Le Centre de Visionnage : Films et débats

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sokol
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groil_groil a écrit :
mer. 4 nov. 2020 09:26
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Ca y est, je l'ai vu. Bon, je l'ai plutôt aimé. C'est très Leanien d'ailleurs.
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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groil_groil
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ahhh quel soulagement :D <3
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cyborg
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asketoner a écrit :
ven. 6 nov. 2020 10:57
Le mépris

Moi aussi le film m'a soufflé quand je l'ai revu il y a quelques semaines :love2:
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Ilan
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2e SOUS-SOL - Frank Khalfoun (2008)

Ce film avait été boudé à l'époque, je me souviens de l'accueil très tiède qu'il avait reçu et qui m'avait dissuadé d'aller le voir, mais c'est peut-être parce qu'il est sorti dix ans trop tôt.
Produit en 2007, 2e sous-sol préfigure l'ère #MeToo à de nombreux égards : le harcèlement dans le milieu professionnel, le harcèlement sur l'espace public, l'héroïne qui encaisse gentiment, qui est diplomate et arrangeante parce qu'il faut pas faire de vagues, jusqu'au moment où ça devient absolument insupportable et où ça franchit toutes les bornes, la police totalement impuissante, les mecs-Tartuffes qui se prétendent alliés de la cause et qui sont en réalité les pires des harceleurs. Visionnaire. 😃
Bon, le film en lui-même n'est pas foufou à part ça, le tandem Aja-Khalfoun a fait mieux quelques années plus tard avec le remake très sale et malaisant de Maniac.


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HOT FUZZ - Edgar Wright (2007)

C'est plein d'idées, certaines sont bonnes clairement, mais c'est un peu trop geeko-référentiel pour moi... à la fin je décrochais vraiment, comme dans Shaun of the dead d'ailleurs. (J'avais bien aimé Le dernier pub avant la fin du monde par contre). Wright doit vraiment être canalisé...


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EFFETS SECONDAIRES - Steven Soderbergh (2013)

Sujet de départ passionnant : si une personne qui prend un anti-dépresseur puissant, qui altère ses facultés mentales, commet un meurtre... doit-elle être condamnée ? Le psy qui lui a prescrit le médicament était-il tenu d'envisager un éventuel passage à l'acte ? Peut-il éventuellement être tenu responsable ? S'il ne l'est pas pénalement, l'est-il "déontologiquement" ?
Hélas dans sa deuxième partie le film s'éloigne de cet arc narratif pour tomber dans une banale histoire de manipulation capillo-tractée, mal écrite et bourrée d'invraisemblances.
Belle mise en scène sinon, et acteurs excellents. Vinessa Shaw méconnaissable. Elle n'est ici pas du tout la même personne que dans Two lovers, ce qui prouve à quel point c'est une grande comédienne. Dommage qu'on la voie si peu.
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asketoner
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Vivre sa vie, Jean-Luc Godard, 1962

La tristesse même.
C'est un film très angoissé, habité par la mort, son présage. Il y a un fatalisme un peu écrasant. Peut-être parce que Godard a fait "une femme est une femme" (et ici dans une scène Anna Karina étend encore un peu plus le domaine des tautologies), alors que Gertrud Stein écrit "rose is a rose is a rose is a rose", débusquant ainsi la morale planquée derrière l'évidence, transformant l'évidence en nouvel enjeu, n'oubliant pas les ombres portées sur les choses, par nos consciences troubles, qui empêchent les corrélations trop pures.
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Détruire, dit-elle, Marguerite Duras, 1969

Un des films les plus drôles de Marguerite Duras. On est dans une sorte d'hôpital psychiatrique. Les personnages présents parlent de ceux qui sont absents, en promenade, jusqu'à une esplanade qu'ils n'ont encore jamais vue. Ils n'arrêtent pas de se proposer d'aller dans la forêt mais ils n'y vont jamais. Il y a un trio totalement malsain qui s'entiche d'une femme seule et tente de la faire entrer dans leur folie. Ils font une partie de cartes ensemble, la partie dure longtemps, au bout d'un moment la femme remarque qu'ils jouent bizarrement, l'un des membres du trio dit froidement : "Nous ne savons pas jouer." C'est ça qui est très beau chez Duras, dans son cinéma : on ne fait pas semblant de faire semblant : on fait semblant et on le dit, parce qu'on ne sait pas faire autre chose que jouer à la vie sans y croire. Et pour ce qui est du cinéma c'est pareil : Duras joue à faire du cinéma mais n'y croit pas une seconde, et cette incrédulité fondamentale fait son style.
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Y a quand même certains films où elle y croit ;)

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Ce film coche absolument toutes les cases du cinéma pour 3ème âge, il ne manque rien. Mais malgré ça, je trouve l'ensemble assez touchant et réussi (enfin une réussite toute modeste hein), notamment grâce aux deux comédiens, mais aussi parce que le film a l'intelligence de ne pas leur faire vivre de romance alors qu'il y en a dans tous les films de ce genre. Là c'est un histoire de nez, on ne parle pas d'autre chose que de nez. De quelques névroses aussi, mais surtout pas de romance.

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Suite du film de Comencini, par Dino Risi cette fois, avec le même duo de comédiens, et en couleurs. Le film est moins réussi que le premier mais il possède un côté désuet absolument charmant, accentué par la beauté de Sorrente où est filmé l'ensemble. Et puis, je me répète hein, mais Sofia Loren est tellement irrésistible qu'elle te ferait aimer n'importe quoi...

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Un film d'espionnage inspiré librement de l'affaire Ben Barka, film ultra rigoureux et sérieux, avec le casting le plus hallucinant qui soit, et une des grandes BOF de Morricone, irréprochable donc, on reconnait bien Boisset là-dedans, mais tellement sérieux qu'il manque de failles, et que le spectateur, en tout cas moi, a du mal à trouver sa place et reste constamment à l'extérieur. En trouvant ça bien objectivement, mais en n'étant jamais impliqué.
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groil_groil a écrit :
lun. 9 nov. 2020 10:32
Y a quand même certains films où elle y croit ;)
Oui sans doute mais pas au cinéma classique disons, où on verrait des gens faire des choses et où on devrait croire qu'ils les font vraiment.
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ah oui ça tout à fait ;)
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Tempo di viaggio, Andrei Tarkovski & Tonino Guerra, 1983

Tarkovski et Guerra préparent Nostalghia, répondent à des questions posées par des étudiants, se remémorent un voyage fait ensemble pour repérer les lieux du film à venir... Ce n'est pas très passionnant, les caractères des deux hommes s'avérant très antithétiques (Guerra s'énerve et Tarkovski boude).


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Numéro deux, Jean-Luc Godard, 1975


Un film extrême à tout point de vue, politiquement, moralement, esthétiquement.
Esthétiquement, c'est simple : Godard filme presque uniquement des télévisions, c'est-à-dire des images déjà tournées et diffusées par des postes de télévision agencés dans le cadre, parfois coupés, toujours petits (il y a plus de noir que de lumière).
Pour le reste, on ne peut pas ne pas penser à la question posée dans son premier film, puis dépliée dans toute l'oeuvre à venir, et trouvant ici une forme de point culminant : c'est quoi, dégueulasse ?
Numéro deux propose une réponse large : tout peut l'être, le travail, le sexe, le couple, les enfants, l'amour, la politique, le corps. Et Godard montre ça avec une forme de tendresse paradoxale, un peu résignée. Il semble aller au bout d'un désespoir, d'une désillusion. C'est un film très courageux. Une enfant écrit au tableau : avant de naître j'étais morte. Ca résume bien l'extrémisme du film, qui se renouvelle au fur et à mesure, toujours plus accablant, terrible. On dirait presque un film de Haneke (sans la raideur bourgeoise (d'ailleurs Godard, à la fin du film, apparaît recroquevillé sur lui-même) : bref, le contraire d'un film de Haneke).

(Et ce que fait Godard au début du film est inouï. On dirait une performance poétique. Il aura inventé un langage, pas seulement cinématographique : une parole aussi.)
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Images d'un monde visionnaire, Henri Michaux & Eric Duvivier, 1963

Tentative (désespérée) de reproduire les visions qui surgissent lors de la prise de mescaline ou de hachich. On voit bien que Michaux méprise le cinéma, qui sans n'est pour lui qu'un art technique, mais c'est touchant (parce qu'il l'annonce d'emblée, au contraire de Jodorowski par exemple, qui pense être un artiste alors qu'il n'a pas d'art). Images d'un monde visionnaire n'a en effet pas grand chose de visionnaire, Michaux et son complice (sans doute quelqu'un pour tenir cette chose dégoûtante qu'est une caméra) filment des gens défoncés qui se prennent la tête entre les mains, et des couleurs qui scintillent, comme n'importe quel junkie fan de ses trips. Les visions semblent mortes bien plus qu'étonnantes ou merveilleuses, comme des papillons épinglés dans un album par un taxidermiste.

