Le Centre de Visionnage : Films et débats

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groil_groil
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sokol a écrit :
lun. 19 juin 2023 11:05
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(Hélas pour moi) je vais vous raconter une histoire : je l'ai vu il y à peu près 20 ans, sur grand écran, quand je commençais à m’intéresser réellement du cinéma. Or, non seulement je ne savais rien de Eustache mais surtout, je n'avais jamais vu un film de Bresson (comme dit Bégaudeau dans son podcast : c'est le film le plus Bressonien de l'histoire du cinéma, voir plus que ceux du maitre lui-même; à propos du posdact : @asketoner, t'es pas le seul à penser que "La maison des bois" est ce que Pialat a fait de plus beau : vous êtes au moins deux, toi et Bégaudeau).

Donc, je l'avais vu il y a 20 ans. Ça m'avait surpris, dérouté, étonné, déconcerté. Bref, ne l'avais pas "compris". Et je l'ai revu avant-hier soir, toujours sur grand écran. Et :

1. Je pense que c'est le plus beau film de Eustache, le plus vrai, le moins 'tricheur' (le cinéma est déjà une grosse tricherie, qui ne le sait pas).

2. J'étais sidéré par la courteur des scènes (je n'ai pas vu mieux au cinéma, à part les films de Bresson ou "Le nouveau monde" de Malick - d'ailleurs, Malick c'est du Bresson avec de la musique donc, même si souvent c'est très réussi, ça reste un peu du sous-Bresson. C'est dit).

3. Et surtout, par la caméra : je pense que c'est le plus beau film au monde en ce qui concerne le positionnellement d'une caméra par rapport aux acteurs (et puisque pour moi "dis moi où tu pose ta caméra et je te dis ce que tu fais comme film", là, ça bat tous les records. A la limite, il y a que les Straub qui arrivaient à faire ça. Très probablement, ça doit venir également du fait que c'est un film autobiographique (même si, comme disait Eustache lui-même, "Mes petites amoureuses" c'est la partie autobiographique de sa vie qui n'a pas eu lieu - une autobiographie rêvé, on va dire).

Puis, vers 2/3 du film, j'ai pleuré. Il n'y avait aucune raison apparente (l'histoire, un personnage, une situation... ) : rien. J'ai dû pleurer pour Eustache, pour l'auteur de l’œuvre. Bergman disait que les larmes au cinéma sont toujours un peu mauvaises car elles libèrent le spectateurs de ses problèmes mais là, c'est des larmes différentes (peut être les seules qui méritent d’être versées). Ça m'arrive de verser ce 'genre' de larmes seulement devant les films de Godard (car chez lui aussi, existe une relation très forte entre l’œuvre et l'auteur, on ne peut les séparer, même durant le visionnage d'un film car même s'il n'y apparait pas, Godard était le plus grand acteur de ses propres films, il suffisait de le voir, il était toujours là, sûr). Et là, rebelote : je ne m'y attendais pas (même si dans "La maman et la putain" Veronika versait parmi les plus belles larmes au cinéma, elle ne m'a jamais fait pleurer, et c'est tant mieux car cela aurait été 'facile').

Sacré film. Et même un film sacré. Pur. Comment peut-on faire ça ?? Cela ne m'étonne pas une seule seconde qu'après celui-ci (pourtant, Eustache avait écrit son scénario il y a 10 ans mais il a tourné juste après "La maman et la putain", probablement pour profiter de la notoriété qu'il a pu obtenir avec celui-ci). On peut même le dire ainsi : faire "Mes petites amoureuses" et se donner la mort.

Du jamais vu. Littéralement.

ps: hier soir j'ai lu ce que @JanosValuska a écrit sur SensCritique à propose de ce film. Magnifique. M a g n i f i q u e. Je pense que Bégaudeau l'a lu avant son podcast : certains de ses idées y sont.

ps2 : le film est dédié aux filles (tout comme le titre indique) et pas à l'héros masculin du film. Ces plans, mais ces plans :

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Sublime.
mon Eustache préféré,
et La Maison des Bois mon Pialat préféré.
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sokol
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groil_groil a écrit :
lun. 19 juin 2023 11:34

Sublime.
mon Eustache préféré,
et La Maison des Bois mon Pialat préféré.
Ca aussi : si les scènes sont courtes, si il coupe après deux ou trois répliques, c'est parce que Eustache sait que l’éveil sexuel d’un jeune adolescent ne peut durer donc, pourquoi faire durer le plan ? (donc la scène). Donc, en fait, zéro formalisme : tout est en fonction du fond.

J'insiste car à nos jours, c'est facile de le taxer de formalisme. Or, à nos jour, aucun cinéaste ose (peut, ...) faire "ce film" : qui ose (peut...) faire aujourd'hui un film presque "photogramme par photogramme", si peu 'aimable' ? ("fuyez-moi que je vous suis" - dit-il aux spectateurs).
Modifié en dernier par sokol le lun. 19 juin 2023 12:40, modifié 3 fois.
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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cyborg
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@groil_groil : ha ça y est tu découvres Lino Brocka, super !!




Attention, découverte magnifique et incroyable ci-dessous :

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Kanchana Sita - Govindan Aravindan - 1977

Qu'il est bon de continuer à explorer, trop lentement il est vrai, le vaste et incroyable cinéma indien.Et quand, en plus, on tombe sur un tel joyaux...

Vents, plantes, montagnes, rivières, feux, animaux composent les éléments principaux de cette incroyable adaptation libre et très partielle du Ramayana de Vālmīki, grand texte mythologique en langue sanskrit. Parmi eux des corps humains, divinités faites hommes et femmes, discutent et se disputent pour des questions de territoires, de possessions, de croyances. On ne sait jamais bien qui est qui (moins encore, je crois, pour un spectateur occidental ne connaissant rien à rien des traditions sanskrits) et de toute façon les enjeux ne sont jamais clairement posés. Les enjeux narratif sont ici beaucoup plus supposés, laissant une place immenses au contexte naturel dans lequel ils s'inscrivent. De là à dire que l'on songe aux adaptations Straub&Huillesque de textes classiques, dont les corps disants habitent le temps de l'image et du paysage, il n'y a même qu'un pas...


Le film auquel on pense le plus durant le visionnage serait peut-être Nostos: The Return, l'afféterie kitsch de Piavoli (fort heureusement) en moins, la saveur massala en plus. Peut-être également au "Pourquoi Bodhi-Dharma est-il parti vers l'Orient?" de Yong-kyun Bae, seul film -à ma connaissance- ayant réussi à adapter ses préceptes mystique -le zen- à sa mise en scène. En réalité, on pense plus encore au sublime cinéma d'Apichatpong... ici avec près de 30 ans d'avance.

Lyrique, sensoriel, contemplatif, spectral, mystique... Kanchana Sita est un film fascinant, totalement sidérant par sa liberté immense et unique, absolument hors du temps, tant par rapport à l'histoire qu'il conte, que dans l'histoire du médium dans lequel il s'inscrit. Il me tarde de voir très très vite d'autres films de Govindan Aravindan.


J'ai découvert, suite à mon visionnage, que le film est de surcroit disponible en version restaurée librement sur YT : https://youtu.be/d2m9n0aKgn4
Les ami.e.s : on arrête tout et on jette un oeil !


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The Orchid - Samuel R. Delany

Une narration déconstruite, une errance labyrinthique dans New-York, des corps nus, des chorégraphies, des costumes d'insectes... la crème de tous les clichés des 70s. Malheureusement pas pour le meilleur, le film manquant d'un minimum de rigueur pour être intéressant passé les 5 premières minutes, bien qu'il en reste encore 25 derrière. Dommage.
Modifié en dernier par cyborg le lun. 19 juin 2023 15:17, modifié 1 fois.
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Tamponn Destartinn
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3 films de Cannes vu en avant premiere, qui sont tous formidable
J'ai vu 6 films, pour l'instant, c'est un sans faute !

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Fermer les yeux - Victor Erice

D'abord, un aveu : c'est mon premier Victor Erice. Même pas vu L'esprit de la ruche, tant de fois conseillé ici-même. Je pense que c'est comme voir Saraband sans connaitre Bergman : on y perd forcément quelque chose.
C'est un vrai film de vieux. C'est à dire guidé par une envie de faire simple et minimaliste, avec épuration de tout artifice. Je pense au cinéma d'Olivera, ou dans un genre très différent aux derniers Eastwood. Le parti pris esthétique le plus étonnant est ce choix de caméra numérique basique, donnant au film une image qu'on pourrait presque qualifiée de terne, tout comme certains choix de décors. Avec deux grandes exceptions, car il y a deux films dans le films : un film inachevé, qu'on voit peu mais sur lequel repose l'essentiel du récit, ainsi qu'une séquence d'imagination, on va dire, où le personnage principal, avatar d'Erice, se fait un film dans sa tête. Et alors là, notamment sur cette séquence (dont est extrait le photogramme) les plans, le découpage, la lumière : tout est une splendeur. Au point où on se demande pourquoi le film ne ressemble pas à cela tout du long.
Mais ce n'est pas le but. Le but, pour faire simple, est d'arriver à cette fin (qui n'est pas celle du photogramme, hein, je spoile rien), qui est la plus belle fin vue depuis longtemps au cinéma. C'est un choc évident, LA raison pour laquelle les gens ont crié au chef d'oeuvre, je pense. Ce qui m'interroge, c'est le besoin des 2h40 avant d'arriver à cette fin. Il y a une différence entre prendre son temps et perdre son temps, et le film est régulièrement sur le fil entre les deux. Cette simplicité et minimalisme dont je parlais au début, il aurait été préférable de les maintenir jusqu'au bout, jusqu'au contenu même du film. Après 30 ans d'absence, j'imagine qu'Erice avait un appétit d'orgre en terme de filmage, mais ce trop plein de matière m'a donné le sentiment d'être face à un diamant brut, mal taillé. Ca a aussi son charme.


