Le Centre de Visionnage : Films et débats

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groil_groil
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Ce n'est en rien un film extraordinaire, mais il a au moins le mérite d'être original.

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Un film de gang vs. flics assez lambda, produit par Scorsese, on sent que Lee est en train de rentrer dans le rang.
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sokol
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groil_groil a écrit :
lun. 7 déc. 2020 10:44
Ce n'est en rien un film extraordinaire, mais il a au moins le mérite d'être original.
En ce qui me concerne, j'ai vu une (belle) réponse au très très médiatisé "Parasite"
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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Mr-Orange
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groil_groil a écrit :
dim. 6 déc. 2020 09:46


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un biopic de Herman Mankiewiecz, scénariste hollywoodien, au moment de l'écriture de Citizen Kane, constellé d'une multitude de flashes-back sur les faits marquants de sa carrière et ses emportements liés à l'alcool. Evidemment, il y a le savoir-faire Fincher, donc ça a forcément de la gueule, une belle mise en scène, une photographie comme si on y était (mais on sent malgré tout l'image tv netflix qui prend le dessus), de bons acteurs et un sujet absolument passionnant, mais le film ne m'a pas complètement convaincu pour autant. Il y a un problème d'incarnation évident, aucun personnage ne parvenant à susciter une empathie quelconque, un débit verbal intensif et vite fatiguant, et des allers-retours narratifs permanents qui deviennent fatiguant au bout du compte. Je dirais pour résumer que comme il y a le sujet et le talent de Fincher c'est plutôt réussi pour un film Netflix mais que malgré tout la plateforme fait qu'elle nivelle par le bas le talent de la quasi totalité des cinéastes qu'elle engage, notamment parce qu'elle ne joue jamais le rôle de producteur / directeur artistique.
Je suis tout à fait d'accord là-dessus. Le film de Fincher est bien fait, c'est une excursion agréable dans le Hollywood d'époque, mais, à l'instar d'une autre production Netflix de l'année dernière, The Irishman de Martin Scorsese, il oublie complètement la notion de montage (ce qui est d'autant plus terrible pour Scorsese qui tire l'énergie cinématographique des montages finement coupés au rasoir par la grande Thelma Schoonmaker) . Ce qui fait que je partage totalement ton diagnostic du syndrome Netflix, qui prouve que la figure du producteur absent et cool, qui donne des montagnes d'argent sans jamais exercer un contrôle artistique, n'est pas nécessairement une panacée.

D'ailleurs, honte à moi, mais j'ai pas encore terminé le film. Je le quitte et le relance selon mon bon plaisir, conformément à l'ethos des consommateurs de séries de cette plateforme. Ce n'est pas très rigoureux de ma part, mais en même temps tout est "fait pour ça" sur Netflix. Ils structurent leurs oeuvres comme des apéros dinatoires, qu'on picore çà et là à notre gré. :D
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groil_groil
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sokol a écrit :
lun. 7 déc. 2020 11:49
groil_groil a écrit :
lun. 7 déc. 2020 10:44
Ce n'est en rien un film extraordinaire, mais il a au moins le mérite d'être original.
En ce qui me concerne, j'ai vu une (belle) réponse au très très médiatisé "Parasite"
c'est vrai.
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groil_groil
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Mr-Orange a écrit :
lun. 7 déc. 2020 15:50
groil_groil a écrit :
dim. 6 déc. 2020 09:46


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un biopic de Herman Mankiewiecz, scénariste hollywoodien, au moment de l'écriture de Citizen Kane, constellé d'une multitude de flashes-back sur les faits marquants de sa carrière et ses emportements liés à l'alcool. Evidemment, il y a le savoir-faire Fincher, donc ça a forcément de la gueule, une belle mise en scène, une photographie comme si on y était (mais on sent malgré tout l'image tv netflix qui prend le dessus), de bons acteurs et un sujet absolument passionnant, mais le film ne m'a pas complètement convaincu pour autant. Il y a un problème d'incarnation évident, aucun personnage ne parvenant à susciter une empathie quelconque, un débit verbal intensif et vite fatiguant, et des allers-retours narratifs permanents qui deviennent fatiguant au bout du compte. Je dirais pour résumer que comme il y a le sujet et le talent de Fincher c'est plutôt réussi pour un film Netflix mais que malgré tout la plateforme fait qu'elle nivelle par le bas le talent de la quasi totalité des cinéastes qu'elle engage, notamment parce qu'elle ne joue jamais le rôle de producteur / directeur artistique.
Je suis tout à fait d'accord là-dessus. Le film de Fincher est bien fait, c'est une excursion agréable dans le Hollywood d'époque, mais, à l'instar d'une autre production Netflix de l'année dernière, The Irishman de Martin Scorsese, il oublie complètement la notion de montage (ce qui est d'autant plus terrible pour Scorsese qui tire l'énergie cinématographique des montages finement coupés au rasoir par la grande Thelma Schoonmaker) . Ce qui fait que je partage totalement ton diagnostic du syndrome Netflix, qui prouve que la figure du producteur absent et cool, qui donne des montagnes d'argent sans jamais exercer un contrôle artistique, n'est pas nécessairement une panacée.

D'ailleurs, honte à moi, mais j'ai pas encore terminé le film. Je le quitte et le relance selon mon bon plaisir, conformément à l'ethos des consommateurs de séries de cette plateforme. Ce n'est pas très rigoureux de ma part, mais en même temps tout est "fait pour ça" sur Netflix. Ils structurent leurs oeuvres comme des apéros dinatoires, qu'on picore çà et là à notre gré. :D
Mais tu as tellement raison.
ça donne envie de pleurer mais c'est exactement ça, et pire c'est notre monde qui est ainsi construit désormais.
là où c'est vraiment triste, c'est qu'habituellement l'art est fait pour lutter contre les dérives du monde, ici au contraire, il les accompagne, voire les cautionne.
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groil_groil
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Comédie d'espionnage à l'anglaise (mais film américain tourné à Londres), avec un Bill Murray parfait et une intrigue toute droit tirée du répertoire Veber / Oury : un quidam est confondu avec un agent secret. L'idée et le décorum sont chouettes mais malheureusement le film s'essouffle et ne tient pas sur la durée.

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Un bus composé uniquement d'hommes noirs traverse les USA pour se rendre à Washington et participer à la grande marche des hommes noirs, censée rassemblée un million de personnes et organisée par Louis Farrakhan et la Nation of Islam. Bon le film n'est pas terrible. C'est une gageure de faire un film entier dans un bus, et Lee s'en tire plutôt bien, mais il n'évite pas les clichés. C'est drôle parce qu'on parlait pas plus tard qu'hier de la présence ou non d'antisémitisme chez Lee et de son attrait pour Farrakhan. Je n'avais jusqu'à présent jamais déceler cela dans ma rétrospective et voilà que ça arrive aujourd'hui. Bon, le film n'est pas condamnable pour autant, il y a une engueulade entre les blacks et un juif qui conduit le bus à un moment, mais le regard de Lee est plutôt au centre, montrant deux peuples qui souffrent in fine, et le chauffeur se barre car il ne veut pas conduire des cinglés. Et d'ailleurs, à la fin du film, ils ne participent pas à la marche, préférant rester au chevet de leur doyen qui vient de mourir dans le bus.

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L'histoire vraie de Donald Woods, journaliste blanc d'Afrique du Sud qui se liera d'amitié avec Steve Biko - alors que c'était mal parti - et qui fera tout, alors qu'il est assigné à résidence, pour fuir son pays avec sa femme et ses 5 enfants, afin de pouvoir publier le livre qu'il vient d'écrire sur Biko, dévoilant que celui-ci fut assassiné dans sa geôle par la police de cet état fasciste. J'en sors bouleversé. Le film est classique dans sa trame, c'est Attenborough, mais magnifique, digne, prenant, toujours très proche de ses personnages, impeccablement incarnés (Washington droit comme I, et Kevin Kline qu'on ne voit jamais dans des rôles dramatiques, mais qui est extraordinaire. Grand film, je le reverrai bientôt.
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asketoner
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Hellraiser, Clive Barker, 1987

Finalement c'est un film qui dit que le fantasme est sans retour possible. La fin d'ailleurs est très réussie pour cette raison : il n'y a pas de rédemption, pas de ça ira mieux demain, non, au contraire, quelque chose est signé, et tout ce qu'on aurait pu prendre pour les prémisses d'une guérison, d'un rétablissement de l'ordre, s'effondre soudain. J'aime que le film s'attaque si ouvertement à la structure père/fille, au couple, à tout ce sur quoi tient la société. Et c'est pour ça qu'on croit (ou du moins qu'on observe attentivement) le monde imaginaire convoqué par le cinéaste. Le montage est un peu "à la truelle", mais au moins il a le mérite d'y aller : on tente des jointures, des raccords terribles (le plus beau pour moi est celui où l'épouse se souvient d'avoir été renversée sur un lit par le frère de son mari, tandis que ce dernier est en train de monter un matelas dans un escalier étroit où un clou dans la paroi attend de s'enfoncer dans sa main). Je dirais que le film est plutôt comique à force d'outrance, mais la sophistication de son imaginaire empêche tout second degré. Les Cénobites sont tous magnifiques, qu'il s'agisse du scorpion, de l'homme aux épingles plantées sur la tête, de la femme à la gorge ouverte, ou de la mâchoire qui claque des dents. En les voyant j'ai retrouvé tout ce qui animait les gens de mon âge qui dans les années 90 voulaient réaliser des films d'horreur : tenter de donner forme à des cauchemars, avec le plus de précision (et donc de perversion) possible. Car tout réside dans le détail. Le cinéma d'horreur était d'abord un cinéma d'artisans, ce qui est une autre manière de lutter contre l'industrie.
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ton texte est magnifique. Merci.
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groil_groil a écrit :
jeu. 10 déc. 2020 09:39
ton texte est magnifique. Merci.
:love2: :love2: :love2:
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groil_groil
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A chaque fois j'ai envie de le revoir, et à chaque fois je suis déçu. Pourquoi ? en fait, ce qu'il se passe dans le film n'est pas croyable, impensable, disons qu'on ne croit pas à ce qui fait se mouvoir ces gens, rien n'est verrouillé scénaristiquement. De Palma ou même Pakula en auraient sans doute fait un grand film, en tirant l'ensemble vers une abstraction de mise en scène, mais Pollack, malgré de beaux moments, reste trop près du scénario, et comme il ne tient pas debout, le film n'est pas très intéressant.

