Le Centre de Visionnage : Films et débats
Midnight Traveler, Hassan Fazili
C'est l'histoire d'un cinéaste qui doit quitter l'Afghanistan, avec sa femme, également cinéaste, et ses deux filles. Franchir des frontières, légalement ou pas. Trouver un passeur. Faire confiance. Chercher un hébergement. Attendre des papiers. Et comme c'est son histoire, c'est lui qui la filme, de l'intérieur. L'attente, l'espoir, les courses à l'aube dans les champs, les nuits dans la forêt, la neige derrière les barbelés, comment s'approprier une chambre sale en quelques minutes, comment dormir dans un couloir et s'y sentir à peu près bien. Le plus beau, ce sont les conversations du cinéaste et de sa femme - ce qu'ils se disent, pendant cette traversée de l'Europe qui a duré trois ans, ne concerne jamais seulement la traversée, n'est jamais seulement matériel : il y est toujours question d'amour, d'éducation, de religion. Les petites filles sont très touchantes - la plus fragile semble être la grande soeur, qui prend beaucoup sur elle pour conserver un semblant de bonne humeur, suivre cette existence qui lui est imposée, sans trop peser sur le moral de ses parents. On la devine rongée par la peur de ne pas être à la hauteur.
- groil_groil
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Salut !
encore une fois, pas une minute de libre en ce moment, donc je vois moins de films, et je ne peux en dire qu'un mot...
C'était mon Rivette préféré, et le film a super bien vielli. Magnifique ! La gestion du temps est l'une des choses les plus réussies. Et puis, l'édition bluray de Potemkine est sublime.
Je poursuis ma découverte du cinéma d'Amos Kollek et c'est formidable, en tout cas ce qu'il a construit avec Anna Thomson est dément et digne des plus grands. Celui-ci est un peu moins bon que Sue, notamment dans la gestion du pathos, et à cause d'une scène de bascule complètement ratée, mais c'est tout de même génial.
La daube du dimanche soir. Disons que De Niro est malgré tout émouvant, mais tant de pathos gelifié, mon dieu... Le cinéaste a quand même pour lui d'être un excellent cadreur (si jamais c'est bien lui qui fait le cadre).
La narration est un peu plus éclatée, Thomson n'est plus le seul centre du récit, et le registre narratif est un peu plus léger, allant parfois jusqu'à la comédie, mais c'est tout de même une réussite également.
Beaucoup aimé à sa sortie, assez aimé en le revoyant quelques années plus tard, mais aujourd'hui ça ne passe plus. On vante la finesse du film, sa langue, son érudition, mais en fait c'est un gros film de phallocrate, ça saute aux yeux. Pire, le personnage fait souffrir volontairement cette jeune femme du début à la fin, et il ne reçoit aucun châtiment final, sa seule punition c'est de recevoir une lettre où elle le quitte timidement, gardant pour elle ses cent ans de malheur. Au secours.
Un film d'auteur indé portugais, ok c'est pour moi, sauf que celui-ci ne sort malheureusement jamais des clichés du genre.
Sous-genre du film catastrophe, le film de tunnel, celui-ci est considéré comme une réussite, sorte de Poséidon sans l'eau. Mais c'est trop cliché, les dialogues et les personnages sont consternants, et les effets spéciaux souvent grotesques.
Alléchant sur le pitch, chiant comme la mort en vrai.
Le dernier Ridley Scott en date, dont je n'avais étonnamment jamais entendu parler ! ça raconte l'histoire vraie du kidnapping de JP Getty à Rome en 1973, et de son grand-père, alors homme le plus riche du monde, qui refuse de payer la rançon car c'est un putain de gros radin. Le film est vraiment bien, j'ai été étonné de suivre ça avec autant d'intérêt.
Un assez mauvais doc sur un assez mauvais groupe (incroyablement surestimé depuis toujours, j'hallucine qu'on ne s'en rende encore pas compte aujourd'hui).
Bonitzer joue à créer du mystère mais il n'y parvient pas souvent. En fait ce qu'il y a de plus mystérieux et de plus réussi vient sans doute de la nouvelle d'Henry James qui est ici adaptée. Y a parfois un petit côté Secret Défense dont Bonitzer est coscénariste, mais on en est quand même à mille lieues. Et toujours aussi impossible de comprendre un mot sortant de la bouche de Duvauchelle.
Un soir où j'avais besoin d'un truc bas du front, et en plus c'est le seul Bond que je n'avais pas vu. Et excellente surprise, car c'est un des meilleurs que j'ai vus (bon, ça ce n'est pas dur), super film d'action, supers ambiances, comme toujours on ne comprend jamais vraiment ce qui motive les personnages à se mouvoir, mais c'est bien fait, on ne perd jamais le fil et les deux heures trente passent en un rien de temps.
Quelques années après Et Dieu... Vadim refait tourner Bardot en ingénue qui fait vriller les coeurs, mais ce film-là, malgré un discours sous-jacent toujours un peu macho, est nettement plus réussi, comme une sorte de De Broca croisé avec la Nouvelle Vague, et ce même si le film s'essouffle avant la fin et est sujet à pas mal de remplissage.
encore une fois, pas une minute de libre en ce moment, donc je vois moins de films, et je ne peux en dire qu'un mot...
C'était mon Rivette préféré, et le film a super bien vielli. Magnifique ! La gestion du temps est l'une des choses les plus réussies. Et puis, l'édition bluray de Potemkine est sublime.
Je poursuis ma découverte du cinéma d'Amos Kollek et c'est formidable, en tout cas ce qu'il a construit avec Anna Thomson est dément et digne des plus grands. Celui-ci est un peu moins bon que Sue, notamment dans la gestion du pathos, et à cause d'une scène de bascule complètement ratée, mais c'est tout de même génial.
La daube du dimanche soir. Disons que De Niro est malgré tout émouvant, mais tant de pathos gelifié, mon dieu... Le cinéaste a quand même pour lui d'être un excellent cadreur (si jamais c'est bien lui qui fait le cadre).
La narration est un peu plus éclatée, Thomson n'est plus le seul centre du récit, et le registre narratif est un peu plus léger, allant parfois jusqu'à la comédie, mais c'est tout de même une réussite également.