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How to have Sex

Très beau film, qui arrive très bien à cristalliser viscéralement cette parenthèse mi-enchantée mi-cauchemardesque des vacances post BAC, où une bande de jeunes cherche à tuer maladroitement l'ado encore en elle. Le film raconte beaucoup avec peu, c'est enivrant, fascinant et déprimant à la fois.
Je regrette juste un choix de montage qui nous fait perdre le point de vue de l'héroine principale (jouée par une révélation incroyable) un instant, créant une sorte de suspens qui m'a semblé en trop, même si en même temps je comprends sa raison d'être. Dommage mais pas trop dommageable.


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Les Filles d'Olfa - Kaouther Ben Hania

Drôle de film, mais j'ai adoré.
C'est une sorte de reconstitution d'un parcours de vie, pour essayer de comprendre comment les deux filles ainées d'Olfa, mère tunisienne de 4 enfants, ont pu partir en Syrie pour rejoindre Daesh. La vraie Olfa et ses deux filles cadettes jouent leur rôle, avec deux actrices qui jouent le rôle des filles ainées + une actrice connue qui joue aussi le rôle d'Olfa pour des scènes précises. Ce qui intéresse la réalisatrice est surtout les discussions entre ces personnes concernées directement et leur avatar de cinéma que provoque ce dispositif. En cela, on mate plus un making of qu'un film, et c'était bel et bien le but initial.
Ca pourrait rapidement devenir impudique, tire larme ou je ne sais quoi d'autres. A mon sens, ça ne l'est jamais. Ces femmes sont incroyables de courage à se confier comme elles le font, leur témoignage est fort, notamment parce que cette réalisatrice a su inventer une forme exceptionnelle et conforme pour cette histoire particulière. Olfa est un personnage fascinant par sa bonhommie qui contraste avec sa part (très) sombre qui n'est jamais éludée, ses interactions avec l'actrice célèbre et bourgeoise qui l'interprète sont particulièrement savoureuses. Immense respect pour les deux filles cadettes, j'espère que leur vie futur sera à la hauteur de ce qu'elles méritent.
Etonnant et grand objet de cinéma, vraiment. Il n'y en a pas deux comme lui.
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groil_groil
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Zéro pointé ! Sous couvert de comédie policière méta, Ozon livre un vieux film rance et bourgeois, dont même le 3ème âge se désintéressera, incroyablement théâtral (c'est inspiré d'une pièce de théâtre, mais ce n'est pas pour cela qu'on est obligé de la transformer en théâtre filmé), qui essaie de faire passer des messages #metoo consternant de platitude, d'enfonçages de portes ouvertes et de mollesse rachidienne, dont les effets spéciaux tentant de reconstituer le Paris de l'époque sont affreux, cheap et criards, on ne voit ça qu'en France, ça doit être l'entrée de gamme en terme de budget, car en effet tout le pognon de ce naveton est passé dans un casting complètement surdimensionné qui aligne les stars toutes plus ridicules les unes que les autres : Luchini outrancier joue tellement mal qu'il ne joue pas de la même façon d'une scène à l'autre, Dussolier insupportable d'autosatisfaction comme depuis 20 ans, Huppert de plus en plus caricaturale, et des seconds rôles abominables, du type Besnehard, Dany Boon, Régis Laspalès, ou même, accrochez-vous, Franck de Lapersonne, ex candidat Front National, Rassemblement National, puis Les Patriotes de Philippot, qu'Ozon est le premier à faire retourner... On peut se demander pourquoi ? comme s'il n'y avait pas d'autre comédien disponible que cette espèce de petite crevure qui maintenant se targue d'appartenir à la Gauche Patriote, mais oui... Bref, heureusement que le film est sauvé par deux rayons de soleil, les deux merveilleuses actrices Nadia Tereszkiewicz et Rebecca Marder, deux actrices qui sont en train de définitivement s'imposer comme les grandes stars de demain, et c'est tant mieux, tant elles sont pleines de vie. Elles sauvent le film du naufrage total, mais on les imagine dans le même genre devant la caméra de Rappeneau, ça aurait quand même une autre gueule que ce naveton de luxe.
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sokol
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Question pour tous le monde : dans le générique de fin de quel film récent on entend "Words (don't come easy)" de F.R. David ? Merci
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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groil_groil
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sokol a écrit :
mar. 20 juin 2023 11:17
Question pour tous le monde : dans le générique de fin de quel film récent on entend "Words (don't come easy)" de F.R. David ? Merci
j'ai vu ce film aussi...
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groil_groil
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sokol a écrit :
mar. 20 juin 2023 11:17
Question pour tous le monde : dans le générique de fin de quel film récent on entend "Words (don't come easy)" de F.R. David ? Merci
ça ne me revient pas mais c'est un film récent que j'ai vu ces derniers jours, donc au choix :
- un petit frère
- beau is afraid
- les cyclades
- wahou !
- l'île rouge
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B-Lyndon
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sokol a écrit :
lun. 19 juin 2023 11:05
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(Hélas pour moi) je vais vous raconter une histoire : je l'ai vu il y à peu près 20 ans, sur grand écran, quand je commençais à m’intéresser réellement du cinéma. Or, non seulement je ne savais rien de Eustache mais surtout, je n'avais jamais vu un film de Bresson (comme dit Bégaudeau dans son podcast : c'est le film le plus Bressonien de l'histoire du cinéma, voir plus que ceux du maitre lui-même; à propos du posdact : @asketoner, t'es pas le seul à penser que "La maison des bois" est ce que Pialat a fait de plus beau : vous êtes au moins deux, toi et Bégaudeau).

Donc, je l'avais vu il y a 20 ans. Ça m'avait surpris, dérouté, étonné, déconcerté. Bref, ne l'avais pas "compris". Et je l'ai revu avant-hier soir, toujours sur grand écran. Et :

1. Je pense que c'est le plus beau film de Eustache, le plus vrai, le moins 'tricheur' (le cinéma est déjà une grosse tricherie, qui ne le sait pas).

2. J'étais sidéré par la courteur des scènes (je n'ai pas vu mieux au cinéma, à part les films de Bresson ou "Le nouveau monde" de Malick - d'ailleurs, Malick c'est du Bresson avec de la musique donc, même si souvent c'est très réussi, ça reste un peu du sous-Bresson. C'est dit).

3. Et surtout, par la caméra : je pense que c'est le plus beau film au monde en ce qui concerne le positionnellement d'une caméra par rapport aux acteurs (et puisque pour moi "dis moi où tu pose ta caméra et je te dis ce que tu fais comme film", là, ça bat tous les records. A la limite, il y a que les Straub qui arrivaient à faire ça. Très probablement, ça doit venir également du fait que c'est un film autobiographique (même si, comme disait Eustache lui-même, "Mes petites amoureuses" c'est la partie autobiographique de sa vie qui n'a pas eu lieu - une autobiographie rêvé, on va dire).

Puis, vers 2/3 du film, j'ai pleuré. Il n'y avait aucune raison apparente (l'histoire, un personnage, une situation... ) : rien. J'ai dû pleurer pour Eustache, pour l'auteur de l’œuvre. Bergman disait que les larmes au cinéma sont toujours un peu mauvaises car elles libèrent le spectateurs de ses problèmes mais là, c'est des larmes différentes (peut être les seules qui méritent d’être versées). Ça m'arrive de verser ce 'genre' de larmes seulement devant les films de Godard (car chez lui aussi, existe une relation très forte entre l’œuvre et l'auteur, on ne peut les séparer, même durant le visionnage d'un film car même s'il n'y apparait pas, Godard était le plus grand acteur de ses propres films, il suffisait de le voir, il était toujours là, sûr). Et là, rebelote : je ne m'y attendais pas (même si dans "La maman et la putain" Veronika versait parmi les plus belles larmes au cinéma, elle ne m'a jamais fait pleurer, et c'est tant mieux car cela aurait été 'facile').

Sacré film. Et même un film sacré. Pur. Comment peut-on faire ça ?? Cela ne m'étonne pas une seule seconde qu'après celui-ci (pourtant, Eustache avait écrit son scénario il y a 10 ans mais il a tourné juste après "La maman et la putain", probablement pour profiter de la notoriété qu'il a pu obtenir avec celui-ci). On peut même le dire ainsi : faire "Mes petites amoureuses" et se donner la mort.

Du jamais vu. Littéralement.

ps: hier soir j'ai lu ce que @JanosValuska a écrit sur SensCritique à propose de ce film. Magnifique. M a g n i f i q u e. Je pense que Bégaudeau l'a lu avant son podcast : certains de ses idées y sont.

ps2 : le film est dédié aux filles (tout comme le titre indique) et pas à l'héros masculin du film. Ces plans, mais ces plans :

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Un des plus beaux trucs que t'ais écrit. Moi aussi j'ai pleuré, lors du plan où Daniel (?) et la jeune fille a carreaux s'embrassent, que la caméra tourne autour d'eux, se rapproche. On entend le vent mais on dirait que tout est ralenti, que tout s'arrête, mais non, tout est déjà perdu, il n'y a pas de temps retrouvé (d'où, je crois, la brièveté des scènes). Je suis aussi d'accord sur les positions de caméra. Ce film lave littéralement les yeux. Il est a la fois surface et profondeur.