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Rho le gros chef-d'oeuvre qu'étonnamment je n'avais pas encore vu. Ce qu'il y a de génial, c'est que le héros est une véritable ordure (en cela le magnifique et récent Invisible Man est tout à fait fidèle) et qu'il ne sert que sa cause, et Whale est tellement un bon cinéaste qu'il parvient tout de même à nous faire éprouver de l'empathie. L'autre truc merveilleux, c'est l'opposition entre l'ancien et le moderne. On ne sait jamais vraiment quand se passe le film... Les gens de l'auberge qui l'accueillent, et le village entier, font vraiment 19ème siècle, leur vêtements, etc., mais aussi par leur jeu d'acteur, hyper vieillot et théâtral. L'Homme Invisible débarque, et il est sapé 20ème siècle, et surtout son jeu est étonnamment moderne. Whale joue là-dessus tout le film. Quel cinéaste génial Whale... j'ai envie de le creuser en 21. ça tombe bien Carlotta s'apprête à sortir un inédit qui à l'air merveilleux.

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Une actrice qui ne trouve pas de boulot, notamment parce qu'elle refuse de se dénuder, devient une professionnelle du téléphone rose, profession dans laquelle elle s'épanouit. Mouaif... Lee veut dénoncer il ne sait trop quoi, mais s'emmêle les pinceaux entre message et complaisance, et le film ne raconte pas grand chose. Et c'est plan plan et souvent de mauvais goût. L'actrice, en revanche est géniale. C'est dingue de voir le pouvoir de Lee à cette époque, même sur des petits films. Là, il a Madonna, Tarantino, Naomi Campbell en petits rôles, musique de Prince, le précédent c'était Michaël Jackson, encore avant Stevie Wonder, tout le monde voulait en être...
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asketoner
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France/tour/détour/deux/enfants, Jean-Luc Godard & Anne-Marie Miéville, 1979

Godard et Miéville inventent une structure de 26 minutes, et la reproduisent 12 fois de suite, comme 12 émissions suivant exactement le même chemin mais n'atteignant jamais la même destination - preuve qu'on peut faire de la télé sans créer de l'ennui en même temps, suivre une grille et pourtant s'égarer.
Dans les films qu'ils préparent et tournent ensemble, les cinéastes assument absolument leur radicalité (aujourd'hui je peux dire que c'est la période de Godard qui m'intéresse le plus, parce que ce n'est pas seulement la naissance d'un langage, mais c'est aussi l'essai d'un dialogue). Les deux enfants qui sont les personnages principaux de ces émissions sont interrogés longuement, compulsivement, presque menés en bateau par Godard qui fait avec eux (et parfois malgré eux) de la maïeutique. On pense au Bourgeois gentilhomme de Molière, qui s'exclame soudain d'avoir fait de la prose sans le savoir. Les questions sont violentes mais le montage l'est aussi. Les mots en surimpression sur leur visage relèvent presque de l'abus de pouvoir et de la manipulation, mais c'est précisément l'objet de ces émissions que de révéler ce qui régit la vie, l'imaginaire, la pensée des enfants. Les cinéastes se tiennent sur cette limite très ambiguë. Certaines émissions sont ratées (et Godard et Miéville le reconnaissent, ne se privant pas de commenter à l'infini ce qu'ils ont filmé, et commentant même leurs commentaires), d'autres éblouissantes. Mais ce qu'on admire toujours, plus que la relation (assez pauvre), c'est l'intention. Il y a une certaine forme de découragement vis-à-vis de la petite fille, qui me semble assez cruel, comme s'il n'y avait rien à tirer d'elle, alors que le garçon, plus en retrait au début, est conduit jusqu'à une très belle dernière émission, où on le voit s'endormir, comme s'il avait recueilli tous les suffrages, les faveurs des cinéastes. Ce jeu de préférence est presque insupportable (la petite fille semble se réduire de plus en plus à une image de victime éternelle), d'autant que si beaucoup de questions sont posées, la toute première est esquivée : comment ces deux enfants ont-ils été choisis ?
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Babs
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groil_groil a écrit :
dim. 6 déc. 2020 09:57
Babs :
Non pas vu Malcolm X en salle, j'en avais rien à foutre à l'époque.
ah ah les a priori ont la vie dure :D

prochain film, "He Got Game" ? avec Denzel encore génial !!!

James Whale, oui, très bon cinéaste qui a eu son heure de gloire dans le fantastique, mais à qui ont doit aussi la fameuse version de "Show Boat" avec Paul Robeson chantant "Ol' Man River" :love2:
Je me souviens aussi d'un très émouvant biopic sur lui qui s'appelle "Ni Dieu ni démon" dans lequel Ian Mc Kellen incarne le cinéaste aux derniers jours de sa vie.

de mon côté découverte de :
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réalisés par Milos Forman en 1963 et 1965

Deux films assez similaires sur la jeunesse tchèque. C'est assez amusant, éloquent aussi sur un désir d'émancipation d'une jeunesse aux aspirations finalement très proches de celles des pays non-communistes de l'époque. C'est également la génèse de l'oeuvre de Forman et de cette recherche de liberté à tous points de vue.
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cyborg
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Elle était donc là la meilleure adaptation de Tintin qui ne dit pas son nom ? Vraiment tout y est, du motif au clin d’œil plus appuyé... tout en inscrivant ces inspiration dans une forme typique du cinéma français des années 60/70 : celle de l'escapade, de la folle parenthèse avant le retour à la normale. Chouette mélange, donc.

La première partie est extrêmement plaisante et ébouriffante tandis que la 2ème traine un peu en longueur, perdant de sa verve. Le film aurait ainsi mérité un bon quart d'heure en moins pour être parfait.

Si l'on accepte de fermer les yeux sur certains point qu'on dira "d'époque" (le rapport homme-femme, mais plus encore la fin dans laquelle le grand progrès civilisateur rasant l'Amazonie est ce qui vient sauver les héros, faisant des amérindiens un folklore du bas côté (pour un contre-point de vue on regardera Iracema: Uma Transa Amazônica réalisé 10 ans plus tard par Jorge Bodanzky et Orlando Senn), L'homme de Rio est en effet un très bon divertissement.

En parlant de "progrès" il est possible que j'en garde surtout ces incroyables scènes et plans dans ce projet fou qu'est Brasilia sortant alors à peine de terre...


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Revisionnage de ce film vu en salle il y a plus de 10 et la claque est encore plus grande qu'imaginée : quel chef d’œuvre :eek:
Maitrise incroyable de la narration et de chaque éléments qui la compose, n'en délaissant aucun au profit d'un autre, ne surlignant ni n'exagérant rien. Le film est hautement bouleversant avant tout par son honnête et sa clairvoyance, malgré la grande complexité des sujets qu'il aborde.
Qui d'autre à fini sa carrière avec un tel point d'orgue ?


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Découverte du cinéaste Paul Fejos qui semble avoir eu de multiples périodes dans sa carrière : du muet au parlant, de l'Europe aux USA et de la fiction au documentaire anthropologique. Cette réalisation de 1928 est son plus grand succès américain. Le film est muet mais s'est vu rajouter quelques scènes parlantes peu après sa sortie, le cinéma sonore commençant tout juste carrière...
La trame du film est fort simple (un ouvrier et une standardiste se sentant bien seuls dans la grande ville de New-York se rencontrent au hasard d'une fête à Coney Island et ne tardent pas à tomber amoureux... ) et celui-ci vaut essentiellement pour sa mise en scène et ses splendides trouvailles visuelles qui culminent dans deux séquences alors particulièrement caractéristiques de l'époque, l'une dédiée au travail (répétitif et standardisé) et l'autre aux loisirs (les amusements débridés et la fête folle, ou l'énergie explose et la caméra virevolte).


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Little Otik - Jan Svankmajer

Quelques jours après avoir vu "Les petits marguerites" me voici par hasard à regarder un autre film tchèque (ok LPM date de la tchécoslovaquie, pardon pour l'approximation) et malgré les 35 ans de différence on semble retrouver ce même sens de la farce sensuelle et bouffonne, semblant chercher dégout et écœurement par l'excès des corps et de la nourriture.