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La dentellière, Claude Goretta, 1976

C'est comme Loulou mais à l'envers, avec Huppert en prolo cette fois.
Sauf que ce n'est pas vraiment Loulou non plus, puisque Pialat filmait d'abord des désirs (désir petit-bourgeois d'un côté (ou désir conformiste), et désir plus sauvage de l'autre, indomptable, non domesticable), quand Goretta s'attache aux signes constitutifs de deux classes sociales séparées, qu'un amour réunit pour un temps.
Le film est très désespéré, le rapport de classes tournant vite à l'absence de rapport. C'est très subtil aussi, parce qu'à la fin tout le monde est responsable de cet échec (de cette mort de l'amour), et pas seulement les deux protagonistes, mais aussi leur famille et leurs amis, vivant ainsi, dans la célébration de leurs impossibilités manifestes, plutôt que dans la transgression. Isabelle Huppert (sa mollesse terrible, son silence, sa soumission) m'a fait penser au livre de Nathalie Quintane : que faire des classes moyennes ?, que j'aime tant.
La fin est étrange, elle vient mythifier au lieu de révéler, mais peut-être s'agit-il, là aussi, pour Goretta, d'accuser le déni de ses personnages.
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groil_groil
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En pleine retro Boisset, je revois ce film qui m'a tant marqué durant mon enfance, par sa violence si réaliste et par sa prophétie qui plus le temps avance plus elle ressemble à la réalité. Ce film a pu sembler kitsch 10 ou 20 ans après sa sortie, mais suffisamment de temps est passé désormais pour qu'on le voit comme ce qu'il est vraiment, et je pense que, malgré les défauts inhérents aux productions française du début des années 80, c'est vraiment un bon film. Etonnant aussi car je n'avais jamais remarqué que le film a été tourné entièrement dans une ville de Yougoslavie (probablement Belgrade) qu'on nous vend comme Paris. Cette délocalisation, sans doute due à une coproduction et à des économies de tournage, est en fait l'un des principaux atouts du film. Cela lui donne un vrai aspect de film d'anticipation, un peu comme dans un vieux Bilal, et la ville qu'on croit être Paris devient d'une tristesse à pleurer, d'une architecture sévère et triste faite de grands bâtiments modernes et sales en même temps, comme si la France avait les aspects physiques d'une dictature. Ce que les aspects du jeu télévisé "Le Prix du Danger" laissent par ailleurs sous-entendre.

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Je mène aussi une rétrospective Claude Goretta, cinéaste suisse que je découvre et qui me passionne. J'espère qu'un jour ses films seront restaurés et surtout édités, car j'ai par exemple été obligé de voir La Provinciale dans un vieux rip tv de l'époque assez catastrophique alors que le film a l'air d'une grande beauté plastique. Mais cela ne m'a absolument pas empêché d'apprécier ce beau film a sa juste valeur. On y suit une jeune femme de 31 ans, jouée magnifiquement par Nathalie Baye (dont le sourire à l'époque était le plus beau sourire du cinéma), qui quitte sa Lorraine où elle se trouvait au chômage, abandonnant famille et amis, pour, comme on le disait à l'époque, tenter sa chance à Paris. Le film raconte ça, la solitude de cette jeune femme dans une ville qu'elle ne connait pas. Sa rencontre avec une homme marié avec qui elle a une aventure amoureuse (Bruno Ganz), alors qu'elle ne veut pourtant pas être une parenthèse pour un homme. Celui-ci, qui semble l'aimer véritablement, partira au Japon suite à une promotion professionnelle. Mais aussi et surtout le film montre cette jeune femme se débattre pour trouver un emploi, et ses échecs répétitifs qui la mèneront jusqu'à l'humiliation la plus totale. Mais dans un ultime sursaut d'orgueil, elle relèvera la tête et décidera de retourner dans ses terres natales. La ville de Paris est montrée de manière froide, comme un gros monstre qui est capable d'avaler lentement les individus isolés et perdus. Pour être "monté" à Paris sans travail il y a plus de 20 ans, j'ai évidemment retrouvé pas mal de choses superbement captées par Goretta ici, l'idée que cette ville peut littéralement vous avaler, vous broyer si vous ne vous débattez pas suffisamment.

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Autre rétrospective que je mène en ce moment : Jean Rollin, et je me régale. Ce film-ci est là aussi une belle réussite, malgré comme d'habitude ses nombreux défauts mais on s'en fiche totalement. C'est l'incarnation même du film gothique, avec tout ce que cette terminologie peut avoir de ridicule, et quelque part ce film c'est un peu comme le premier album de Black Sabbath.

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Joie immense de revoir enfin ce film rarissime de Danièle Dubroux, celui qui suit Le Journal d'un Séducteur, que j'avais vu en salle à sa sortie mais que je n'avais jamais réussi à revoir depuis. Amis éditeurs, à quand un beau coffret intégrale de l'oeuvre de Dubroux, ça me parait essentiel. J'ai beaucoup aimé le revoir, et c'est dingue de constater comme ce film est étrange et qu'il déjoue toutes les attentes qu'on peut en avoir. D'une liberté et d'une audace folle, le film doit aussi beaucoup à la qualité de ses interprètes, la toute jeune Julie Depardieu magnifique et qui rend ce drôle de rôle crédible avec sa présence lunaire, François Cluzet du temps de sa superbe, jouant un jaloux petit manipulateur pervers narcissique aux grands accès de colère à la perfection, et surtout le grand Serge Riaboukine, acteur que j'ai toujours adoré, sorte de Depardieu doux, mais qui n'a malheureusement pas eu la carrière qu'il mérite, malgré quelques grandes réussites (ce film, Les Marchands de Sable de Salvadori ou Peau d'homme coeur de bête d'Hélène Angel.

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Je n'avais pas aimé la première fois et je ne sais pourquoi j'ai voulu le revoir, sans doute l'appel du thriller du dimanche soir un mercredi férié. Bref, malgré une situation de départ prometteuse, le film est un vrai naufrage à force de situations pas crédibles pour un sou et de raccourcis scénaristiques totalement inadmissibles, d'autant que la mise en scène pataude de Figgis ne rattrape absolument pas ça. Et puis Gere et ses dents de lapin dans le rôle du mal absolu j'ai beaucoup de mal à y croire...
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Le passager, Abbas Kiarostami, 1974

(Rien que pour cette séquence, de l'appareil photo volé, bravo...)

C'est très beau, très émouvant. On pourrait résumer le film comme ça : un petit garçon apprend que le désir est une quête, pas une conquête. Qu'il importe peu d'atteindre, beaucoup de cheminer. Et que face à l'objet du désir, il arrive qu'on s'évanouisse.
Tout Kiarostami est déjà là dans ce premier long-métrage (auquel Jafar Panahi répondra directement 25 ans plus tard avec Hors-Jeu, qui est exactement le même film mais réactualisé).

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Tout va bien, Jean-Luc Godard & Jean-Pierre Gorin, 1972

C'est bien (évidemment) mais un peu lourd, ou plutôt appliqué. Ca (le film) manque de corps... c'est-à-dire de fluides, de mouvements contraires... La technique (les travellings impressionnants, les décors...) a quelque chose de très écrasant. Jane Fonda s'en sort bien mais Yves Montand patauge (il n'a très clairement aucun humour) ; je me demande pourquoi Godard, si souvent mal à l'aise avec les comédiens professionnels, n'a pas constitué une petite troupe de gens qu'il aime bien diriger, avec qui il lui est facile de travailler.
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asketoner a écrit :
mer. 11 nov. 2020 14:34
Nathalie Quintane est une poétesse, c'est ça ?
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
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asketoner a écrit :
jeu. 12 nov. 2020 12:29
Tout va bien, Jean-Luc Godard & Jean-Pierre Gorin, 1972

C'est bien (évidemment) mais un peu lourd, ou plutôt appliqué. Ca (le film) manque de corps... c'est-à-dire de fluides, de mouvements contraires... La technique (les travellings impressionnants, les décors...) a quelque chose de très écrasant. Jane Fonda s'en sort bien mais Yves Montand patauge (il n'a très clairement aucun humour) ; je me demande pourquoi Godard, si souvent mal à l'aise avec les comédiens professionnels, n'a pas constitué une petite troupe de gens qu'il aime bien diriger, avec qui il lui est facile de travailler.