Tiens, en voyant le film d'Erice je pensais à Eustache. Je me disais qu'Erice est un plasticien immense, comme le dit très bien Tampoon. Mais il s'embourbe dans des scènes de discussion en champ contrechamp qui évoque le passé et n'a pas le genie d'Eustache avec la parole, qui "ouvre une brèche dans la réalité", la parole qui fait surgir les choses, les souvenirs, les aventures dont on parle. Et je me suis dit qu'il n'y a qu'un cinéaste au monde qui a su être les deux cinéastes : Eustache avec d'un côté La Maman, film long et bavard, et de l'autre Mes petites amoureuses, film d'actions mutique. C'est hallucinant. Même Godard ne sait pas faire ça. Tous les cinéastes doivent choisir, et Erice aurait dû simplement suivre la voie de Mes petites amoureuses (comme il le fait dans L'esprit de la ruche, tourné je crois la même année). Eustache lui a su faire les deux.
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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Tamponn Destartinn
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groil_groil a écrit :
mar. 20 juin 2023 12:19
sokol a écrit :
mar. 20 juin 2023 11:17
Question pour tous le monde : dans le générique de fin de quel film récent on entend "Words (don't come easy)" de F.R. David ? Merci
ça ne me revient pas mais c'est un film récent que j'ai vu ces derniers jours, donc au choix :
- un petit frère
- beau is afraid
- les cyclades
- wahou !
- l'île rouge


En googlant "words fr david dans quel film de 2023", je tombe sur ce lien :
https://www.cinezik.org/critiques/affcr ... 022080214

A priori la chanson est dans les Cyclades de Fitoussi
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B-Lyndon
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Ah si, il y en a une qui y est parvenue aussi, comme par hasard, dans un seul et même film : Akerman avec Les Rendez-vous d'Anna.

Et les Straub mais c'est un peu différent je trouve
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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groil_groil
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Tamponn Destartinn a écrit :
mar. 20 juin 2023 12:25
groil_groil a écrit :
mar. 20 juin 2023 12:19
sokol a écrit :
mar. 20 juin 2023 11:17
Question pour tous le monde : dans le générique de fin de quel film récent on entend "Words (don't come easy)" de F.R. David ? Merci
ça ne me revient pas mais c'est un film récent que j'ai vu ces derniers jours, donc au choix :
- un petit frère
- beau is afraid
- les cyclades
- wahou !
- l'île rouge


En googlant "words fr david dans quel film de 2023", je tombe sur ce lien :
https://www.cinezik.org/critiques/affcr ... 022080214

A priori la chanson est dans les Cyclades de Fitoussi
voilà :D <3
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JanosValuska
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sokol a écrit :
lun. 19 juin 2023 11:05
Image

(Hélas pour moi) je vais vous raconter une histoire : je l'ai vu il y à peu près 20 ans, sur grand écran, quand je commençais à m’intéresser réellement du cinéma. Or, non seulement je ne savais rien de Eustache mais surtout, je n'avais jamais vu un film de Bresson (comme dit Bégaudeau dans son podcast : c'est le film le plus Bressonien de l'histoire du cinéma, voir plus que ceux du maitre lui-même; à propos du posdact : @asketoner, t'es pas le seul à penser que "La maison des bois" est ce que Pialat a fait de plus beau : vous êtes au moins deux, toi et Bégaudeau).

Donc, je l'avais vu il y a 20 ans. Ça m'avait surpris, dérouté, étonné, déconcerté. Bref, ne l'avais pas "compris". Et je l'ai revu avant-hier soir, toujours sur grand écran. Et :

1. Je pense que c'est le plus beau film de Eustache, le plus vrai, le moins 'tricheur' (le cinéma est déjà une grosse tricherie, qui ne le sait pas).

2. J'étais sidéré par la courteur des scènes (je n'ai pas vu mieux au cinéma, à part les films de Bresson ou "Le nouveau monde" de Malick - d'ailleurs, Malick c'est du Bresson avec de la musique donc, même si souvent c'est très réussi, ça reste un peu du sous-Bresson. C'est dit).

3. Et surtout, par la caméra : je pense que c'est le plus beau film au monde en ce qui concerne le positionnellement d'une caméra par rapport aux acteurs (et puisque pour moi "dis moi où tu pose ta caméra et je te dis ce que tu fais comme film", là, ça bat tous les records. A la limite, il y a que les Straub qui arrivaient à faire ça. Très probablement, ça doit venir également du fait que c'est un film autobiographique (même si, comme disait Eustache lui-même, "Mes petites amoureuses" c'est la partie autobiographique de sa vie qui n'a pas eu lieu - une autobiographie rêvé, on va dire).

Puis, vers 2/3 du film, j'ai pleuré. Il n'y avait aucune raison apparente (l'histoire, un personnage, une situation... ) : rien. J'ai dû pleurer pour Eustache, pour l'auteur de l’œuvre. Bergman disait que les larmes au cinéma sont toujours un peu mauvaises car elles libèrent le spectateurs de ses problèmes mais là, c'est des larmes différentes (peut être les seules qui méritent d’être versées). Ça m'arrive de verser ce 'genre' de larmes seulement devant les films de Godard (car chez lui aussi, existe une relation très forte entre l’œuvre et l'auteur, on ne peut les séparer, même durant le visionnage d'un film car même s'il n'y apparait pas, Godard était le plus grand acteur de ses propres films, il suffisait de le voir, il était toujours là, sûr). Et là, rebelote : je ne m'y attendais pas (même si dans "La maman et la putain" Veronika versait parmi les plus belles larmes au cinéma, elle ne m'a jamais fait pleurer, et c'est tant mieux car cela aurait été 'facile').

Sacré film. Et même un film sacré. Pur. Comment peut-on faire ça ?? Cela ne m'étonne pas une seule seconde qu'après celui-ci (pourtant, Eustache avait écrit son scénario il y a 10 ans mais il a tourné juste après "La maman et la putain", probablement pour profiter de la notoriété qu'il a pu obtenir avec celui-ci). On peut même le dire ainsi : faire "Mes petites amoureuses" et se donner la mort.

Du jamais vu. Littéralement.

ps: hier soir j'ai lu ce que @JanosValuska a écrit sur SensCritique à propose de ce film. Magnifique. M a g n i f i q u e. Je pense que Bégaudeau l'a lu avant son podcast : certains de ses idées y sont.

ps2 : le film est dédié aux filles (tout comme le titre indique) et pas à l'héros masculin du film. Ces plans, mais ces plans :

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Tout d'abord,
Quel bonheur de te lire sur ce film que j'aime à la folie !
C'est drôle qu'on ait vécu une expérience similaire : Déconcerté en l'ayant découvert au cinéma, puis adoré bien plus tard. Je me souviens l'avoir revu lors du premier confinement. Un choc.

Ensuite,
Merci de citer mon papier. Je n'avais pas écrit grand-chose à l'époque, qui était une époque douloureuse personnellement, mais revoir ce film-ci faisait partie des soleils de mes journées, on va dire. Donc j'avais eu envie d'écrire une petit truc...

C'est d'autant plus troublant (de lire ton message là) que je traverse une période où je n'ai pas envie de voir grand chose. Je n'ai quasi rien vu d'intéressant depuis six semaines. Hormis un film film : Désordres de Cyril Schaublin. Une merveille totale. Qui t'a beaucoup plu il me semble.

Si je trouve ça étonnant, c'est que je sais combien on partage tous deux l'admiration et le plaisir d'écoute pour Begaudeau et son podcast, notamment. Par ailleurs si des idées se recoupent entre les miennes et les siennes (je n'ai pas encore écouté son podcast sur le Eustache) c'est sans doute parce que je l'ai beaucoup lu et écouté depuis quinze ans. Je pense que ma cinéphilie s'inspire de trois "endroits" : Aled, évidemment. Puis Les cahiers. Et Begaudeau. C'est peut-être réducteur, mais c'est comme ça. Bref, comme je sais qu'il n'en a pas parlé dans son podcast, je me permets de te donner un lien où il parle justement de Désordres (dans un entretien pour Lemagcinema) c'est évidemment passionnant :)
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JanosValuska
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sokol a écrit :
mar. 20 juin 2023 11:17
Question pour tous le monde : dans le générique de fin de quel film récent on entend "Words (don't come easy)" de F.R. David ? Merci
Pour moi "Words" de Fr David c'est : Le marin masqué, de Sophie Letourneur :love2: :D
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JanosValuska
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JanosValuska a écrit :
mar. 20 juin 2023 13:13
sokol a écrit :
lun. 19 juin 2023 11:05
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(Hélas pour moi) je vais vous raconter une histoire : je l'ai vu il y à peu près 20 ans, sur grand écran, quand je commençais à m’intéresser réellement du cinéma. Or, non seulement je ne savais rien de Eustache mais surtout, je n'avais jamais vu un film de Bresson (comme dit Bégaudeau dans son podcast : c'est le film le plus Bressonien de l'histoire du cinéma, voir plus que ceux du maitre lui-même; à propos du posdact : @asketoner, t'es pas le seul à penser que "La maison des bois" est ce que Pialat a fait de plus beau : vous êtes au moins deux, toi et Bégaudeau).

Donc, je l'avais vu il y a 20 ans. Ça m'avait surpris, dérouté, étonné, déconcerté. Bref, ne l'avais pas "compris". Et je l'ai revu avant-hier soir, toujours sur grand écran. Et :

1. Je pense que c'est le plus beau film de Eustache, le plus vrai, le moins 'tricheur' (le cinéma est déjà une grosse tricherie, qui ne le sait pas).

2. J'étais sidéré par la courteur des scènes (je n'ai pas vu mieux au cinéma, à part les films de Bresson ou "Le nouveau monde" de Malick - d'ailleurs, Malick c'est du Bresson avec de la musique donc, même si souvent c'est très réussi, ça reste un peu du sous-Bresson. C'est dit).

3. Et surtout, par la caméra : je pense que c'est le plus beau film au monde en ce qui concerne le positionnellement d'une caméra par rapport aux acteurs (et puisque pour moi "dis moi où tu pose ta caméra et je te dis ce que tu fais comme film", là, ça bat tous les records. A la limite, il y a que les Straub qui arrivaient à faire ça. Très probablement, ça doit venir également du fait que c'est un film autobiographique (même si, comme disait Eustache lui-même, "Mes petites amoureuses" c'est la partie autobiographique de sa vie qui n'a pas eu lieu - une autobiographie rêvé, on va dire).