Svankmajer est avant tout connu pour ses films d'animations (je crois en avoir vu par le passé l'un ou l'autre, sans véritable souvenir) et il semble incapable de penser en terme de plan large ou de respiration de ses images ; tout semble filmé de très près, et il ponctue absolument TOUTES ses scènes par des détails en très gros plans avec d'incessants inserts de toutes les actions : si un personnage prend une clé dans sa poche on a un plan sur la main qui prend la clé dans la poche, si un personnage marche dans la rue on a un plan sur ses pieds. Bref : c'est d'une lourdeur sans nom, semblant redoubler toute étape de la narration. Nous avons bien sur de nombreuses scènes de repas, et nous avons donc droit à d'innombrables très gros plans de trucs mis dans des bouches, de bouillies versées dans des assiettes et autres œufs dégoulinants. Le résultat est incroyablement étouffant, mais surtout épuisant.

Cela est à coup sur raccord avec la trame du film : un coupe stérile adopte une buche/racine d'arbre qu'il traite comme un vrai bébé... mais les véritables problèmes commencent lorsque la buche devient gigantesque et vivante et se met à dévorer les voisins...

Même si trop long, je ne pense pas que le film soit fondamentalement mauvais, et vu son poids symbolique je ne doute pas qu'il porte un sous-texte psychanalytique... Lors du visionnage j'ai surtout pensé à une phrase de Deleuze dans son abécédaire qui déclare (à propos de Minelli d'ailleurs) "méfiez-vous du rêve de l'autre, parce que si vous êtes pris dans le rêve de l'autre, vous êtes foutu." Ici c'est le cas : le rêve d'enfant du couple finit par engloutir tous leurs proches ainsiq qu'eux-même... Par contre en tant que spectateur je ne sais pas si j'ai été digéré immédiatement ou si j'ai fuit avant.


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Why has bodhi-dharma left for the east - Bae Yong-kyun - 1989

Trois moines bouddhistes vivent dans un temple isolé : un enfant découvrant la vie et la nature, un vieux sage attendant la mort, et un homme en plein apprentissage de la foi.

Nous sommes à des années lumières de toute réinterprétation occidentale de la foi zen que l'on a pu voir au cinéma (je pense à Kundun de Scorcese ou à Little Buddha de Bertolluci) et c'est précisément là que repose l'immense force et singularité de ce film magnifique. Nous ne sommes ni dans un traitement illustratif ni exotique, mais bien dans un film totalement incarné par ses préoccupation mystiques. Il en ressort une profonde pureté et tranquillité particulièrement agréable durant le sombre confinement que nous traversons.

Derrière l'aspect initiatique du film (ne connaissant rien ou presque au bouddhisme j'ai beaucoup appris) il est saisissant de voir à quel point le réalisateur (il s'agit de son premier film. Il y a presque tout fait et n'en a fait qu'un autre depuis) sait se servir de son médium pour exprimer la dimension mystique de sa foi. Les images semblent très respectueuse de tout ce qui est filmé, réussissant à mettre sur un pied d'égalité homme, animaux et nature.

Lors d'un des plans j'ai pu entendre dans ma tête Sokol crier "Tarkovvvskyyyyy". C'est assez amusant car il y a en effet un long et lent plan remontant doucement un cours d'eau qui ne peut pas ne pas faire penser à Stalker. Ce clin d’œil au final assez discret est surtout assez émouvant, dans sa façon de réunir deux cinéma et deux questionnement mystiques très différents, comme semblant reconnaitre à demi-mot que les questions de vie et d’au-delà dépassent la diversité des fois.


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Une femme a passé - René Jayet - 1928

Film muet français méconnu narrant la pagaille semée par une crapuleuse femme fatale au sein de l'équipage d'une péniche sillonnant la France. Bref et sans détour (une heure seulement), le film est porté par une esthétique et des acteurs superbes (ces plans de visage !).
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Babs a écrit :
ven. 11 déc. 2020 20:16
groil_groil a écrit :
dim. 6 déc. 2020 09:57
Babs :
Non pas vu Malcolm X en salle, j'en avais rien à foutre à l'époque.
ah ah les a priori ont la vie dure :D

prochain film, "He Got Game" ? avec Denzel encore génial !!!

James Whale, oui, très bon cinéaste qui a eu son heure de gloire dans le fantastique, mais à qui ont doit aussi la fameuse version de "Show Boat" avec Paul Robeson chantant "Ol' Man River" :love2:
Je me souviens aussi d'un très émouvant biopic sur lui qui s'appelle "Ni Dieu ni démon" dans lequel Ian Mc Kellen incarne le cinéaste aux derniers jours de sa vie.

Deux films assez similaires sur la jeunesse tchèque. C'est assez amusant, éloquent aussi sur un désir d'émancipation d'une jeunesse aux aspirations finalement très proches de celles des pays non-communistes de l'époque. C'est également la génèse de l'oeuvre de Forman et de cette recherche de liberté à tous points de vue.
:hello:
Les a priori n'ont pas la vie si dure que cela puisque je me fais en ce moment une intégrale, d'un cinéaste qui ne m'intéressait pas à la base ;)
Je note pour le biopic sur Whale, je ne connaissais pas du tout.
Je suis ultra fan de la première période de Forman, et les films que tu viens de voir je les aime d'amour.
J'ai d'ailleurs mis le coffret bluray des oeuvres de jeunesse sur ma liste au Père Noël, je rêve de les revoir dans de bonnes conditions, alors que j'en avais déjà deux en dvd, et en plus il y a un inédit dans le coffret, joie !!!
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@cyborg : ça a l'air bien body-dharma dis donc !
& j'avais tellement aimé Solitude quand je l'avais vu il y a 20 ans... ça m'avait beaucoup impressionné, je crois d'ailleurs que je dois à ce film de m'être intéressé au cinéma muet, mais je me demande ce que j'en penserais aujourd'hui
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cyborg
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Je n'ai pas l'air très enthousiaste dans mon poste mais, oui, c'est bien, Solitude ! Je n'aurais pas dis non à une trame un peu plus étoffé mais l’intérêt est ailleurs.



Bodi-dharma : je vais t'envoyer un lien, comme ça tu pourras le regarder si tu veux. Je serai curieux de ce que tu/vous en penserez, savoir si je n'ai pas rêvé :D Quoi qu'il en soit le sentiment d'apaisement offert m'a vraiment fait du bien :D
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Encore un très bel exercice de style, plus dans le giallo cette fois, mais proposant une relecture du polar musclé 70's. Mais les deux cinéastes sont tellement imprégnés par le giallo que le film fait tout de même giallo !

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Tous les codes de film noir transposés dans le Londres de 1900. Le film est bien, le scénario tient bien la route jusqu'au bout, sans être génial. Génial, Laughton l'est, dans le rôle d'un petit salaud médiocre.

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Documentaire de Spike Lee sur un fait divers terrible. 4 gamines tuées en 1963 par le KKK, par une bombe placée dans une église où elles suivaient un cours. Cette horrible tragédie est racontée 30 ans plus tard par les proches des 4 fillettes, notamment, et surtout, leurs parents. C'est déchirant, littéralement à en pleurer. On peut regretter quelques images malvenues (les photos de cadavres des gamines, franchement...) ou de rares passages un peu trop appuyés au niveau lacrymal (mais ils sont rares, la plupart sont plein de dignité et d'émotion vraie), mais le film est superbe, notamment parce qu'il remet ce tragique événement dans le contexte général de la ségrégation dans les années 50 et 60 et de l'enfer dans lequel vivait la population noire à l'époque. Cela semble un autre monde, mais pourtant, ceux qui le raconte ici dans un film de la fin du 20ème siècle, sont tous encore vivant, et même encore jeunes pour la plupart.

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Je voulais le revoir avant de boucler mon top 2020, et c'est bien toujours une merveille absolue.
je n'ai pas fini de le revoir, celui-ci !
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groil_groil a écrit :
dim. 13 déc. 2020 10:08

:hello:
Les a priori n'ont pas la vie si dure que cela puisque je me fais en ce moment une intégrale, d'un cinéaste qui ne m'intéressait pas à la base ;)
Je note pour le biopic sur Whale, je ne connaissais pas du tout.
Je suis ultra fan de la première période de Forman, et les films que tu viens de voir je les aime d'amour.
J'ai d'ailleurs mis le coffret bluray des oeuvres de jeunesse sur ma liste au Père Noël, je rêve de les revoir dans de bonnes conditions, alors que j'en avais déjà deux en dvd, et en plus il y a un inédit dans le coffret, joie !!!
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Hillbilly Elegy (Une Ode américaine) - Ron Howard - 2020 - Netflix

Un mélo hyper classique dans sa forme qui fait surtout la part belle aux perf' de Amy Adams en mère junkie et Glenn Close (méconnaissable) en mamie acariâtre. On a connu Ron Howard en chouia plus inspiré.

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Mank - David Fincher - 2020 - Netflix

Encore plus classique, voir académique, que le Howard ! David Fincher nous la joue pastiche des années 30 dans l'esthétique et la narration dans un va et vient temporel vite lassant. Gary Oldman , qui ne cherche même pas 2 mn à ressembler à Herman Mankiewicz (dont la notoriété a vite pâlit lorsque son petit frère Joe est devenu un cinéaste majeur de années 40 et 50), en fait des caisses sans pour autant incarner ni humaniser son modèle. Bien sûr, Fincher fait tout pour montrer à minima Orson Welles, pour surtout ne pas faire d'ombre à son "héros" si peu attachant.
Les moments les plus intéressants sont finalement les quelques séquences tournées à Hearst Castle (un lieu incroyable que j'ai eu la chance de visiter il y a quelques années) et les personnifications de Marion Davies et de Louis B. Mayer.
pas inoubliable.

