sur un sujet qui lui correspond plutôt (la recherche des survivants d'un accident de zeppelin en plein Antarctique), mais qui devient à cause de cet excès de gigantisme, forcément impersonnel.

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Zéro pointé pour cette adaptation d'une nouvelle de Stephen King étirée jusqu'à la rupture pour remplir un long métrage, mais qui ne le remplit que de vide, de non-sens, et d'un mauvais goût aussi absolu que racoleur, jouant sur le lacrymal à répétition quant à la mort d'une fillette. Odieux.

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Kalatozov encore, mais ici 100% russe et nettement plus convaincant, sur l'errance de 4 géologues perdus en pleine Sibérie alors qu'ils recherchent une mine de diamants. Le film propose presque une vision anticipée et naturaliste du Stalker de Tarkovski (il l'a forcément) et réussi tant dans ses personnages que dans la mise en scène magnifique d'une nature aussi grandiose que dangereuse. Sans doute mon Kalatozov préféré.

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Odieux nanar fin de carrière de Rob Reiner mettant en scène un vieillard grincheux et à destination d'un public du 3ème qui l'est sans doute tout autant.

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J'avoue avoir râlé quand j'ai vu les frères Dardenne recevoir encore un Prix au dernier Festival de Cannes, mais franchement celui-ci est sans doute leur plus mérité, et ce film est l'un de leurs plus beaux. Film direct, sans transition, ultra frontal, il met en scène deux gamins, réfugiés illégaux du Bénin qui tentent de survivre en Belgique. Le plus jeune a pu avoir des papiers, l'ainée n'en a pas. Sa quête effrénée pour en avoir sera le centre du film, tout comme ce qui causera sa perte. Les Dardenne démontent un système mais jamais tomber dans le discursif, et montrent uniquement par la mise en scène l'absurdité d'une société. Le film est d'une noirceur phénoménale qui m'a retourné le ventre, et surtout il ne s'embarrasse d'aucune psychologie. Ce sont juste des actes, des actions, qui nous sont montrés comme une matière vivante et abrasive. Il y a quelque chose de L'Argent de Bresson là-dedans, dans le sens où les Dardenne montre l'impuissance de l'être humain dans un système établi, qui forcément, va le broyer. C'est un film sans espoir, mais en même temps d'où surgissent deux des personnages les plus lumineux de leur oeuvre, ces deux enfants qui se font passer pour frère et soeur afin de ne pas être séparés, mais surtout pour encore avoir quelqu'un à aimer dans un monde où l'amour a disparu. Et c'est justement cet amour qui sera leur perte. J'en suis sorti terrassé, y pense continuellement depuis, un de mes plus gros chocs de l'année, assurément.

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Après la mort accidentelle de son épouse, Julien Lepers est recontacté par cette dernière en direct du trépas et via les ondes radio et télé. Elle lui annonce des morts à venir, et Julien va tenter de les entraver tout en essayant de communiquer au max avec sa femme. L'idée est marrante et aurait pu donner lieu à un bon thriller paranormal du dimanche soir mais l'ensemble part trop vite en wtf pour susciter le moindre intérêt.

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J'avoue l'avoir vu avec beaucoup d'a priori, mais in fine le film m'a plutôt plu, et marqué. Déjà la durée de 2h40 qui m'effrayait ne se sent pas, et il est assez facile d'accepter que le cinéaste ne propose pas un film biographique, mais une rêverie autour du personnage de Marilyn (ce qui est assez chiant, car on passe une partie de son temps sur wikipédia à vérifier si ceci est vrai ou si ceci est faux). Mais j'ai fini par me prendre au jeu et par être ému par ce portrait assez expérimental d'une part, mais surtout très simple et déchirant de l'autre. Dominik fait vraiment de Marilyn une victime, terrorisée toute sa vie par le fait de ne pas avoir eu d'enfant (la fausse couche comme leitmotiv est assez éprouvant), mais surtout d'avoir dû subir toute la violence des hommes et la violence d'une industrie et d'un siècle tout entier qui la désigna comme la victime idéale. En cela, le film aurait pu, dû, s'appeler La Passion de Marilyn.

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Revu cette merveille avec toujours autant de plaisir pour la montrer à mon gamin, même si je ne me souvenais pas que l'humour y était souvent assez trash et en dessous de la ceinture...

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C'est du cinéma de droite décomplexée, catho, réac, militaire friendly, une sorte de tract parfait pour la NRA, qui considère tout étranger (et qui plus est s'il vient du Moyen Orient) comme un métèque, mais malgré cela, j'ai trouvé des qualités au film. Notamment parce que j'étais persuadé que le père partait en Irak recherché son fils disparu, mais pas du tout, il ne quitte pas son bled, et sa quête est très vite introspective, lui permettant seulement de faire son deuil impossible. En cela, le traitement est assez habile, parce que la mise en scène n'est jamais trop à la recherche de l'effet et préfère se poser, on dirait presque du Wenders parfois, pour respirer au rythme de ses personnages meurtris.

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Moi qui disais pis que pendre de Villeneuve, j'avais découvert cette merveille absolue l'an dernier et m'étais pris une claque monumentale. Revu seulement un an plus tard, le film est toujours aussi fort, magistral, à la bonne distance. C'est un des thrillers de psychopathes les plus haletants vus dans ma vie, mais le film soulève en plus une question essentielle et perturbante, celle de savoir jusqu'où on est prêt pour retrouver sa fille enlevée. Le film dit que oui, on est prêt à devenir un monstre pour cela, et il ne glorifie pas cette action bien au contraire, mais nous laisse face à ça avec une grande intelligence et beaucoup de subtilité.

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Toute la promo de ce film méconnu de 1983 laissant penser qu'il s'agissait d'un film de zombie alors que pas du tout, c'est un slasher, mais un slasher bancal, atypique, qui ressemble parfois à Re-Animator, parfois à du De Palma. On frôle en permanence la série Z, mais le film avance avec franchise, sans se soucier de sa réception, et finit par convaincre lors d'un finish aussi grandiose que grand-guignol. Belle découverte de cinéma bis.

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Fabuleux documentaire au rythme si effréné qu'il en devient presque fatigant, consacré à la boite de prod CANNON qui dans les 80's devient la plus grosse machine à nanars de tous les temps, fabriquant à la chaine des films de consommation avec Charles Bronson, Sylvester Stallone, Chuck Norris, Dolph Lungren ou JC Van Hamme, et en mettant du cul partout et tout le temps. Fondée par deux israéliens aussi cinéphiles qu'opportunistes, la Canon tenta ensuite de se racheter une bonne conduite en signant de grands artistes comme Cassavetes, Schroeder, Schatzberg, Kontchalovsky, Frankenheimer ou même Godard (King Lear, ce sont eux !), la firme finit par imploser par soucis de mauvaise gestion et d'égo démesuré. Ce doc assez complet et survolté est totalement réjouissant, nous replongeant dans l'époque comme si on l'avait vécue.
Modifié en dernier par groil_groil le lun. 17 oct. 2022 15:13, modifié 1 fois.
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cyborg
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Villa Les Dunes - Madeleine Hartmann-Clausset - 1974

Surprenante découverte que le totalement méconnu "Villa les Dunes", de la tout aussi méconnue Madeleine Hartmann-Clausset, un film s'inscrivant parfaitement dans la lignée très française des "films de vacances". Paru exactement la même année que "Le Chaud Lapin" de Pascal Thomas, autre film de vacances désormais totalement daté (par sa misogynie, mais pas uniquement), nous en sommes ici à l'opposé du spectre cinématographique et intellectuel.

Quelques couples, amis, enfants passent plusieurs semaines dans une maison de vacances dans le sud. Mots croisés à la plage, discussions, déjeuners, fêtes et autre virées en bateau constituent le programme de ces jours suspendus. L'intrigue est porté à son minimum, l'auteur se contentant d'enchainer les situations, dont les liens se font par la récurrence des personnages. A nous d'observer aux côtés de l'auteur les relations humaines, les idées sur l'amour et le couple, sur les la consommation, sur les enfants, sur le travail qui sont évoqués, l'aliénation des uns par rapports aux autres, des individus par rapport à la société. C'est donc ainsi une posture sociologique, anthropologique presque, qu'adopte l'auteur, essayant de construire un portrait des classes moyennes françaises, alors en pleine période d'opulente insouciante. L'ensemble des acteurs étant amateurs, une légère étrangeté surgit parfois, mais la force naturaliste des plans fixes en noir et blanc, bien composés et distanciés, fini par remporter mon adhésion.

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Mirch Masala - Ketan Mehta - 1987

Un petit "seigneur" local, un groupe de femmes ouvrières, un village dans le désert, un point d'eau (point de croisement), tels sont les éléments très schématiques qui font se rapprocher Mirch Masala de la forme du conte. Et c'est par ce choix que le discours féministe et progressiste du film résonne avec autant de force dans ses derniers instants, rendant universel la lutte portée à l'écran. L'image finale, transformant la production de leur travail (de la poudre de piment, fameux "mirch" du titre si je ne m'abuse) en arme de victoire commune, est ainsi particulièrement géniale.

