Les Olympiades est un nouveau Jacques Audiard qui respire la fraîcheur et un vent de jeunesse. Complètement singulier vis-à-vis du reste de sa filmo, on y suit la vie de 4 jeunes trentenaires au sein du 13e arrondissement de Paris. Camille (Makita Samba) est prof de français, désireux de ne pas s'engager dans des relations de couple et de travailler dans l'immobilier.
Emilie (Lucie Zhang) est asociale, a fait sciences po mais se retrouve à travailler en centre d'appels.
Nora (Noémie Merlant) débarque de Bordeaux pour faire du droit, et va faire la rencontre d'une cam-girl du nom de Amber Sweet (Jenny Beth).
Tout ce beau monde (le casting est absolument parfait) va se croiser, s'aimer, se décevoir, et tenter de trouver leur identité.
Un postulat dont la finalité n'aura rien de surprenant, et on regrettera que le scénario ne comporte pas + d'enjeux dramatiques supplémentaires.
Néanmoins, le film (écrit par Céline Sciamma et Léa Mysius) parvient avec authenticité et douceur à prendre le pouls d'une génération multi-culturelle, diplômée, et de la middle-class, qui se cherche autant humainement qu'intimement et professionnellement.
A ce titre, l'enjeu principal des Les Olympiades est de suivre le cheminement de ces âmes solitaires, qui se mentent tous à eux-mêmes. S'enchaînent donc plusieurs scènes de marivaudage tantôt mordantes (oui le film est drôle), sensuelles ou planantes, afin de retranscrire le spleen existentiel des divers protagonistes.
On se plait à les suivre tenter de construire quelque chose, au rythme de la BO de Rone (très bonne) oscillant entre sonorités électroniques et atmosphériques.
D'entrée de jeu Audiard, aidé de son chef op' Paul Guilhaume, filment les Olympiades, Montsouris ou Tolbiac dans un somptueux noir et blanc rappelant forcément le Manhattan de Woody Allen.
Visuellement c'est évidemment de toute beauté, enchaînant plan aériens voluptueux ou perspectives d'un 13e arrondissement moderne, loin de l'architecture Haussmannienne toujours associée à la capitale.
La volonté d'un décorum multi-culturel également, qui se poursuit avec le choix de casting.
On esquisse par endroits la volonté de traiter des problématiques familiales (tous distants avec leur famille et qui vont là-aussi essayer de renouer le lien) même si le tout reste plus au second plan (comme la perspective de carrière, qui n'est pas tant la finalité du récit non plus).
2-3 scories, pour une belle chronique à la fabrication et à l'interprétation tout simplement exemplaire
Très beau film
4/5
Avec Tromperie, Desplechin surprend via une mise en scène travaillée, accompagnée d'une photographie douceâtre par Yorick le Saux (habitué de la filmo d'Ozon).
Un soin formel carré pour mettre en scène Philip (un très bon Podalydès dans un registre tout à fait inédit), écrivain et séducteur impliqué dans une relation adultère avec sa jeune muse (une Léa Seydoux qui démontre encore une fois aux détracteurs qu'elle a du talent).
En 12 séquences chapitrées, le spectateur est donc témoin des rencontres de Philip avec toutes les femmes de sa vie (relations passées et présentes) : l'occasion d'aboder avec intelligence un nombre de thèmes varié, allant bien sûr du mariage, des attentes, de l'antisémitisme, du sexisme, du mensonge, de l'envie...
Le tout via des dialogues piquants à la dimension théâtrale souvent assumée.
Car oui Tromperie est très verbeux, et c'est aussi sa principale limite. Si la réalisation globale permet quelques fulgurances de point de vue ou de fading significatif, le montage un peu trop programmatique donne au film un rythme de croisière monocorde empêchant l'irruption de l'émotion.
Plus cérébral et littéraire qu'autre chose donc, tandis que certains segments (ceux n'impliquant pas Léa Seydoux paradoxalement) font office de parenthèses illustratives et un brin inutiles (le rapport à la mort via le personnage d'Emmanuelle Devos demeure intéressant, tout comme le faux procès).
Reste un chouette film par Desplechin qui se renouvelle, porté par un très bon duo d'acteurs
6/10
Peut-être mon film préféré de cette sélection cannoise (avec le Audiard dont il partage des similitudes thématiques).
10 ans après Oslo, 31 aout et 3 ans après Thelma, Joachim Trier revient avec Julie (en 12 chapitres), à savoir la chronique sur plusieurs années du personnage féminin éponyme.
Julie est une trentenaire indécise et perdue dans la vie, qui se cherche, multiplie les rencontres et les désirs professionnels. Lorsqu'elle commencera à filer le parfait amour avec Aksel, un dessinateur de BD quarantenaire, une rencontre en soirée avec Eivind viendra encore une fois chambouler son existence (à moins que ce soit elle le problème ?).
A travers un canevas basique de comédie romantique, Joachim Trier livre in fine une "dramédie" à la délicatesse et au lyrisme tout simplement délectable. L'occasion (tout comme Fleabag dans un registre plus satirique) de dresser le portrait d'une femme moderne à travers l'ère post-MeToo.
Jamais complaisant ou faussement indigné, le film dresse aussi des portraits masculins nuancés, et universellement applicables.
Drôle, touchant, parfois même audacieux (un segment en animation, un autre utilisant un arrêt temporel sur une musique magnifique d'Ola Flottum), on regrettera peut-être une fin relativement classique (mais lourde de sens sur la possibilité ou non de compatibilité relationnelle de Julie).
Mais si il faut absolument voir ce film pour autre chose que l'intelligence de son écriture, la maitrise de sa mise en scène ou la pertinence de ses propos, c'est indéniablement pour la révélation Renate Reinsve dans le rôle-titre, tout simplement renversante autant dans le drame que la comédie.
Bref on va pas chipoter, c'est très beau et très bon !
8/10