Beaucoup aimé à sa sortie, assez aimé en le revoyant quelques années plus tard, mais aujourd'hui ça ne passe plus. On vante la finesse du film, sa langue, son érudition, mais en fait c'est un gros film de phallocrate, ça saute aux yeux. Pire, le personnage fait souffrir volontairement cette jeune femme du début à la fin, et il ne reçoit aucun châtiment final, sa seule punition c'est de recevoir une lettre où elle le quitte timidement, gardant pour elle ses cent ans de malheur. Au secours.
Un film d'auteur indé portugais, ok c'est pour moi, sauf que celui-ci ne sort malheureusement jamais des clichés du genre.
Sous-genre du film catastrophe, le film de tunnel, celui-ci est considéré comme une réussite, sorte de Poséidon sans l'eau. Mais c'est trop cliché, les dialogues et les personnages sont consternants, et les effets spéciaux souvent grotesques.
Alléchant sur le pitch, chiant comme la mort en vrai.
Le dernier Ridley Scott en date, dont je n'avais étonnamment jamais entendu parler ! ça raconte l'histoire vraie du kidnapping de JP Getty à Rome en 1973, et de son grand-père, alors homme le plus riche du monde, qui refuse de payer la rançon car c'est un putain de gros radin. Le film est vraiment bien, j'ai été étonné de suivre ça avec autant d'intérêt.
Un assez mauvais doc sur un assez mauvais groupe (incroyablement surestimé depuis toujours, j'hallucine qu'on ne s'en rende encore pas compte aujourd'hui).
Bonitzer joue à créer du mystère mais il n'y parvient pas souvent. En fait ce qu'il y a de plus mystérieux et de plus réussi vient sans doute de la nouvelle d'Henry James qui est ici adaptée. Y a parfois un petit côté Secret Défense dont Bonitzer est coscénariste, mais on en est quand même à mille lieues. Et toujours aussi impossible de comprendre un mot sortant de la bouche de Duvauchelle.
Un soir où j'avais besoin d'un truc bas du front, et en plus c'est le seul Bond que je n'avais pas vu. Et excellente surprise, car c'est un des meilleurs que j'ai vus (bon, ça ce n'est pas dur), super film d'action, supers ambiances, comme toujours on ne comprend jamais vraiment ce qui motive les personnages à se mouvoir, mais c'est bien fait, on ne perd jamais le fil et les deux heures trente passent en un rien de temps.
Quelques années après Et Dieu... Vadim refait tourner Bardot en ingénue qui fait vriller les coeurs, mais ce film-là, malgré un discours sous-jacent toujours un peu macho, est nettement plus réussi, comme une sorte de De Broca croisé avec la Nouvelle Vague, et ce même si le film s'essouffle avant la fin et est sujet à pas mal de remplissage.
I like your hair.
Le film avait fait parler de lui à l'époque car Kevin Spacey a été remplacé par Christopher Plummer à quelques semaines seulement de la sortie du film à cause de son blacklistage alors que le tournage était déjà terminé.groil_groil a écrit : ↑mer. 7 juil. 2021 08:01
Le dernier Ridley Scott en date, dont je n'avais étonnamment jamais entendu parler ! ça raconte l'histoire vraie du kidnapping de JP Getty à Rome en 1973, et de son grand-père, alors homme le plus riche du monde, qui refuse de payer la rançon car c'est un putain de gros radin. Le film est vraiment bien, j'ai été étonné de suivre ça avec autant d'intérêt.
On peut d'ailleurs trouver sur Youtube la bande-annonce avec Spacey :
- groil_groil
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oh purée, merci, je me souvenais de ce fait divers, mais absolument pas qu'il était lié à ce film. Quelle connerie d'ailleurs. Est-ce qu'on a effacé Spacey de tous ses films précédents également ?Pale a écrit : ↑mer. 7 juil. 2021 08:34Le film avait fait parler de lui à l'époque car Kevin Spacey a été remplacé par Christopher Plummer à quelques semaines seulement de la sortie du film à cause de son blacklistage alors que le tournage était déjà terminé.groil_groil a écrit : ↑mer. 7 juil. 2021 08:01
Le dernier Ridley Scott en date, dont je n'avais étonnamment jamais entendu parler ! ça raconte l'histoire vraie du kidnapping de JP Getty à Rome en 1973, et de son grand-père, alors homme le plus riche du monde, qui refuse de payer la rançon car c'est un putain de gros radin. Le film est vraiment bien, j'ai été étonné de suivre ça avec autant d'intérêt.
On peut d'ailleurs trouver sur Youtube la bande-annonce avec Spacey :
I like your hair.
Le comble étant que Plummer a été nommé à l'oscar pour ce rôle !groil_groil a écrit : ↑mer. 7 juil. 2021 09:32oh purée, merci, je me souvenais de ce fait divers, mais absolument pas qu'il était lié à ce film. Quelle connerie d'ailleurs. Est-ce qu'on a effacé Spacey de tous ses films précédents également ?Pale a écrit : ↑mer. 7 juil. 2021 08:34Le film avait fait parler de lui à l'époque car Kevin Spacey a été remplacé par Christopher Plummer à quelques semaines seulement de la sortie du film à cause de son blacklistage alors que le tournage était déjà terminé.groil_groil a écrit : ↑mer. 7 juil. 2021 08:01
Le dernier Ridley Scott en date, dont je n'avais étonnamment jamais entendu parler ! ça raconte l'histoire vraie du kidnapping de JP Getty à Rome en 1973, et de son grand-père, alors homme le plus riche du monde, qui refuse de payer la rançon car c'est un putain de gros radin. Le film est vraiment bien, j'ai été étonné de suivre ça avec autant d'intérêt.
On peut d'ailleurs trouver sur Youtube la bande-annonce avec Spacey :
Non juste de ce film là mais après il a été évincé de pas mal de projets comme la saison finale de House of Cards.groil_groil a écrit : ↑mer. 7 juil. 2021 09:32oh purée, merci, je me souvenais de ce fait divers, mais absolument pas qu'il était lié à ce film. Quelle connerie d'ailleurs. Est-ce qu'on a effacé Spacey de tous ses films précédents également ?