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The Seventh Horse Of The Sun - Shyam Benegal - 1992

Un groupe d'ami écoute les histoires d'amours raconté par l'un des leurs. Au fil de nombreux flash-back nous apprenons les points de vues des divers personnages de l'histoire, jusqu'à ce que tout se mélange avec le présent de la narration. Faisant d'un des thèmes centraux du cinéma indien (les rapports amours et politiques, ici des relations à la lutte des castes/classes), The Seventh Horse Of The Sun est un film ambitieux, m'ayant malheureusement complétement laissé sur le côté, et ce dès le début. Je veux bien admettre que je n'étais pas très en forme mais les plus de 2h du visionnage, et les kitcheries locales typiques, m'ont malheureusement parues interminables.
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asketoner
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J'avais bien aimé moi aussi La Lettre non envoyée de Kalatozov
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groil_groil
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C'est l'avant-dernier Preminger, il a souvent mauvaise côte, mais pourtant c'est un super film, à la production internationale (on y voit Isabelle Huppert et même Georges Beller), ce qui occasionne parfois un jeu d'acteurs un peu recité, figé, tourné en Corse, à Paris, à Berlin, au Liban, et qui est le pendant parfait de son classique Exodus. Rosebud raconte la prise d'otages de 5 jeunes femmes par des terroristes palestiniens qui exigent pour leur libération la fin des rapports du monde occidental avec l'état d'Israël (pour aller vite), ni plus ni moins. Le film se construit comme une grande entreprise de tentative de libération de ces jeunes femmes (deux en sortent vivantes plus tôt, les trois autres restant prisonnières), dans une mise en scène généreuse, inventive, dynamique, à l'image magnifique, qui ne semble pas du tout être l'œuvre d'un cinéaste en fin de carrière.
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sokol
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groil_groil a écrit :
lun. 17 oct. 2022 14:42
. Ce qu'il y a de génial dans ce film c'est avant tout Léa Seydoux, qui n'a jamais été aussi juste et aussi belle (c'est dingue comme elle semble être réelle dans ce film, on a l'impression de la connaitre, et fou aussi comme les cheveux courts lui vont bien)
J'ai eu le même sentiment en regardant Isabelle Huppert dans son "L'avenir" (actrice que d'habitude je n'aime pas, tout comme Léa Seydoux). Ce qui montre que MHL ne fétichise pas ses actrices et du coup, elle les filme pour de vrai.
Modifié en dernier par sokol le mar. 18 oct. 2022 10:10, modifié 1 fois.
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
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groil_groil a écrit :
lun. 17 oct. 2022 14:42
C'est du cinéma de droite décomplexée, catho, réac, militaire friendly, une sorte de tract parfait pour la NRA, qui considère tout étranger (et qui plus est s'il vient du Moyen Orient) comme un métèque, mais malgré cela, j'ai trouvé des qualités au film.
C'est marrant car à l'époque, le film a été vendu comme ultra progressiste (donc de gauche), anti-guerre etc etc. Mon cinéma l'avait mis en couverture en vantant ses qualités anti-guerre en Irak etc etc.
C'est un mélo, si je me souviens bien, assez "bien fait"
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groil_groil
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sokol a écrit :
mar. 18 oct. 2022 10:02
groil_groil a écrit :
lun. 17 oct. 2022 14:42
. Ce qu'il y a de génial dans ce film c'est avant tout Léa Seydoux, qui n'a jamais été aussi juste et aussi belle (c'est dingue comme elle semble être réelle dans ce film, on a l'impression de la connaitre, et fou aussi comme les cheveux courts lui vont bien)
J'ai eu le même sentiment en regardant Isabelle Huppert dans son "L'avenir" (actrice que d'habitude je n'aime pas, tout comme Léa Seydoux). Ce qui montre que MHL ne fétichise pas ses actrices et du coup, elle les filme pour de vrai.
:jap:
oui c'est une certitude.
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groil_groil
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sokol a écrit :
mar. 18 oct. 2022 10:09
groil_groil a écrit :
lun. 17 oct. 2022 14:42
C'est du cinéma de droite décomplexée, catho, réac, militaire friendly, une sorte de tract parfait pour la NRA, qui considère tout étranger (et qui plus est s'il vient du Moyen Orient) comme un métèque, mais malgré cela, j'ai trouvé des qualités au film.
C'est marrant car à l'époque, le film a été vendu comme ultra progressiste (donc de gauche), anti-guerre etc etc. Mon cinéma l'avait mis en couverture en vantant ses qualités anti-guerre en Irak etc etc.
C'est un mélo, si je me souviens bien, assez "bien fait"
en fait c'est hyper ambigu. le film critique ça, la guerre etc., tout en en faisant l'apologie en sous-texte, c'est un drôle de positionnement, mais en même temps ça rend le film intéressant.
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Tamponn Destartinn
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L'innocent - Louis Garrel

Incroyable surprise. C'est mon premier film de Louis Garrel réalisateur et il faut absolument que je mate les précédents (même si on m'a dit clairement que celui ci est son meilleur de loin).
Bref : qu'est-ce que j'ai ri ! C'est très bien écrit, très bien joué. Il n'y a que la première scène que je trouve un peu foiré dans son rythme, mais ensuite c'est d'une maitrise absolue. On se marre jusqu'à arriver au climax comique, le "braquage", où les deux personnages principaux doivent jouer une dispute de couple pour attirer le regard d'un routier. Et là, l'écriture devient vraiment remarquable, car non seulement on se marre encore plus, mais petit à petit, la scène fait exploser ce qui n'était que sous jacent jusqu'alors. Les deux acteurs sont au meilleur de leur art (Garrel, qui sait se diriger comme personne, et Noémie Merlant, révélation comique inattendue tellement elle me paraissait chiante comme la pluie !). Les autres sont tous très bien aussi. Quant à la mise en scène, elle arrive à bien digérer des ref comme Brian DePalma ou Vertigo, qui sont pastichées, jamais parodiées et surtout jamais gratuite. Je ne comprends juste pas le parti pris d'étallonnage (l'image est contrastée sa mère !) mais ça reste une comédie française pas moche visuellement, ce qui est toujours un petit évènement en soi.
Je pourrais presque le mettre top 1 de cette année. Je me demande si ce n'est pas par snobisme que je me l'interdis ?


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Tori et Lokita - les Dardenne

Déjà 3 critiques excellentes sont lisibles ici et je n'ai rien à ajouter.
Juste un : l'énergie de Tori est très empathique mais surtout est un élément permettant d'éviter le misérabilisme. Pour moi, les Dardenne sont ici à leur meilleur, ils enchainent les exploits invisibles. Par exemple : faire une force de ce qu'on pourrait habituellement leur reprocher. Le film est didactique, et alors ? Comme le dit asktoner, la démonstration est implacable, donc elle est réussie. Les Dardenne n'ont pas de temps à perdre, il n'y a pas de gras. Par contre, il n'y a pas de tricherie non plus. Donc quand Tori doit pénétrer dans ce batiment, on montre chaque étape. C'est important pour croire en ce qu'on voit. Là où l'ellipse pour les scènes de viols est la meilleure chose à faire. Les Dardenne maitrisent leur narration comme jamais.


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L'origine du Mal - Sébastien Marnier

Sur ce coup, Marnier se la joue total Claude Chabrol avec une moustache.
C'est très bien, notamment grâce à 4 actrices formidables (Calamy en tête, mais aussi Tellier, Blanc et Weber). Les rapports de force, de classe, les humiliations perverses, tout cela est montré avec beaucoup d'intelligence. Je pense juste qu'il y a un gros problème de rythme. Je me suis ennuyé à des moments. Il y a beaucoup de pistes narratives lancées, et plusieurs ne servent pas à grand chose au final. Un récit resserré aurait vraiment fait du bien. Autrement dit, c'est le genre de film qui doit faire 1h40 max, pas 2h05. Le meilleur exemple pour moi est le personnage de Suzanne Clément. Indispensable sur le papier, permettant un sursaut dans l'intrigue à la Gone Girl, elle m'a cependant paru être le plus gros point faible du film, jusqu'au final moins fort que ce qu'il aurait pu être. Pour moi, l'espace qu'elle prend est soit trop, soit pas assez. Elle est dans un entre deux, ça manque d'un parti pris fort sur le point de vue, et ça amène un faux rythme. Le film est bien quand même, hein. Mais j'insiste là dessus car c'est la seule raison qui m'amène à ne pas en faire un des plus grands films français de l'année.
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groil_groil
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Tamponn Destartinn a écrit :
mer. 19 oct. 2022 11:19