Puis, vers 2/3 du film, j'ai pleuré. Il n'y avait aucune raison apparente (l'histoire, un personnage, une situation... ) : rien. J'ai dû pleurer pour Eustache, pour l'auteur de l’œuvre. Bergman disait que les larmes au cinéma sont toujours un peu mauvaises car elles libèrent le spectateurs de ses problèmes mais là, c'est des larmes différentes (peut être les seules qui méritent d’être versées). Ça m'arrive de verser ce 'genre' de larmes seulement devant les films de Godard (car chez lui aussi, existe une relation très forte entre l’œuvre et l'auteur, on ne peut les séparer, même durant le visionnage d'un film car même s'il n'y apparait pas, Godard était le plus grand acteur de ses propres films, il suffisait de le voir, il était toujours là, sûr). Et là, rebelote : je ne m'y attendais pas (même si dans "La maman et la putain" Veronika versait parmi les plus belles larmes au cinéma, elle ne m'a jamais fait pleurer, et c'est tant mieux car cela aurait été 'facile').

Sacré film. Et même un film sacré. Pur. Comment peut-on faire ça ?? Cela ne m'étonne pas une seule seconde qu'après celui-ci (pourtant, Eustache avait écrit son scénario il y a 10 ans mais il a tourné juste après "La maman et la putain", probablement pour profiter de la notoriété qu'il a pu obtenir avec celui-ci). On peut même le dire ainsi : faire "Mes petites amoureuses" et se donner la mort.

Du jamais vu. Littéralement.

ps: hier soir j'ai lu ce que @JanosValuska a écrit sur SensCritique à propose de ce film. Magnifique. M a g n i f i q u e. Je pense que Bégaudeau l'a lu avant son podcast : certains de ses idées y sont.

ps2 : le film est dédié aux filles (tout comme le titre indique) et pas à l'héros masculin du film. Ces plans, mais ces plans :

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Tout d'abord,
Quel bonheur de te lire sur ce film que j'aime à la folie !
C'est drôle qu'on ait vécu une expérience similaire : Déconcerté en l'ayant découvert au cinéma, puis adoré bien plus tard. Je me souviens l'avoir revu lors du premier confinement. Un choc.

Ensuite,
Merci de citer mon papier. Je n'avais pas écrit grand-chose à l'époque, qui était une époque douloureuse personnellement, mais revoir ce film-ci faisait partie des soleils de mes journées, on va dire. Donc j'avais eu envie d'écrire une petit truc...

C'est d'autant plus troublant (de lire ton message là) que je traverse une période où je n'ai pas envie de voir grand chose. Je n'ai quasi rien vu d'intéressant depuis six semaines. Hormis un film film : Désordres de Cyril Schaublin. Une merveille totale. Qui t'a beaucoup plu il me semble.

Si je trouve ça étonnant, c'est que je sais combien on partage tous deux l'admiration et le plaisir d'écoute pour Begaudeau et son podcast, notamment. Par ailleurs si des idées se recoupent entre les miennes et les siennes (je n'ai pas encore écouté son podcast sur le Eustache) c'est sans doute parce que je l'ai beaucoup lu et écouté depuis quinze ans. Je pense que ma cinéphilie s'inspire de trois "endroits" : Aled, évidemment. Puis Les cahiers. Et Begaudeau. C'est peut-être réducteur, mais c'est comme ça. Bref, comme je sais qu'il n'en a pas parlé dans son podcast, je me permets de te donner un lien où il parle justement de Désordres (dans un entretien pour Lemagcinema) c'est évidemment passionnant :)
Et donc, avec le lien c'est mieux :D
https://www.youtube.com/watch?v=qpASzpCQGWk
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groil_groil a écrit :
mar. 20 juin 2023 12:19


ça ne me revient pas mais c'est un film récent que j'ai vu ces derniers jours, donc au choix :
- un petit frère
- beau is afraid
- les cyclades
- wahou !
- l'île rouge
je crois que c'est UN PETIT FRÈRE :sarcastic:
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
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B-Lyndon a écrit :
mar. 20 juin 2023 12:22
Erice aurait dû simplement suivre la voie de Mes petites amoureuses
Tu parles de son dernier ?
merci
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Tamponn Destartinn a écrit :
mar. 20 juin 2023 12:25

En googlant "words fr david dans quel film de 2023", je tombe sur ce lien :
https://www.cinezik.org/critiques/affcr ... 022080214

A priori la chanson est dans les Cyclades de Fitoussi
Quand quelqu’un fait le même truc (la même action...) juste quelques secondes avant toi (moi, dans ce cas ), on dit qu'il (tu) vivra plus longtemps (et je l’espère bien !) : j'ai googlé et je suis tombé exactement sur le même site (cinezik.org). Mais je n'ai pas vu le film en question (Les Cyclades) donc ce n'est pas celui-ci
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B-Lyndon a écrit :
mar. 20 juin 2023 12:30
Ah si, il y en a une qui y est parvenue aussi, comme par hasard, dans un seul et même film : Akerman avec Les Rendez-vous d'Anna.
Le bavardage et le mutisme dans le même film, tu veux dire ?
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JanosValuska a écrit :
mar. 20 juin 2023 13:14


Pour moi "Words" de Fr David c'est : Le marin masqué, de Sophie Letourneur :love2: :D
parfait !! et je l'ai revu il y a 2 semaines (d'où mon souvenir)

merci !!!
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JanosValuska a écrit :
mar. 20 juin 2023 13:13
Tout d'abord,
Quel bonheur de te lire sur ce film que j'aime à la folie !
C'est drôle qu'on ait vécu une expérience similaire : Déconcerté en l'ayant découvert au cinéma, puis adoré bien plus tard. Je me souviens l'avoir revu lors du premier confinement. Un choc.

Ensuite,
Merci de citer mon papier. Je n'avais pas écrit grand-chose à l'époque, qui était une époque douloureuse personnellement, mais revoir ce film-ci faisait partie des soleils de mes journées, on va dire. Donc j'avais eu envie d'écrire une petit truc...

C'est d'autant plus troublant (de lire ton message là) que je traverse une période où je n'ai pas envie de voir grand chose. Je n'ai quasi rien vu d'intéressant depuis six semaines. Hormis un film film : Désordres de Cyril Schaublin. Une merveille totale. Qui t'a beaucoup plu il me semble.

Si je trouve ça étonnant, c'est que je sais combien on partage tous deux l'admiration et le plaisir d'écoute pour Begaudeau et son podcast, notamment. Par ailleurs si des idées se recoupent entre les miennes et les siennes (je n'ai pas encore écouté son podcast sur le Eustache) c'est sans doute parce que je l'ai beaucoup lu et écouté depuis quinze ans. Je pense que ma cinéphilie s'inspire de trois "endroits" : Aled, évidemment. Puis Les cahiers. Et Begaudeau. C'est peut-être réducteur, mais c'est comme ça. Bref, comme je sais qu'il n'en a pas parlé dans son podcast, je me permets de te donner un lien où il parle justement de Désordres (dans un entretien pour Lemagcinema) c'est évidemment passionnant :)
:jap: :love2: :jap: :love2: :jap:

Que dire ? Ah oui, au moins je peux rajouter un truc drôle : quand je m'étais 'engueulé' avec Bégaudeau (sur son profile fb) à propos du dernier Östlund (et par conséquent, à propos de Haneke, son figure tutélaire) qu'il défend corps et âme, je lui ai bien précisé que je lui doit tout de même presque un quart de ma cinéphilie (ça lui a fait rire :D ).

ps: oui, Désordres est, de loin, ce qu'il y a eu de plus intéressant cette année (qui à mon opinion, continue d’être, suite à l'année passée, une année bien médiocre... . Et Cannes, apparemment, n'avait rien d'extraordinaire non plus cette année, même si, comme on dit, "on verra bien")
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JanosValuska a écrit :
mar. 20 juin 2023 13:16
Et donc, avec le lien c'est mieux :D
https://www.youtube.com/watch?v=qpASzpCQGWk
merci beaucoup !!
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sokol a écrit :
mar. 20 juin 2023 14:16
B-Lyndon a écrit :
mar. 20 juin 2023 12:30
Ah si, il y en a une qui y est parvenue aussi, comme par hasard, dans un seul et même film : Akerman avec Les Rendez-vous d'Anna.
Le bavardage et le mutisme dans le même film, tu veux dire ?
Oui ! d'autres ont essayé, mais peu de cinéastes y parviennent aussi bien, je veux dire

et oui je parlais de son dernier, qui sort cet été ;)
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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B-Lyndon a écrit :
mar. 20 juin 2023 14:45
et oui je parlais de son dernier, qui sort cet été ;)
Oui, je sais. Mais je ne suis pas très chaud, concernant son dernier film. Quelque chose me dit que je serais gêné par le retour de Ana Torrent, son actrice fétiche (on va dire). Ce n'est pas parce que il ne faut pas ressusciter le passé, loin de là, mais Erice n'a pas fait de film depuis 30 ans (contre exemple : j'avais beaucoup aimé "Douleur et gloire" de Almodovar, film qui parle de ses premières amours, les suivantes, des acteurs avec qui il a travaillé etc). Mais cela "avait un sens" (si je peux dire) : Almodovar n'a jamais arrêté d'en faire. Je ne vois pas pourquoi Erice s'est mis à faire après tant d'année un film (car, si c'était une histoire de financement, il l'aurait eu, je pense, puisqu'il l'a eu cette fois-ci). Donc, je ne crois pas qu'il s'agit un 'film maudit', un film qu'il n’arrivait pas naitre, n'est ce pas ? (dis moi si je me trompe). Alors c'est quoi ?? :??:
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sokol a écrit :
mar. 20 juin 2023 16:33
B-Lyndon a écrit :
mar. 20 juin 2023 14:45
et oui je parlais de son dernier, qui sort cet été ;)
Oui, je sais. Mais je ne suis pas très chaud, concernant son dernier film. Quelque chose me dit que je serais gêné par le retour de Ana Torrent, son actrice fétiche (on va dire). Ce n'est pas parce que il ne faut pas ressusciter le passé, loin de là, mais Erice n'a pas fait de film depuis 30 ans (contre exemple : j'avais beaucoup aimé "Douleur et gloire" de Almodovar, film qui parle de ses premières amours, les suivantes, des acteurs avec qui il a travaillé etc). Mais cela "avait un sens" (si je peux dire) : Almodovar n'a jamais arrêté d'en faire. Je ne vois pas pourquoi Erice s'est mis à faire après tant d'année un film (car, si c'était une histoire de financement, il l'aurait eu, je pense, puisqu'il l'a eu cette fois-ci). Donc, je ne crois pas qu'il s'agit un 'film maudit', un film qu'il n’arrivait pas naitre, n'est ce pas ? (dis moi si je me trompe). Alors c'est quoi ?? :??:



Si ça te rassurer, Ana Torrent n'a pas un grand rôle dans le film.
Il est vite fait clé, mais techniquement on la voit assez peu.