@groil_groil
Just curious
Je ne connaissais pas ton opinion concernant The Doors (pour lesquels je n'ai pas du tout d'opinion). T'en as d'autres musiciens 'cultes' que tu considères surestimés ?incroyablement surestimé depuis toujours, j'hallucine qu'on ne s'en rende encore pas compte aujourd'hui
Just curious
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Jean-Marie Straub
- Tamponn Destartinn
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Annette - Carax
Ca a une sacrée gueule d'atmosphère, bien sûr. Mais pour la première fois, je crois que Carax m'a laissé en dehors...
Y'avait un souci de projection, un voile bleu visible dans les scènes sombres. J'ai hésité à expliquer mon ressenti via cela, mais la vérité est que si ce problème m'a de plus en plus gêné, c'est parce que je m'ennuyais et me concentrais plus que là dessus.
Le film se vend d'abord comme une histoire d'amour, avant de se révéler finalement comme étant le portrait d'une ordure qui gâche la vie de son entourage pour essayer de se maintenir à flot. Je trouve ça très bien sur le papier, mais ça manque cruellement d'incarnation concernant tout le monde à part Adam Driver. Et ce déséquilibre atténue énormément le propos du film. Le personnage de Cotillard est bien trop transparent...
C'est dommage.
Aussi : quelqu'un a une explication sur la transformation physique du personnage d'Adam Driver, qui se met de plus en plus à ressembler à Carax ? Ca me parait très ambigu comme position de Carax (d'ailleurs, c'est qui la jeune fille à côté de lui dans la séquence d'ouverture ? sa propre fille ? si oui... bon...)
C’est marrant car quand j’ai entendu parler du film (de son sujet), j’ai tout de suite pensé à son histoire personnelle (sa compagne s’était suicidé la veille du tournage de ‘Holy motors’. Et il ne l’avait pas annulé (comme si de rien n’était)Tamponn Destartinn a écrit : ↑ven. 9 juil. 2021 13:34
Aussi : quelqu'un a une explication sur la transformation physique du personnage d'Adam Driver, qui se met de plus en plus à ressembler à Carax ? Ca me parait très ambigu comme position de Carax (d'ailleurs, c'est qui la jeune fille à côté de lui dans la séquence d'ouverture ? sa propre fille ? si oui... bon...)
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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oui c'est sa filleTamponn Destartinn a écrit : ↑ven. 9 juil. 2021 13:34d'ailleurs, c'est qui la jeune fille à côté de lui dans la séquence d'ouverture ? sa propre fille ? si oui... bon...)
et c'est le film d'un homme qui donne à sa fille la possibilité de ne pas lui pardonner
(pour ma part j'ai adoré)
- Tamponn Destartinn
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Merci pour ces réponses, j'ai en effet appris pour les evenements personnels de Carax (j'ignorais)
Je pense que je vais devoir aller le revoir.
Je pense que je vais devoir aller le revoir.
- Tamponn Destartinn
- Messages : 1169
- Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 21:11
Bon, l'air de rien ça fait deux jours et je n'arrête pas d'y penser...
Je DOIS aller revoir le Carax.
Je préviens donc qu'il est pas impossible que je fasse une Greg avec Neon Demon
Je DOIS aller revoir le Carax.
Je préviens donc qu'il est pas impossible que je fasse une Greg avec Neon Demon
Annette, Leos Carax
Il y a trente ans, Carax faisait un choix : Binoche contre Lavant, l'argent et la gloire contre l'amour fou, voir plutôt qu'éprouver.
Pourtant, il a continué de filmer Denis Lavant, et plus Binoche. Comme si ce qui avait été abandonné, laissé pour compte, devait nécessairement revenir.
Alex le clochard pur est devenu monsieur Merde - un monstre des sous-sols, un homme qui s'est enfoncé là, peut-être pas par choix, mais par refus en tout cas. Un homme libre, sans condition.
Et puis, dans Holy Motors, cette liberté éclatait : monsieur Merde n'était même pas seulement monsieur Merde, mais tout le monde, et peut-être personne. Vertige de la dépersonnalisation, jusqu'à l'animal, jusqu'au cyborg, jusqu'à la machine (les voitures émotives à la fin du film, remisées au garage) - inanité peut-être aussi, trop-plein ne pouvant mettre en évidence que les limites d'un imaginaire (et de ses genres). Holy Motors était un film plein de scènes réussies formant un ensemble qui ne m'a pas convaincu ; comme si chacune des scènes disait "je peux" en ignorant volontairement ce qu'elles ne peuvent pas, ce qu'elles ne pourront jamais, et cessant de lutter contre cet état de fait. Si l'animal et la machine s'y trouvaient, le féminin s'en était absenté : Edith Scob ou Kylie Minogue, assistante ou star, rien de bien vivant. Les héros sont devenus solitaires, les femmes sont reléguées aux marges.
Annette est le contraire : un film qui peut, certes, et qui montre qu'il peut beaucoup. Mais on n'y voit presque pas de scènes : plutôt des visions que du temps, des couleurs que des enjeux. D'ailleurs les images s'imbriquent les unes dans les autres, fondus de l'émotion, superpositions du rêve.
Carax ne filme plus les pauvres (la pauvreté, dans Annette, n'existe pas - et c'est sans doute ce qui fait de Kiarostami, à talent égal, un cinéaste plus profond que Carax). Mais il filme ce qui l'intéresse et le concerne : l'amour-peut-être, le doute, une femme qui ne cesse de mourir, un enfant-marionnette, un monde qui s'effondre, des fantasmagories très réelles, la cuirasse d'un spectacle permanent.
Le film sonne comme quelque chose de personnel - au moins autant que l'impersonnalité était la lubie d'Holy Motors. D'une vibration particulière. Comme si Carax, ayant manqué d'être un ange en ce monde corrompu, se condamnait lui-même pour mieux viser les hommes, et les pères et les mères, et l'amour qui ne tient pas ses promesses.