Je pourrais presque le mettre top 1 de cette année. Je me demande si ce n'est pas par snobisme que je me l'interdis ?
il ne faut jamais s'interdire ce genre de sentiment, c'est d'ailleurs ainsi que j'ai mis le Dardenne en top 1
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groil_groil
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Le message de Tamponn me fait repenser à quelque chose que je voulais dire à propos de Tori & Lokita et que je n'ai pas dit. J'ai été très choqué par les enquêtes lues dans le Monde sur l'envers de l'industrie pornographique française qui sont tombées récemment, à la fois sur celle concernant Jacquie & Michel et l'autre sur deux producteurs véreux dont les noms m'échappent, bref, les mecs organisaient de vraies trafics de prostitution, les filles étaient violées, torturées, sans aucun recours possible, etc... Et en fait, quand Lokita accepte un job dont on ignore tout, et qu'on la voit partir pour une destination inconnue et qu'on découvre de nuit cet affreux bâtiment de parpaings, sans fenêtre aucune, j'étais persuadé qu'elle avait été vendu pour un gangbang ou une atrocité de ce genre. ça m'a littéralement glacé le sang, d'autant que les Dardenne ne mettent heureusement pas de pathos dans cette scène (ni ailleurs) et qu'on est simplement confronté au trajet et à un lieu qui d'un coup nous est rendu visible, sans qu'il soit mis en valeur, d'une manière ou d'une autre. C'est donc à nous de projeter ce qu'on veut sur ce lieu, et moi j'ai imaginé cela terrifié par ce que je venais de lire... Et quand j'ai vu que ce n'était pas ça mais un élevage de cannabis, j'ai été dans un premier temps presque rassuré que ce soit moins grave que ce que j'avais redouté, mais très vite cette peur permanente du lieu m'est revenue et a imprégné chacune des scènes s'y déroulant. Ce lieu était perverti, comme peuvent l'être certains lieux des films de Lynch, dont la seule évocation peut suffir à glacer le sang. Bref, c'est l'un des lieux les plus terrifiants et anxiogènes que j'ai vu au cinéma. Et quand le petit Tori veut rejoindre Lokita son entrée dans ce lieu, je l'ai vécu comme une vraie descente aux Enfers, et j'avais vraiment l'impression de vivre ça avec lui. Et comme tu le dis Tamponn, tout ça est aussi rendu possible par le fait que les Dardenne filment le trajet, le déplacement, l'entrée, chaque geste, chaque étape (un peu comme sont filmés les trajets dans Secret Défense de Rivette), et que ces scènes nous permettent de vivre littéralement avec les personnages.
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asketoner
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Les Funérailles des Roses, Toshio Matsumoto, 1969

Un très bel hommage à Jean Genet, fait par un fan de Jonas Mekas.
D'ailleurs Jonas Mekas est cité dans le film. Enfin pas tout à fait, le type qui le cite se trompe, il dit : Jokas Menas. Et les travestis autour de lui disent que oui, c'est bien le cinéma expérimental, mais quand même elles préfèrent la drogue. Alors elles retournent à leur bar favori : le Genet.
Il y a de belles choses, parfois je me suis un peu ennuyé parce que les expérimentations ont pris un coup de vieux, parfois elles tiennent et un plan vient me sidérer, parfois aussi le temps leur a donné un sens qu'elles n'avaient pas forcément à l'époque. C'est un film réalisé sans espoir de faire carrière et ça se voit, ça se sent : un film qui grille toutes ses cartes d'un coup, qui va au bout de l'horreur, au bout de la sophistication, au bout de sa propre impasse.
A un moment, il y a une interview de l'acteur principal, dont c'est le premier film. Il dit qu'il a accepté le rôle parce qu'il aimait bien l'univers des travestis, mais qu'il n'appréciait pas trop l'histoire d'inceste à la fin. Et c'est vrai, cette histoire est de trop, c'est une fabrication. Mais comme le héros lui-même l'a dit, on la regarde autrement. On s'en détache et on la voit pour ce qu'elle est : une histoire pour un film, où les gens ont l'air de s'être bien amusés.
(Je ne serais pas étonné que La Rivière de Tsai Ming-Liang soit un remake de ces Funérailles des Roses... Même si l'histoire d'Oedipe ne date pas de 1969, le rapport est évident.)
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Tamponn Destartinn
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groil_groil a écrit :
mer. 19 oct. 2022 14:11
Et quand le petit Tori veut rejoindre Lokita son entrée dans ce lieu, je l'ai vécu comme une vraie descente aux Enfers, et j'avais vraiment l'impression de vivre ça avec lui.
Oui, pareil.
Je me disais vraiment "mais comment il va se sortir de là ?".
Le sentiment qu'une dinguerie va leur tomber dessus est permanent. Et ça amène un décale entre nous spectateurs et eux. Car ils en ont tellement vu et vécu qu'ils ne vivent pas le danger comme nous. Sans pour autant être inconséquents, ils ont d'assez bons réflexes tout du long. Bref, ce décalage est aussi ce qui rend le film intéressant. Et qui fait que, contrairement à ce que dit Sokol, je reverrais bien le film une seconde fois. Libéré de ce suspens permanent, c'est un autre film, qui doit être aussi passionnant à voir.
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sokol
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Tamponn Destartinn a écrit :
mer. 19 oct. 2022 19:02
Car ils en ont tellement vu et vécu qu'ils ne vivent pas le danger comme nous. Sans pour autant être inconséquents, ils ont d'assez bons réflexes tout du long.
C'est ce que Edward Saïd appelait l'Orientalisme (https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Orientalisme). Mais une fois découvert, il ne lui reste pas grand chose à cet étonnement postcolonial. La preuve : la demande des papiers faite par Tori à la fin du film est une "solution" qui correspond à la ruse (très justement dénoncé par @asketoner ici !) que propose "Merci Patron" de François Ruffin.

ps: cela dit, une bonne nouvelle : Ameur-Zaïmeche (qui propose un cinéma tout le contraire des Dardenne, Ruffin & co.) a présenté au FIFIB de Bordeaux son nouveau long métrage qui s'intitule "Le Gang des bois du temple". Il me tarde de le voir !!
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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sokol a écrit :
jeu. 20 oct. 2022 13:49
Tamponn Destartinn a écrit :
mer. 19 oct. 2022 19:02
Car ils en ont tellement vu et vécu qu'ils ne vivent pas le danger comme nous. Sans pour autant être inconséquents, ils ont d'assez bons réflexes tout du long.
C'est ce que Edward Saïd appelait l'Orientalisme (https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Orientalisme). Mais une fois découvert, il ne lui reste pas grand chose à cet étonnement postcolonial. La preuve : la demande des papiers faite par Tori à la fin du film est une "solution" qui correspond à la ruse (très justement dénoncé par @asketoner ici !) que propose "Merci Patron" de François Ruffin.

ps: cela dit, une bonne nouvelle : Ameur-Zaïmeche (qui propose un cinéma tout le contraire des Dardenne, Ruffin & co.) a présenté au FIFIB de Bordeaux son nouveau long métrage qui s'intitule "Le Gang des bois du temple". Il me tarde de le voir !!

J'ai vu des petits bouts du film de RAZ, c'est sublime, crois-moi.
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sokol
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B-Lyndon a écrit :
jeu. 20 oct. 2022 14:48

J'ai vu des petits bouts du film de RAZ, c'est sublime, crois-moi.
:love:

Je voulais le voir ET l'écouter (il allait intervenir à la fin de la projection de son film) mais comme il a tourné au Grand Parc, une cité HLM à Bordeaux, il parait que "tout le monde" qui apparait dans le film allait être dans la salle (rien de mal mais bon, la discution, à coup sur, allait virer au folklore du tournage quoi.. :p ). Donc, je me suis abstenu (puis, j'avais une peur bleue de voir son film dans une salle blindée d'"acteurs" (de figurants quoi) et tout ce qui va avec (bruit, rires... etc etc).

De toute façon, avce RAZ c'est simple : il se plante uniquement quand il fait des films historiques. Le 'reste' ne peut être que passionnant.
Vivement sa sortie !!
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Tamponn Destartinn
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sokol a écrit :
jeu. 20 oct. 2022 13:49
Tamponn Destartinn a écrit :
mer. 19 oct. 2022 19:02
Car ils en ont tellement vu et vécu qu'ils ne vivent pas le danger comme nous. Sans pour autant être inconséquents, ils ont d'assez bons réflexes tout du long.
C'est ce que Edward Saïd appelait l'Orientalisme (https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Orientalisme). Mais une fois découvert, il ne lui reste pas grand chose à cet étonnement postcolonial. La preuve : la demande des papiers faite par Tori à la fin du film est une "solution" qui correspond à la ruse (très justement dénoncé par @asketoner ici !) que propose "Merci Patron" de François Ruffin.

ps: cela dit, une bonne nouvelle : Ameur-Zaïmeche (qui propose un cinéma tout le contraire des Dardenne, Ruffin & co.) a présenté au FIFIB de Bordeaux son nouveau long métrage qui s'intitule "Le Gang des bois du temple". Il me tarde de le voir !!