Tu as vu "Letter to Jane" ? J'ai un problème éthique avec ce film pourtant irréprochable adressé à Jane Fonda (et pourtant Godard ne me pose jamais de problème éthique, enfin je veux dire, il me pose plein de problèmes, mais je trouve jamais que sa manière de les poser, en elle-même, pose un problème, surtout éthique). Et quelque chose me dit qu'en le voyant, tu m'aideras à l'élucider.
Et puis il paraît que les problèmes posés, c'est ton truc. :D
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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Goretta encore. Ce film-là se déroule dans une petite ville suisse. Depardieu est le fils d'un menuisier / fabricant de meubles qui victime d'un AVC, ne peut plus assurer la direction de sa petite entreprise. Son fils le remplace tant bien que mal. Et, alors qu'il n'arrive pas à payer les traites ni les salaires de ses employés, il décide de réaliser des braquages dans les environs, récoltant ainsi de l'argent pour sauver des emplois. Lors d'une attaque d'un bureau de Poste, il tombe sur Marlène Jobert, guichetière qui s'évanouit à la vue du pistolet. Depardieu ôte son déguisement et va la secourir, se mettant ainsi à nu. Entre eux, va se nouer une drôle de relation, lui insistant pour entrer dans sa vie, alors qu'elle ne souhaite aucun rapport avec ce criminel "pas si méchant que ça". Ils font finir par tomber amoureux, mettant à mal la liaison de la jeune femme avec son petit ami (Philippe Léotard, peu présent à l'écran mais très bien), Marlène allant jusqu'à l'aider dans ses larcins. Ce beau, doux et étrange film, qui se passe beaucoup en campagne, se cristallise autour d'un arbre, un bel arbre solide et élancé, presque un arbre Kiarostamien, au sein duquel réside un creux dans lequel Depardieu prend l'habitude de monter pour cacher arme et déguisement (Jobert y cachera aussi de l'argent). La métaphore autour de cette arbre est sans doute la plus belle idée du film, car il est vu comme le seul repère, la seule chose solide et immuable, le seul endroit où l'on se retrouve et s'unit, c'est un postulat, presque un monolithe, dans un monde où tout est incertain, des conditions sociales des ouvriers, de leur travail même, jusqu'aux relations amoureuses.

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Deux jeunes filles se rendent d'Allemagne à Vérone, Italie, pour les fêtes de Noël. Leur train immobilisé, elles décident d'en prendre un autre, quasi désert, dans lequel elles vont être violées, torturées et tuées avant d'être balancées dehors par deux malfrats paumés, accompagnés d'une bourgeoise dominatrice rencontrée dans le train précédent (excellente Macha Méril qui aimait se frotter au bis). Le film a tout sur le papier d'un film dégueulasse et complaisant mais il ne l'est pas et c'est plutôt un bon film. Pour deux raisons principales; La première c'est qu'il est mis en scène pas le vénitien Aldo Lado et que c'est un excellent metteur en scène (troisième film que je vois après le chef-d'oeuvre Qui l'a vue mourir ? et le très bon Je suis vivant), et que, malgré le sujet, le cinéaste fait tout pour éviter la condescendance et la complaisance, et que ses idées de mise en scène prennent le dessus et évitent le scabreux. La seconde, c'est que ce genre de film autorise la revanche. C'est un sentiment peu glorieux, mais le film se termine par la mort de ces deux types par le père d'une des deux jeunes femmes. Loin de prôner la loi du talion, je dirais que Lado rééquilibre les forces et les sentiments, et crée en faisant cela un film où un sentiment ne domine pas l'autre. C'est difficile à expliquer, mais disons que voir des adolescentes se faire trucider est abject en soi, voir un homme en tuer deux autres à la carabine l'est tout autant, mais Lado dans les deux cas trouve la bonne distance pour faire passer l'un et l'autre et décrit ainsi un monde de violence très noir et sans aucun espoir. Un terrible constat, et un film de genre qui a une portée plus lointaine que ce qu'on pourrait croire de premier abord.

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Rattrapage de l'avant-dernier que j'avais raté en salle. C'est l'un des films les plus simples de son auteur, la narration est linéaire et ultra limpide, je n'irais pas jusqu'à dire fainéante même si je pense qu'il fait partie de ses films les plus rapidement bouclés (enfin, ne le sont-ils pas tous, et cet état de fait ne contribue-t-il pas au charme de ceux-ci), mais ça fait du bien de voir son cinéma s'aérer un petit peu. Il y a aussi quelque chose de très émouvant dans ce film, c'est le personnage du vieux poète, qui se sait à la fin de sa vie, personnage très proches de certains personnages d'Ozu ou de Kurosawa (je pense à Vivre) et pour le coup assez inédit dans le cinéma d'Hong Sang-Soo.
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B-Lyndon a écrit :
jeu. 12 nov. 2020 19:32


Tu as vu "Letter to Jane" ? J'ai un problème éthique avec ce film pourtant irréprochable adressé à Jane Fonda (et pourtant Godard ne me pose jamais de problème éthique, enfin je veux dire, il me pose plein de problèmes, mais je trouve jamais que sa manière de les poser, en elle-même, pose un problème, surtout éthique). Et quelque chose me dit qu'en le voyant, tu m'aideras à l'élucider.
Et puis il paraît que les problèmes posés, c'est ton truc. :D

Non pas encore, mais je le verrai je pense. ;)
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The Decay of Fiction - Pat O'Neill

Des acteurs, grimés comme il se doit, rejouent des gimmicks de films noirs hollywoodiens. Ils sont incrustés en transparence, fantomatiques, sur différents lieux d'Hollywood, leur quartier général semblant être le (véritable) Ambassador Hotel. La caméra parcourt la ville, effectuant des mouvements typiquement cinématographiques, le temps s’accélère parfois, les heures et les saisons passent.
Voilà à peu près tout ce qui constitue l'heure du film expérimental The Decay of Fiction. Sa simplicité et répétitivité est autant sa grande faiblesse que sa grande force, ouvrant potentiellement le film vers l'infini.

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Aferim! - Radu Jude

De la scène cinématographique roumaine de cette dernière décennie je ne connaissais pas encore Radu Jude, pourtant auteur de plusieurs courts et longs métrages. A la différence de ses collègues, Jude (pour ce que j'en ai vu) semble prendre une voix plus légère voir humoristique : tandis que The Tube with a Hat décrit le trajet d'un père et son fils pour faire réparer leur vieux téléviseur, Shadow of a Cloud décrit le quotidien d'un prêtre bien empêtré avec ses fidèles. Aferim! est plus original encore puisqu'il s'agit d'un en film en costume, picaresque en diable, dans lequel un policier et son fils partent à la recherche, puis ramènent, l'esclave d'un seigneur local. Le long trajet à cheval est l'occasion de moults rencontres et digressions, toujours sources de réflexion pour le héros et d'éducations pour son fils. Les traits excessifs déployés peuvent finir par lasser, mais les échos incessants avec notre époque donnent néanmoins un plaisant mordant à l'oeuvre.


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Radio On - Chris Petit

Long et lent road movie spleenesque à l'anglaise, de Londres jusqu'au côtes de Bristol, baigné d'un noir et blanc glacial et carburant à la musique d'alors (sont ouvertement cités et joués Kraftwerk, Devo, Bowie... et Sting y joue même un petit rôle). Fantomatique en diable - on comprend vite pourquoi Mark Fisher en a fait une de ses référence - le film fini surtout par convaincre comme témoignage d'une époque (sous l'angle dépressif) que pour ses pures qualités cinématographiques.


Quelqu'un l'a vu ? Groil ? Enfin je pense à la musique qui pourrait te plaire...


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Chouette ces temps ci de voir quelques films qui ont marqué les débuts de ma cinéphilie il y a une 15aine d'années...
Je ne vais pas revenir sur les qualités indéniables du film (tendance chef d'oeuvre) mais je crois que ce qui me plait le plus est la façon dont Antonioni continue ici sa quête "moderne" dans la seconde partie de sa carrière, et d'autant plus comment il la conclue (P:R étant à mes yeux son dernier bon film, trouvant identification d'une Femme mauvais et boursouflé, et n'ayant pas vu les suivants "post-accident" qui n'ont pas du tout une bonne réputation).
Ce qui me saute aux yeux, avant tout, est la proximité du film avec La Mort Au Trousse, cette histoire d’identité à retrouver à travers un jeu de piste, guidé d'indices en indices entre la poursuite et la fuite. Mais si Hitchcock nous parle du concept d'acteur, ce n'est pas ce que fait Antonioni. Je préfère voir en P:R le prolongement et basculement de Blow-Up. Dans blow-up on cherche à savoir si l'image contient ou non un mort, la triturant dans tous les sens sans jamais rien en savoir (mort du sujet), ici c'est le photographe qui prend la place du cadavre dès le début du film (mort de l'auteur). C'est d'ailleurs bien ce double rapport que semble nous dire la dernière scène et son mythique et incroyable mouvement cinématographique : partant de la chambre du héros, traversant les barreaux de sa fenêtre (ce qui devrait être la surface de l'image), faisant un demi-tour à 180° pour enfin voir son point de départ et venant nous présenter le même héros, mort sans crier gare, dans une posture similaire au cadavre ouvrant le film... On échappe pas à son destin, j'imagine...

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Un jeune homme débarque de la campagne pour s'installer à Lisbonne et devenir cordonnier. Rapidement il s'amourache d'une jeune et jolie femme de chambre. Mais la découverte de la vie urbaine à tôt fait de faire évoluer le héros... Beau film, touchant et âpre, ou les enjeux sont vraiment entre modernité et tradition, jusqu'à se jouer dans la mise en scène de Rocha, se servant de la lisière entre ville et campagne, ou se passent de nombreuses scènes, pour ajuster son style : les scènes en ville, modernes, sont contrebalancés par des images qui évoquent le cinéma muet tant dans le style que les interactions entre les deux personnages, dès que le film revient dans les abords campagnards de la ville.