Annette s'ouvre sur sa fille et lui, dans un studio d'enregistrement, prêts à lancer le spectacle obscène de leur relation - il se clôt sur eux, qui marchent dans la nuit en portant une lanterne, au milieu de leurs personnages, ayant rejoint ce monde de fiction où une fille peut dire à son père : "tu n'as plus rien à aimer maintenant", résistance d'une âme lassée d'apparaître.
Monde rêvé, monde idéal, qui par la chanson vient sacrer la parole, en faire le seul refuge dans la forêt des images criardes.
Le film est triste, désespéré : l'amour tombe malade, et l'artiste en vient à la conclusion qu'il ferait mieux de se taire.
Il est heureux aussi, d'un même mouvement, puisqu'il ne cesse, en vue de ce silence, d'inventer le cinéma, c'est-à-dire de le détruire, à défaut d'avoir su changer l'amour en autre chose qu'un rapport de forces.
Une fois admis que le cinéma de Carax ne connaît ni la pauvreté ni la bonté, on peut le suivre jusqu'à l'endroit sublime qu'il nous propose : celui d'un homme en lutte, qui croit un peu trop en sa petitesse et pas assez en la grandeur des autres, mais qui la traque avec rage et souffle. Un homme qui sait qu'il ment, et persiste, mais se dénonce et pourtant ne cherche pas le salut de son âme, plutôt son évaporation sous la forme d'images effrayantes et superbes.
Tu parles de Carax ou de Henry ?
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Jean-Marie Straub
Déconfinement & été donc beaucoup moins de films et je ne prend pas le temps d'écrire ici...
J'espère que vous allez tous bien !
The Host and The Cloud - Pierre Huyghes - 2010
Pierre Huyghes est l'un des plasticiens français -et internationaux- les plus épatant et passionnant depuis le début des années 2000. Il recourt fréquemment au medium vidéo et The Host and The Cloud est sans doute l'une de ses pièces les plus ambitieuses. Parfaitement intégré à sa pratique, cette œuvre est une déambulation de près de 2h dans un musée fictif dans lequel vivent une série de personnages, dont les existences se complètent ou s'ignorent, s'observant ou s'évitant. Le croisement en eaux troubles entre performances, situations construites, improvisations, scripts, documentaires qui définissent le travail de Huyghes se trouve ici magnifié et le résultat est hypnotisant. Il s'agit assurément d'une des meilleurs pièces d'art vidéo que j'ai pu voir, et une des meilleures expérimentation cinématographique du début du XXIème siècle tout court.
Le Jardin de pierre - Parviz Kimiavi - 1976
Surprenant film, entre documentaire et allégorie, sur un berger iranien qui, à la suite d'une illumination, décide de construire un "parc de sculpture" en plein désert. Pierres, rochers, fils téléphoniques et arbres morts constituent un langage artistique total comme seul sait en générer l'art brut, doublé ici d'une porté ouvertement mystique. Cette double couche est elle même complétée par une portée politique car en arrière plan gronde la dictature iranienne qui viendra au final annihiler l'ensemble du projet, ne laissant place à aucun écart créatif, ni artistique ni religieux.
Dupieux semble pour de bon revenu en Europe, mais sans oublier du tout son long passage par les Etats-Unis. Si avec Le Daim il réinscrivait les codes du slasher dans un cadre franco-français, c'est ici les règles de la comédie "buddy-movie" qu'il réinterprète. Dur, par exemple, de ne pas penser à Wayne's World durant le visionnage de Mandibules, et encore bien plus aux frères Farrelly tendance Dumb & Dumber. Même personnages doucement débiles et surtout même primauté accordé aux relations humaines et à l'amitié. Le film n'est ainsi jamais prétentieux, se plaçant lui même -ainsi que les spectateurs- au même niveau que ceux qu'il filme amusé, tandis que la fameuse mouche ne se révèle être qu'un prétexte pour vivre et apprendre sur soi même. Et que cela est fait avec légèreté et drôlerie... un grand plaisir.
Le cinéma de Rohmer est un cinéma dans lequel la géographie tient un rôle essentiel. Tous ses films sont ainsi toujours précisément situés en des lieux porteurs de sens par rapport à leurs localisations ou aux façon dont on y arrive ou y circule. A l'inverse le cinéma de Rohmer est un cinéma ou la temporalité est comme secondaire, ses films tendant plus à une sorte d'éternité idéale des relations humaines. Il est ainsi surprenant de découvrir avec "L'arbre..." un film qui soit tant défini par le cadre de son époque : une campagne politique régionale française du début des années 90. Si l'on retrouve tout ce qui fait l’intérêt du cinéma de Rohmer (intelligence des dialogues, précision des cadrages etc et bien sur géographie !...) cette particularité transforme le film est un étonnant témoignage de l'histoire contemporaine récente. Et comme si le réalisateur en avait conscience il fait répéter deux ou trois fois à Luchini "Ou en serons nous dans 40 ans ?"... faisant ainsi glisser de lui même l’intérêt qu'on peut trouver habituellement à ses œuvres.
Trás-os-Montes - António Reis & Margarida Cordeiro - 1976
Il est toujours troublant de découvrir un film qui réussit à créer son propre langage cinématographique et donne tout un coup un aspect neuf à tout ce qu'il filme et à la façon même dont il les filme. Au plus près des habitants de la très pauvre région Nord du Portugal (Tras Os Montes, donc), ce film est un incroyable témoignage prenant toutes les libertés qu'il veut, mélangeant tons, activités, saisons, époques, pour dresser un portrait intemporel d'un lieu et d'un peuple. Ici les strates du paysages deviennent les cousines des savoirs-faire, les souvenirs éclosent comme des bourgeons, histoire et Histoire ne font plus qu'un tout indissociable. Magnifique.
J'espère que vous allez tous bien !
The Host and The Cloud - Pierre Huyghes - 2010
Pierre Huyghes est l'un des plasticiens français -et internationaux- les plus épatant et passionnant depuis le début des années 2000. Il recourt fréquemment au medium vidéo et The Host and The Cloud est sans doute l'une de ses pièces les plus ambitieuses. Parfaitement intégré à sa pratique, cette œuvre est une déambulation de près de 2h dans un musée fictif dans lequel vivent une série de personnages, dont les existences se complètent ou s'ignorent, s'observant ou s'évitant. Le croisement en eaux troubles entre performances, situations construites, improvisations, scripts, documentaires qui définissent le travail de Huyghes se trouve ici magnifié et le résultat est hypnotisant. Il s'agit assurément d'une des meilleurs pièces d'art vidéo que j'ai pu voir, et une des meilleures expérimentation cinématographique du début du XXIème siècle tout court.