Je vois très bien ce qu'est l'Orientalisme, mais c'est un procès d'intention que je trouve injuste dans ce cas précis.
C'est marrant, parce que j'aurais pu le faire pour leur précédent film, Le jeune Ahmed. Là, non. Une jeune femme venant d'Afrique demande aux Occidentaux des papiers pour vivre légalement ici, parce que très concrètement ça lui permettrait d'obtenir un travail légal, elle ne les obtient pas, l'amenant à d'autres voies qui vont mal finir. Donc pour moi, la remarque de Tori est juste un africain qui ne comprend pas pourquoi les occidentaux n'ont pas voulu donner de papiers à Lokita, c'est un cas très concret et volontairement éloigné des préoccupations classiques des occidentaux quand ils se posent la question de légaliser ou non les sans papiers.
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asketoner
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La débrouillardise du gamin est la même que celle de tous les autres personnages d'enfant des films des Dardenne. Donc ça me semble un peu injuste de parler d'orientalisme.
D'autant que les Dardenne semblent faire très attention à ce sujet. La chanson que les enfants chantent n'est pas une chanson "de leur pays", mais une chanson italienne, à l'endroit de leur rencontre. On peut trouver ça bien-pensant peut-être, mais c'est surtout bien pensé je trouve : comment faire exister tous les lieux de l'exil, et pas seulement le pays perdu ?
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B-Lyndon
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Eo, Jerzy Skolimowski, 2022.

Dans la profusion d'images et de sons, parfois étonnante et vivifiante, parfois pataude et clippesque, que le film orchestre ; quelques moments me semblent touchés par la grâce. Jamais de ma vie je n'oublierai ce plan où la caméra, enfermée avec l'âne Eo dans le petit compartiment d'un train, rêve d'évasion en voyant passer dehors une horde de chevaux sauvages à travers la lande. C'est comme si l'âne regardait ses frères chevaux et se disait : pourquoi, moi, l'âne, je suis moins libre qu'eux, moins flamboyant qu'eux ? L'injustice qu'une espèce peut éprouver quant à la mystérieuse beauté d'une autre espèce est un sentiment que je n'avais jamais vraiment vu représenter au cinéma, et Skolimowski me le raconte avec un âne, quelques chevaux, c'est assez bouleversant. Jamais non plus je n'oublierai ce moment où le film délire, et où la caméra harnachée à un drone se balade au dessus d'une forêt brumeuse. A cet instant, le monde n'est plus que teinté d'une seule couleur, rouge. Le film, dangereux et limite, est rentré dans l'œil de l'âne, le film voie rouge. Ces deux moments sont représentatifs de ce que le film a de meilleur : pas de psychologie, pas de contemplation, surtout pas de pose, mais une voracité, je devrais dire une faim, de saisir le monde à travers ses éléments les plus primaires : les lacs, les forêts, la montagne, la brume, les ânes, les chiens, les cochons, les vaches...Skolimowski, c'est là sa force limite, a 84 ans, n'a plus de temps à perdre, n'observe pas mollement mais dévore littéralement la nature, à pleines dents, avec générosité, plaisir et désespoir. Ce geste là m'émeut infiniment, c'est l'œuvre d'un vieux cinéaste qui n'a pas renoncé à pétrir et remodeler la matière du monde, à considérer qu'il est encore un rêve à accomplir, un idéal à restituer. Il y a ici une puissance antinaturaliste pure, sauvage et affirmée, qui n'est pas toujours mais parfois politique. Il y a tant à voir de l'âne en regardant son œil, mais tant du monde à voir en partant de ce même œil, forme sphérique que Skolimowski fait circuler dans le film avant beaucoup de beauté. A cet endroit, le film me paraît très inspiré, bien que parfois un peu balourd. Car cette énergie de la mise en scène a tendance à aplatir le geste, à ne le circonscrire qu'à l'hystérie d'un déluge d'inventions formelles, où la distance nécessaire à l'émotion d'un regard porté sur un animal est quelquefois franchie. Pour être plus concret, la liberté de la mise en scène est telle qu'elle s'aventure parfois trop loin, dans la psyché même de l'animal telle que le cinéaste se la représente. Or, c'est peut-être ce qui est le plus déchirant quand on filme un être vivant non-humain : on ne sait pas, non seulement ce qu'il pense, mais comment il pense. Et c'est le regarder faire, bouger, être dans le plan, qui invite à se poser la question. On ne sait pas pourquoi les éléphants se mettent soudainement à s'échapper dans la ville, à la fin de Hatari de Hawks. Mais on sait que c'est leur fuite qui permettra de retrouver la fille que John Wayne a laissé filer, et qui permettra qu'un couple d'humains trop timides puisse se former. Les éléphants y ont-ils pensé ? Mystère, et Hawks de les filmer, plein de malice, content de leur méfait qu'ils ignorent sans doute.

Mais Hawks, s'il s'amuse à courir après les animaux, s'intéresse aussi aux Hommes. Dans Eo, c'est une catastrophe : on dirait que le cinéaste ne sait plus les filmer. Ca pourrait être rassurant d'une certaine manière, seulement si Skolimowski ne s'écharnait pas à constamment revenir vers eux. Dès que les Hommes sont autre chose que des silhouettes, dès qu'ils se mettent à parler, à devenir des personnages, le film s'écroule. A quoi bon orchestrer une telle symphonie panthéiste si c'est pour souscrire, dès le retour de ses semblables dans le plan, à un imaginaire aussi cliché, aussi ringard et affecté ? Les rugbymen sont obèses et virilistes, le conducteur de poids-lourd porte un marcel troué, est musclé, tatoué, lourd avec les filles, écoute du punk nul et bien entendu arbore une tête de mort à l'avant de son camion ; et par dessus tout, l'apparition d'Huppert en comtesse décadente est invraisemblable. On ne comprend rien à ce qu'elle fait, à ce qu'elle dit , pourquoi elle est là, la scène est piteusement écrite, mal jouée et ne sert à rien. En voyant le drapeau de l'Europe arboré dans le générique, je me suis dit qu'un film d'un vieux réalisateur ayant pour personnage principal un âne devait être tellement difficile à financer que la caution Huppert avait dû leur apporter quelques sous. Du reste, on sent qu'Eo est un film « européen », pas vraiment ancré quelque part, que le foisonnement formel devient parfois celui d'un pudding. Quand le film se trouve, on est dans un cinéma puissant, habité. Quand il se trompe, on tombe dans le clip. Rarement vu un film, aussi brutalement inspiré formellement, s'égarer parfois autant, et même, pourrait-on dire, trahir son noble et puissant pacte de cinéma.
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Tyra
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Je n'ai pas encore vu le film, mais ta critique devance point par point ce que je craignais. J'ai toujours eu un sentiment mitigé face au Balthazar de Bresson, trouvant les scènes avec les humains assez ratées ou inutiles, n'amenant que frustration tant c'était le parcours de l'âne que je voulais voir. J'espérais que Skolimowski répare un peu tout ça en replaçant l'âne au centre...
Et si en plus il ajoute un anthropomorphisme mal venu...
:sweat:
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sokol
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asketoner a écrit :
jeu. 20 oct. 2022 20:25
La débrouillardise du gamin est la même que celle de tous les autres personnages d'enfant des films des Dardenne. Donc ça me semble un peu injuste de parler d'orientalisme.
Tout à fait ! Je n’ai pas parlé d’orientalisme de la part des frères mais de notre orientalisme !
Pas de souci, les frères sont dans leur droit (droit dans leurs bottes quoi : cathos, donc Levinassien à mort !). Humaniste quoi
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B-Lyndon
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Tyra a écrit :
ven. 21 oct. 2022 09:44
Je n'ai pas encore vu le film, mais ta critique devance point par point ce que je craignais. J'ai toujours eu un sentiment mitigé face au Balthazar de Bresson, trouvant les scènes avec les humains assez ratées ou inutiles, n'amenant que frustration tant c'était le parcours de l'âne que je voulais voir. J'espérais que Skolimowski répare un peu tout ça en replaçant l'âne au centre...
Et si en plus il ajoute un anthropomorphisme mal venu...
:sweat:
Je n'ai pas vu le film de Bresson, mais j'ai quand même l'impression que la forme bressonienne, épurée et attentive, rend quand même mieux justice à la matière que celle de Skolimowski, qui parfois me laisse sur le carreau. Hâte de te lire sur le film en tout cas, j'essaie de dire dans mon petit texte que le film reste un objet très stimulant.
Pour l'anthropomorphisme, j'avoue ne pas être encore tout à fait sûr de mon fait...d'ailleurs, le plan des chevaux au début dont je parle relève peut-être un peu de ça...pourtant, j'adore.
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Journal d'un voleur à Shinjuku, Nagisa Oshima, 1969

Un autre hommage à Jean Genet, plus direct que les Funérailles des Roses, très chic, très pop. Je n'ai jamais été très sensible au cinéma d'Oshima. Quand c'est beau, ça ressemble à des images de mode. Et sinon, l'ennui me gagne.
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yhi
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asketoner a écrit :
sam. 22 oct. 2022 22:58
Je n'ai jamais été très sensible au cinéma d'Oshima.
As-tu vu La pendaison et/ou La cérémonie ?
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asketoner
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Non pas du tout. J’avais plutôt aimé les contes cruels du soleil mais il y a quelque chose chez lui qui me laisse indifférent même quand c’est bien
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cyborg
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Une superbe version restaurée fut disponible en streaming pendant une semaine, excellente occasion pour revoir ce classique découvert il y a des années.
Dans mon souvenir le film était beaucoup plus austère, il m'a paru cette fois d'une folle puissance poétique. Les plans, très simples, se concentrent toujours sur un seul élément à la fois. Mais chaque plan, et ce qu'il représente, semble vouloir s'échapper de lui même, être tenté par une radicale ouverture. Ceci grâce au splendide sens du montage de Pollet, jouant de correspondances de formes, couleurs, textures... Les ruines se jouent des techniques modernes, le corps endormi de la jeune femme se confond avec une statue : ici le temps n'est plus qu'un et Fernand Braudel semble se tenir en embuscade.
D'un côté l’Égypte, de l'autre la Grèce. Au milieu, un homme sur un bateau, l'espace de la mer méditerranée, le temps. Et ce sont tous les possibles du cinéma qui nous sont ici offerts.


