Un jeune homme suit la femme qu'il aime en Italie, mais sans lui déclarer sa flemme car elle va tenter d'y rejoindre son amoureux. On dit toujours que Doniol-Valcroze fut un meilleur critique que cinéaste, c'est vrai, il est l'un des fondateurs des Cahiers, et le premier rédac chef de la revue, mais son cinéma est intéressant toutefois, même si pas totalement Nouvelle Vague, influencé aussi par le cinéma italien et le cinéma français. Le Coeur Battant n'est pas une franche réussite, mais c'est un film intéressant, avec de belles idées, surtout si on le replace dans le double contexte de l'homme et de l'époque.
Je l'ai regardé un peu par cynisme mais aussi pour raisons professionnelles, et en fait c'est pas mal. Disons que la jeune cinéaste a déjà son style, de l'humour, et elle sait tout à fait construire un film amusant, malin, qui m'a fait beaucoup penser à l'esprit de Valérie Lemercier. Pas mal, donc. Mais le souci c'est le fond, ou plutôt l'inconséquence du truc, c'est à dire que le film fait de Bernadette et de Jacques Chirac des personnages attachants, drôles, presque vidés de leur substance réelle, à savoir des ordures. Pas un mot sur ses accointances avec l'Eglise d'Extrême-Droite par exemple (elle fréquentait Saint Nicolas du Chardonnay) et les arnaques du mari passibles de prison ferme sont simplement évoquées dans la pirouette finale du film (en gros elle fait élire Sarkozy et en échange il lui évite la prison). Un peu (trop) léger.
A 95 ans, c'est possiblement le dernier film de James Ivory. Et, même si on lui souhaite encore une longue vie, ce serait parfait pour conclure sa carrière en beauté, tant ce film aux allures de testament est l'un des ses plus beaux et de ses plus émouvants. C'est un documentaire sur un documentaire jamais fini, sur le papier on peut faire plus glamour, mais le résultat est bouleversant. Au début de sa carrière, le jeune James Ivory est envoyé en Afghanistan, avant les Talibans, les Russes et les Moudjahidine pour y réaliser un film documentaire qu'il ne terminera jamais. Plus de 60 ans plus tard, alors qu'une vie de cinéma s'est déroulé entre les deux dates, il retombe sur ces bobines et les montre enfin. Les images sont merveilleuses, bouleversantes d'une vérité qu'on ne connaitra jamais puisqu'elle a définitivement disparu. En faisant cet acte, Ivory fait littéralement revivre un temps disparu, oublié, supposé immontable. C'est un geste de cinéma immense. Mais James Ivory ne se contente pas que de ça. Cette plongée dans son passé est l'occasion pour lui de remonter tout le début de sa carrière, la moins connue et l'une des plus passionnante, soit sa période Indienne où il alterna documentaires et fictions, toujours dans une recherche de la vérité ontologique saisissante. C'est aussi un film qui retrace la vie de Babur, Prince puis Empereur Moghol du 16ème siècle, connu pour être avoir pris la ville de Kaboul. Cet Empereur a laissé des écrits dans lesquels il apparait un fin connaisseur des arts, et laisse aussi échapper entre deux lignes des attirances physiques pour le sexe masculin. C'est l'occasion idéale pour James Ivory de faire le parallèle avec sa vie et d'évoquer, je crois pour la première fois de manière frontale dans son œuvre, sa propre homosexualité. Il se livre avec une honnêteté et une simplicité absolument bouleversante, contribuant à faire de ce film bien plus qu'un simple documentaire sur une exhumation d'archives, mais l'une des oeuvres les plus émouvantes de ce début d'année.
Je m'attendais à détester, ce n'est pas le cas. Si j'apprécie beaucoup le fait qu'on puisse désormais faire en France des films de genre qui soient des films populaires, je n'aime pas le film pour autant. Passons sur les effets spéciaux discutables, on se fiche de ça, pour se concentrer sur l'essentiel, absent ici : le fond. Cailley filme des gens qui se transforment en animaux, oui, et puis ? Et puis rien, le film ne fait rien de ça, ne débouche sur rien, les personnages ne sont pas plus avancés en fin de métrage qu'à son ouverture, aucune évolution, aucun apprentissage, rien. On se contente de montrer quelque chose, sans pensée. Et en ce qui concerne la question de la transformation corporelle, n'importe quel plan des deux beaux films de Julia Ducournau, Grave puis Titane, disent 100 fois plus, et 100 fois mieux que la totalité de ce film-là, suffisamment sage et plat pour ne déranger personne et remporter tous les suffrages.
Je l'avais vu une première fois quelques années après sa sortie et n'en avait eu strictement rien à foutre, mais j'ai beaucoup aimé le revoir ces jours-ci alors que mon fils est en plein au coeur des romans et qu'il a beaucoup aimé ce premier film, ainsi que ma fille de 6 ans qui pour le coup découvrait complètement l'univers et a adoré. Je pense qu'on doit beaucoup de ça à Chris Colombus, cinéaste ô combien estimable, et l'un des meilleurs pour faire du divertissements intelligent, sans prendre les spectateurs pour des idiots.
J'avais bien aimé La Nuée, le premier film de Just Philippot, mais son second, Acide, est nettement moins réussi. Je reprends ce que je dis sur Le Règne Animal, j'adore l'idée que le cinéma de genre intègre le cinéma français mainstream, c'est un vrai signe de vitalité, encore faut-il avoir quelque chose à dire. Après l'invasion des insectes dans son premier opus, Philippot imagine ici une pluie acide qui détruit tout (mais bizarrement pas le toit de la voiture dans lequel s'abrite notre héros et sa fille tout le long du film) et réalise une sorte de film de zombies, course perpétuelle en avant, population qui se paupérise jusqu'à épuisement, mais avec la pluie à la place des zombies, ça coûte moins cher en effets spéciaux. Je suis dur, car le film se suit vraiment sans difficulté aucune, mais franchement, lorsqu'est on est amateur de cinéma de genre, ce type de film emprunte tellement a des films qu'on connait par coeur sans rien proposer de neuf, qu'on en a vite fait le tour.