Le Jardin de pierre - Parviz Kimiavi - 1976
Surprenant film, entre documentaire et allégorie, sur un berger iranien qui, à la suite d'une illumination, décide de construire un "parc de sculpture" en plein désert. Pierres, rochers, fils téléphoniques et arbres morts constituent un langage artistique total comme seul sait en générer l'art brut, doublé ici d'une porté ouvertement mystique. Cette double couche est elle même complétée par une portée politique car en arrière plan gronde la dictature iranienne qui viendra au final annihiler l'ensemble du projet, ne laissant place à aucun écart créatif, ni artistique ni religieux.
Dupieux semble pour de bon revenu en Europe, mais sans oublier du tout son long passage par les Etats-Unis. Si avec Le Daim il réinscrivait les codes du slasher dans un cadre franco-français, c'est ici les règles de la comédie "buddy-movie" qu'il réinterprète. Dur, par exemple, de ne pas penser à Wayne's World durant le visionnage de Mandibules, et encore bien plus aux frères Farrelly tendance Dumb & Dumber. Même personnages doucement débiles et surtout même primauté accordé aux relations humaines et à l'amitié. Le film n'est ainsi jamais prétentieux, se plaçant lui même -ainsi que les spectateurs- au même niveau que ceux qu'il filme amusé, tandis que la fameuse mouche ne se révèle être qu'un prétexte pour vivre et apprendre sur soi même. Et que cela est fait avec légèreté et drôlerie... un grand plaisir.
Le cinéma de Rohmer est un cinéma dans lequel la géographie tient un rôle essentiel. Tous ses films sont ainsi toujours précisément situés en des lieux porteurs de sens par rapport à leurs localisations ou aux façon dont on y arrive ou y circule. A l'inverse le cinéma de Rohmer est un cinéma ou la temporalité est comme secondaire, ses films tendant plus à une sorte d'éternité idéale des relations humaines. Il est ainsi surprenant de découvrir avec "L'arbre..." un film qui soit tant défini par le cadre de son époque : une campagne politique régionale française du début des années 90. Si l'on retrouve tout ce qui fait l’intérêt du cinéma de Rohmer (intelligence des dialogues, précision des cadrages etc et bien sur géographie !...) cette particularité transforme le film est un étonnant témoignage de l'histoire contemporaine récente. Et comme si le réalisateur en avait conscience il fait répéter deux ou trois fois à Luchini "Ou en serons nous dans 40 ans ?"... faisant ainsi glisser de lui même l’intérêt qu'on peut trouver habituellement à ses œuvres.
Trás-os-Montes - António Reis & Margarida Cordeiro - 1976
Il est toujours troublant de découvrir un film qui réussit à créer son propre langage cinématographique et donne tout un coup un aspect neuf à tout ce qu'il filme et à la façon même dont il les filme. Au plus près des habitants de la très pauvre région Nord du Portugal (Tras Os Montes, donc), ce film est un incroyable témoignage prenant toutes les libertés qu'il veut, mélangeant tons, activités, saisons, époques, pour dresser un portrait intemporel d'un lieu et d'un peuple. Ici les strates du paysages deviennent les cousines des savoirs-faire, les souvenirs éclosent comme des bourgeons, histoire et Histoire ne font plus qu'un tout indissociable. Magnifique.
Ah ! Cela tu l'as cherché car : à la toute fin, durant le générique, tu as bien vu Carax lui-même avec ça fille, n'est ce pas ? C'était comme si pour nous dire : oui, je lui ai donné la possibilité de ne pas me pardonner mais, ça, c'est pour le cinéma (seulement durant le film). Regardez bien : une fois il est terminé (le générique de la fin), c'est autre chose (on est bras dessus bras dessous). D'ailleurs, c'est ce générique qui m'a fait définitivement basculé. En ce qui me concerne, il n'avait pas lieu d’être (le film devait se terminer sur cette scène Henry/fille, écran noir et point barre).
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Jean-Marie Straub
Benedetta, Paul Verhoeven
En fait je n'ai vraiment rien à en dire, c'est une grosse machine qui fonctionne, on la regarde fonctionner, les thèmes sont clairs, le code de jeu est atroce mais unifié, l'esthétique est repoussante mais utile. On ne peut même pas reprocher à Verhoeven de ne pas aller au bout de choses, il y va. Mais je ne trouve ça ni sensible ni personnel, ni même vraiment intéressant. C'est lourd, quasi-pornographique, et beaucoup trop long ; et il y a déjà cent films qui ont été faits sur le sujet.
Sans cette dernière scène, le film aurait été beaucoup moins ambivalent. Or Carax comme cinéaste se méfie du sens ou du discours (c'est peut-être sa limite, mais en tout cas c'est sa singularité). Et grâce à cela il fait coexister deux choses : une relation père/fille impossible, frappée d'arrêt de mort, et une relation père/fille dans la complicité de l'élaboration d'une fiction à travers laquelle le vécu s'épanche et s'élabore.sokol a écrit : ↑lun. 12 juil. 2021 10:58Ah ! Cela tu l'as cherché car : à la toute fin, durant le générique, tu as bien vu Carax lui-même avec ça fille, n'est ce pas ? C'était comme si pour nous dire : oui, je lui ai donné la possibilité de ne pas me pardonner mais, ça, c'est pour le cinéma (seulement durant le film). Regardez bien : une fois il est terminé (le générique de la fin), c'est autre chose (on est bras dessus bras dessous). D'ailleurs, c'est ce générique qui m'a fait définitivement basculé. En ce qui me concerne, il n'avait pas lieu d’être (le film devait se terminer sur cette scène Henry/fille, écran noir et point barre).