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Pas de ponctuation dans le titre : absence de point, ni simple, ni d'interrogation ou d'exclamation. Parfait jeu de langage pour ce film atonal, plongé dans une torpeur généralisée dans lequel on ne sait jamais totalement ce qu'on est en train d'y voir : rêve dans des rêves ou hallucination consciente ? Peu importe.
Au cœur de l'été, Nicole, début de 20aine, squatte la maison familiale à l'occasion d'un voyage de ses parents. Elle y traine avec une amie et y côtoie son frangin occupé à enregistrer une album de rock avec son groupe dans le salon de la demeure. Petit boulot, flirt et dégustation de glace donnent forme à ce temps qui s'écoule mollement.
La crise de l'entrée dans l'age adulte ressemble ici à une crise d'angoisse climatisée, ponctué d'un délicieux surréalisme drôlatique. Jamais la notion "d'inquiétante étrangeté" semble avoir été aussi bien porté à l'écran.
L'eau (de la piscine) et l'air (travaillé par le son du groupe de rock) sont les ingrédients centraux du film, lui donnant cette surprenante impression d'onde et d'illusion du mouvement. Il n'est ainsi pas surprenant que ce soit la rencontre de ces deux éléments (la grosse caisse jetée dans le bassin) qui provoque -enfin ?- l'explosion finale du film.

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Grande joie d'avoir découvert ce Godard sur grand écran en superbe copie 35mm.
"Un plus un" : probablement le titre le plus programmatique de toute la filmographie de Godard, transformant le point central de son travail (le montage) en formule simplissime (mettre un élément à côté d'un autre élément, qu'est ce que ça crée ?).

Le résultat proposé n'a lui, par contre, rien de simple.
Tout d'abord car le contenu du film ne ressemble pas à du Godard : il utilise à foison de plans séquences étirés jusqu'à l’extrême, forme peu caractéristique de son cinéma.
D'un côté les Stones en studio, en pleine création d'un nouveau morceau. De l'autre de jeunes activistes noirs préparant "la révolution".
En les filmant exactement de la même façon, Godard semble nous demander si écrire un morceau de rock et écrire un discours révolutionnaire reviens à la même chose, ces deux gestes et processus s'équivalent t-il ? Mais comment, pour qui et pour quoi ?
Les quelques autres plans plus surprenant qui ponctuent le film (une longue interview d'une jeune femme frisant le ridicule, un passage chez des nazillons amateurs de pop-culture...) ainsi que les étranges voix-off érotico-politique qui s'y superposent, ressemblent fort à des tentatives "situationnistes", critiquant et détournant les images, formes et discours préfabriqués par la société du spectacle. Une manière d'orienter la réponse que pose cette équivalence entre création d'une chanson pop et la formation d'un groupuscule révolutionnaire....
Je me permet de revenir précisément sur le choix du "plan-séquences" comme outil central de l’œuvre : ceux-ci permettent d'unifier totalement les personnes à l'écran à l'inverse d'un classique montage qui, forcément, les juxtapose et les sépare. Ainsi les partie docu dans le studio sont magnifiques, Godard se permettant d'inclure dans les images les assistants, techniciens présent sur place et de leur donner autant de valeur que les "stars" qu'il filme, leur rendant leur place essentiel dans la création en cours

On sent ainsi que Godard est à une période charnière de son œuvre et de son processus créatif, semblant comprendre d'une part que le cinéma peut "accueillir" d'autres arts, mais aussi que le cinéma peut-être politique "au premier degré" et saisir le monde pour le transformer, notamment par la façon dont il est fabriqué. Le très beau Week-End n'est pas si loin, mais la forme narrative n’intéresse plus vraiment l'auteur, dont l'esprit semble déjà orienté vers les questions qui composeront sa décennie 70s (le groupe Dziga Vertov...).
Le film est donc pour moi terriblement excitant, mais je le réserverai avant tout aux initiés...



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Affettuosa presenza - Piavoli

Une voix off lit la correspondance entre le poète Alessandro Parronchi et le sculpteur Umberto Bellintani, sur des images de la nature italienne.
Certes les textes sont beaux et les paysages également, mais trop peu de choses apparaissent de cette alliance pour vraiment me convaincre.
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cyborg
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Je vois pas mal de films ces temps-ci et j'en ai oublié quelques uns dans mon précédent post...

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Première réalisation de Manoel de Oliveira, un court-métrage documentaire sur la Douro et plus précisément la partie traversant la ville de Lisbonne.
Film assez courant pour l'époque, entre les "portraits de ville" (ici sur une zone plus réduite néanmoins) typique dans le cinéma européen d'alors et les expérimentations du montage soviétique, tout en prenant le temps par moment d'observer les êtres et les choses un peu plus posément.
Le résultat est convaincant, d'autant qu'Oliveira filme à une période (le film date de 1932) intéressante ou semblent se mélanger deux époques de l'industrie : les forces animales et mécaniques cohabitent ici sur de nombreux plans.

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10 ans plus tard, De Oliveira réalise son premier long métrage. Il retourne sur les bords de la Douro et y filme une bande d'enfants préférant faire l'école buissonnières et les 400 coups que d'aller en classe. Jeux, bluettes, rivalités, maigres larcins composent leur quotidien jusqu'à l'arrivée d'un drame profond.
Un film simple mais juste grâce à son regard à taille d'enfant et la complexité des émotions y étant explorées. Côté réalisation on n'atteint pas encore les sommets de A Çaca (20 ans plus tard, il est vrai...) mais on sent déjà une grande maitrise et audace (durant la scène de cauchemars, par exemple) de la part de De Oliveira

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A l'heure ou la DV faisait encore ses premiers pas (2003), Isild Le Besco en saisit toutes ses virtualités et sa virevoltante simplicité d'utilisation pour coller au plus près de son sujet : 3 enfants délaissés par leurs parents et livrés à eux même dans leur vie quotidienne.
Si l'on a sans doute rarement aussi bien saisi l'énergie et l'esprit d'un enfant errant au grès d'une ville, l'absence d'une toute petite structure d'ensemble, ou même d'un quelconque trait scénaristique, peine à rendre le film captivant sur toute sa durée -pourtant courte, 1h à peine.



et du coup je rajoute ce que j'ai vu ce soir

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Lorsqu'est abordé le sujet de la SF au cinéma au tournant du nouveau millénaire, Avalon est souvent cité en rapport avec Matrix. Les deux films présentent en effet de troublantes ressemblances, mais la comparaison s'arrête là. Les pistes de réflexions ouvertes par le film de Wachoski étant beaucoup plus riches, solides et maitrisés qu'il éclipse le film de Oshii.
Avalon à pour lui d'être peut-être encore plus étrange dans son projet global, mené par une équipe japonaise et tourné en Pologne (et en polonais), et doté d'un univers pictural tellement marqué que le film réussit à ne pas avoir l'air vieillot malgré les 2 décennies qui nous sépare de sa sortie. Étrangement c'est presque la partie finale (dans "le monde réel") qui finit par dénoter le plus. L'ensemble reste néanmoins assez peu captivant dans ses personnages et les enjeux qu'ils prétendent mettre en place. Dommage.
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sokol
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Voici ce que Uzal a écrit dans le blog des Cahiers au moment de la sortie du film des frères Dardenne à Cannes, en mai. Il résume exactement ce que je voulais dire aussi à propos de ce film :

https://www.cahiersducinema.com/actuali ... -dardenne/
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Soit un des films que j'attendais le plus cette année, mais au fond je ne sais plus très bien pourquoi, le pitch ne pouvant finalement n'aboutir qu'à un film neuneu : un âne paisible et triste fait l'expérience de la brutalisation de la société.
C'est une fable animalière ahurie, qui aurait pu sommeiller sur l'étagère d'une classe de maternelles pour montrer des animaux aux enfants une veille des vacances de la Toussaint. Mais Skolimowski ne veut pas que ce soit le destin du film, alors il l'enrobe d'un vernis expérimental. Mais qui n'expérimente rien : l'expérimental, pour Skolimowski, c'est des effets sonores pompiers, une photographie au filtre rouge, des images avec un prisme déformant.
C'est aussi un film extrêmement inspiré en termes d'idées de mise en scène, dont voici un petit florilège :
- La grande idée de Skolimowski, c'est que la forêt la nuit, c'est un peu la boite de nuit des animaux. L'âne rencontre des loups et un hibou, et soudain des lasers verts irriguent le champ avec de la musique électro à donf (sans rire). Les lasers verts de boite de nuit se transforment en tirs de blasters qui abattent un loup : la chasse, c'est mal (la forêt est un espace de fête mais aussi le lieu de tous les dangers) !!
- Un travelling aérien au-dessus de champs et forêts (histoire de tenter de choper un prix de la mise en scène) : des éoliennes entrent dans le champ, la caméra imite alors le mouvement de rotation des éoliennes.