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Un homme à moitié - Vittorio de Seta

6 ans après son néo-réaliste "Bandits à Orgosolo", De Seta pousse les portes de la psyché en explorant l'esprit et l'imagination d'un homme (Jacques Perrin) dans un asile-psychiatrique. Le film est l'exemple même du "film cerveau" car on comprend vite que tout ce que nous voyons est composé d'imaginations, souvenirs ou hallucinations du personnage principal en proie à ses démons intérieurs. Étrangement le film, par sa forme, évoque des films qui paraitrons quelques années plus tard comme Un Homme Qui Dort où Je t'aime je t'aime. En moins réussi néanmoins, l'excès d'une mise en scène trop expressive et de textes trop plats finissant par rendre le film indigeste et ennuyant. Dommage.
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coucou ! non pas vu :)
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groil_groil
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Comprend du SPOIL.
Le superbe Eva en Août m'a donné envie de découvrir les films précédents de Jonas Trueba (pas faciles à trouver...) J'ai commencé par La Reconquista sorti en Espagne, mais pas en France, Eva en Août étant son premier film distribué chez nous, en 2016. Et je suis scotché, je crois que je le préfère encore au dernier, c'est dire ! Et en deux films, tu sais que tu viens de rencontrer un cinéaste important, et l'un de ceux qui te parlent vraiment. Ce film-là, La Reconquête en Français, est littéralement bouleversant. Il met en scène deux jeunes trentenaires madrilènes qui se retrouvent après une séparation de 15 ans. Elle était partie vivre à Buenos Aires et elle est de retour en Espagne pour Noël. Rapidement elle lui dit qu'elle a retrouvé une lettre de lui, écrite quand ils s'aimaient à 15 ans. Cette lettre parle d'amour absolu, tel qu'on peut l'exprimer à l'adolescence, et est bouleversante. Ils décident de passer un moment ensemble, heureux de se retrouver, passeront finalement la nuit entière, d'abord dans un restaurant chinois, puis à un concert du père de la jeune femme, puis dans une boite de swing. C'est dans cette boite que les deux corps vont se rapprocher, et on comprend qu'ils s'aiment tout deux encore comme lors de leur adolescence. Mais lui est en couple, il ne cèdera pas. Il rentre chez lui au petit matin et raconte tout à sa compagne, qui reste digne et dubitative. ll s'allonge sur le lit. Cut. On suit une bande d'adolescents. Parmi eux, un garçon, une fille, et l'on comprend vite que ce sont nos héros et qu'on va nous raconter alors leur amour naissant à l'adolescence, celui si ardent qu'il brûle encore 15 ans plus tard, mais terré au fond du coeur, même capitonné par le coton du silence.
Ce film est absolument merveilleux car il parle magnifiquement de la puissance du sentiment amoureux adolescent, celui auquel on ne pense plus étant adulte, mais qui ne s'éteint pourtant jamais et qui est sans doute l'expression absolue de l'amour. Trueba capte cela avec une justesse et une sensibilité qui élèvent ce film et qui font que celui-ci semble en permanence en apesanteur. Ses deux acteurs sont sublimes et tellement juste (c'est la même Itsaso Arana qui joue Eva dans le dernier film), et sa mise en scène est d'une précision et d'une simplicité qui rendent l'adhésion au film évidente et immédiate. J'ajoute qu'il y a un rapport à la musique qui est magnifique. Il y a de la musique tout le temps ou presque, des chansons dans leur intégralité, rien que le concert du père en enchaine trois entières, et cette mélodie permanente vient se mêler avec celle de la mise en scène et avancent ensemble pour remonter l'histoire de ses deux amants adolescents qui n'en ont pas fini de s'aimer mais qui ne se l'autorisent pas. Bouleversant.
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asketoner
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Le gai savoir, Jean-Luc Godard, 1969

Godard entreprend de combiner toutes les idées (et le vocabulaire - la langue) que mai 68 vient de brasser, mais en vient souvent à les ériger en purs signes. La combinatoire est un peu inerte pour le moment. Disons que Godard pose ici les bases de ses grands films futurs. Mais étrangement ça manque de dialectique, ou plutôt la dialectique est là, mais schématique, figée dans le boy meets girl inaugural. Heureusement Berto et Léaud sont géniaux (mais vraiment géniaux ; comme si Léaud avait assez crié en 68 et pouvait désormais parfaire son grand numéro d'équilibriste (ou de déséquilibriste) en chuchotant), et très beaux qui plus est, dans ces ténèbres où Godard les place. Au point que j'ai été ému à la toute fin, lorsqu'ils se et nous quittent.
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Vite fait, trois films de Jean-Luc Godard :

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JLG/JLG autoportrait de décembre (1994)

Qu'est-ce qui vit encore sous l'acronyme ? Le paysage, c'est-à-dire le pays caché au coeur du paysage, qui vient redéfinir la vie même.

Le rapport Darty (avec Anne-Marie Miéville) (1989)

L'idée de départ est excellente, sa mise en oeuvre l'est moins. C'est un film qui n'a pas trouvé sa forme, perdu entre la commande et la prise de liberté. La faute revient surtout à Godard, qui rend toute la première partie du film inaudible, et à force de faire le pitre change la parole de Miéville en discours. La fin rattrape rapidement le tout.

On s'est tous défilé (1988)

Au moins le rapport Darty a-t-il l'élégance de mettre en scène un conflit. Cet On s'est tous défilé est juste un gagne-pain (Godard a été payé par une marque de mode pour réaliser une sorte de clip).
Si on pouvait encore avoir un doute, détrompons-nous : c'est le marché qui remporte toujours la partie, pas l'art.
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groil_groil
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J'avais très très peur, mais c'est plutôt une bonne surprise. Autant je peux adorer la moitié de la filmo de Zemeckis, autant je peux détester la seconde. Je pensais que ce nouveau film, pour enfants, avec beaucoup d'effets spéciaux, proche de ses films d'animation pour moi inregardables, ferait partie de la seconde, mais on va dire qu'il est pile entre les deux. C'est clairement un film pour enfants, mais pas pour petits, il y a beaucoup de cruauté, mais ça reste un film où l'imaginaire de Zemeckis prend le dessus, et c'est ça qui le sauve. L'autre film de Zemeckis dont il est le plus proche est La Mort vous va si bien, on retrouve des dizaines de motifs semblables (même s'il est loin d'égaler ce chef-d'oeuvre bien sûr). Disons que ce film est un mix entre Ratatouille et La Mort vous va si bien. La fin est super cruelle, mais je pense que c'est l'adaptation stricto sensu du livre de Roald Dahl et tout le monde sait que les contes sont cruels.

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Je poursuis l'exploration du cinéma de Jonas Trueba et je vais de merveille en merveille. Celui-ci (2015) est un film plus modeste, déjà par sa durée (1h10) mais tout aussi magnifique. On y suit 3 exilés romantiques, de jeunes hommes qui partent de Madrid en van pour rejoindre la France, car chacun d'entre eux vous retrouver une femme qu'il aime, qu'il a aimé, qu'il souhaite aimer. D'abord à Toulouse, pour l'un d'eux, puis à Paris, pour les deux autres, et le film s'achevera dans une parenthèse enchantée au bord du Lac d'Annecy. C'est une merveille de délicatesse, de non-dit, mais de dit surtout, car les personnages de Trueba disent beaucoup, c'est une des particularités de son cinéma, malgré les longues plages de silence c'est un cinéma où les personnages se disent les choses, c'est un cinéma littéraire dans le bon sens du terme où la littérarité n'étouffe jamais le cinéma. Encore une fois l'épistolaire est au centre du film (il y a encore une scène de lecture de lettre formidable) et encore une fois la musique est aussi au centre du film (scènes de concerts, musique très présente, et une séquence chantée dans le van bouleversante). Cinéaste majeur, à n'en point douter, et qui n'en est qu'au début de sa carrière, ce qui est surexcitant.
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groil_groil
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Il s'agit du film documentaire dont Arnaud Desplechin s'est inspiré pour Roubaix, une lumière. Enfin, c'est plus qu'inspiré, parce qu'il en a acheté les droits et en a livré un vrai remake. Cette opération est inédite dans le cinéma je pense. A part chez Eustache qui l'a fait dans un seul film, Une Sale Histoire, mais il est l'auteur des deux parties. C'est à dire faire un remake d'un documentaire, et surtout pour en faire une fiction. Je me souviens qu'à l'époque de la sortie du Desplechin on pouvait lire certains le traitant de feignant, voire de voleur, mais au contraire. Déjà son opération est on ne peut plus légale, il a acheté les droits de remake, comme s'il le faisait d'un film de fiction, et qui plus est, cette idée est vraiment nouvelle et ambitieuse. Et réussie aussi. Elle parait d'ailleurs encore plus réussie lorsqu'on voit le film de Boucault, et qu'on voit le travail d'adaptation réalisé par Desplechin, et le travail des acteurs pour coller au mieux aux tristes personnages de cette affaire réelle. Sinon pour parler du film de Boucault en tant que tel, c'est un magnifique documentaire criant de vérité qui suit la brigade de police du Commissariat de Roubaix dans diverses enquêtes sordides, avant de se concentrer sur l'une d'elles qui prend le centre du récit, le meurtre d'une mémé dans un quartier très pauvre, assassinée par deux jeunes femmes, voisines, qui la connaissaient très bien et avec qui elles s'entendaient bien, meurtre motivé par le simple vol d'une bouteille de javel et de deux ou trois autres détergents. C'est dire la profondeur de la misère humaine. Ces deux jeunes femmes sont paumées, et elles sont là parce que le système les a mises là, mais on les imagine très bien ailleurs, ayant réussi leur vie, ou trouvé un emploi. L'une d'elles est d'une grande beauté d'ailleurs, et l'on comprend le choix de Desplechin de confier le rôle à Léa Seydoux. Ce film sonde les profondeurs de l'âme humaine avec une acuité bouleversante. Ces deux jeunes femmes ont en donc tué une autre, qu'elles appréciaient qui plus est, pour le simple vol d'une bouteille d'eau de javel. C'est triste à pleurer, il n'y a rien à dire d'autre. Mais le plus triste dans tout cela, c'est qu'elles avouent très rapidement leur crime, et que la caméra les suit, avec l'inspecteur de police, sur le lieu du crime pour sa reconstitution. Et à ce moment, ces deux jeunes femmes, semblent vivre, exister comme jamais, tout simplement parce qu'on les écoute, on les regarde, on leur prête de l'attention. Evidemment il y a la caméra, mais ce n'est pas la caméra qui fait ça, elle est discrète presque absente. Non, c'est un simple regard, une simple présente. On les considère enfin comme des êtres humains.