Et c'est drôle que tu parles de Douleur et Gloire, parce que j'y ai pensé aussi pendant le film, même si je ne l'ai pas cité dans mes exemples de "films de vieux"
La comparaison est intéressante, parce que les deux cinéastes parlent d'eux mêmes, sans être directement autobiographique.
Mais clairement, Almodovar n'ayant jamais arrêté, on sent un "savoir faire", là où Eurice est peut être plus maladroit dans son écriture et son montage.

Par contre, j'y connais rien à la vie d'Eurice, mais je pense que c'est courant, des cinéastes qui galèrent des années et des années à faire financer un film, au point de ne pas y arriver, et soudainement ils arrivent à revenir avec un nouveau projet parce qu'ils sont arrivés cette fois au bon moment, au bon endroit, peut être aussi tout simplement parce qu'ils tentent moins le diable en faisant un film beaucoup moins cher que le précédent... Et que ça arrive des années voire décennies après, parce que la douleur de leur précédent echec les ont bloqué artistiquement un temps.
Donc sans connaitre sa vie, je ne suis pas d'accord avec cette phrase : si c'était une histoire de financement, il l'aurait eu, je pense, puisqu'il l'a eu cette fois-ci
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sokol a écrit :
mar. 20 juin 2023 14:33
JanosValuska a écrit :
mar. 20 juin 2023 13:13
Tout d'abord,
Quel bonheur de te lire sur ce film que j'aime à la folie !
C'est drôle qu'on ait vécu une expérience similaire : Déconcerté en l'ayant découvert au cinéma, puis adoré bien plus tard. Je me souviens l'avoir revu lors du premier confinement. Un choc.

Ensuite,
Merci de citer mon papier. Je n'avais pas écrit grand-chose à l'époque, qui était une époque douloureuse personnellement, mais revoir ce film-ci faisait partie des soleils de mes journées, on va dire. Donc j'avais eu envie d'écrire une petit truc...

C'est d'autant plus troublant (de lire ton message là) que je traverse une période où je n'ai pas envie de voir grand chose. Je n'ai quasi rien vu d'intéressant depuis six semaines. Hormis un film film : Désordres de Cyril Schaublin. Une merveille totale. Qui t'a beaucoup plu il me semble.

Si je trouve ça étonnant, c'est que je sais combien on partage tous deux l'admiration et le plaisir d'écoute pour Begaudeau et son podcast, notamment. Par ailleurs si des idées se recoupent entre les miennes et les siennes (je n'ai pas encore écouté son podcast sur le Eustache) c'est sans doute parce que je l'ai beaucoup lu et écouté depuis quinze ans. Je pense que ma cinéphilie s'inspire de trois "endroits" : Aled, évidemment. Puis Les cahiers. Et Begaudeau. C'est peut-être réducteur, mais c'est comme ça. Bref, comme je sais qu'il n'en a pas parlé dans son podcast, je me permets de te donner un lien où il parle justement de Désordres (dans un entretien pour Lemagcinema) c'est évidemment passionnant :)
:jap: :love2: :jap: :love2: :jap:

Que dire ? Ah oui, au moins je peux rajouter un truc drôle : quand je m'étais 'engueulé' avec Bégaudeau (sur son profile fb) à propos du dernier Östlund (et par conséquent, à propos de Haneke, son figure tutélaire) qu'il défend corps et âme, je lui ai bien précisé que je lui doit tout de même presque un quart de ma cinéphilie (ça lui a fait rire :D ).

ps: oui, Désordres est, de loin, ce qu'il y a eu de plus intéressant cette année (qui à mon opinion, continue d’être, suite à l'année passée, une année bien médiocre... . Et Cannes, apparemment, n'avait rien d'extraordinaire non plus cette année, même si, comme on dit, "on verra bien")
Je me souviens très précisément de cet échange avec Bégaudeau lui-même, en effet :D
Pareil je lui dois beaucoup. Mais parfois on est en désaccord total c'est terrible. Qu'il chie sur Mann et encense Délépine & Kervern ça m'a toujours laissé dubitatif :lol:
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B-Lyndon
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Les Herbes sèches, Nuri Bilge Ceylan, 2023.

Les Herbes sèches m'a placé dans l'état exactement contraire au dernier film d'Erice : le film est sublime tout du long, et manque sa sortie. Arrêtons nous dessus, puisque c'est sur cette frustration que les lumières se rallument.
Dans l'avant-dernière scène du film, le personnage principal, professeur d'arts plastiques frustré exerçant dans un collège du fin fond de l'Anatolie, annonce sa mutation à la jeune élève qu'il a humilité tout du long du film, et la rabaisse à nouveau en la sommant de s'excuser d'un geste (que je ne révèlerai pas) qu'elle était du reste légitime de commettre. L'élève le fixe, inflexible, sans colère, sans jugement, douleur dignement contenue, et ponctue le monologue de son tortionnaire d'une voix très douce. "Mais s'excuser de quoi, Monsieur ?" ; "Mais vous dire quoi, Monsieur ?" ; "Puis-je partir, Monsieur ?". On est au présent de la situation, dans une tension extraordinaire entre la logorrhée du professeur, et l'opacité apparente de la fillette. Le silence de la jeune fille dit tout, renvoyant à sa vacuité le triste spectacle d'un homme prêt à déshonorer les autres pour ne pas avouer (et s'avouer à lui-même) sa fatigue d'être soi, sa proximité effrayante avec le vide. Des scènes comme ça, le film les enfile auparavant comme des perles - je n'oublierais jamais, par exemple, ce que Ceylan peut aujourd'hui faire, en un décadrage, d'une scène de discussion politique à priori abstraite, sa mise en scène atteignant une liberté et une fluidité rares. Seulement voilà, vient la fin : le personnage gravit une colline, sa voix-off s'élève, poétise un peu sur le vent, la neige, les herbes sèches du titre. On voit le visage de la fillette apparaître en ralenti, et en off le professeur avouer : ses mensonges, sa faiblesse, qu'il a conscience de tout, que tout était fait sciemment, et que cette jeune fille saura mieux vivre que lui, mieux se battre, mieux s'aimer et aimer les autres. Cette conscience, ainsi nommée, me gêne, parce qu'elle sauve en quelque sorte le personnage, qui tout du long faisait tout pour demeurer insauvable, un peu comme le jeune héros du Poirier Sauvage, actif malgré tout dans son aigreur. Comme si Ceylan, in extremis, ne faisait plus confiance à la cruauté de son geste, au dessin si précis, si net, de cet anti-héros ignoble qu'on prend tant plaisir à observer pendant 3 heures, à aimer malgré tout, sans jamais s'y identifier. A quoi bon orchestrer des scènes si splendides si c'est pour accoucher d'un épilogue aussi sirupeux, qui fait triompher la quête de sens sur la recherche de matière dans lequel le film s'engage très vite ? Car c'est bien le pari que semble faire Les Herbes sèches, celui du temps long, celui de la situation, donc de la contradiction, et donc de la vitalité, la respiration des scènes. Alors pourquoi gâcher au finish un grand film matérialiste en l'achevant d'une voix-off qui trahit tout ce qu'on a vu jusqu'à présent ? Matérialiste, ce monologue intérieur ne l'est pas : il est surplombant, d'inspiration métaphysique, et recouvre de mots définitifs (et explicatifs) l'incroyable puissance dialectique que le film déploie auparavant.

Uzak se terminait par un zoom sur le visage d'un homme, attendant sur un banc, dans le froid. Un des plus beaux plans au monde. Cet homme ne disait rien, et on comprenait tout, ou l'on se berçait de cette idée, de tout comprendre, qui n'est jamais réellement possible. Le zoom vers son visage indiquait peut-être que là, dans le froid, cet homme était en train de mesurer ce qu'il avait manqué, en laissant ce cousin des campagnes tant toisé, tant méprisé, partir sans se retourner. Quel sens de la fraternité, du partage, avait pu lui faire défaut. Le problème des Herbes sèches, je crois, c'est que c'est Uzak vingt ans plus tard. Le film raconte les mêmes choses, il y a les mêmes motifs (les deux bouffons perdus dans la neige, la perte des illusions, la photographie, la lassitude d'espérer, la fascination pour une femme qui demeurera toujours plus vivante que nous). Uzak se taisait sur la fin et parlait à notre cœur, Les Herbes sèches déborde d'un vouloir-dire qui finit par ne plus rien dire du tout. On dit souvent que les jeunes cinéastes veulent mettre trop de choses dans les premiers films et qu'ils se canalisent avec le temps. Je crois que c'est exactement le contraire. Les premiers films, quand ils sont grands, imposent un monde avec une puissance concise et précise, qui appartient je crois à l'insouciance et la magie primaire des premiers gestes. Plus Ceylan avance, plus il complexifie - tant mieux, cela veut dire qu'il se pose de plus en plus de questions. Mais à trop complexifier vient le risque de soudainement prendre peur, et vouloir relier tous les fils. Et donc, de sabrer le mystère. De finir par expliquer son monde, au lieu de le laisser exister jusqu'au bout.
Modifié en dernier par B-Lyndon le mer. 21 juin 2023 13:40, modifié 1 fois.
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Très déçu, je préfère largement le 1. Là, on sent que le réal peut faire ce qu'il veut, alors il étire son film au maximum, 2h20 pour raconter ça c'est trop, il étire aussi les scènes de violence jusqu'à les pousser dans des trucs de plus en plus gore sans que ça génère le climax qui va avec. Mais surtout le film est complètement vide scénaristiquement et les personnages ne sont absolument pas creusés ni travaillés, alors qu'en 2h20 t'es censé avoir le temps. Et la photo ne travaille que sur 3 couleurs, le orange et le bleu pour éclairer le film et le rouge pour le sang. C'est bien de faire des choix affirmés, mais c'est hyper répétitif et systématique. Bon, y a des scènes gore cool et le Clown est vraiment top de flippe, mais ça pouvait être tellement mieux...