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The Prom - Ryan Murphy - 2020 - Netflix

Le moins que l'on puisse dire c'est que Ryan Muphy honore à plein régime son contrat avec Netlix ! Après une nouvelle adaptation de "The Boy in the Band", plus bavarde que passionnante, une saison 2 de "The Politician", et les contestables et bariolées mini-séries "Ratched" et "Hollywood", voici "The Prom". Pour le coup, on est très très proche de ce qu'il a pu faire sur "Glee", soit du musical volontairement kitsch et décomplexé dans le too-much. Il creuse son sillon LGBT, ici en mode rose bonbon et violet. J'suis hyper cliente des musicals, mais là ça pique un peu les yeux quand même :D la bonne surprise, c'est de retrouver au générique Meryl Streep et Nicole Kidman épatantes en gloires de Broadway sur le retour.

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The Silver Cord - John Cromwell - 1933

Un drame implacable et terrifiant avec comme personnage central une mère obsessionnelle et possessive qui va manipuler ses deux fils pour qu'ils rompent avec leurs compagnes et restent auprès d'elle. Ce film en huit-clos très certainement adapté d'une pièce de théâtre est organisé essentiellement sur la parole et le jeu incroyable Laura Hope Crews. Saisissant.
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asketoner
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Je vous salue Marie, Jean-Luc Godard, 1985

Je revoyais ce film l'autre soir et me disais, malgré sa beauté évidente, qu'il n'allait peut-être pas assez loin, pas au bout de ce qu'il propose. C'est dû à l'histoire d'Eva qui se mêle à celle de Marie. Le professeur d'Eva dit des choses fabuleuses qui donnent vraiment à entendre autrement l'histoire de Marie, mais sa petite affaire avec son étudiante a peu d'intérêt. Ou alors (et c'est pire) : elle a presque plus d'intérêt que l'autre histoire, celle de Joseph avec Juliette Binoche, totalement anecdotique, qui vient brouiller les pistes inutilement.
Sinon, je ne sais pas si on pouvait faire plus juste que Marie vivant dans une station service (l'essence) et Joseph conduisant un taxi (l'existence). Cette transposition est géniale et marche magnifiquement.

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Le livre de Marie, Anne-Marie Miéville, 1985

Il s'agit du premier film solitaire d'Anne-Marie Miéville. C'est une sorte d'introduction à Je vous salue Marie, bien que la Marie de Godard diffère sérieusement (en termes de classe sociale) de celle de Miéville. Marie est une enfant qui chante et danse, ses parents (Bruno Crémer et Aurore Clément) sont en train de se séparer. Ca dure trente minutes, c'est très simple et absolument parfait : d'abord il y a la séparation, puis la première journée de Marie seule avec sa mère, puis son premier week-end chez son père, puis la première soirée qu'elle passe seule parce que sa mère a rencontré un homme. L'enfant dégage quelque chose de très intense et très intelligent (une intelligence rebelle, liée au corps, au refus de laisser parler les adultes à sa place). C'est ce qui rend ce film si émouvant.
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Ilan
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VOLVER - Pedro Almodovar (2006)

Les films d'Almodovar prennent vraiment de la valeur avec le temps.
Pour exemple, "Talons aiguilles" m'avait un peu indifféré la première fois que je l'avais vu... avant de devenir un de mes films préférés quelques années plus tard.
Celui-là, je l'avais vu à sa sortie, en 2006, je ne me rappelais de rien à part de m'être ennuyé. Mais j'avais envie de le revoir.
J'ai bien fait: sans être le meilleur de son auteur, c'est un film brillant, qui réinvente cinématographiquement tout ce qu'il touche: les fantômes, les secrets de famille, la temporalité, le passé, le présent, la culpabilité, le rachat, le pardon, la folie, la raison.
Je ne sais pas du tout comment j'ai pu m'ennuyer à l'époque tant ce film raconte de choses.
La seule explication, c'est qu'entre le film et moi, y en a un des deux qui a changé en 14 ans. Mais le plus dingue, c'est que j'ai l'impression que c'est le film.


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INCEPTION - Christopher Nolan (2010)

Bon, là, par contre, aucun des deux n'a changé en dix ans, ni le film, ni moi.
Alors il y a un sujet en or, DiCaprio et Cillian Murphy sont au top de leur génie, mais le résultat est brouillon, scolaire, indécis, tiède.
Peut-être qu'il aurait fallu en faire une série, peut-être qu'il aurait fallu davantage se concentrer sur cette sublime histoire d'amour vécue en rêve et moins sur cette affaire un peu rasante d'espionnage industriel, je ne sais pas, mais tel quel, malgré ses temps forts et ses qualités, sans être ennuyeux ou vraiment raté, pour moi, le film ne fonctionne pas vraiment.
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asketoner
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Petite fille, Sébastien Lifshitz

Documentaire abominable qui n'a d'autre fonction que de servir la soupe. La musique est atroce, les plans sont d'une bêtise intersidérale ; tout le film est réactionnaire, mais son sujet (la transidentité) nous laisse croire le contraire. J'arrête avec Lifshitz.
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groil_groil
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ah merci
j'étais sûr que c'était ça et comme tout le monde en dit du bien de partout, j'étais à deux doigts de me faire avoir.
Content de n'avoir pas cédé avant de te lire :D
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cyborg
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Bah même message que Groil du coup... Tout le monde criait à la merveille sur facebook.
Du coup j'étais un peu méfiant. Mais ce qui me surprend c'est que c'était plutôt des gens en qui je pensais pouvoir "faire confiance". Et du coup ton qualificatif de "réactionnaire" me surprend aussi...
Peut-être que je vais encore plus me laisser tenter alors :D
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Tyra
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Mais pourquoi réactionnaire du coup ?
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asketoner
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Tyra a écrit :
mer. 16 déc. 2020 14:41
Mais pourquoi réactionnaire du coup ?
Réactionnaire dans la mise en scène.

En gros, faire un film sur la dysphorie de genre en nous montrant à quel point cette petite fille née dans un corps de garçon est attiré par le rose, les poupées, et les cours de danse classique, c'est vraiment n'avoir rien à dire sur la question du genre. (Tomboy était autrement plus pertinent, même si je n'en suis pas ultra-fan.) (Et bien sûr nous préciser que la prof de danse transphobe est russe, ça coûte pas cher en clichés.)
Mais ce n'est pas seulement le problème du sujet principal, car tout est à l'avenant. Par exemple, à un moment, les personnages partent en vacances à la mer. Et là, Lifshitz fait des plans où l'on voit qu'il n'a rien à dire sur la mer. Rien du tout ! L'horizon est au milieu, le sable en bas, le ciel en haut. C'est inouï, je ne sais même pas comment il ose. Après, la famille est sur le canapé, le plan dure 2 minutes parce que c'est produit par Arte : franchement je regrette que ça n'ait pas été produit par M6 parce qu'au moins le plan avec les regards vides sur le canapé aurait duré 1 seconde. (Et ça aurait raconté la même chose !)
Réactionnaire aussi dans la place laissée à l'enfant : elle ne parle jamais. C'est la mère qui parle à sa place, et qui semble se servir du documentaire pour défendre sa cause, qui doit être aussi celle du cinéaste (la mère le dit elle-même : elle s'est trouvée une mission ; Lifshitz, lui, a trouvé une émission). Mais en fait on transforme une petite fille en cause un peu niaise, pour faire chialer dans les chaumières. Et finalement, la question de la normalité, qui serait le point de vue politique de Lifshitz (montrer une petite fille trans normale), n'est jamais posée, si bien qu'on se retrouve face à cette énorme confusion entre normalité et norme. D'où : réactionnaire.


@groil_groil , @cyborg : franchement, vous pouvez vous en passer :D
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Ilan
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Sur Petite fille j'ai lu certains dire que le point de vue psychologique passait à la trappe, mais que ce choix se défendait, parce que le film s'affichait militant et que c'était très bien comme ça, etc... je me suis dit que j'allais éviter du coup.

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J'AI TUE MA MERE - Xavier Dolan (2009)

Il existe assez peu de films à ma connaissance qui explorent une relation mère-fils toxique.
Celui-là a le mérite d'exister, d'être plutôt honnête, juste et réussi dans son genre.
Après, je trouve Dolan toujours plus intéressant quand il s'échappe des problématiques familiales.
Il y a dans "Les amours imaginaires" et "Tom à la ferme" quelque chose de plus libéré, jouissif et créatif, que dans "Mommy", "Juste la fin du monde", ou ce film-là donc, un peu prisonniers de leurs dispositifs, un peu écrasés sous leur propre poids.
Comme si en s'échappant du carcan familial, Dolan retrouvait la pleine possession de ses moyens, psychologiquement comme artistiquement. ^-^
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groil_groil
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Revu ce film doudou, en VF s'il vous plait, que j'adore, et qui passe super bien le fil des ans et des revisionnages, même si certains effets de mise en scène (notamment les flashes back souvenirs) sont assez atroces. Mais on les oublie vite, dans le reste, le présent de narration donc, nous emporte.