Personnellement, je suis sorti quand l'âne regarde un match de foot et gratte le sol lorsqu'un joueur marque un but.
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Eros + Massacre, Yoshishige Yoshida, 1969


On dirait un Bertolucci... Il y a de bonnes scènes mais elles sont perdues dans un ensemble à la fois très pédant et très bête, d'une superficialité pénible à force, et d'une suffisance dingue. C'est simple : le film ne veut pas s'arrêter.
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asketoner a écrit :
mar. 25 oct. 2022 00:19
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Eros + Massacre, Yoshishige Yoshida, 1969


On dirait un Bertolucci... Il y a de bonnes scènes mais elles sont perdues dans un ensemble à la fois très pédant et très bête, d'une superficialité pénible à force, et d'une suffisance dingue. C'est simple : le film ne veut pas s'arrêter.
purée qu'est-ce que j'avais souffert... C'est ça, ça ne s'arrête jamais comme si le type pensait bêtement : plus mon film sera long plus il sera considéré comme un film d'auteur...
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sokol a écrit :
lun. 24 oct. 2022 14:16
Voici ce que Uzal a écrit dans le blog des Cahiers au moment de la sortie du film des frères Dardenne à Cannes, en mai. Il résume exactement ce que je voulais dire aussi à propos de ce film :

https://www.cahiersducinema.com/actuali ... -dardenne/
'tain t'en es venu à citer les Cahiers nouvelle formule, c'est vraiment que t'es à court d'argument mon ami :D :lol:
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Mr-Orange a écrit :
lun. 24 oct. 2022 16:05
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Soit un des films que j'attendais le plus cette année, mais au fond je ne sais plus très bien pourquoi, le pitch ne pouvant finalement n'aboutir qu'à un film neuneu : un âne paisible et triste fait l'expérience de la brutalisation de la société.
C'est une fable animalière ahurie, qui aurait pu sommeiller sur l'étagère d'une classe de maternelles pour montrer des animaux aux enfants une veille des vacances de la Toussaint. Mais Skolimowski ne veut pas que ce soit le destin du film, alors il l'enrobe d'un vernis expérimental. Mais qui n'expérimente rien : l'expérimental, pour Skolimowski, c'est des effets sonores pompiers, une photographie au filtre rouge, des images avec un prisme déformant.
C'est aussi un film extrêmement inspiré en termes d'idées de mise en scène, dont voici un petit florilège :
- La grande idée de Skolimowski, c'est que la forêt la nuit, c'est un peu la boite de nuit des animaux. L'âne rencontre des loups et un hibou, et soudain des lasers verts irriguent le champ avec de la musique électro à donf (sans rire). Les lasers verts de boite de nuit se transforment en tirs de blasters qui abattent un loup : la chasse, c'est mal (la forêt est un espace de fête mais aussi le lieu de tous les dangers) !!
- Un travelling aérien au-dessus de champs et forêts (histoire de tenter de choper un prix de la mise en scène) : des éoliennes entrent dans le champ, la caméra imite alors le mouvement de rotation des éoliennes.

Personnellement, je suis sorti quand l'âne regarde un match de foot et gratte le sol lorsqu'un joueur marque un but.
Merci, je le sentais mal, grâce à toi je fais l'impasse ;)
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groil_groil a écrit :
mar. 25 oct. 2022 09:42
purée qu'est-ce que j'avais souffert... C'est ça, ça ne s'arrête jamais comme si le type pensait bêtement : plus mon film sera long plus il sera considéré comme un film d'auteur...
Et à la fin, la photo des protagonistes alignés et le personnage qui dit : "ce sera un monument pour les générations suivantes" ! :D L'art d'avancer à visage découvert, sans la moindre humilité. (J'avais envie de demander à Yoshishige Yoshida : mais si tu voulais faire un monument pourquoi tu as fait un film ???)
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groil_groil a écrit :
mar. 25 oct. 2022 09:43
'tain t'en es venu à citer les Cahiers nouvelle formule, c'est vraiment que t'es à court d'argument mon ami :D :lol:
Franchement, "nouvelle formule" ou pas, ils continuent à garder l'esprit Cahiers, c'est indéniable (et c'est tant mieux !). La preuve : l'article en question (que bien évidement t'as pas daigné lire :p - pourtant, ça prend 4 minutes ) se référence à Hawks et à sa critique vis à vis du Train sifflera trois fois.
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sokol
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Mr-Orange a écrit :
lun. 24 oct. 2022 16:05
Personnellement, je suis sorti quand l'âne regarde un match de foot et gratte le sol lorsqu'un joueur marque un but.
Et tu n'as pas vu Huppert qui sort directement de "La Belle Endormie" (un film de Bellocchio de 2012 où elle tenait le rôle de "Divina madre") pour jouer 10 ans plus tard le même rôle. Le ridicule ne tue pas, bien sur :lol:
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
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groil_groil
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sokol a écrit :
mar. 25 oct. 2022 12:01
groil_groil a écrit :
mar. 25 oct. 2022 09:43
'tain t'en es venu à citer les Cahiers nouvelle formule, c'est vraiment que t'es à court d'argument mon ami :D :lol:
Franchement, "nouvelle formule" ou pas, ils continuent à garder l'esprit Cahiers, c'est indéniable (et c'est tant mieux !). La preuve : l'article en question (que bien évidement t'as pas daigné lire :p - pourtant, ça prend 4 minutes ) se référence à Hawks et à sa critique vis à vis du Train sifflera trois fois.
Bon je l'ai lu du coup :D
... C'est tellement scolaire comme point de vue : j'ai eu l'impression de retourner à la fac de ciné tant les arguments sont entendus.
et je pense sincèrement qu'il pourrait dire exactement la même chose en aimant le film et renversant les points de vue, dans il n'est jamais dans le film quand il écrit mais prend comme principe de rester extérieur et d'y apposer sa théorie.
C'est simple, il dit que le film choisit de filmer les salauds, mais il est à 100% du temps avec Tori & Lokita le film, il ne filme rien d'autre. Les salauds sont comme ceux de ET, ils n'existent pas, ils sont à peine filmés.
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groil_groil
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Un homme récupère un appareil photo instantané type Polaroid et se rend compte que les photos qui en sortent viennent d'une autre temporalité, et sont annonciatrices d'événements tragiques. Quelle chance de voir apparaître en dvd ce (télé)film d'Edmond Séchan, grand chef-opérateur (du Ballon Rouge à l'Homme de Rio en passant par la Boum), écrit et interprété par Jean-Claude Carrière. Film passé inaperçu, c'est pourtant l'une de ses plus belles réussites scénaristique, ou l'étrange et le surnaturel se mêlent au quotidien, faisant pensé au Papillon sur l'Epaule, à ses collaborations avec Buñuel, ou plus loin encore à Lost Higway (ici des polaroïds, là une bande vidéo).

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Certes il y a quelques longueurs et quelques numéros d'acteurs en trop, mais c'est quand même une très belle tentative de film post-apocalyptique à la française, genre monopolisé par l'imaginaire US, et il est bon d'en voir une approche différente et originale.

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Passionnante biographie filmée et, je pense, assez fidèle, de l' "enfant terrible" du cinéma allemand, Rainer Werner Fassbinder, qu'on ne présente plus. C'est dingue de voir qu'à si peu de temps d'intervalle peuvent sortir deux films aussi différents (le nanar d'Ozon et icelui) sur la même personne. Pourtant Roehler choisit lui aussi de théâtralisé à outrance chacune des scènes, mais c'est pour mieux saisir tout l'esprit du cinéma de Fassbinder plutôt que d'en livrer une pantomime ridicule comme chez Ozon.

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J'ai suffisamment écrit sur ce chef-d'oeuvre absolu pour ne pas y revenir dans le détail, mais le plaisir est intact, décuplé même, à cette énième vision, la première en HD. Si je ne suis pas complètement convaincu par le master de Carlotta, qui conserve beaucoup trop de grain à mon avis, je suis toujours subjugué par la beauté, la force et la finesse de ce film qui te laisse en larmes à chaque vision. Je crois que je n'ai jamais vu Jane Fonda comme ça, rarement une actrice a été aussi "réelle" dans un film Hollywoodien. Un mot aussi sur la musique, composée uniquement de gros hits rocks, Rolling Stones, Beatles, Doors, etc., et qui est quasiment en continu durant tout le film, mais à volume modéré (le mixage est parfaitement fait d'ailleurs), comme si la radio était branchée en permanence et que nous écoutions la bande son d'époque des personnages. C'est je crois une tentative assez rare de bande son dans l'histoire du cinéma, et c'est parfaitement réussi.

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Je m'attendais à une grosse meringue tendance Visconti du pauvre (surtout que le pauvre Terence Young n'est pas toujours très habile) mais non, c'est plutôt réussi, la durée passe crème, la reconstitution est là, et cette histoire d'amour fou et impossible à la cour d'Autriche qui ne peut que se terminer dans le sang, a le sens du tragique et finit par vraiment émouvoir.