Cela dit, je suis d'accord avec toi pour la scène thaïlandaise, il me semble que c'est l'endroit où le film s'arrange avec lui-même, avec ses failles. Comme si Carax avait lu un demi-article sur la "masculinité toxique" dans Elle, et qu'il s'était dit "ben oui c'est mon personnage". Ca ne va pas très loin.
101% d'accord. A un virgule près.asketoner a écrit : ↑lun. 12 juil. 2021 11:15En fait je n'ai vraiment rien à en dire, c'est une grosse machine qui fonctionne, on la regarde fonctionner, les thèmes sont clairs, le code de jeu est atroce mais unifié, l'esthétique est repoussante mais utile. On ne peut même pas reprocher à Verhoeven de ne pas aller au bout de choses, il y va. Mais je ne trouve ça ni sensible ni personnel, ni même vraiment intéressant. C'est lourd, quasi-pornographique, et beaucoup trop long ;
Peux tu citer quelques-uns ? Merci
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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Au-delà des collines de Mungiu,
Hadewijch de Dumont,
Le Narcisse noir de Powell et Pressburger,
Les Anges du Péché de Bresson,
Mère Jeanne des Anges de Kawalerowicz,
La Religieuse portugaise de Green,
il y a aussi un Almodovar mais je ne sais plus le nom...
et je mettrais aussi Contact de Zemeckis dans cette liste
(j'imagine que Thérèse de Cavalier et La Religieuse de Rivette n'enseigneraient ont pas éloignées non plus)
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Je ne vois pas trop en quoi sa fille a participé à l'élaboration de cette fiction : on la voit au tout début d'ailleurs, mais je ne me souviens pas trop : elle pose ses mais sur ses épaules ? (si je ne me trompe pas, il est assis sur son fauteuil de réalisateur, n'est ce pas ?).
ps: je serais curieux de savoir ce que pense de ce film Sharunas Bartas, le père des deux autres frères/sœurs d'Annette.
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Merci. Mais pas vu ces films.
Oui, j'y ai pensé.
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Oui, elle pose les mains sur ses épaules, ils sont ensemble dans le studio d'enregistrement, ils lancent la musique - et ils regardent ensemble l'histoire.sokol a écrit : ↑lun. 12 juil. 2021 11:45Je ne vois pas trop en quoi sa fille a participé à l'élaboration de cette fiction : on la voit au tout début d'ailleurs, mais je ne me souviens pas trop : elle pose ses mais sur ses épaules ? (si je ne me trompe pas, il est assis sur son fauteuil de réalisateur, n'est ce pas ?).
ps: je serais curieux de savoir ce que pense de ce film Sharunas Bartas, le père des deux autres frères/sœurs d'Annette.
Le Almodovar c'est Dans les ténèbres qui doit être son second long-métrage, en pleine Movida. Après que des films sur le sujet aient été faits, ça ne me gêne pas trop. Verhoven n'est ni Powell ni Almodovar, c'est sa vision qui m'intéresse.asketoner a écrit : ↑lun. 12 juil. 2021 11:38Au-delà des collines de Mungiu,
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HahahaTamponn Destartinn a écrit : ↑sam. 10 juil. 2021 14:41Bon, l'air de rien ça fait deux jours et je n'arrête pas d'y penser...
Je DOIS aller revoir le Carax.
Je préviens donc qu'il est pas impossible que je fasse une Greg avec Neon Demon
Cette fois j'ai adoré tout de suite, moi
Enfin j'ai plein de réserves mais le film m'a fasciné puis terrassé. Et en grande partie pour ce qu'en dit Asky.
Carax avait dedié Holy motors à Katerina Golubeva, je crois. Annette c'est clairement pour sa fille. Mais punaise que c'est sombre...
Tu n'as pas lu : "à Nastya" ? Le film lui est littéralement dédié
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Formidable, beau et original, est à l'Afrique ce qu'un Macunaïma serait au Brésil.
Le dernier Costa-Gavras nous explique les origines de la crise grecque par le menu, mais il est tellement occupé à faire un cours qu'il oublie d'en faire un film.
Deuxième fois, et j'aime toujours autant. On peut reprocher au film sa violence, le fait qu'il prend un personnage féminin en lui faisant endurer tout ce qu'il y a de possible, mais j'y vois personnellement surtout de la persévérance et de la determination. Et puis le film est bien mis en scène et très beau d'un point de vue plastique.
I like your hair.
Qu'est ce qui te faisait pleurer dans ce film ? La dernière scène alors car, si Adam Driver passe son temps à circuler en moto, il a fallu attendre la dernière scène pour que ça circule un peu dans le film.
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Mais oui, c'est la chialance ultime cette fin !
Et puis, elle donne une conclusion parfaite au film, mais aussi à une partie du film (l'exploitation d'Annette à travers le monde) qui n'est peut être pas la plus réussie, et qui sans cette conclusion s'effondre un peu sur elle même et tourne un peu à vide.
Et puis, elle donne une conclusion parfaite au film, mais aussi à une partie du film (l'exploitation d'Annette à travers le monde) qui n'est peut être pas la plus réussie, et qui sans cette conclusion s'effondre un peu sur elle même et tourne un peu à vide.
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Oui bien entendu la scène de la prison. Et comme le dit Tyra, ça fait tenir tout l'édifice. "Sympathy for the abyss" m'a terrassé...
Le problème (pour moi) c'est qu'il n'y a pas vraiment d'édifice et je peux même dire que c'est justement à ce moment là que le film devrait commencer (le film sur Annette, puisque c'est ce que intéresse Carax, apparemment).JanosValuska a écrit : ↑mer. 14 juil. 2021 01:22
Oui bien entendu la scène de la prison. Et comme le dit Tyra, ça fait tenir tout l'édifice. "Sympathy for the abyss" m'a terrassé...