Immense merci à Asketoner.
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cyborg a écrit :
sam. 14 nov. 2020 01:15
un policier et son fils partent à la recherche, puis ramènent, l'esclave d'un seigneur local.

mais les échos incessants avec notre époque
Oui, c'est un western roumain (c'est un Django des Balkans quoi) que j'avais beaucoup aimé. C'est picaresque mais ce n'est pas exotique. Et surtout, comme tu dis, le film fait une terrible allusion à la situation actuelle post-communiste de la Roumanie (et pas seulement : les pays des Balkans ressemblent comme des gouts d'eaux : le film pouvait très bien etre bulgare, serbe ou albanais - le mot AFERIM, mot d'origine turque, se dit dans tout ces pays d'ailleurs).

Mais de Radu Jude il faut aussi que tu vois son tout dernier film, " Peu m'importe si l'Histoire nous considère comme des barbares" qui est, à mon avis, le film annonciateur de la vague conservatrice et réactionnaire dans pas mal de pays de l'Union Européenne (un peu comme "Pour le réconfort" était le film annonciateur des Gilets Jaunes)
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
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groil_groil a écrit :
sam. 14 nov. 2020 18:44
La Reconquista
il me tarde de le voir ! :love2:
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groil_groil a écrit :
jeu. 12 nov. 2020 10:21
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En pleine retro Boisset, je revois ce film qui m'a tant marqué durant mon enfance, par sa violence si réaliste et par sa prophétie qui plus le temps avance plus elle ressemble à la réalité. Ce film a pu sembler kitsch 10 ou 20 ans après sa sortie, mais suffisamment de temps est passé désormais pour qu'on le voit comme ce qu'il est vraiment, et je pense que, malgré les défauts inhérents aux productions française du début des années 80, c'est vraiment un bon film. Etonnant aussi car je n'avais jamais remarqué que le film a été tourné entièrement dans une ville de Yougoslavie (probablement Belgrade) qu'on nous vend comme Paris. Cette délocalisation, sans doute due à une coproduction et à des économies de tournage, est en fait l'un des principaux atouts du film. Cela lui donne un vrai aspect de film d'anticipation, un peu comme dans un vieux Bilal, et la ville qu'on croit être Paris devient d'une tristesse à pleurer, d'une architecture sévère et triste faite de grands bâtiments modernes et sales en même temps, comme si la France avait les aspects physiques d'une dictature. Ce que les aspects du jeu télévisé "Le Prix du Danger" laissent par ailleurs sous-entendre.
j'avais bien aimé Le Prix du danger que j'ai vu à sa sortie au cinoche (comme Running Man son "remake" avec Schwarzy)
Vosg'patt de cœur
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La terre, Alexandre Dovjenko, 1930

Quelle beauté !
Quand on voit ça, ça semble simple de faire du cinéma.
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groil_groil
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D'abord il faut saluer le boulot d'Olivier Assayas, et l'incroyable efficacité avec laquelle il se fond ici dans le système Hollywoodien. Son film est un pur film américain, bien que tourné en langue espagnole et à Cuba, et il n'a pas à rougir en terme de professionnalisme, mise en scène, jeu d'acteurs, direction générale du projet, et se hisse au niveau des productions américaines de genre. C'est assez formidable de voir un cinéaste qui vient du milieu "art & essai" réussir cela alors que toute la bande à Besson qui est parti aux USA a lamentablement échoué (à commencer par Kassovitz). Je ne vois qu'Alexandre Aja dans la production récente ayant réussi son transfuge mais le cas est différent car Aja est clairement un cinéaste américain dans le sang et fera sans doute toute sa carrière là-bas, alors que Cuban Network est sans doute un cas isolé pour Assayas. En tout cas il reste un cinéaste français. Alors ceci dit, que vaut Cuban Network. Je dirais que le fond du film est intéressant, ça se déroule en 1990 et l'on y parle de pilotes cubains qui fuient leur pays pour passer aux USA, qui deviennent pilotes en Floride, très vite on leur demande de repérer les Cubains qui quittent leur pays et de les aider à pénétrer aux USA, puis ils sont recrutés par le FBI. Et l'on apprend finalement que ce sont des agents doubles et qu'ils travaillent depuis le début pour le gouvernement cubain alors qu'on les prenait pour des traitres et toute la suite du film est un chassé-croisé entre ces deux états dans une instabilité permanente. Le film est très intéressant politiquement et historiquement dans le sens où il est bien documenté et son architecture globale semble sérieuse et crédible. Mais le souci, parce qu'il y a un souci, c'est que malgré toutes ces qualités, le spectateur ne se sent jamais impliqué. Un ennui poli parcourt l'ensemble du film et l'on se demande bien pourquoi. Je pense déjà que c'est parce qu'on ne s'attache à aucun personnage, ils sont tous totalement antipathiques, ou froids, et seul le personnage joué par Penelope Cruz pourrait être attachant mais il sert la plupart du temps de potiche. Mais je pense aussi que la froideur du projet vient de son côté international. Réal Français, prod américaine, tournage en espagnol, je pense que cela doit dresser des barrières qui in fine livrent un travail de qualité (Assayas est également l'auteur du scénario notamment), mais qui a du mal à transcender ses intentions de départ.

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Une orgie vampirique, gothique et érotique quasiment sans paroles, assez délirante mais au récit plutôt bien tenu. Du pur Rollin en somme.
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groil_groil a écrit :
mar. 17 nov. 2020 16:06

Mais le souci, parce qu'il y a un souci, c'est que malgré toutes ces qualités, le spectateur ne se sent jamais impliqué.
Je suis de A à Z d'accord avec ce que tu écris. On a vu exactement le même film.

Je pense qu'on ne se sent pas impliqué car, dans ce genre de film, il faut toujours prendre parti car le sujet est politique donc, c'est inévitable. Quand je dis prendre parti, je ne dis pas un film partisan. Mais engagé. D'une façon à l'autre (les films noir américains sont assez souvent 'de droite', 'réactionnaire' mais c'est là que ça réside parfois leur beauté.
Or, comme c'est un produit américain, malgré le générique de la fin (le vrai destin des vrais personnages puisque il s'agit d'une histoire vraie) je suppose que Assayas ne pouvait pas aller plus loin.. .
Quoi qu'il en soit, cette absence de fond (de positionnement) correspond avec sa forme américaine (hollywoodienne) donc il ne faut pas trop s'étonner non plus (le fond et la forme s'interchange toujours, ça se sait).
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Oui tu as tout dit, le film ne s'engage pas politiquement et c'est pour ça qu'on s'y ennuie poliment, mais en même temps, vue sa position, Assayas ne peut pas s'engager. Et je pense qu'il sait que ça donnera ce résultat alors qu'il est en train de faire le film. Et qu'il sait aussi qu'il n'y peut rien.
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Jean-Pascal Zadi, comédien, dans son propre rôle, essaie de sensibiliser tous les comédiens ou personnes médiatiques noirs afin de participer à une grande marche pour la cause noire qu'il souhaite organiser à Paris. Mais sa maladresse et son emportement vont le conduire à produire le contraire de ce qu'il souhaite provoquer. C'est évidemment un film dans la veine des "faux-documentaires", on appelle ça un "mockumentary" en anglais, et le film est réussi pour plein de raisons. Déjà parce qu'il est très drôle, et parce que ce Zadi dont je n'avais jamais entendu parler est vraiment excellent, et n'hésite pas à se ridiculiser jusqu'à l'outrance, évoquant très souvent le travail d'un Ricky Gervais, mais aussi et surtout parce que c'est un film très intelligent, et très intelligemment mené. Zadi n'hésite pas, à chaque instant, à se moquer de la cause qu'il souhaite défendre, et c'est justement parce qu'il s'en moque, et qu'il s'en moque bien, avec l'intelligence et le recul nécessaire, que le message premier qu'il souhaite faire passer, passe véritablement. Le film est un déroulé de stars plus ou moins connues, et je donnerai des mentions spéciales à Lucien Jean-Baptiste, Fabrice Eboué et Vikash Dhorasoo qui sont hilarants. Zadi n'hésite pas à aller jusqu'à l'outrance, pousse tous ses gags trop loin (je pense notamment à Jean-Baptiste avec sa machette ou à Kassovitz avec son mesure-nez), mais c'est justement cette outrance qui crée l'absurdité de la situation, qui du coup génère un malaise, et c'est ce malaise qui provoque la prise de conscience.
Modifié en dernier par groil_groil le mer. 18 nov. 2020 10:41, modifié 1 fois.
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Quelques remarques sur la réalisation et la production du film Sauve qui peut (la vie) - 1979
& Scénario du film Passion - 1982
& Petites notes à propos du film Je vous salue, Marie - 1983
de Jean-Luc Godard