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Nanar à la Guerre des Six Jours, qui ne vaut que pour Sophie Marceau, qui parvient à émouvoir alors qu'elle ne joue pourtant pas très bien.

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Les malins de programmateurs d'Arte diffusent ce film sur les dangers du conflit nucléaire russe... Mais ils sont plus malins que le film, où le clinquant Tony Scott n'a pas assez de place pour faire bouger sa caméra engoncé dans son sous-marin nucléaire et se fait vite chier autant que le spectateur... Et que les acteurs, car même Hackman et Washington, qui sont pourtant deux cadors, sont en deçà de leur potentiel.

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alias LES MAINS D'ORLAC

Je connaissais l'adaptation de Gréville, magnifique, mais j'ignorais que dès 1935, l'excellent Karl Freund, grand réalisateur de fantastique de l'US 30's avait tourné une première version du roman de Maurice Renard. Et cette version de Freund est tout aussi magnifique, terrifiante, belle, concise (1h08, pas de gras !) et superbement mis en scène, avec un Peter Lorre au moins aussi extraordinaire que dans M le Maudit. Merveille !
Modifié en dernier par groil_groil le mar. 25 oct. 2022 15:24, modifié 1 fois.
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sokol
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B-Lyndon a écrit :
jeu. 20 oct. 2022 22:57
L'injustice qu'une espèce peut éprouver quant à la mystérieuse beauté d'une autre espèce est un sentiment que je n'avais jamais vraiment vu représenter au cinéma, et Skolimowski me le raconte avec un âne, quelques chevaux...
A mon humble opinion, il faut que tu lise quelques auteurs (philosophes... etc) de ce qu'on peut appeler "la veine matérialiste" (Épicure, Feuerbach, Spinoza, Engels, ...) car à mon humble opinion (une fois de plus), un animal ne peut éprouver ce genre de sentiment...
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groil_groil a écrit :
mar. 25 oct. 2022 14:06

C'est simple, il dit que le film choisit de filmer les salauds, mais il est à 100% du temps avec Tori & Lokita le film, il ne filme rien d'autre. Les salauds sont comme ceux de ET, ils n'existent pas, ils sont à peine filmés.
Non, il dit surtout que le film, via cet odieux dénouement, a choisi de faire passer le sens de la fable avant la vie des personnages et la grâce des acteurs. Et c'est une crapulerie, emballée dans de bonnes intentions. C'est ça que dit l'article.

Mais tu sais, maintenant je comprends totalement les frères belges : souviens toi, justement ici sur ce forum j'avais exprimé mon étonnement par rapport à la fin de "Rosetta" : la variante qui circule maintenant en VOD ou en DVD (Rosetta, sauvée du suicide par la main tendue et le pardon de son ami) est différente de celle du film présenté à Cannes où elle y parvient (tout comme la Mouchette de Bresson).

Le changement de cette fin de leur film-modèle c'est un peu leur péché originel : tout vient de Rosetta (très beau film d'ailleurs). Mais comme il s’agissait d'un suicide, en terme strictement scénaristique, qu'elle le réussisse ou pas, c’était acceptable (on va dire).
Depuis, les frères se sont amusés à jouer avec ce fameux salut : il(elle)-meurt / il(elle)-ne-meurt-pas, un peu comme on effeuille une marguerite quoi : Cyril ("Le gamin à vélo") tombe d'un arbre mais ne meurt pas; Sandra ("Deux jour, une nuit") fait une tentative de suicide mais elle ne meurt pas non plus. Etc etc etc.

"Bien évidement" qu'on allait arriver un jour à Lokita, puisque Rosetta était déjà rectifiée. Or, ce qui pose problème c'est que, cette fois-ci, ce n'est pas un suicide ! Du coup, même s'ils veulent, les frères belges ne peuvent plus rectifier ! Or, quand on réfléchit, c'est justement cette fois-ci qu'ils devait sauver leur héroïne !! * (et pas faire passer le sens de la fable avant la vie des personnages et la grâce des acteurs).

* à propos de l’héroïne : même si on veut accepter que sa vie n'est qu'une suite d'humiliations et de sévices (et encore mais bon, on peut bien fermer un œil, puisque on a un peu l'habitude avec les Dardenne), travaillant avec un public étranger, je peux te dire que il n'y a pas de telles Lokitas dans la vie, je te garantis (après, si tu veux que je fasse le politiquement correct, ok, pas de souci, mais ce n'est pas la peine qu'on discute, dans ce cas là), tout simplement parce que la vie est bien plus complexe que les schémas réductrices et bien intentionnées des Dardenne. beaucoup beaucoup plus complexe !! (ou ce que les cahiers appelle : l'absence totale de la société chez les frères).
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B-Lyndon
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sokol a écrit :
mar. 25 oct. 2022 15:13
B-Lyndon a écrit :
jeu. 20 oct. 2022 22:57
L'injustice qu'une espèce peut éprouver quant à la mystérieuse beauté d'une autre espèce est un sentiment que je n'avais jamais vraiment vu représenter au cinéma, et Skolimowski me le raconte avec un âne, quelques chevaux...
A mon humble opinion, il faut que tu lise quelques auteurs (philosophes... etc) de ce qu'on peut appeler "la veine matérialiste" (Épicure, Feuerbach, Spinoza, Engels, ...) car à mon humble opinion (une fois de plus), un animal ne peut éprouver ce genre de sentiment...
Je pense que tu as raison, en effet.
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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asketoner
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Pauvres humains et ballons de papier, Sadao Yamanaka, 1937

Un classique du cinéma japonais, paraît-il.
Il s'agit du dernier film de son auteur, avant que celui-ci ne meure de dysenterie en Mandchourie à 29 ans. Le reste de son oeuvre a été détruit.
Ca parle du désespoir lié à la pauvreté. Ca commence par un suicide et ça finit par... deux suicides. Le ton est très mordant, enregistrant la modernité à l'endroit des marges ; la perspective, délibérément sociale.
Je préfère Marcel Carné. Chez Carné il y a les dialogues qui transforment les gens en poèmes, et les plans qui les érotisent. C'est-à-dire qu'on n'oublie jamais, chez Carné, qu'on est au cinéma. Et comme on ne l'oublie pas, on peut l'oublier. C'est paradoxal mais c'est comme ça. Je crois que le cinéma fonctionne de cette façon.
Ici, disons, tout est un peu plus plat. Très rigoureux, assez juste, mais ça ne me suffit pas. Quand un affect éclate, il me semble toujours trop petit. Par exemple, le ballon de papier dans le caniveau à la fin, c'est poignant et délicat, mais c'est un plan tout seul, qui n'entraîne rien d'autre, et donne le sentiment d'une poésie cadrée (donc d'une absence flagrante de poésie dans le reste du film).
Et à Carné, je préfère encore Chaplin, qui trouve le poème dans le corps partagé entre la soumission et la fuite, grâce à la maladresse, cette ruse parfaite de l'âme pour qu'aucun être ne reste à sa place. Ce fabuleux corps contraire du pauvre.
Et Carné, Chaplin et Yamanaka montrent tous les trois, depuis trois continents différents, une détresse à peu près semblable, de trois façons très différentes.
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groil_groil
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Revu avec le fiston qui aime beaucoup Pierre Richard. C'est un bon film, pour un premier Veber s'en tire vraiment bien, car il a une particularité visuelle, ce n'est pas juste une suite de gags, mais en revanche, et c'est une qualité, je crois que c'est l'un des films de Richard les plus plombant, carrément triste par moments.

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Film à sketches réalisé par la bande à Tarantino (4 sketches dont un de lui, un de Rodriguez...) se déroulant dans 4 chambres d'un hôtel dont le fil rouge est un groom joué par Tim Roth. ça faisait des années que je n'avais pas vu quelque chose d'aussi désespérément nul, vide de tout, complètement con et qui plus est arrogant. Une horreur !

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Un assassin ultra massif et masqué d'un sac en papier troué sème la terreur en s'en prenant à des jeunes femmes ou à des couples au hasard. Beau slasher, qui s'inspire sans doute et sans le dire de l'affaire du Zodiac (spoiler : le film se termine sans que le tueur soit démasqué), cette belle pépite exhumée par Rimini traine un peu la patte sur ses scènes de police mais est passionnante lors des scènes de meurtres, faisant montre d'une vraie inventivité de mise en scène.

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Cheerful Wind - Hou Hsiao-Hsien - 1982

Second film du maitre HHH, Cheerful Wind est une petite bluette sans intérêt qui se distingue seulement par une science du cadrage déjà très prononcée et quelques décors in situ bien mis en valeurs (scènes de rues, de ville, de campagne). Sinon rien n'indique ici le cinéaste qu'il deviendra.

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Génial film d'horreur à l'ancienne mais fait aujourd'hui, Barbarian est vraiment flippant, et original dans sa construction, vous emmenant toujours à un endroit que vous n'attendiez pas, sans pour autant perdre de sa cohérence globale. C'est sans doute la meilleure contre-pub qu'on puisse faire à air'b'n'b et c'est tant mieux. Au-delà du côté gore du film, Barbarian se laisse aussi voir comme un film d'auteur, tant sa construction est intelligente, plein de choses sont simplement suggérées, et c'est au spectateur de les reconstituer, sans perdre non plus le plaisir d'être devant une belle série B.