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Hasard ? pourquoi, à ton avis ? (perso j'ai une petite idée )
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Dans le genre érotico-SM chez les nones plus assumé, il y a aussi ce film qui vaut le coup d'œil :asketoner a écrit : ↑lun. 12 juil. 2021 11:38Au-delà des collines de Mungiu,
Hadewijch de Dumont,
Le Narcisse noir de Powell et Pressburger,
Les Anges du Péché de Bresson,
Mère Jeanne des Anges de Kawalerowicz,
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asketoner a écrit : ↑lun. 12 juil. 2021 11:15
Benedetta, Paul Verhoeven
En fait je n'ai vraiment rien à en dire, c'est une grosse machine qui fonctionne, on la regarde fonctionner, les thèmes sont clairs, le code de jeu est atroce mais unifié, l'esthétique est repoussante mais utile. On ne peut même pas reprocher à Verhoeven de ne pas aller au bout de choses, il y va. Mais je ne trouve ça ni sensible ni personnel, ni même vraiment intéressant. C'est lourd, quasi-pornographique, et beaucoup trop long ; et il y a déjà cent films qui ont été faits sur le sujet.
C'est troublant car ce que tu dis pourrais très bien coller aux autres films de Verhoeven quand on en voit pas la porte d'entrée...?
Mais comme je sais que tu connais son œuvre et son mode de fonctionnement "en caméléon", ça me surprend !
En tout cas me voilà encore plus curieux de le voir...
Ça dépend du rapport que chacun a avec ses films : en ce qui me concerne, cela colle par excellence au "Basic instinct".
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Esthétiquement ça se regarde (je pensais que ça serait pire) mais au niveau du fond, de ce que ça raconte, mon dieu... que de poncifs et de médiocrité... En gros : si on boit un petit peu, c'est cool, si on boit plus, c'est dangereux, et si on boit trop, on peut perdre son boulot, sa femme, et même sa vie... Putainnnnnn, merci Vinterberg pour cette grande leçon de choses... Mon dieu...
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Annette, Leos Carax (2021)
Le nouveau film de Leos Carax est un film superficiel. Entendre par là : un film sur la scène, le show, le spectacle (populaire côté Adam Driver, intello côté Marion Cotillard) et donc tout ce que ça sous-entend comme façades et comme barrières entre l'image qu'on donne et la réalité des événements. Toute la première partie du film, avant la scène sur le yacht, ressemble d'ailleurs à un clip ou à une succession de clips dans lesquels Carax ne laisse pas réellement exister ses personnages : soit ils sont sur scène et jouent donc un rôle, soit les moments d'intimité qu'ils partagent sont creux et mécaniques. La romance entre les deux personnages principaux est aseptisée voir terne, on n'y croit absolument pas (moi, en tout cas, je n'y ai pas cru) malgré les mots doux chantés, susurrés et répétés inlassablement entre les deux amants, et de cette union nait inévitablement un enfant qui n'est pas le fruit d'un amour sincère mais plutôt celui d'une relation fantasmée par le monde (les médias, le showbiz qui ne sont réduits qu'à de simples annonces télévisées et même le couple lui-même) entre deux mondes culturels opposés. Forcément, l'enfant ne peut donc être, dans un premier temps qu'une marionnette : c'est la plus belle idée cinématographique du film que de montrer comment l'enfant s'arrache de lui-même à ce milieu pour finalement exister par lui-même. La scène finale est d'ailleurs la seule (ou l'une des seules) qui existe par elle-même et pour elle-même, la seule qui soit réellement émouvante car l'enjeu le plus important est finalement atteint par l'enfant et les conséquences finalement tangibles pour le père.
C'est le problème principale du film car ces scènes constituent la moitié du film. Au cinéma, on ne peut pas filmer la scène inlassablement (ou alors, la filmer en entier et ça donne "Moise et Aaron" des Straub). Sinon, ça donne un fragment du spectacle de Gad Elmaleh ou Guy Bedos, même si tu la film "magistralement bien" (ou un morceau d'opéra qui passe sur Arte quoi). Ce qui est perturbant c'est que Carax "sait bien tout ça", et pourtant, c'est le choix qu'il a fait.
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Les séquences scéniques d'Annette sont formidables et n'ont rien de fragments de spectacle de Bedos ou d'Opéra filmés, stop la mauvaise foi !
C'est leur inscription dans la comédie musicale (ce qu'est le film, j'ai l'impression que ses détracteurs ont du mal à le prendre comme tel, une comédie musicale, avec toute l'artificialité qui va avec) qui est formidable, virtuose. Les scènes avec Driver sur scène ne ressemblent à rien de connu, avec cette chorégraphie qui inclue Driver, plus le public, le tout en prise de son directe.
Après c'est un film qui joue beaucoup sur l'excitation du spectateur (comme les shows de Driver), de l'électricité dans l'air, de l'excitation du spectacle, de la scène, du concert, de la musique, et ce dès le premier plan, avec cette barre de son frémissante qui fait tanguer l'image. Si on n'est pas dans cet état recherché par Carax dès le début, je conçois parfaitement qu'on puisse ne jamais rentrer dans le film et voir tous ses défauts, plutôt que d'être pris dans la totalité du geste.
C'est leur inscription dans la comédie musicale (ce qu'est le film, j'ai l'impression que ses détracteurs ont du mal à le prendre comme tel, une comédie musicale, avec toute l'artificialité qui va avec) qui est formidable, virtuose. Les scènes avec Driver sur scène ne ressemblent à rien de connu, avec cette chorégraphie qui inclue Driver, plus le public, le tout en prise de son directe.
Après c'est un film qui joue beaucoup sur l'excitation du spectateur (comme les shows de Driver), de l'électricité dans l'air, de l'excitation du spectacle, de la scène, du concert, de la musique, et ce dès le premier plan, avec cette barre de son frémissante qui fait tanguer l'image. Si on n'est pas dans cet état recherché par Carax dès le début, je conçois parfaitement qu'on puisse ne jamais rentrer dans le film et voir tous ses défauts, plutôt que d'être pris dans la totalité du geste.
Salut Sokol.sokol a écrit : ↑jeu. 15 juil. 2021 14:43C'est le problème principale du film car ces scènes constituent la moitié du film. Au cinéma, on ne peut pas filmer la scène (ou alors, la filmer en entier et ça donne "Moise et Aaron" des Straub). Sinon, ça donne un fragment du spectacle de Gad Elmaleh ou Guy Bedos, même si tu la film "magistralement bien" (ou un morceau d'opéra qui passe sur Arte quoi). Ce qui est perturbant c'est que Carax "sait bien tout ça", et pourtant, c'est le choix qu'il a fait.