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Un homme, expert-comptable, marié, bourgeois de la petite ville de Pavie, tombe éperdument amoureux du fantôme de la femme qu'il aima jadis. Mais cette femme est morte et il est le seul à la voir, et cette "rencontre" va lui ruiner sa vie et le faire basculer dans la folie. Un Dino Risi épatant et étonnant, sans la moindre once d'humour ou de légèreté, tourné en hiver, sous la brume, la pluie et le froid glacial qui contribuent à donner encore plus au film une ambiance mortifère et ténébreuse. Mastroianni est étonnant (enfin, ce n'est pas une surprise), et Romy Schneider semble déjà complètement paumée et dépressive, à tel point que son rôle et ce qu'elle est dans la vie à ce moment-là semblent totalement se confondre.
I like your hair.
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B-Lyndon a écrit :
mer. 21 juin 2023 01:30
On dit souvent que les jeunes cinéastes veulent mettre trop de choses dans les premiers films et qu'ils se canalisent avec le temps. Je crois que c'est exactement le contraire. Les premiers films, quand ils sont grands, imposent un monde avec une puissance concise et précise, qui appartient je crois à l'insouciance et la magie primaire des premiers gestes.
Je pense qu'il y a deux catégorie de cinéastes qui ont fait des films magiques dès le premier coup (comme tu dit très justement) :

- D'un coté, Jacques Demy, John Cassavetes, Victor Erice, les Straub, Jean-Claude Brisseau, Werner Herzog, Tsai Ming-Liang, Hong Sang-soo, Cristi Puiu, Elia Suleiman etc donc, ceux qui n'ont jamais perdu la main après (bien sur, parfois ils ont fait quelques mauvais films, "Parking", "Gloria", "Le jour d'après" mais c'est des exceptions qui confirme la "règle"), ou alors, ils ont arrêté net à faire des films (Erice).

- De l'autre, Nani Moretti, Arnaud Desplechin, les Dardennes, Bruno Dumont, Jim Jarmusch etc (qui ont fait également des films magiques dès le premier coup) mais, après avoir trouvé leur public (le financement nécessaire pour leur films etc etc) ont perdu la main.

Ceylan fait partie de ces dernier, c'est une évidence.

ps: puis, il y a ceux qui oscillent entre les deux (Alain Guiraudie, un exemple par excellence) mais qui n'ont pas encore dit le "dernier mot" (on ne sait pas s'ils appartiennent au premier ou deuxième groupe).
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sokol a écrit :
mer. 21 juin 2023 14:02
B-Lyndon a écrit :
mer. 21 juin 2023 01:30
On dit souvent que les jeunes cinéastes veulent mettre trop de choses dans les premiers films et qu'ils se canalisent avec le temps. Je crois que c'est exactement le contraire. Les premiers films, quand ils sont grands, imposent un monde avec une puissance concise et précise, qui appartient je crois à l'insouciance et la magie primaire des premiers gestes.
Je pense qu'il y a deux catégorie de cinéastes qui ont fait des films magiques dès le premier coup (comme tu dit très justement) :

- D'un coté, Jacques Demy, John Cassavetes, Victor Erice, les Straub, Jean-Claude Brisseau, Werner Herzog, Tsai Ming-Liang, Hong Sang-soo, Cristi Puiu, Elia Suleiman etc donc, ceux qui n'ont jamais perdu la main après (bien sur, parfois ils ont fait quelques mauvais films, "Parking", "Gloria", "Le jour d'après" mais c'est des exceptions qui confirme la "règle"), ou alors, ils ont arrêté net à faire des films (Erice).

- De l'autre, Nani Moretti, Arnaud Desplechin, les Dardennes, Bruno Dumont, Jim Jarmusch etc (qui ont fait également des films magiques dès le premier coup) mais, après avoir trouvé leur public (le financement nécessaire pour leur films etc etc) ont perdu la main.

Ceylan fait partie de ces dernier, c'est une évidence.

ps: puis, il y a ceux qui oscillent entre les deux (Alain Guiraudie, un exemple par excellence) mais qui n'ont pas encore dit le "dernier mot" (on ne sait pas s'ils appartiennent au premier ou deuxième groupe).
Pour moi Ceylan ne fait pas partie de la deuxième catégorie et ça n'a rien d'évident. Du reste je n'écris pas qu'il a perdu la main, au contraire (je dis bien que le film est en grande partie sublime), et d'ailleurs sa mise en scène est de plus en plus époustouflante, tu verras le film. Je dis simplement qu'il a tendance à trop s'expliquer, trop se justifier, au lieu de se faire plus confiance. Comme s'il devait asseoir désormais une position, celle du grand cinéaste turc que l'Europe adore. Alors que quand tu vois Uzak, tu sens qu'il s'en fout.

A mon avis, c'est parce que les films de ces grands auteurs se financent sur leur nom, leur réputation, leur carrière. Ceylan doit continuer de prouver quelque chose, alors il arrondit un peu mes bords. Mais la puissances inouïe de son cinéma, sa beauté, sa tendresse, sont bien là, plus vivantes que jamais (le film est parfois encore plus époustouflant que Le Poirier Sauvage, que nous adorons tous les deux)

Je suis sur que tu vas aimer.
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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sokol
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B-Lyndon a écrit :
mer. 21 juin 2023 17:39
A mon avis, c'est parce que les films de ces grands auteurs se financent sur leur nom, leur réputation, leur carrière.
C'est tout à fait le cas du dernier Wes Anderson
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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cyborg
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1 - FIREWORKS
2 - LUCIFER RISING
3 - SCORPIO RISING
4 - EAUX D'ARTIFICES


Quoi que de mieux pour (re)voir les film de Kenneth Anger qu'une projection sur grand écran, qui plus est au Max Linder à Paris.
Je pensais avoir vu les deux "rising", mais je n'avais vu en fait que Lucifer Rising.
Il est dingue de se dire que Fireworks date de 1947, tant pour son style expérimental que pour son esthétique ouvertement homoérotique, à une époque ou l'homosexualité est encore illégale aux USA. Longue rêverie très corporelle, ce film contient déjà tout son cinéma à venir. Lucifer Rising passe du monde des matelots au monde des motards, de la longue préparation d'une tenue (dans une optique cérémonielle, déjà) à une étrange séance entre orgie et saccage d'une église. L'occultisme n'est qu'à deux pas, et surgit dans Lucifer Rising, longue virée égyptienne ou se mélange les étrangetés de genres et d'époques, jusqu'au surgissement de soucoupes spatiales. Les images sur grand écran sont envoutantes, mais doivent une grande partie de leur force à la bande son composée par le fameux Bobby Beausoleil... Anger est connu pour avoir été le premier à mettre du rock sur des images (avec Lucifer Rising, en 69, donc), ne serait-il pas ici aussi le précurseur tout simplement du vidéo-clip (dur de ne pas penser, dans un tout autre genre, à Michael Jackson et son clip egyptien 10 ans plus tard...). Enfin, Eaux d'Artifices -brillamment présenté en ciné-concert avec saxo et retouches electroniques- m'a fasciné et de suite fait penser au magnifique Aguaespejo Granadino de José Val Del Omar, qui 2 ans plus tard filmera avec merveilles les jeux d'eaux de la ville de Grenade. Je doute que les deux réalisateurs se soient connu l'un l'autre (deux mondes différents ne se rencontraient pas si facilement au début des années 50...) mais il est troublant que les films se rapprochent à ce point. Anger se perd ici dans les jardins de la Villa d'Este (est de Rome) aux multiples fontaines, parmi lesquels déambule un.e protagoniste grimé.e, dont la coiffe ornée d'un toupet n'est pas sans rappeler les jets environnants. Abstrait et organique, le film est un doux enchantement.
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yhi
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Je sais pas pourquoi, mais je me rappelle que j'avais trouvé un fondu en particulier de Eaux d'artifices absolument magnifique
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groil_groil
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Plus il avance, plus le cinéma de Wes Anderson se radicalise, et plus il désoriente le public qui croyait l'aimer et qui souvent ne s'y retrouve plus. Personnellement, je l'aime de plus en plus en plus, je le trouve de plus en plus passionnant, émouvant dans sa retenue, intelligent dans sa conception et complexe dans sa narration. Et qu'on ne vienne pas me parler de maniérisme pour décrire son cinéma, Anderson n'est absolument pas maniériste, c'est un cinéaste musical, expérimental, un cinéaste qui travaille l'art de la miniature, et qui fait de cette conception de l'art miniature sa signature. Il y a un terme en musique expérimentale qui lui conviendrait parfaitement et que je vais réemployer pour le définir : c'est un réductionniste. C'est à dire qu'au lieu d'essayer de tirer le maximum d'effet il essaie de le réduire comme le ferai un réducteur de tête pour n'en conserver que l'essence, l'esprit. Pour beaucoup cela l'empêche de générer de l'émotion (je le lis beaucoup ça) pour moi c'est le contraire, ça en propose une sorte de quintessence réduite à son expression la plus simple et surtout, c'est là ou ça m'intéresse, la plus modeste. On lui reproche aussi de n'utiliser que des stars et de plus en plus, même pour des rôles anodins. Personnellement je trouve que ça participe du même élan, et qu'il ne s'agit jamais de name-dropping. Un acteur vient jouer son petit rôle, et Anderson propose une version condensée, minimale, presque minérale de tout son talent, comme si c'était sa carrière entière, ses rôles précédents, qui venaient se cristalliser dans ces quelques scènes, parfois quelques plans. Cela produit un effet de cinéma rare et précieux, là encore beaucoup liée à l'idée du passé. Car si le cinéma d'Anderson n'est évidemment pas un cinéma de petit malin (il est beaucoup trop intelligent pour cela), c'est n'est pas non plus un cinéma humoristique. L'adage populaire "L'humour est la politesse du désespoir" (qui vient je crois de Chris Marker, pas étonnant), semble avoir été inventé pour lui, tant son cinéma charrie de la mélancolie, de la tristesse profonde, mais que par pudeur et par respect de son spectateur à qui il refuse de faire du chantage émotionnel, il va dissimuler sous une apparence qui peut prêter à sourire. Ici le cadre, c'est une ville paumée au milieu du désert lui a pris le nom d'Asteroïd City depuis qu'une météorite est tombée en plein milieu de nulle part. La petite ville organise chaque année un concours de scientifiques en herbe, et plusieurs adolescents surdoués débarquent pour recevoir leur prix. On les suit eux, mais aussi beaucoup leurs parents, dont une mère célèbre actrice, et un père de 5 enfants, dont trois petites triplées, dont la mère vient juste de mourir. Il leur annonce d'ailleurs le décès une fois arrivés à Asteroïd City, alors qu'il est censé les remettre au grand-père, pensant ne pas savoir s'en occuper seul. De là bien sûr le scénario se déploie, mais il est entièrement marqué par les deux grands thèmes que sont la solitude et le deuil, thèmes qui sont traités comme je l'évoquait plus haut de manière réductionniste mais qui pour moi décuplent l'émotion. Et comme dans son autre grande réussite récente, The French Dispatch, Wes Anderson narre avec un système de matriochkas, où son film semble être une grosse commode dont chaque chapitre est un tiroir qui s'ouvre et déploie ces secrets. C'était un journal hier, c'est aujourd'hui une pièce de théâtre qui prend vie sous nos yeux, et dont on découvre l'auteur, le metteur en scène, le producteur, et toutes les scènes de vie qui vont avec. D'aucuns diront que cela les éloigne d'avantage de l'émotion du film, me concernant je vois ça comme un écrin qui protège la pureté et la force de cette émotion nichée en son sein.