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L'argument est top. Denzel est en prison pour le meutre accidentel de sa femme, il est convoqué par le directeur de la prison qui lui propose un deal : Le gouverneur de l'état veut à tout prix que le fils de Denzel, un prodige du basket promis à une grande carrière en NBA, vienne s'inscrire à l'université de son état. Il a une semaine pour parvenir à cela (en liberté surveillée) en l'échange de quoi sa peine sera réduite. Le souci est double : son fils est courtisé par toutes les universités du pays, prêtes à l'avoir dans leur équipe à n'importe quel prix, et il refuse d'adresser la parole à son géniteur, l'assassin de sa mère. Le film est plutôt plaisant, mais est aussi problématique, il ne pose en effet jamais la question de la culpabilité du père, qui est quoiqu'on dise, l'assassin de son épouse. Après le film est moche visuellement, comme quasiment tous les films de Lee, mais il capte quelque chose quand même, aidé bien évidemment par la superbe bande son signée Public Enemy, dont le titre phare "He Got Game", comprenant un sample magnifique de Buffalo Springfield, et la présence de Stephen Stills, est l'un des plus beaux morceaux du groupe.

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Je l'avais déjà vu celui-là. L'ambiance est belle, New York sous l'affreuse canicule de 1977, et un serial killer qui fait un carnage... Le film s'intéresse plutôt à l'ambiance d'un quartier, et à suivre des histoires parallèles, créant une ambiance réussie et attachante, inspirée par Scorsese, et se fout complètement de son enquête. D'ailleurs il n'y a même pas d'enquête, on voit de temps à autre l'assassin tuer, et puis à la fin il est attrapé par la police, mais tout le monde s'en fout, à commencer par le spectateur. Et c'est un peu l'écueil du film. Lee a voulu faire deux films en un, pourquoi pas, c'est une bonne idée, mais il se fout complètement de l'un d'eux, créant un résultat bancal et à moitié satisfaisant.

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Film réalisé par John Turturro dans lequel il se donne le premier rôle, et dans lequel les autres acteurs passent son temps à lui dire qu'il est beau, bel homme, beau gosse, qu'il sait faire jouir les femmes, etc. A part ça, c'est plutôt plaisant quand même, et le pitch, c'est Woody Allen qui devient le maquereau de son pote fleuriste, Turturro donc, qui va se prostituer pour gagner du blé auprès de riches et belles femmes seules et en quête d'aventures... L'ambiance new yorkaise est belle et bien rendue, mais le film vaut surtout pour ses acteurs, Woody Allen est excellent, même quand il joue un texte qui n'est pas le sien, Turturro très bien aussi, et Sharon Stone en beauté qui commence à faner est, comme toujours, magnifique. C'est un petit film, mais un petit film charmant, même si totalement attendu dans son déroulé (l'intrigue avec Vanessa Paradis)

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Plus je le vois, plus je l'aime, et plus le temps passe, plus Basic Instinct se patine et prend les atours d'un grand classique intemporel. Le côté provoc s'efface avec le temps, et ressort avec évidence la beauté de la mise en scène de Verhoeven, qui signe ici son plus beau film, un Vertigo 2.0, l'ombre du chef-d'oeuvre d'Hitchcock planant sur le film en permanence.

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Un peu à l'instar du récent Tout Simplement Noir, ce film est une satire sur la manière dont les Noirs sont traités en audiovisuel (cinéma et télévision). Le héros est un noir programmateur de télé et showrunner d'émissions, qui a l'idée de créer un show dans lequel on se moque de la façon dont sont filmés les Noirs habituellement, mais le message passe mal et la communauté se sent agressée, et tout se finit dans un bain de sang. Si le message est chouette, le film est vite chiant, moche et partant dans tous les sens. Il faut tout de même noter une fin très réussie, où Spike Lee, qui adore insérer dans ses oeuvres des images d'archives à foison, réalise un florilège de scènes montrant la représentation désastreuse des acteurs noirs dans le cinéma classique et l'animation. C'est tellement affligeant que cela génère une vraie prise de conscience, peut-être plus radicale que les deux heures de film qu'on vient de voir.
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Babs
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pas vu "The Very Black Show". Ce qui est bien chez Spike Lee, c'est que même dans les films moyens ou de commande il y a toujours quelque chose à sauver. On peut apprécier ou pas les "films à messages" ou "films-dossiers", mais là encore, impossible de nier la constance de Lee et le sillon qu'il creuse depuis 35 ans. Le gars ne lâchera jamais l'affaire ! et il a raison le bougre :D

J'ai adoré "Basic instinct" tout de suite...je crois même me souvenir qu'à l'époque j'avais été le voir 3 fois ! j'ai même la novélisation du scénario de Joe Eszterhas :lol: là ça fait quelques années que j'ai pas revu le film, mais dès que j'entends quelques notes de la superbe musique de Jerry Goldsmith, je replonge dans l'ambiance illico ! On parle rarement de ce compositeur d'ailleurs, alors qu'il a fait des trucs super et qu'il a style, une rythmique assez unique (même si pas mal copiée).
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groil_groil
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L'histoire vraie de Barry Seal, pilote de la ligne pour la TWA qui devient simultanément agent pour la CIA, chargé de fournir des armes aux rebelles nicaraguayens opposés aux Sandinistes (et donc aux communistes) et l'un des plus grands trafiquants de drogue de l'histoire, important une grosse partie de la drogue en provenance du cartel de Medellin. Malgré un montage épileptique vain et fatigant (qui se calme quand même au bout d'un moment) et une photo dégueu, cramée et sursaturée, le film est génial, édifiant, super rythmé, avec un Tom Cruise comme souvent génial. C'est drôle car je suis en train de lire l'énorme autobiographie de Jon Roberts (American Desperado), l'un des plus grands trafiquants de drogue de l'histoire des Etats-Unis, dont le job était justement de récupérer les cargaisons de cocaïne qui remplissaient les avions de mecs comme Barry Seal et de les distribuer partout sur le territoire américain, et Roberts évoque justement Barry Seal dans un passage. J'ai lu ce passage il y a quelques jours et j'ignorais l'existence de ce film. Un collègue m'en parle par hasard la semaine dernière, et par hasard encore, je découvre qu'une chaine le diffuse genre deux jours après que j'en entende parler pour la première fois. Le hasard fait parfois bien les choses.
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asketoner
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Invisible man, Leigh Whannel, 2020

Toute l'originalité du film repose sur le fait qu'on adopte ici le point de vue de ceux qui sont visibles (au contraire de James Whale, qui nous plaçait du côté du savant fou, suivant en cela le roman d'HG Wells). La métaphore de l'aliénation domestique est évidente (même invisible (et par son invisibilité même), l'homme continue de foutre en l'air la vie de sa femme), et le film pourrait se contenter de relire un sujet de société à l'aune d'un classique du cinéma de genre (quand quelqu'un croira-t-il cette femme, à qui son pervers de mari fait subir mille atrocités : il plante son entretien d'embauche, pirate sa boîte mail, la fâche avec ses amis, et bien entendu la frappe et la viole, mais demeure malgré tout invisible, et l'on préfère douter de sa femme plutôt que de croire aux hypothèses de celle-ci), mais il va un peu au-delà de son programme, en poussant très loin, m'a-t-il semblé, la dimension paranoïaque du thriller, maîtrisant parfaitement ses effets, jusqu'au point où ce genre devient intéressant. Un jeu s'instaure en effet avec le spectateur, qui, confronté à une série de scènes banales, stéréotypées (le petit déjeuner oeuf et bacon, le resto entre soeurs, l'entretien d'embauche mi-drague mi-bienveillance, etc...), n'attend qu'une seule chose : le point de rupture, c'est-à-dire l'irruption brutale et sans retour d'une violence inadmissible. Le spectateur a accepté l'idée que la réalité n'était pas exempte de cette violence, et il finit par reconnaître que la seule vérité valable est sans doute la pulsion dominatrice voire meurtrière glissée sous la moindre de nos actions, sous la plus "normale" de nos journées.
Cela dit, malgré sa réussite, le film est aussi le produit parfait de son époque, et je dois avouer que son esthétique m'intéresse peu. Si la mise en scène en tant que telle est irréprochable, le jeu de la comédienne principale m'a à la fois impressionné (par son volontarisme) et un peu dégoûté (pour les mêmes raisons), la musique m'a paru totalement à côté de la plaque, et les décors (banlieue anonyme vs maison pleine de baies vitrées perchée sur une falaise) témoignent d'une vision du monde un peu binaire.

(Et sinon, j'ai trouvé que ça manquait un peu de transpiration, pour un film en si bonne position dans le top 2020 de @groil_groil . Dommage. D'ailleurs j'aimerais que groil nous livre enfin son top all-time des films où les gens suent beaucoup, pour qu'on parte sur de bonnes bases pour les vacances de Noël.)
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asketoner
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Frissons, David Cronenberg, 1975

J'ai bien aimé le voir, disons que c'est un film plutôt approprié pour la période, il y est question d'une contamination mystérieuse dans un immeuble moderne et coupé du monde, qui ramollit le cerveau des gens mais gonfle leur libido, les incitant à se lancer dans de vastes partouzes dans les couloirs, le parking ou la buanderie. Sauf qu'il ne s'agit pas d'un virus mais d'un parasite (l'invisible n'intéresse pas trop Cronenberg), et que le parasite en question est un gros ver qui passe par tous les trous, humains ou architecturaux. C'est très gore et plutôt audacieux, d'autant que les personnages, bien qu'ils cherchent à échapper aux assauts des premiers malades, se satisfont rapidement, lorsqu'il y succombent malgré tout, de l'état hyper-érotique dans lequel ça les plonge. J'ai pensé à Artaud, entendu plus tôt dans la journée, parlant avec horreur de la "bonne santé" et délectation de la maladie.
On trouve déjà en germe (si j'ose dire) dans ce Shivers les pénétrations douteuses d'eXistenZ, et même un accident de voiture étrangement sexuel, annonçant Crash avec 20 ans d'avance. Mais Crash et eXistenZ sont quand même d'une autre trempe. Ici, Cronenberg est encore un peu trop théorique, pas assez concret dans la mise en scène, et peine à troubler, peut-être parce qu'il montre plus qu'il ne regarde.
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sokol
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J'AI TUE MA MERE - Xavier Dolan (2009
Il y a dans "Les amours imaginaires" et "Tom à la ferme" quelque chose de plus libéré, jouissif et créatif, que dans "Mommy", "Juste la fin du monde", ou ce film-là donc, un peu prisonniers de leurs dispositifs, un peu écrasés sous leur propre poids.
Comme si en s'échappant du carcan familial, Dolan retrouvait la pleine possession de ses moyens, psychologiquement comme artistiquement. ^-^
Puisque Juste la fin du monde est évoqué :
Je l'ai vu 2 fois durant mon vol. Je l'avais boudé quand il était sorti au cinema, j'avais eu la dose avec Mommy.