Oui, c'est aussi la principale réserve que j'ai sur le film même si je comprends pourquoi Carax fait ça (c'est effectivement un choix de sa part). Le plus intéressant dans ces scènes c'est surtout les moments où il choisit de filmer ou de faire entendre les réactions du public (surtout du côté d'Adam Driver en fait), ces passages-là parasitent justement cette logique du spectacle puisque le public crée une rupture dans cette mise en scène essentiellement faite de scénettes clipesques qui s'enchaînent les unes derrière les autres. Et, en quelque sorte, c'est là qu'on voit que le "vernis craque" en présageant la suite du film. A titre d'exemple, la scène où Driver déclare en plein show est un pur moment de malaise (parce qu'à partir de là, le show ne lui appartient plus, le public s'en mêle).
Ah perso, je suis quand même rentré dans le film, mais ça ne m'a pas empêché de voir tous ces défauts !Tyra a écrit : ↑jeu. 15 juil. 2021 15:05Les séquences scéniques d'Annette sont formidables et n'ont rien de fragments de spectacle de Bedos ou d'Opéra filmés, stop la mauvaise foi !
C'est leur inscription dans la comédie musicale (ce qu'est le film, j'ai l'impression que ses détracteurs ont du mal à le prendre comme tel, une comédie musicale, avec toute l'artificialité qui va avec) qui est formidable, virtuose. Les scènes avec Driver sur scène ne ressemblent à rien de connu, avec cette chorégraphie qui inclue Driver, plus le public, le tout en prise de son directe.
Après c'est un film qui joue beaucoup sur l'excitation du spectateur (comme les shows de Driver), de l'électricité dans l'air, de l'excitation du spectacle, de la scène, du concert, de la musique, et ce dès le premier plan, avec cette barre de son frémissante qui fait tanguer l'image. Si on n'est pas dans cet état recherché par Carax dès le début, je conçois parfaitement qu'on puisse ne jamais rentrer dans le film et voir tous ses défauts, plutôt que d'être pris dans la totalité du geste.
Mais ce n'est pas grave : effectivement, c'est en fin de compte le geste qui l'emporte.
C'est parce qu'on ne peut pas qu'il le fait.sokol a écrit : ↑jeu. 15 juil. 2021 14:43C'est le problème principale du film car ces scènes constituent la moitié du film. Au cinéma, on ne peut pas filmer la scène inlassablement (ou alors, la filmer en entier et ça donne "Moise et Aaron" des Straub). Sinon, ça donne un fragment du spectacle de Gad Elmaleh ou Guy Bedos, même si tu la film "magistralement bien" (ou un morceau d'opéra qui passe sur Arte quoi). Ce qui est perturbant c'est que Carax "sait bien tout ça", et pourtant, c'est le choix qu'il a fait.
Et un film est nécessairement un ensemble de fragments de choses impures, comme un film qui filmerait un match de foot par exemple ne serait pas un match de foot pour autant, ou De Palma qui utilise la vidéosurveillance... Le one-man-show est une image de la modernité, une image actuelle du spectacle, et tout l'enjeu du film de Carax est de relier deux spectacles (l'opéra, noble, et le one man show, plus populaire) et de donner à voir leur complicité dans le crime.
A partir du moment où tu obtiens le droit de filmer les entrepôts d'Amazon, c'est que l'entreprise juge bénéfique l'image de la marque que va renvoyer le film, c'est donc bel et bien un pacte avec le diable que tu signes dès le début (et encore, je ne mentionne pas Disney en temps que producteur). On ne verra rien des conditions de travail dans l'entrepôt, mais des pauses déjeuné sympathiques et chaleureuses entre les employés. Et ce sera ça pendant tout le film : la dureté du quotidien, sa rugosité, son aspect concret, ne sera jamais réellement montré, mais simplement survolé. Lorsqu'une employée d'une station service propose son aide et prévient Fern que la nuit qu'elle compte passer dans le froid sera dangereuse, on ne verra pas cette nuit là, comment Fern composera et s'organisera avec le froid dans sa voiture. Lorsqu'il nous est montré une chaine de solidarité entre les nomades, qui se refilent des trucs et astuces pour la vie et la survie, ce sera survolé, les plans seront trop brefs et allusifs pour comprendre ces gestes qui se transmettent. Mais on comprend l'idée. C'est toujours l'idée que l'on comprend, alors qu'on a envie de voir, concrètement, cette vie.
En revanche, multitude de plans malickiens (même les arbres en contre plongé sont là), sur l'émerveillement de la nature ou sur un coucher de soleil, le tout saupoudrée par la musique d'ascenseur de Ludovico Einaudi. Une esthétique publicitaire cotonneuse et mièvre qu'on espérait ne plus voir en 2021.
Le film devient un peu plus regardable sur la fin, lorsqu'il touche un peu à l'intériorité de Fern, qui ne parvient pas à sortir de son état de deuil, se refusant à accepter l'amour d'un homme et la chaleur d'un foyer, pour repartir sur la route. C'était ça, peut etre, le film à faire, puisque l'aspect concret et documentaire des choses échappe totalement à cette cinéaste (dans ce film en tout cas, c'était bien mieux dans The Rider).
Et une comédie musicale et des scènes avec le public ? Tu ne trouves pas que cela s'auto-annule un peu ?
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Parfait ! Tout est dit @asketoner
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il se passe quoi durant le générique ? un bêtisier genre ? je suis parti tout de suite à la fin du film, sans voir le génériquesokol a écrit : ↑lun. 12 juil. 2021 10:58Ah ! Cela tu l'as cherché car : à la toute fin, durant le générique, tu as bien vu Carax lui-même avec ça fille, n'est ce pas ? C'était comme si pour nous dire : oui, je lui ai donné la possibilité de ne pas me pardonner mais, ça, c'est pour le cinéma (seulement durant le film). Regardez bien : une fois il est terminé (le générique de la fin), c'est autre chose (on est bras dessus bras dessous). D'ailleurs, c'est ce générique qui m'a fait définitivement basculé. En ce qui me concerne, il n'avait pas lieu d’être (le film devait se terminer sur cette scène Henry/fille, écran noir et point barre).
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