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Tant mieux pour tout le monde, y compris pour lui, mais aussi pour nous, Paul Schrader est revenu en état de grâce après une longue traversée du désert et ça fait 3 films de suite qu'il tape juste et offre de oeuvres d'auteur profondes et dignes de Taxi Driver (qu'il n'a certes pas réalisé mais c'est vraiment tellement lui ce film) ou Amercian Gigolo. Il y eut First Reformed en 2017 (le meilleur des trois), puis The Card Counter en 2021 et enfin ce Master Gardener aujourd'hui. Dans les trois cas, Schrader revient à ce qu'il sait le mieux faire, la figure de l'homme abimé en quête de rédemption. Ici, je spoile je vous préviens, il s'agit d'un ancien néo-nazi versant hardcore, tatoué de partout et ayant fait parti d'un groupuscule d'assassins, qui a changé de bord, dénoncé tout le monde et qui est planqué sous une fausse identité, reconverti en méticuleux jardinier, responsable d'un jardin luxuriant d'une grande propriété appartenant à une riche septuagénaire, géniale Sigourney Weaver, comme toujours. Cette dernière lui demande de prendre en stage sa petite-nièce dont la mère vient de mourir. Des liens forts vont se tisser, il tombe amoureux de la petite-fille, alors qu'il couchait avec la grand-mère, cette dernière ne prenant évidemment pas la chose de la meilleure façon qui soit... Bref, on se fiche un peu du scénario, tant c'est la figure centrale de cet homme abimé et plein de secrets qui intéresse Schrader. Le film est bon franchement, et très beau esthétiquement, mais je ne peux pas m'empêcher de le trouver tout de même un peu en roue libre, comme s'il venait de trouver une nouvelle recette et qu'il se contentait de l'appliquer. En cela c'est sans doute le moins fort de la trilogie récente, même si cela reste évidemment recommandable.

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Western anecdotique, assez mal branlé et sans intérêt... Burt Lancaster ne fut pas aussi bon metteur en scène qu'acteur...
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cyborg
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Cinéaste mécanique par excellence, Wes Anderson à l'idée judicieuse de démarrer Asteroïd City par une panne de voiture. Un problème néanmoins : nous ne savons pas si cette panne sera du type simple, infime et express à réparer, ou du genre grave, couteuse et laborieuse. Pire que tout : la panne en question se révèlera n'être ni d'un genre ni de l'autre et restera méconnue, inidentifiable.

Alors que la panne est, à mon sens, la joie d'un possible déraillement, d'une sortie de route et l'ouverture d'un espace de jeu possible qui pourrait permettre à Anderson de remettre en question sa maniaquerie caractéristique, il s'empresse d'emprunter l'approche inverse, faisant de cette panne l'occasion d'un sur-place généralisé et d'un hommage appuyé au théâtre, medium vers lequel son cinéma à toujours plus ou moins secrètement tendu.

Comme le souligne non sans justesse Mathieu Macheret dans sa critique du Monde, impossible de ne pas faire un parallèle entre le confinement contraint des personnages du film et celui vécu par la planète entière il y a encore quelques mois à peine. Anderson à peut-être, lui aussi, souffert de cet immobilisme qui à pu lui donner envie de se détourner de la potentielle sclérose stylistique qui le guettait de loin en loin. S'il s'avère incapable de remettre en question au premier degré sa mise en scène, son esthétique, sa direction d'acteur, Anderson pense s'en sortir avec originalité en mettant en abime l'écriture de la pièce qui nous est joué. Le tout d'une façon diantrement appuyée, didactique et amplement commentée. Quant au potentiel risque de foisonnement des histoires et des strates de compréhensions celles-ci sont savamment soulignés, orientés et chapitrés bien comme il faut tout au long du film. Quand, enfin, le risque d'incompréhension partielle surgit, c'est le dramaturge qui s'interroge haut et fort sur ce qu'il est en train de faire... Car chez Anderson le contrôle de la mise en scène s'adresse in fine et avant tout à ses spectateurs eux-même, leurs regards, leurs pensées, leurs imaginations. Qu'elle semble loin l'incroyable énergie et légèreté du Carosse d'Or de Renoir qui, il y a 70 ans, rendait hommage et honneur au théâtre et à la vie dans un film d'une sidérante vitalité.

A la panne automobile mystérieuse répond l'autre point d'étrangeté du film : la météorite. Cette masse noire, inerte, mystérieuse, que chacun pourra interpréter comme l'incarnation de la mélancolie ou du deuil planant sur le film, est ainsi le véritable centre de gravité de l'histoire. Mais la grande chance du film en sera précisément la disparition. Le vol de l'objet par une puissance extraterrestre permettra ainsi de dérégler l’œuvre et de créer -enfin !- un hors-champs pour les personnages. Une bouffée d'espace et de jeu ou chacun, le temps de quelques instants, pourra s'interroger sur sa perspective, ses relations, ses motivations et ses raisons d'être : se questionner pour mieux se laisser être. Cette porte ouverte ne tardera malheureusement pas à être rapidement close par la prompt restitution de la dite météorite (après inventorisation, semble-t-il : la normalisation guette donc même les formes de vies de l'hyper espace avec Wes Anderson) par le même extraterrestre. Tout à t'il changé après cet épisode ? Non, bien au contraire, tout à repris sa place dans le monde, la voiture du héros peut enfin reprendre la droite route vers l'ouest et l'engrenage des choses reprendre sa course. Sorte d'anti-road-movie, Astéroïd City, suinte d'une nostalgie doucereuse qu'il ne faudrait surtout pas venir égratigner. Malheureusement je ne suis pas bien sur de pouvoir un jour trouver mon compte dans le cinéma délicatement mortifère et control-freak de Wes Anderson, pourtant non dénué d'indéniables qualités.
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Kit
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@groil_groil :( tu préfères perdre ton temps avec un western merdique (que moi aussi je n'aime pas) au magnifique "L'homme des vallées perdues" que je t'avais conseillé il y a quelques mois, t'inquiète je ne t'embêterai plus avec mes suggestions
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Tamponn Destartinn
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Kit a écrit :
dim. 25 juin 2023 09:14
@groil_groil :( tu préfères perdre ton temps avec un western merdique (que moi aussi je n'aime pas) au magnifique "L'homme des vallées perdues" que je t'avais conseillé il y a quelques mois, t'inquiète je ne t'embêterai plus avec mes suggestions

https://www.youtube.com/watch?v=V0cwBNlTy-4
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Tamponn Destartinn a écrit :
dim. 25 juin 2023 20:42
Kit a écrit :
dim. 25 juin 2023 09:14
@groil_groil :( tu préfères perdre ton temps avec un western merdique (que moi aussi je n'aime pas) au magnifique "L'homme des vallées perdues" que je t'avais conseillé il y a quelques mois, t'inquiète je ne t'embêterai plus avec mes suggestions

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Tamponn Destartinn a écrit :
dim. 25 juin 2023 20:42
Kit a écrit :
dim. 25 juin 2023 09:14
@groil_groil :( tu préfères perdre ton temps avec un western merdique (que moi aussi je n'aime pas) au magnifique "L'homme des vallées perdues" que je t'avais conseillé il y a quelques mois, t'inquiète je ne t'embêterai plus avec mes suggestions

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Kit a écrit :
dim. 25 juin 2023 09:14
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@groil_groil :( tu préfères perdre ton temps avec un western merdique (que moi aussi je n'aime pas) au magnifique "L'homme des vallées perdues" que je t'avais conseillé il y a quelques mois, t'inquiète je ne t'embêterai plus avec mes suggestions
pourquoi tu prends mal les choses, comme ça ? Evidemment que je prends en compte les suggestions, je me souviens notamment de Cyborg qui m'a conseillé des films il y a 3 ans, que je n'ai pas encore vus, mais je m'en souviens très bien, j'en ai même acheté un en dvd, mais je ne sais pas comment fonctionne ta cinéphilie, moi elle est tout sauf linéaire, et j'ai surtout des milliers (le mot est réel) de films en attente chez moi, donc ce n'est pas parce qu'on me donne un conseil que je vais forcément voir le film dans la foulée, mais ce n'est pas non plus pour cela que je vais l'oublier.
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Une jeune femme agricultrice et son futur mari tentent de reprendre l'exploitation paternelle en faillite, avec projet de la moderniser selon des normes environnementales contemporaines. Pour cela, elle doit avoir l'aval d'un élu local, qui fait mine de l'aider mais dont la seule intention véritable est de coucher avec elle. Il parvient à ses fins, elle est médusée, n'ose se rebeller, et subit un viol qu'elle ne révèle pas de suite. Mais face à l'échec de son projet, ainsi que celui de sa vie conjugale, la jeune femme décide de ne plus se taire. La Terre des Hommes a tout d'un premier film (même si en fait il s'agit d'un second), dans le choix du sujet, son implantation territoriale, sa mise en scène, ses défauts aussi, c'est parfois un peu cliché, mais l'ensemble est tout à fait correct, digne d'intérêt, et je retiens surtout le courage avec lequel le jeune cinéaste dénonce ce patriarcat ultra violent, puisqu'il va jusqu'au viol, mais au viol nié, que le coupable tente de faire passer comme un consentement, qui règne encore dans de trop nombreux milieux ou professions.