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C'est drôle car sans le savoir j'enchaine Barbarian et Men et les deux films se ressemblent beaucoup, en tout cas partent du même point de départ : une femme seule arrive dans un appartement / une maison isolé(e) qu'elle vient de louer, et il va leur arriver des ennuis sur place. Ici la jeune femme décide de quitter Londres pour s'installer à la campagne après le suicide de son petit ami, qu'elle menaçait de quitter et qui, violent, lui a fait un énorme chantage affectif qui s'est terminé par une défenestration. Le film est signé Alex Garland (auteur d'un roman que j'adore, La Plage, qui n'a pas réalisé le film de son propre roman, mais qui est tout de suite devenu cinéaste quand même), et c'est un film très inquiétant, qui parvient à distiller un constant malaise malgré une apparence calme, presque ambient, liée à cette campagne magnifique et sublimée. Pour peu qu'on rentre dans le film, on se surprend à angoisser sur le moindre détail tant l'attention à construire ce malaise est délicate. La fin du film est gargantuesque, elle n'aurait pas déplu à Brian Yuzna, mais je la trouve magnifique, surprenante, et vraiment originale dans sa mise en scène de la cruauté. Le sujet du film : la violence faite aux femmes, et le fait que celle-ci est partout, en chacun des hommes. En tout cas c'est ainsi que le ressent l'héroïne après l'avoir vécue de son conjoint, et Garland transmet ce sentiment au spectateur de la plus belle des façons qui soient, puisqu'il n'est jamais en train de faire la morale ni de donner de leçon à quiconque, se contentant de nous transmettre, merveilleusement, ce que vit intérieurement cette jeune femme.
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cyborg
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Les amis, j'aurais besoin de votre aide !

Pour un projet radiophonique à venir, je cherche de nombreuses scènes de fêtes dans des films.
Il faut que la musique y soit "diégétique" : venir de la scène (tout en étant plutôt entrainante) + dans l'idéal que l'on y entende les bruits de la fête elle même (bruit de danse, d'objet, même quelques bribes de conversations...).
Si vous avez quelques idées ou même liste en tête, ça m'aiderait beaucoup !
Merci à vous ! :love:
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Mr-Orange
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cyborg a écrit :
sam. 29 oct. 2022 13:37
Les amis, j'aurais besoin de votre aide !

Pour un projet radiophonique à venir, je cherche de nombreuses scènes de fêtes dans des films.
Il faut que la musique y soit "diégétique" : venir de la scène (tout en étant plutôt entrainante) + dans l'idéal que l'on y entende les bruits de la fête elle même (bruit de danse, d'objet, même quelques bribes de conversations...).
Si vous avez quelques idées ou même liste en tête, ça m'aiderait beaucoup !
Merci à vous ! :love:
Il y a sans doute matière à piocher dans le cinéma de Whit Stillman, mais les fêtes y sont assez feutrées. Quelques exemples de scènes (il y en a peut-être qui correspondent davantage à ta demande, mais je ne les trouve pas) :
https://youtu.be/1ARSujv8Ysg (Barcelona, la deuxième moitié de la vidéo)
https://youtu.be/K5EPv_X_bxM et https://youtu.be/oEUGmWlkJZk (Les Derniers jours du disco)
https://youtu.be/_xcicrFIZCU (Metropolitan)

Sinon je pense à la scène finale de Phantom of the Paradise qui part totalement en couilles :D (mais il y a peut être une part d'extradiégétique)
https://www.dailymotion.com/video/xh3cqt

Les nuits de la pleine lune, mais les bruits de pas et de claquements de doigts sont subtils
https://youtu.be/YP5sAihmDgU

Sinon ce fan clip de I'm So Excited est un montage de multiples scènes de fêtes de film, il y a peut-être des idées à piocher dedans :D
https://youtu.be/Yz6hTuK9yBo
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Mr-Orange
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Mr-Orange a écrit :
dim. 30 oct. 2022 09:19
cyborg a écrit :
sam. 29 oct. 2022 13:37
Les amis, j'aurais besoin de votre aide !

Pour un projet radiophonique à venir, je cherche de nombreuses scènes de fêtes dans des films.
Il faut que la musique y soit "diégétique" : venir de la scène (tout en étant plutôt entrainante) + dans l'idéal que l'on y entende les bruits de la fête elle même (bruit de danse, d'objet, même quelques bribes de conversations...).
Si vous avez quelques idées ou même liste en tête, ça m'aiderait beaucoup !
Merci à vous ! :love:
Il y a sans doute matière à piocher dans le cinéma de Whit Stillman, mais les fêtes y sont assez feutrées. Quelques exemples de scènes (il y en a peut-être qui correspondent davantage à ta demande, mais je ne les trouve pas) :
https://youtu.be/1ARSujv8Ysg (Barcelona, la deuxième moitié de la vidéo)
https://youtu.be/K5EPv_X_bxM et https://youtu.be/oEUGmWlkJZk (Les Derniers jours du disco)
https://youtu.be/_xcicrFIZCU (Metropolitan)

Sinon je pense à la scène finale de Phantom of the Paradise qui part totalement en couilles :D (mais il y a peut être une part d'extradiégétique)
https://www.dailymotion.com/video/xh3cqt

Les nuits de la pleine lune, mais les bruits de pas et de claquements de doigts sont subtils
https://youtu.be/YP5sAihmDgU

Sinon ce fan clip de I'm So Excited est un montage de multiples scènes de fêtes de film, il y a peut-être des idées à piocher dedans :D
https://youtu.be/Yz6hTuK9yBo
Maintenant que j'y pense, La Vie au ranch de Sophie Letourneur regorge de ce genre de scènes, aussi, il me semble.
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cyborg
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Merci pour tes suggestions @Mr-Orange !

La scène des nuits de la pleine lune est parfaite pour ce que je cherche, merci !
Tu as bien fait de me la remettre sous le nez car j'avais survolé le film en pensant en trouver une et je l'avais raté ! Super.
Phantom of the Paradise est une bonne piste, je vais creuser.

Stillman en est c'est un peu trop feutré et c'est plus (discussions) dans une ambiance de fête/soirée que de "faire la fête" comme je l'avais en tête.
De même les extraits du montage du clip sont trop proches de scène de chorégraphies, donc ce n'est pas exactement ça non plus dans mon esprit.

Je vais jeter un oeil sur La Vie au Ranch que je n'ai pas vu !



Question complémentaire : j'ai souvenir de quelqu'un qui disait ici que si un réalisateur savait mettre en scène/filmer une bonne scène de fête, alors c'était un bon réalisateur... J'ai rêvé, ou non ? C'est la citation de qqn connu ou juste une idée partagé ici ? Instinctivement je m"adresserai à @sokol car je le vois bien dire un tel truc, mais si qqn d'autre à une idée je suis preneur :D
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Mr-Orange
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cyborg a écrit :
dim. 30 oct. 2022 17:26
Merci pour tes suggestions @Mr-Orange !

La scène des nuits de la pleine lune est parfaite pour ce que je cherche, merci !
Tu as bien fait de me la remettre sous le nez car j'avais survolé le film en pensant en trouver une et je l'avais raté ! Super.
Phantom of the Paradise est une bonne piste, je vais creuser.

Stillman en est c'est un peu trop feutré et c'est plus (discussions) dans une ambiance de fête/soirée que de "faire la fête" comme je l'avais en tête.
De même les extraits du montage du clip sont trop proches de scène de chorégraphies, donc ce n'est pas exactement ça non plus dans mon esprit.

Je vais jeter un oeil sur La Vie au Ranch que je n'ai pas vu !



Question complémentaire : j'ai souvenir de quelqu'un qui disait ici que si un réalisateur savait mettre en scène/filmer une bonne scène de fête, alors c'était un bon réalisateur... J'ai rêvé, ou non ? C'est la citation de qqn connu ou juste une idée partagé ici ? Instinctivement je m"adresserai à @sokol car je le vois bien dire un tel truc, mais si qqn d'autre à une idée je suis preneur :D
Une nouvelle suggestion me vient, si tu arrives à mettre la main dessus : Travolta et moi, de Mazuy. Il y a vers la fin une longue séquence de fête dans une patinoire, avec plusieurs musiques intradiégétiques, bruits de patins qui rayent la glace, gloussements, cris et conversations. ;)
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sokol
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cyborg a écrit :
dim. 30 oct. 2022 17:26

Question complémentaire : j'ai souvenir de quelqu'un qui disait ici que si un réalisateur savait mettre en scène/filmer une bonne scène de fête, alors c'était un bon réalisateur... J'ai rêvé, ou non ? C'est la citation de qqn connu ou juste une idée partagé ici ? Instinctivement je m"adresserai à @sokol car je le vois bien dire un tel truc, mais si qqn d'autre à une idée je suis preneur :D
Non, moi c’est : un bon cinéaste est un cinéaste qui sait quand faut-il couper une scène

😜
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