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En fait, je l'ai trouvé très bien. Je pense que c'est son meilleur film. Si ses premiers sont plus personnels (je les préfère), celui ci, même si c'est l'adaptation d'une piece de théâtre, je pense que c'est son Mépris (qui était également une adaptation !). Si Le Mépris c'était : comment en une fraction de seconde on passe de la méprise au mépris, "Juste la fin du monde" c'est : comment en une fraction de seconde on passe de "je vais mourir" au "je rentre chez moi".
Pari reussi.
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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B-Lyndon
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C'est drôle je repense beaucoup à ce film que je n'avais pas aimé à sa sortie. Je crois que le montage y est particulièrement réussi.
Je relis aussi Le pays lointain de Lagarce, qui est une version étoffée de Juste la fin du monde et pour moi sa plus belle pièce. C'est le même argument mais avec plus de personnages, et des fantômes en plus. Je suis curieux de ce que Dolan aurait réussi s'il avait adapté celle là.
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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cyborg
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Badnam Basti - Prem Kapoor - 1971

Film qu'on croyait perdu pendant 40 ans avant d'être retrouvé et rénové en 2019. L'argument principal du film est qu'il s'agit (s'agirait ?) du premier film ouvertement homosexuel indien. Soit. Le "problème" est que l'homosexualité y est plutôt vaguement sous entendu que autre chose et je ne sais même pas si j'y aurais simplement vu une histoire d'amitié un peu appuyé si je n'avais rien su. La nouvelle d'origine est, semble-t-il, un peu plus explicite. Soit. Malheureusement le reste du film est assez bancal et hormis quelques belles expérimentations visuelles on s'ennuie ferme. Une déception, donc.


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L’âne qui a bu la lune - Marie Claude Treilhou - 1988

Après un premier film passant du sas d'un cinéma porno à un bar lesbien, "Simone Barbès ou la vertu" en 1980, Marie-Claude Treilhou semble prendre le contrepied total pour son deuxième long métrage 8 ans plus tard, "L'âne qui a bu la lune". Dans celui-ci un vieille homme se promène avec son petit fils dans un village occitan et lui raconte 5 histoires et légendes locales, donnant lieu à autant de décrochages narratifs. Celles-ci sont toutes drôles et amusantes, sauf la dernière, contemporaine de la narration du film et teinté d'une glaçante mélancolie.
Ce qui uni les films, des clubs de Pigale au folklore occitan, c'est il me semble cette volonté de se tenir à la marge, de donner à voir, à valoriser ceux qui ne sont pas ou plus vu, ceux que la société ne considère pas. En effet si en 2020 il y a un regain d'intérêt pour la connaissance des traditions, le questionnement de la modernité et le retour à la campagne, je doute que ce fut le cas à la fin des années 80. Il se dégage ainsi des deux films une belle générosité et une tendresse non feinte.


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Le point fort du film est son côté abstrait, ou disons quasi schématique, de mettre en place sa situation de départ. Les personnages sont à peine caractérisés, on ne connait pas vraiment leur situation, ni leur travail, ni leur ville, ni toute une somme d'éléments qui aurait engluée la narration dans un contexte social qui aurait desservi deux autres éléments moteurs du film : l'humour et la question du couple. Ainsi quand le film décroche dans sa deuxième partie et bascule vers une promenade/perte en forêt absurdement et symboliquement trop longue, tout continue à fonctionner. Et le tout est fait de façon suffisamment humble et honnête pour être crédible et touchant.


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Fatigue, grosse fatigue. Rivette c'est soit ça passe, soit ça casse, malheureusement ici ça casse.
Au final on cite (à juste titre) toujours le théâtre pour parler de Rivette, mais ne pourrait on pas songer aussi au Nouveau Roman ? Dans sa façon de narrer, de composer ses personnages, dans une approche assez abstraite au final. Mais un Nouveau Roman ou la rigueur intellectuelle aurait été remplacé par l'aura du mystère et habillé par la sensualité des films noirs. Là ou on peut saluer le film et lui reconnaître une singularité, c'est sa façon de mettre en scène essentiellement des femmes et de taquiner ouvertement le fantastique, un genre souvent dévoyé au bis. Malheureusement si il n'y avait pas quelques fulgurances cinématographiques, je crains que c'est le kitsh de l'ensemble qui aurait remporté la partie.

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Peu ou prou les mêmes remarques que ci-dessus, tant sur l'apprêterai kitsh de l'ensemble que les fulgurances cinématographique (ce sens du décor toujours incroyable, et quelques saisissant mouvements d'appareils). Mais surtout l'impression globale de voir une troupe de théâtre (amateur ?) à qui on aurait donné trop de moyen. La durée excessive du tout (2h10) rend l'ensemble particulièrement pénible et j'ai failli couper avant la fin.

Il me reste Merry-Go-Round (2h40) dans le coffret, que je vais me faire mais que je redoute un peu du coup :D


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Surprenant ratage d'un réalisateur turque qui avait pourtant bien débuté sa carrière avec l'émouvante trilogie Oeuf - Lait - Miel (j'avoue, je n'en ai vu que deux sur trois, et je ne sais plus les quels :D). Le point de départ était pourtant intéressant (dans un futur proche, un monde aride ou plus rien ne pousse, tandis que des humains entassés dans des camps attendent des autorisations pour pouvoir aller vivre dans les villes) mais vire vite à la fable mystique pompant très lourdement Tarkoski sans réussir à exister par elle même. Même les choix esthétiques (noir et blanc et photo hyper travaillée) donnent davantage une impression de pompiérisme académique que du sublime escompté. Dommage.
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groil_groil
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asketoner a écrit :
sam. 19 déc. 2020 22:03
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(Et sinon, j'ai trouvé que ça manquait un peu de transpiration, pour un film en si bonne position dans le top 2020 de @groil_groil . Dommage. D'ailleurs j'aimerais que groil nous livre enfin son top all-time des films où les gens suent beaucoup, pour qu'on parte sur de bonnes bases pour les vacances de Noël.)
:lol: :lol: :lol: :lol:

et sinon pour le film :love:
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Narval
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(Pour répondre à cyborg) : Si le diptyque Duelle-Noroît (que j'adore par ailleurs) t'emmerde, je crois que l'expérience Merry-Go-round qui est encore plus déconcertante et nébuleuse (reflet aussi de son tournage chaotique) risque de te faire tourner de l'œil :D C'est un film qui se construit encore plus autour de blocs de temps flottants. Pour moi son plus grand intérêt réside dans sa cartographie de la périphérie (du même niveau que Le pont du Nord, mais version Roissy).
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cyborg
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Narval a écrit :
dim. 20 déc. 2020 18:43
(Pour répondre à cyborg) : Si le diptyque Duelle-Noroît (que j'adore par ailleurs) t'emmerde, je crois que l'expérience Merry-Go-round qui est encore plus déconcertante et nébuleuse (reflet aussi de son tournage chaotique) risque de te faire tourner de l'œil :D C'est un film qui se construit encore plus autour de blocs de temps flottants. Pour moi son plus grand intérêt réside dans sa cartographie de la périphérie (du même niveau que Le pont du Nord, mais version Roissy).
Le Pont du Nord fait partie des Rivette que j'aime beaucoup, donc tu me donnes plutôt de l'espoir ;)
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asketoner
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L'Heure du loup, Ingmar Bergman, 1968

J'ai toujours eu un problème avec le cinéma de Bergman dès lors qu'il se contente d'opposer au puritanisme la petite tentation adultérine (mais au fond le cinéma suédois (et danois) en est encore beaucoup là). Par exemple, ici, difficile d'éprouver quoi que ce soit, malgré le talent visuel de Bergman, ses trouvailles narratives, etc..., pour cet artiste peintre mutique, insomniaque, qui accepte les invitations chez des gens qu'il méprise mais achètent ses oeuvres, fait de sa femme une esclave domestique, rêve de tuer un enfant et de gifler tout le monde avec morgue, mais ne fait rien, et reste un peu bloqué sur un vieil amour impossible. Il y a quand même des choses incroyables, comme cette femme qui s'arrache le visage, cet homme qui par angoisse se met à marcher au plafond, et surtout la première et la dernière scènes, où Liv Ullmann s'adresse à la caméra, nous invitant à entrer dans le film avec une histoire puis à en sortir avec une question.
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Mr-Orange
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Je reviens sur ce film, puisque c'est à mon avis un des films les plus importants de ces dernières années.