Ces trois films réalisés en marge des films mieux produits auxquels ils se rapportent sont aussi passionnants qu'une marge peut l'être. Il faut entendre ici la marge comme la zone sur le cahier réservée aux notes, corrections, gribouillis et poèmes vite faits : à la fois l'explication, et la rêverie. La recherche, et la trouvaille.
Le plus génial est Scénario du film Passion. Il s'agit du plus long des trois films, mais aussi du plus étonnant. Godard recrée, par la parole (et quelques images), le film qu'il vient de tourner. En fait il inverse le rapport de forces qui a généralement lieu au cinéma : la parole ici est première, c'est elle qui nous guide à travers les images du film (elle qui structure le récit et distribue l'attention).
Quelques remarques sur la réalisation et la production du film Sauve qui peut (la vie) est encore plus risqué, puisque la ligne directrice, ici, n'est pas le scénario, mais simplement deux effets esthétiques que Godard commente : la surimpression, et le ralenti, auxquels il donne sens, et à partir desquels il nous donne à voir ce que son film sera.
Petites notes à propos du film Je vous salue, Marie est un peu plus rapide et schématique, moins miraculeux que les deux premiers. Il se concentre sur le travail de la comédienne, les premières indications qu'elle reçoit à propos de son rôle, les premières lignes de dialogue, la musique qu'elle entendra, les actions qu'elle effectuera.
Ce qui est passionnant, c'est que Godard qui parle de cinéma, c'est encore du cinéma (au contraire du film d'Alain Fleischer, qui lui faisait, finalement, de la télévision et s'en contentait - plus j'y pense, plus je trouve Morceaux de conversations avec Jean-Luc Godard aberrant).
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Pour avoir, à raison, giflé un procureur, une jeune femme flic est mutée de Paris à Lens. A peine arrivée, elle découvre le cadavre d'une enfant sur un terril et, en remontant l'enquête met au jour un immense réseau de pédophilie dans la région. Mais comme celui-ci implique un Commandant ainsi qu'un riche entrepreneur de la région, qui emploie des centaines de salariés, sa hiérarchie l'oblige à abandonner l'enquête et la mute dans un coin paumé. C'est fou car qu'on était gamins, ce film passait à 20h30 et on regardait ça en famille comme un quelconque polar, alors que c'est un film d'une dureté, d'une âpreté, d'une violence telles que jamais je ne mettrais un gamin devant... ça glace le sang. C'est un grand Boisset, sans concession, qui dénonce les travers de la société française, mais t'enfonce la tête dans un seau de merde en te forçant à bien regarder au fond, mais sans jamais oublier de faire du cinéma. Au milieu d'une galerie de seconds rôles tous parfaits, même ceux qui jouent les personnages les plus odieux, Miou-Miou est magnifique, dans un rôle effacé, discret, timide, mais déterminé à aller au bout de son enquête, quitte à se brûler les ailes.

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4 vétérans noirs américains du Vietnam, accompagnés par le fils de l'un d'eux retournent dans la forêt vietnamienne 50 ans plus tard avec deux buts : retrouver les restes du cadavre de leur 5ème copain mort sur place il y a 50 ans, et retrouver également une caisse de lingots d'or enterrée par eux-mêmes au fond de la forêt à cette époque. Très vite des dissensions au sein du groupe, plus de nombreux adjuvants extérieurs (dont je vous passe les détails et les péripéties car on s'en fout, mais sachez qu'il y a notamment Jean Reno) font que les copains d'antan vont soit s'entretuer soit se faire dézinguer. Enfin pas tous non plus. Le dernier Spike Lee est un film Netflix, et il conjugue les défauts propres à Netflix et ceux de Spike Lee. Les défauts Netflix : le film est trop long (2h35), manque de direction artistique, de producteur qui s'investirait dans le projet pour le raccourcir, le rendre crédible ou en combler les failles, l'image est moche, faite pour la télé. Les défauts Spike Lee : il ne peut pas faire un film sans la ramener sur la cause noire toutes les 30 secondes, donc il y des cuts sur des images d'archives tout le temps, je vous passe le détail, mais qui de son Malcolm X, qui de son Marvin Gaye à qui mieux mieux et balancé à l'emporte-pièce. Sur le papier le projet peut séduire mais le résultat est foireux, les personnages sont tous antipathiques, et le message dessert la cause qu'il est censé défendre.
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Journal de Septembre, Eric Pauwels, 2019, visible sur Mediapart ( https://www.mediapart.fr/studio/documen ... -l-instant )


C'est immédiatement émouvant, parce que Pauwels a cette façon limpide, sans apprêt de filmer ce qu'on pourrait appeler le quotidien, mais qui est bien plus que ça : plutôt l'être-au-monde. Ou encore : la présence du filmeur dans le présent filmé, ouvrant l'espace et le temps aussi simplement (naïvement) que s'il s'agissait de tirer un rideau. La séquence où une amie adulte chante et où Pauwels la montre quelques années plus tôt, enfant, sur un manège, tandis qu'on continue de l'entendre chanter, est assez remarquable pour cette raison, la facilité avec laquelle ce cinéma s'aventure d'un temps vers l'autre, sans scénario, sans raison sinon le simple désir de réunir ce qui a été séparé. (Désir qui produit de merveilleux raccords.)
La forme du journal, d'abord, semble parfaite, comme un calendrier de l'avent, correspondant assez bien à deux esthétiques coutumières du cinéaste : la collection et la miniature. Collection de feuilles mortes vues à travers une loupe, accumulation d'objets offerts à une amie, suite d'animaux passant dans le plan... Portraits rapides d'un homme qui sourit, d'une femme qui découvre son sein, de comédiens invités à prononcer une phrase. Le film trouve son point culminant lors de l'éclosion d'un cocon contenant des dizaines d'araignées minuscules se dispersant sur une seule toile, tandis qu'un voisin joue de l'accordéon. Journal de septembre devrait être comme ce cocon : à la fois une naissance et un éparpillement.
Mais dans la deuxième moitié du film Pauwels essaie de boucler la boucle (de faire rimer les images entre elles, de leur donner, en plus du sens qu'il saisit toujours, une finalité, ce qui est moins évident), et il n'y parvient pas, ou moins bien que d'habitude. Quand à la grâce se mêle le moindre forçage, c'est toujours un peu gênant. C'est le cas ici, lorsque le cinéaste nous ramène in extremis à l'image première, alors qu'on se trouvait si bien loin d'elle.
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Une autre femme, Woody Allen, 1988

Alors donc, comme je l'expliquais à Sokol ailleurs, je n'avais jamais vu ce film, alors que je croyais, en lisant le résumé, bien le connaître. Mais je crois que le motif du mur au travers duquel on entend le psy est récurrent chez Woody Allen (il me semble qu'il y a une scène semblable dans Alice - Groil, tu confirmes ?).

Le film m'a semblé être une métaphore de la cure analytique.
Tout se passe d'abord comme si l'appartement que loue le personnage de Gena Rowlands (a priori pour écrire) savait avant elle ce qui allait se passer. Comme si la conscience venait du lieu plus que des êtres (la conscience induite par le dispositif, c'est un des postulats de la psychanalyse).
D'ailleurs le lieu se met à parler à Gena Rowlands, qui entend à travers les murs des bribes de séances analytiques. Mais ces séances existent-elles vraiment ? Rien ne le certifie. Elles pourraient aussi bien relever de l'ensorcellement. Et puis il semblerait qu'il n'y ait qu'une seule patiente ou presque, cette femme enceinte jouée par Mia Farrow, qui apparaîtra aussi au détour d'une rue, puis dans un magasin d'antiquités, en larmes. Le film se tient sur cette frontière de la réalité et de l'imaginaire en permanence, mêlant les souvenirs, les fantasmes et les rêves à la chronique ordinaire de cette vie d'universitaire mariée (comme en analyse, où l'association libre est l'état que vise la parole de l'analysant).
A un moment, Gena Rowlands s'allonge sur un divan, près du mur d'où viennent les voix. Elle écoute Mia Farrow en train de parler et se rend compte qu'elle aurait pu être cette femme. Ainsi elle est absolument dans le rôle de l'analysante : elle s'écoute. Elle écoute cette part avortée d'elle-même (cette autre femme du titre).
Et dès lors tout s'enclenche, dans la vie de Gena Rowlands, comme dans une cure : par liens, effets de sens, repérage des récurrences (cette scène incroyable où le mari de Gena Rowlands sort à celle-ci exactement la même réplique que celle prononcée quelques années plus tôt à l'encontre de sa première épouse...), épiphanies brusques (au point que le scénario, par endroits, semble grossier).
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yhi
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Je sais pas si l'info a vraiment circulé, mais je mets ça là si ça en intéresse certains :