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Grande joie de le revoir en salle, et bonheur inusable. Je ne reviens pas sur le film, que tout le monde connait par coeur, mais sur deux détails, qui les deux concernent les enfants. Lorsqu'on voit la mer pour la première fois, c'est via un effet de cadre dans le cadre, et la caméra de Tati est à l'arrière d'une voiture, avec les deux enfants d'une famille, et nous découvrons la mer par leurs yeux. Cette scène est sublime et m'a en effet rappelé que c'était ainsi qu'enfants nous découvrions tous la mer, les trajets se déroulaient en voiture, on partait de nuit, on roulait des heures et au matin, la jour se levait, on commençait à sentir l'air changé, on cherchait à droite à gauche, en s'étirant le cou au maximum, et puis hop, d'un coup elle était là, la mer, qu'on avait attendue toute l'année. Tati filme ce moment de manière merveilleuse. L'autre concerne un gag où un petit gamin d'à peine 5 ans va acheter deux cornets de glaces chez le glacier ambulant, une pour lui, une pour son copain. On le voit rentrer avec et peiné pour ouvrir la porte de la pension car ses deux mains sont prises. Il finit par ouvrir la porte en penchant dangereusement l'un des cornets et la boule de glace est prête à tomber, l'autre cornet est juste en dessous, et puis finalement, miraculeusement, alors que tout s'y prêtait, la boule de glace ne tombe pas, il ouvre la porte et rentre avec ses deux cornets intacts. Ce gag, ou cet anti-gag car justement il ne se produit jamais, est révélateur à la fois de l'intelligence cinématographique de Tati (il construit une scène entière sur un gag qui n'arrive pas, misant sur la croyance et le respect qu'il a de son spectateur qui va réaliser le gag à sa place), mais surtout dit beaucoup sur le rapport de Tati aux enfants. En fait j'ai réalisé que jamais Tati ne fait un gag aux dépends des enfants. Il ne se moque jamais d'eux, ne les mets jamais dans une situation de faiblesse, de victime, ce ne sont jamais les enfants qui subissent les gags, mais ce sont au contraire eux qui les créent (par exemple les sifflements de Mon Oncle qui font tourner la tête des adultes se cognant alors aux lampadaires).

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A la demande de mon fils qui a eu, je ne sais pas comment, envie de voir cette série. J'avais déjà vu ça une fois, c'est inspiré des films de pirates à l'ancienne et c'est, comment dire, pas terrible...

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J'avais interrompu mon cycle Argento en attendant que Carlotta ne sorte ce film annoncé en bluray, c'est chose faite, et c'était chouette de le revoir, sachant que, comme beaucoup d'entre nous, je confondais toujours un peu ses trois premiers, notamment à cause des titres animaliers. Celui-ci est le second, et est moins bon que le 1er, mais a peu près d'un niveau du 3ème. C'est un bon giallo, créateur d'un genre dont Argento s'écartera dès que celui-ci se développera pour proposer des cauchemars visuels plus personnels, un peu à l'instar d'un Lucio Fulci.

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J'avais oublié que ce Godard avec gagné le Lion d'Or à Venise et que ça avait désorienté pas mal de critiques italiens... Le film est toujours bien, très dans ce que Godard développait à l'époque, avec pas mal d'humour, notamment dans le perso du tonton joué par Godard lui-même. Detmers est super, c'est filmé en partie à Trouville - même si il ne filme quasiment que les vagues - et je me disais que si on n'avait pas le titre du film et le prénom de l'héroine il serait bien difficile de deviner qu'il s'agissait d'une adaptation...
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cyborg a écrit :
ven. 23 juin 2023 15:56
Car chez Anderson le contrôle de la mise en scène s'adresse in fine et avant tout à ses spectateurs eux-même, leurs regards, leurs pensées, leurs imaginations.
De la mise en scène de son film ou de la pièce de théâtre qui s'y joue ?
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Jean-Marie Straub
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groil_groil a écrit :
lun. 26 juin 2023 10:22
et je me disais que si on n'avait pas le titre du film et le prénom de l'héroine il serait bien difficile de deviner qu'il s'agissait d'une adaptation...
A partir des années 80, Godard disait qu'il faisait des films grâce à la musique (c'était uniquement elle qui l’inspirait). C'est un peu comme l'inspiration pour son "Adieu au langage" : ça aurait été un couple de politiques (Segolène et François H. qui voulait le pouvoir - je l'ai cité). C'est dire ce que voulait dire pour Godard 'inspiration' (j’aurai bien aimé voir son film sur les Gilets Jaunes : on n'en aurait, bien évidement, pas vu un seul :D)
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sokol a écrit :
lun. 26 juin 2023 16:38
groil_groil a écrit :
lun. 26 juin 2023 10:22
et je me disais que si on n'avait pas le titre du film et le prénom de l'héroine il serait bien difficile de deviner qu'il s'agissait d'une adaptation...
A partir des années 80, Godard disait qu'il faisait des films grâce à la musique (c'était uniquement elle qui l’inspirait). C'est un peu comme l'inspiration pour son "Adieu au langage" : ça aurait été un couple de politiques (Segolène et François H. qui voulait le pouvoir - je l'ai cité). C'est dire ce que voulait dire pour Godard 'inspiration' (j’aurai bien aimé voir son film sur les Gilets Jaunes : on n'en aurait, bien évidement, pas vu un seul :D)
et marrant d'ailleurs d'adapter Carmen en n'utilisant que de la musique de Beethoven :D
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groil_groil a écrit :
lun. 26 juin 2023 10:22
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A la demande de mon fils qui a eu, je ne sais pas comment, envie de voir cette série. J'avais déjà vu ça une fois, c'est inspiré des films de pirates à l'ancienne et c'est, comment dire, pas terrible...
Je me souviens que tu étais plus enthousiaste à l'époque (oui j'ai une bonne mémoire pour ce genre de chose :D).
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cyborg
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sokol a écrit :
lun. 26 juin 2023 16:04
cyborg a écrit :
ven. 23 juin 2023 15:56
Car chez Anderson le contrôle de la mise en scène s'adresse in fine et avant tout à ses spectateurs eux-même, leurs regards, leurs pensées, leurs imaginations.
De la mise en scène de son film ou de la pièce de théâtre qui s'y joue ?
Honnêtement -si on omet le noir et blanc- il n'y a aucune différence de mise en scène entre ces deux versants du film, non ?
Alors...
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sokol
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groil_groil a écrit :
lun. 26 juin 2023 16:55
et marrant d'ailleurs d'adapter Carmen en n'utilisant que de la musique de Beethoven :D
Voilà : c'est Godard quoi. Non seulement il dépouille, mais il brouille (les pistes) également
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groil_groil
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Pale a écrit :
lun. 26 juin 2023 17:29
groil_groil a écrit :
lun. 26 juin 2023 10:22
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A la demande de mon fils qui a eu, je ne sais pas comment, envie de voir cette série. J'avais déjà vu ça une fois, c'est inspiré des films de pirates à l'ancienne et c'est, comment dire, pas terrible...
Je me souviens que tu étais plus enthousiaste à l'époque (oui j'ai une bonne mémoire pour ce genre de chose :D).
:D
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Tyra
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cyborg a écrit :
mar. 27 juin 2023 10:22
sokol a écrit :
lun. 26 juin 2023 16:04
cyborg a écrit :
ven. 23 juin 2023 15:56
Car chez Anderson le contrôle de la mise en scène s'adresse in fine et avant tout à ses spectateurs eux-même, leurs regards, leurs pensées, leurs imaginations.
De la mise en scène de son film ou de la pièce de théâtre qui s'y joue ?
Honnêtement -si on omet le noir et blanc- il n'y a aucune différence de mise en scène entre ces deux versants du film, non ?
Alors...
New York : noir et blanc, format 4/3 de l'image, que des plans larges et plans d'ensemble (mais qui n'empêchent pas des scènes sublimes comme la séquence de répétition finissant par le baiser homosexuel).
Asteroid City : couleur, format cinémascope, toute une grammaire cinématographique beaucoup plus variée.
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B-Lyndon
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sokol a écrit :
mar. 27 juin 2023 10:33
groil_groil a écrit :
lun. 26 juin 2023 16:55
et marrant d'ailleurs d'adapter Carmen en n'utilisant que de la musique de Beethoven :D
Voilà : c'est Godard quoi. Non seulement il dépouille, mais il brouille (les pistes) également
Mon prof de ciné avait une super blague là-dessus :

"On peut dire que Godard brouille l'écoute...sans vouloir faire de contrepèteries..."


voilà c'était ma contribution à cette discussion :D :D
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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