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Les Bonnes manières — Marco Dutra et Juliana Rojas — 2018

Ça, c'est une sacrée claque. Non que le film soit sensationnel ou délibérément viscéral, bien au contraire, il y a une retenue des émotions, une pudeur, qui donnent une grande dignité aux personnages, mais c'est vraiment un film magnifique.

D'une part, c'est certainement un des films à la photographie la plus audacieuse et la plus belle de ces dernières années — avec une inventivité qu'on n'avait peut-être pas retrouvé depuis L'Étrange affaire Angélica, de Manoel De Oliveira, avec un numérique éblouissant, utilisé d'une manière que je n'avais jamais vue. A ce titre, la séquence en dessins de l'origine mythologique de l'affaire est somptueuse, et témoigne de la grande vitalité artistique du duo de cinéastes.

Car ce film, c'est aussi l'inspiration, ce souffle venant d'ailleurs, en mouvement, dans un élan de création et d'énergie inventive permanent. Ça, je n'avais peut-être pas vu ça depuis le retour de Twin Peaks. C'est l'immensité du cinéma qui vibre dans cette création tantôt film de genre, tantôt comédie musicale (les scènes chantées ayant d'ailleurs une grande beauté extatique et céleste, à l'instar d'un air de Bach), tantôt drame social, tantôt conte, tantôt film d'initiation, tantôt film d'horreur. Quoi de plus cohérent, puisque c'est un film sur la mutation, l'acceptation des contraires, sur l'hybridité. C'est un film contradictoire, comme en atteste le traitement des personnages, comme celui de la propriétaire du logement de Clara, a priori antagoniste, a priori insupportable rentière satisfaite et paresseuse, qui gagne, très subtilement, au long du film, une complexité humaine et une discrète beauté qui témoignent de cette dignité dont je parlais auparavant.

En somme, à l'image de la main finale tendue au monstre, c'est un merveilleux geste vers le cinéma total, dans ce qu'il a de plus poétique et politique.
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asketoner
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@Mr-Orange : :jap: :jap: :jap:
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Ilan
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sokol a écrit :
sam. 19 déc. 2020 23:34
En fait, je l'ai trouvé très bien. Je pense que c'est son meilleur film. Si ses premiers sont plus personnels (je les préfère), celui ci, même si c'est l'adaptation d'une piece de théâtre, je pense que c'est son Mépris (qui était également une adaptation !).
Ah oui ? Je trouve que c'est un film sans grande prise de risque (surtout comparé au Mépris...).
Une famille, on en a tous une, avec laquelle c'est souvent compliqué, donc il est facile de se reconnaître dans le texte, d'autant plus quand il est interprété par de grands acteurs... le gros plan permanent, ça marche pour créer une atmosphère suffocante, mais en terme de cinéma c'est limité... je trouve que c'est un de ses films les moins intéressants pour ma part.
Par contre j'ai vu récemment

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LAURENCE ANYWAYS

Que j'ai trouvé formidable pour le coup. D'une générosité et d'une intelligence rare, en plus d'être un régal de mise en scène pure.

revu aussi

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PROBLEMOS

Qui est pour moi la meilleure comédie des années 2010.

Vu enfin:
Zootopie, que j'ai trouvé sans grand intérêt
Et 40 minutes de L'esquive de Kechiche, ça m'a exaspéré, je n'ai pas réussi à en voir plus.
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B-Lyndon
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Mr-Orange a écrit :
mar. 22 déc. 2020 11:06
Je reviens sur ce film, puisque c'est à mon avis un des films les plus importants de ces dernières années.
Le personnage d'Ana est sans doute l'un des plus beaux personnages de ces dernières années au cinéma :love2:
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
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asketoner
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The Last Sunset / El Perdido, Robert Aldrich, 1961

Quatre personnages principaux : une femme mal mariée, sa fille de 16 ans, son ex un peu trop violent, et l'homme qui est à la poursuite de ce dernier. Aldrich suggère toutes les possibilités sexuelles de ce quatuor, et même les impossibilités, allant jusqu'à butter contre un inceste final en forme d'apothéose (que les cinéphiles internautes américains s'accordent pour qualifier de "disgusting"), devenant l'enjeu retors et terrifiant de son récit. (A peu près sûr pourtant que ces mêmes cinéphiles adorent Les Liaisons dangereuses - mais sans les costumes d'époque, loin des salons feutrés et au milieu du désert et des vaches, c'est tout de suite beaucoup moins affriolant.) (Je vois dans ce finale un parallèle évident avec celui d'En quatrième vitesse, qui se termine sur cette boîte qu'il vaudrait mieux ne pas ouvrir, capable de détruire beaucoup de choses : comme si Aldrich avait réussi à faire un lien, dans son oeuvre, entre l'inceste et la bombe atomique.)
Ce goût pour la surenchère m'a plu. J'ai l'impression qu'avec Aldrich (comme avec Tourneur finalement), il se passe toujours quelque chose. Ses films (j'en ai vu deux mais j'ai déjà une théorie :D ) avancent sans chercher l'ampleur ni l'émotion ni la profondeur, mais plutôt la torsion - vraiment comme s'ils se tordaient au fur et à mesure, comme de l'adn, remplis d'informations disparates qui mises bout à bout forment un être étrange mais bien vivant. Ainsi Aldrich enchaîne-t-il des scènes qui n'ont pas grand chose à voir les unes avec les autres : du marivaudage amoureux, du pur western, du mélodrame, ou encore cet moment charmant où Rock Hudson apprend à la jeune fille comment faire pour qu'un veau la suive... Esthétiquement, le film est aussi très hybride, entre studio trop coloré et décors réels. Jusqu'à une séquence très réussie de tempête de sable où les viols et les meurtres potentiels abondent, comme si avec la disparition du paysage, l'homme perdait toute structure, révélant le chaos qui le fonde.
L'autre grand plaisir de The Last Sunset tient au personnage de Kirk Douglas, cet homme si profondément violent qu'il ne s'en rend même plus compte, qu'on qualifierait de pervers narcissique dans un magazine mais qui est ici simplement regardé à travers le prisme du western, c'est-à-dire comme un homme quasi sauvage, livré à lui-même, trop seul pour considérer l'autre autrement que comme un objet, trop menacé pour abandonner le fantasme qui donne un sens à sa vie de bête perpétuellement aux aguets. Il s'en prend à un chien, fond en voyant réapparaître une robe jaune qu'il croyait détruite, se roule dans la poussière avec Rock Hudson, se rase torse nu face à une très jeune fille, risque tout pour un vague souvenir, chante curucucu autour du feu, improvise des poèmes au sujet des nuages pour éviter de dire la vérité, renonce à tout pour tomber dans un autre panneau, et se sait si invincible qu'il ne peut périr que s'il le décide. Bref, il survit, et il a pour cela un nombre incalculable de stratégies. C'est un grand personnage, malfaisant, terrible : un Américain absolu.
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Narval
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Mr-Orange a écrit :
mar. 22 déc. 2020 11:06
Je reviens sur ce film, puisque c'est à mon avis un des films les plus importants de ces dernières années.

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Les Bonnes manières — Marco Dutra et Juliana Rojas — 2018

Ça, c'est une sacrée claque. Non que le film soit sensationnel ou délibérément viscéral, bien au contraire, il y a une retenue des émotions, une pudeur, qui donnent une grande dignité aux personnages, mais c'est vraiment un film magnifique.

D'une part, c'est certainement un des films à la photographie la plus audacieuse et la plus belle de ces dernières années — avec une inventivité qu'on n'avait peut-être pas retrouvé depuis L'Étrange affaire Angélica, de Manoel De Oliveira, avec un numérique éblouissant, utilisé d'une manière que je n'avais jamais vue. A ce titre, la séquence en dessins de l'origine mythologique de l'affaire est somptueuse, et témoigne de la grande vitalité artistique du duo de cinéastes.

Car ce film, c'est aussi l'inspiration, ce souffle venant d'ailleurs, en mouvement, dans un élan de création et d'énergie inventive permanent. Ça, je n'avais peut-être pas vu ça depuis le retour de Twin Peaks. C'est l'immensité du cinéma qui vibre dans cette création tantôt film de genre, tantôt comédie musicale (les scènes chantées ayant d'ailleurs une grande beauté extatique et céleste, à l'instar d'un air de Bach), tantôt drame social, tantôt conte, tantôt film d'initiation, tantôt film d'horreur. Quoi de plus cohérent, puisque c'est un film sur la mutation, l'acceptation des contraires, sur l'hybridité. C'est un film contradictoire, comme en atteste le traitement des personnages, comme celui de la propriétaire du logement de Clara, a priori antagoniste, a priori insupportable rentière satisfaite et paresseuse, qui gagne, très subtilement, au long du film, une complexité humaine et une discrète beauté qui témoignent de cette dignité dont je parlais auparavant.