Le festival des 3 continents diffuse un film gratuit chaque jour pendant une dizaine de jour. Et il y a du très bon au programme (principalement des vainqueur de leur compétition des années précédentes)
https://www.3continents.com/fr/programm ... ontinents/
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B-Lyndon
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Je vous conseille à toutes et tous le magnifique "Comme un cheval fou" de Tao Gu, disponible le mercredi 25 novembre entre 20h et minuit ;)
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groil_groil
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Oui pour Allen, récurrent je ne sais pas mais au moins dans ces deux films en effet.
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groil_groil
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Sur le papier, c'est un Boisset qui fait rêver, un film politique, sur les trafics d'influence pour prendre la municipalité de Marseille, avec la mafia qui s'en mêle, et un casting original fait de Jean Yanne, de Sterling Hayden ou de Santa Berger, et la sublimissime BOF de François de Roubaix mais la déception est là, ça ne prend pas, on sent poindre un désintéressement général de chacun des participants au film, des acteurs au metteur en scène. ça se regarde tout de même, Boisset ne sombre jamais dans l'irregardable, mais il y a tout pour pondre un brûlot et ça ne vaut pas bien plus qu'un OSS (d'époque, j'entends).

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Celui-ci je le connaissais déjà et je l'aime beaucoup. Girardot joue le rôle d'une prof de lycée émancipée, qui considère ses élèves comme ses égaux et que sa fille, dans sa classe de terminale, invite en grand nombre dans l'appartement familial, délaissé par le père parti vivre depuis plusieurs années au Canada, pour des fêtes qui n'en finissent plus. Elle rencontre par hasard un médécin de nuit lunaire (ça tombe bien) joué à merveille par Patrick Deweare entre douceur et cynisme. Avec lui, elle va accepter de s'ouvrir et d'à nouveau aimer quelqu'un. C'est l'un des films les plus doux d'Yves Boisset, on dirait presque du Pinoteau, mais le ton est toujours extrêmement juste et bien senti, c'est un film qui raconte magnifiquement son époque.

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La vie d'un groupe de jazz emmené par Denzel "dents de lapin" Washington, tant sur le point de vue professionnel qu'amoureux. Il coule une douce mélodie au sein de film, un rythme cotonneux et nonchalant qui est très agréable, mais le souci c'est qu'on s'en fiche un peu. Il pourrait se passer autre chose, ce serait pareil. Malgré ça, c'est tout de même agréable.

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C'est l'un des premiers Spike Lee, son second et son premier distribué en France, et ça raconte les amours de la belle Nola Darling, amours qu'elle croque à pleines dents et dans la variété, puisqu'elle multiplie les conquêtes au grand dam de ses amants qui souhaiteraient l'exclusivité. On la voit principalement évoluer au milieu d'un trio d'épris, dans un film très beau, très verbal, où les protagonistes s'adressent au spectateur face caméra entre les scènes, dans un beau noir et blanc, à un moment où New York est en pleine mutation, et avec pas grand chose Spike Lee réalise un film attachant et très beau, quelque part entre Woody Allen et Jim Jarmush, mais versant black.
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cyborg
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Tired Moonlight - Britni West

Le cycle "American Fringe" de la plateforme Henri de la Cinémathèque Française permet de découvrir le cinéma indépendant américain contemporain, le vrai, pas le "indé-Sundance" devenu presque aussi formaté que le cinéma hollywoodien.

Avec Tired Moonlight on passe quelques jours dans un petit bled américain isolé, suivant vaguement quelques personnages (enfants et adultes) dans leurs activités quotidiennes. Nous sommes face à des images qui rendent impossible de savoir de ce qui relève de la mise en scène ou du documentaire, style particulièrement à la mode que je fini surtout par trouver ennuyant, nous conduisant à nous interroger davantage sur ce qui est "vrai" et ce qui est "faux", plus que de nous faire nous intéresser à ce qui nous est présenté. Ici le résultat est plutôt plaisant, parfois drôle, rarement captivant, et plutôt anecdotique. Je me souviendrais surtout du personnage du poète qui revient quelques fois et dont on entend régulièrement des textes en voix-off. Ses apparitions font penser aux chœurs de la tragédie grecque, venant ponctuer et commenter l'histoire, donnant ici un liant improbable à tout ces micro-évènements.

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We live in public - Ondi Timoner

Le documentaire n'a pas d'intérêt propre (style particulièrement télévisuel), mais son sujet mérite le détour. Le film retrace la vie de Josh Harris, pionnier de la bulle internet (créateur de la première web-tv au milieu des années 90) lui ayant permis de faire fortune. Avec cet argent il mettra en place deux projets, complètement fous : tout d'abord en 1999 un "big brother" pour 150 volontaires, enfermés et filmés dans un sous-sol new-yorkais aménagé (avec "pods" de repos, restaurants, douches, salle de culte, salle de tir....) durant un mois et filmé en permanence par des 10aines de caméra. Puis quelques mois plus tard il décidera de filmer l'entièreté de son appartement -et donc de sa vie privé, de son couple...- et de le diffuser en permanence en direct sur internet, tout en permettant les commentaires des spectateurs. Nous sommes alors au milieu de l'an 2000, juste avant l'explosion de la "bulle .com", qui provoquera d'ailleurs la fin des projets de Harris.Pour l'un comme pour l'autre je vous laisse deviner l'ampleur des dégâts finaux...
Le personnage tout comme les projets sont assurément discutables, ils n'en demeurent pas moins fascinants pris par l'angle de l'histoire de l'art (art vidéo, net-art, performance...). La radicalité totale de leur mise en œuvre ne fait que renforcer leurs troublantes portées prophétiques quand on voit l'internet totalisé des réseaux sociaux dans laquelle nous vivons 20 ans plus tard...

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Premier film de Kiarostami, que m'a donné envie de découvrir Asketoner.

En effet le film est très touchant, très attendrissant (malgré un petit héros tête à claque :D ) et surtout superbement inventif.

Une scène géniale résume assez bien le film : le héros, en plein cours de math, refuse de faire ses exercices mais se retrouve à faire des calculs monétaires pour ses futures aventures... 5 rials plus 5 rials....? L'éducation abstraite de l'école face à l'éducation concrète du monde extérieur... c'est assez beau comme problématique, à laquelle répond sans le savoir le garçonnet par son obstination à réaliser ce long et ambitieux voyage initiatique. C'est une idée et une dichotomie que l'on retrouvera, du moins il me semble, plus tard tout au long de l'oeuvre de Kiarostami, sur le fil entre la fiction (ici l'école) et le documentaire (ici la virée au stade) et le rapport entre les deux (dans la Trilogie du Kokker par exemple ou même par la suite dans ses travaux plus expérimentaux comme Ten ou Shirin)


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Cette fois c'est groil-groil qui m'en a donnée envie... malheureusement je suis loin d'être aussi enthousiaste que toi.

C'est un ennui poli, mais marqué. Les choses s'arrangent quand John -joue comme un pied- Malkovitch passe l'arme à gauche, mais il est un peu tard. Tout le reste me semble particulièrement pompier et c'est une façon de faire du cinéma qui m'indiffère beaucoup.
Ce que je préfère de tout le film est en effet ses sublimes décors (mais peut on vraiment se rater dans un tel cadre ?) et la dernière phrase tiré du livre (même si... tout ça pour ça ?). Bref deux éléments qui sont en fait externes ou presque au réalisateur. Du coup...

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The Scenic Route - Mark Rappaport - 1978

Découverte de ce metteur en scène américain qui semble plus connu par chez nous pour ses écrits réguliers dans Trafic que pour ses réalisations. Et cela est fort dommage car quelle rafraichissante découverte... The Scenic Route s'inscrit pleinement dans les rapports entre cinéma et théâtre, et pourtant j'ai rarement vu un film aussi cinématographique sur le sujet. Le symbolisme théâtral est ici transformé en un minimaliste fort à propos, rendant l'ensemble quasiment schématique tout en ouvrant bien plus qu'il n’appauvrit. Beaucoup passe par une sorte de "faux hors-champs" et des éléments ce qui sont là sans y être vraiment (le langage corporel, la voix-off de monologues intérieurs, les images dans l'image...) et qui donne une tonalité absurde, parfois drôle, à cette histoire sinon étrangement glauque (la soeur de l'héroïne se met en couple avec l'ex de sa soeur, et se dernier en profite pour essayer de la reconquérir... ). J'ai très envie d'en voir plus !
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sokol
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B-Lyndon a écrit :
sam. 21 nov. 2020 17:12
Je vous conseille à toutes et tous le magnifique "Comme un cheval fou" de Tao Gu, disponible le mercredi 25 novembre entre 20h et minuit ;)
il faut que je ne loupe surtout pas celui-ci
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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groil_groil
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A ceux qui n'ont jamais vu le film, sachez qu'il s'inspire de très près de l'histoire du juge François Renaud, mais que pour ne pas se prendre une balle entre les deux yeux Boisset l'a renommé Jean-Marie Fayard et a transposé l'histoire de Lyon à Saint-Etienne. Sinon c'est la même chose ou presque, en tout cas on ne peut pas ne pas reconnaitre l'affaire. Le film est l'un des meilleurs de son réalisateur, et Dewaere est comme souvent extraordinaire, même dans un rôle qui apparait au vu de sa filmographie comme un pur contre-emploi. J'ai beaucoup aimé le revoir, mais je dois admettre que le cinéma de Boisset ne vieillit pas très bien, et que c'est aussi valable pour ce film-là. Disons que je suis en parallèle en train de me refaire l'intégrale d'Engrenages et que le Boisset souffre de cette comparaison. C'est un cinéma un peu poussiéreux dans sa manière de faire, même si le geste est d'un grand courage et que je continue à beaucoup aimer le film.

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Un couple, parents d'un petit garçon de 15 mois, se sépare. C'est tout. Ni plus ni moins que ça. Mais c'est tellement bien écrit, tellement bien mis en scène, tellement magnifiquement interprété par Huppert et Auteuil tous deux en état de grâce, à un moment où ils sont peut-être tous les deux au meilleur de leur carrière (d'ailleurs Auteuil n'a jamais été aussi beau que dans ce film, la façon dont le film Vincent le rend totalement irrésistible), que le film en est bouleversant, magnifique. D'ailleurs je me faisais la remarque suivante : c'est un genre de film, quand ils sont réussis et c'est le cas ici, où le passage du temps est bénéfique. A sa sortie en 1994 ça passe comme du cinéma tout venant, sans point de vue particulier, presque du cinéma de consommation tradition française, mais le temps passant lui donne une patine qui l'anoblie, on comprend mieux le geste du réalisateur, ses points de vue discret ressurgissent avec plus d'évidence, et sa manière de filmer, de filmer Paris, de filmer ses acteurs, relèvent de vrais choix d'auteur qui sont mis en évidence par la distance entre sa sortie et aujourd'hui.

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C'est le tout premier Spike Lee (1983) et c'est en fait son film de fin d'études. Il dure à peine une heure, et raconte l'histoire d'un salon de coiffure New-Yorkais sur lequel la mafia met la main. C'est à voir comme un projet de fin d'études mais c'est réussi, les personnages sont intéressants, on sent le style Skipe Lee poindre, et la manière de filmer un New York sombre et triste est très réussie.
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groil_groil
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Cybou, désolé de t'avoir fait voir ce Bertolucci alors, moi ce film me bouleverse...
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cyborg
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groil_groil a écrit :
lun. 23 nov. 2020 10:11
Cybou, désolé de t'avoir fait voir ce Bertolucci alors, moi ce film me bouleverse...
Allons ne t'excuse pas ! Même si le film ne m'a pas plu je suis content de l'avoir vu ;)
Le forum sert aussi à ça ! :love2:
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Tyra
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Le Rideau déchiré - Alfred Hitchcock
Une vidéo youtube qui faisait un montage parallèle entre la séquence du musée dans Le Rideau déchiré et son pastiche dans Grand Budapest Hotel par Wes Anderson ma donné envie de revoir ce film mal-aimé du maitre, souvent considéré comme marquant le début de la fin pour Hitchcock. Cherchant donc ce qu'il y a à sauver dans ce projet bancal, auquel personne ne croyait, les acteurs en premier lieu, qui sont d'ailleurs mal choisis, que ce soit Paul Newman, trop acteur studio, trop sérieux, manquant de légèreté, ou Julie Andrews qui n'a rien à faire dans ce rôle de scientifique.
C'est un film rempli de paradoxe. Hitchcock veut tourner la page du technicolor, du faste, du somptueux, bref du grand Hollywood dont Marnie était le dernier représentant. Ici donc, exit Bernard Hermann, exit le grand directeur de la photographie Robert Burks, Hitchcock veut entrer de plein pied dans la modernité, quoi que cela veuille dire à l'époque.
Résultat sans appel : le film semble coincé entre deux époques, ce qui a joué contre lui à sa sortie.
Car contrairement à la tendance générale d'aller filmer en décors naturels dans les années 60, Le Rideau déchiré ne quitte à aucun moment les studios, donnant au film son aspect artificiel, entre décors trop propres et mate painting osés. Une abstraction déjà entrevue dans La Mort au trousse, mais ici dévitalisée, aplanie. La mise en scène d'Hitchcock en est d'autant plus soulignée, rendue évidente par le dépouillement général.
A la clé trois séquences qui marquent les esprits :
- Le musée donc, déambulation du héros dans des décors peints où la menace n'est que bruits de pas approchants ou s'éloignants.
- Le meurtre de Gromek évidemment, macabre et dérangeante mise à mort qui dure plus longtemps que prévu.
- L'évasion en bus, où Hitchcock nous rappelle pourquoi il est le maitre du suspense.
Et puis par dessus tout, je crois que ce que je préfère c'est la première partie en Scandinavie, où Hitchcock est à son aise avec le soupçon conjugal, où il faut montrer le déraillement du couple avec les choses du quotidien, suspendre le spectateur avec des petits riens.
A coté de ça, le film a pas mal de gros défauts, ce manque de rythme, de crédibilité parfois, une dernière partie à Berlin qui s'essouffle un peu.
Mais il y a tellement générosité à coté dans la mise en scène du Hitch, ça reste un grand plaisir. :)


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Babs
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:hello: hello everybody !
J'ai le moral en peu dans les chausettes, le confinement, la fermeture des cinémas, tout ça tout çà...

voici le film qui m'a redonné le sourire :
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Le Mort en fuite - André Berthomieu - 1936

Jules Berry et Michel Simon interprètent deux acteurs de boulevard minables qui pour devenir célèbres ont l'idée saugrenue de monter un plan foireux dans lequel l'un doit se faire passer pour le meurtrier de l'autre. Le prétendu macchabée devant refaire surface au procès du coupable et dénoncer une erreur judiciaire retentissante. Bien entendu, tout ne vas pas se passer comme prévu.... Les deux loustics de génie font un numéro comique de haute volée, bien accompagnés par quelques dialogues aux petits oignons. La mise en scène vive n'est pas en reste. Franchement poilant et salvateur par les temps qui courent ! :love:
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groil_groil
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:hello: :hello: :love2:

Reviens poster plus souvent.
Déjà parce que tu nous manques, et ensuite ça te redonnera peut-être un peu le moral, et j'espère qu'on te fera parfois sourire avec nos conneries :D :love2:
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groil_groil
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Soirée Double Peine Cinéma Français 2020

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J'ai toujours détesté profondément le cinéma de ces deux usurpateurs, mais leur dernier film, qui une fois de plus (et peut-être même plus que d'habitude) bénéficie d'une hallucinante indulgence critique (on n'est pas loin du plébiscite général), est sans doute leur film le plus odieux. C'est un cinéma qui n'en est pas, sauf qu'il en utilise le nom, joué, cadré, filmé, interprété avec les pieds, mais surtout, et c'est le vrai gros problème (parce qu'à la limite faire une merde, c'est inoffensif) c'est un cinéma odieux, méprisant, qui déteste profondément ses personnages, et donc qui déteste ses spectateurs et qui plus largement le peuple, celui dont il est censé épouser la cause. Les personnages de ce film sont des connards, des gens sans intérêt, méprisants et méprisables, et les deux bouffons qui se prétendent cinéastes passent leur temps à les rendre encore plus détestables au fil des scènes. Au nom de quoi ? on l'apprend vers la 35ème minute du film, moment où j'ai lâché l'affaire, épuisé devant tant de mépris, en fait leurs personnages sont d'anciens Gilets Jaunes qui se sont rencontrés autour d'un rond point. Ils ne pouvaient donc être que des gros cons alcoolos à la mauvaise bière, névrosés, seuls car méprisables. Voilà, c'est ça le cinéma réac de ces deux types qui se prétendent de gauche mais qui sont, ça transpire dans leur oeuvre, des gens qui méprisent littéralement les autres. A gerber.

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L'archétype du cinéma narcissique et nombriliste petit bourgeois petit parvenu ayant réussi au prix de nombres d'efforts sans doute surhumains à se glisser dans le petit cénacle ronflant et moisi du cinéma français de grande distribution, et ayant réussi, frère et soeur associés, à enfin placer un film qui ne raconte, comme toujours, rien d'autre que les petits errements personnels d'une trentenaire bourgeoise qui n'arrive pas à s'affirmer mais qui, au bout d'1h25 d'une grande pénibilité, arrivera enfin à commencer à écrire son roman. C'est consternant, mais au moins, contrairement à celui du dessus, c'est inoffensif.
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yhi
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Les personnages de ce film sont des connards, des gens sans intérêt, méprisants et méprisables
A se demander qui est odieux et déteste les personnages :sarcastic:
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