En somme, à l'image de la main finale tendue au monstre, c'est un merveilleux geste vers le cinéma total, dans ce qu'il a de plus poétique et politique.
J'ai vraiment aimé la première partie du film qui est effectivement très rafraichissante, mais je trouve que Les bonnes manières est beaucoup moins inspiré (et inspirant) dans sa partie horrifique - celle qui vient à partir de la transformation véritable. Toute la séquence de la fête ou du magasin - et ce qui les prépare car le film prend son temps - par exemple m'ont semblé êtres des actes manqués, trop faciles (j'ai vu le film il y a quelques années j'avoue ne pas me souvenir du déroulé exact, mais ça m'avait marqué à l'époque). En fait tout devenait prévisible et ça m'a vraiment étonné après un début si différent des films de genre habituels. Le personnage du gamin est un bon exemple de cette écriture : il est de manière générale trop superficiel et orienté pour faire progresser l'histoire, poser des problèmes pour déclencher l'inévitable confrontation finale, il n'y a pas de questionnement réel de son identité. Et la déception est d'autant plus grande que le film ne semble pas trop savoir où conduire son loup-garou, sinon dans une image finale trop symbolique qui rappelle plutôt un Disney (la musique n'aide pas beaucoup). Cela ne retire en rien ses qualités de mise en scène, ses acteurs et ses prises de risque bien entendu, mais le film m'a paru un peu inégal.
Modifié en dernier par Narval le mer. 23 déc. 2020 14:46, modifié 1 fois.
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Narval
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B-Lyndon a écrit :
mer. 23 déc. 2020 11:46
Mr-Orange a écrit :
mar. 22 déc. 2020 11:06
Je reviens sur ce film, puisque c'est à mon avis un des films les plus importants de ces dernières années.
Le personnage d'Ana est sans doute l'un des plus beaux personnages de ces dernières années au cinéma :love2:
C'est fou parce que je me souviens absolument pas d'elle comme d'un personnage intéressant (en plus elle meurt tôt non ?).
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sokol
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Narval a écrit :
mer. 23 déc. 2020 14:41
C'est fou parce que je me souviens absolument pas d'elle comme d'un personnage intéressant (en plus elle meurt tôt non ?).
Justement, justement !!

C'est marrant car moi aussi je l'ai revu il y a une dizaine de jours. Je l'avais adoré à sa sortie et la, encore et encore plus.

Film extrêmement riche et courageux. Comment ont-ils fait pour ne pas se payer UNE SEULE seconde la tête de leurs personages ?? Et sans verser dans les bons sentiments !! Ils ont reussi exactement là où échouent les Lanthimos, les Sorentino & co. Les Haneke quoi.

Grand grand grand film !
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
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cyborg
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M15 demande protection / The Deadly Affair - Sydney Lumet

Note : sur ce coup les traducteurs français se sont dépassés, transformant le "MI:5" en un improbable "M15" sorti d'absolument nul part. Bravo :lol:

Que James Mason ait des faux airs de Sean Connery n'est pas un hasard, renforçant le pied de nez fait par Lumet (et John Le Carré, auteur du roman originel) au flamboyant et fantasmatique James Bond qui connait alors ses premiers succès. C'est sous la grisaille poisseuse de Londres et dans ses arrières ruelles sordides que se déroule le film, il n'y a ni gadgets, ni filles en bikini. L'enquête elle même semble passer au second plan et fait languir tant les spectateurs que les personnages. Lumet préfère s'attarder davantage en des digressions sur le théâtre ou sur la vie intime du héros, donnant des échos étranges à l'affaire en cours. Car c'est bien ceci le sujet du film : le portrait d'un agent secret vieillissant, en proie à tous les doutes possibles, tant envers sa profession que ses relations privées. Et le jeu de dupe qui constitue sa profession de lentement mais surement se reproduire dans sa vie personnelle, à tel point que nous finissons par ne plus vraiment savoir qui parle ni à qui, ni comment, ni au nom de quoi dans une sorte de distanciation perpétuelle. Le film est loin d'être un chef d'oeuvre mais vaut par son faux rythme stagnant et par sa représentation très terre à terre d'une profession bien souvent idéalisé par le cinéma.


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Revisionnage de "La Garçonière" de Billy Wilder, peut-être plus de 15 ans après la première fois (j'étais encore au lycée et commençais tout juste à m'intéresser vraiment au cinéma). Dans mon souvenir le film était plus drôle et pétillant. Si le film est régulièrement comique, il est en fait essentiellement morose et sujet à quelques longueurs. Si l'ensemble est incontestablement daté, il en ressort néanmoins une belle histoire d'émancipation des deux personnages principaux au sein d'une société toxique.

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Merry-go-round me semble difficilement comparable avec les deux chapitres existants de "Scènes de la vie parallèle" et tendre bien plus fort vers le très bon "Pont du Nord", sans en atteindre néanmoins les sommets.

A mon sens le problème de "Noroit" et de "Duelle" est le décorum qui les enrobe et le sérieux avec lequel Rivette prétend constituer leurs narrations alors qu'il n'en a rien à faire. Il n'a de cesse de vouloir faire croire au spectateur que lui devrait avoir quelque chose à faire de ce qui se passe à l'écran, alors qu'il ne lui donne rien pour se raccrocher nul part, donnant ainsi l'impression de se moquer tant de ses personnages que de ses spectateurs.

Merry-go-round bien au contraire fait partir le spectateur sur un pied d'égalité avec les deux héros : ni eux ni lui ne sait précisément ce qui se passe, ni pourquoi ni comment. Le vague arrière plan dramatique devient avant tout un gigantesque Mac Guffin, prétexte aux aventures de nos deux héros. Leur imagination, cherchant de mystérieux signes ou il n'y en a peut-être pas, est ainsi autant stimulé que la nôtre. C'est d'ailleurs lorsque le film cherche à "contraindre" ou "faire avancer", donnant des éléments plus concrets, des ressorts dramatiques, qu'il est le moins convaincant (la discussion sur le coffre en Suisse, la fin sur le terrain de golf). Au contraire il devient assez génial lorsque les deux personnages semblent devoir exister par eux même avec ce qui a été mis à leur disposition, par exemple ce diner fait d'anchois et de confiture avant d'évoquer leurs souvenirs personnels dans le froid de cette grande maison.

Le film est ponctué de scènes de chasse à l'homme abstraites, où les deux acteurs cherchent à s'entretuer (que Rivette y remplace Maria Schneider par une Hermine Karagheuz lui ressemblant peu ou prou est assez truculent, que ceci ait été fait par choix ou par contrainte), dans un esprit très pirandelesque. Celles-ci semblent être la clé pour comprendre l'ouverture du film : les deux personnages y sont réunit par un mystérieux troisième qui n'est pas tant un personnage (sœur ou amoureux de l'un et l'autre comme nous l'apprendrons plus tard) que le bon vouloir de l'auteur qui continuera par le suite à se jouer d'eux et à jouer avec eux. Pour peu que le spectateur accepte ce pacte, les 2h40 suivantes sont assez truculentes.


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Gosses de Tokyo - Ozu

Si Ozu à la réputation de "filmer à hauteur de tatami", cette mise en scène s'adapte parfaitement bien ici en filmant "à hauteur d'enfant", coupant régulièrement la tête aux adultes du film et créant d'amusant rapport d'échelles et d'espaces. Il est, et nous sommes, au même niveau qu'eux.

Deux jeunes frères (la répétition en double de ce petit corps enfantin est la grande trouvaille visuelle du film) emménage dans un nouveau quartier à la suite d'un déménagement. Ils doivent affronter une bande locale et s'habituer à leur nouvelle école. Après un début espiègle, le film prend la tournure d'un drame (après une superbe scène de projection cinématographique dans le salon familial, ou se mélangent petits et grands sur lesquels se superposent des images projetées) où la cellule familiale se fissure face à une structure sociale dont l'injustice est trop grande pour disparaitre devant la naïveté de l'enfance. Et l'heure et demi de se conclure en valorisant l'école, en faisant non un lieu de reproduction et de formatage, mais la présentant comme le seul vrai lieu de brassage de classes et ainsi, peut-être, d'évolution sociale.
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groil_groil
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Désolé d'avance d'être aussi expéditif dans le message qui va suivre, mais dur de trouver du temps quand on le passe en cuisine :D

alors, vu ces derniers jours :

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24h dans la vie d'une adolescente qui hésite à offrir sa virginité à un homme plus âgé qu'elle. Visuellement magnifique, mise en scène splendide, le film déroute par un sentiment d'inachevé, parfois à l'instar des films de Bellochio de cette période, et c'est justement cela qui lui donne son identité. Le titre original rend parfaitement l'ambiance et le propos du film (Douces Déceptions) et l'on regrette que le titre français purement racoleur entraine sur une fausse piste

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Considéré comme l'un des meilleurs Lee de la seconde partie de sa carrière, je trouve ça quand même bien simpliste et schématique. ça se regarde, certes, mais ça ne va pas bien loin.

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Comédie italienne friponne des 70's, qui vaut surtout pour ses acteurs, et surtout surtout pour Monica Vitti plus sublime que jamais

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Un peu moins mauvais que lors de mon premier visionnage, mais pas de quoi se réjouir non plus.

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3ème fois, et c'est de mieux en mieux. Mise en scène, photographie et construction narrative magnifiques, ça devient finalement l'un des grands Fincher.

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Tenu 20 minutes. Disons que ce qui fait le sel du premier c'est que les passants rencontrés puissent penser que ce mec existe. Ici, on voit bien que tous les passants sont des acteurs qui jouent au passant, et tout l'intérêt du procédé s'écroule. Du coup, on assiste à une cascade d'insultes homophobes, antisémites et sexistes, qui sont débités uniquement dans le but de provoquer bien sûr, mais ça ne provoque que gêne et consternation.

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Le postulat est intéressant - filmé Marseille aujourd'hui comme si on était à Paris sous l'occupation, notamment pour dénoncer les conditions de vie des migrants - mais ça ne marche pas deux secondes. Déjà parce que c'est adapté d'un texte d'époque qui ne correspond plus du tout à la monstration, et ensuite parce que c'est tellement ampoulé dans la mise en scène que le film fonce sans jamais se retourner dans un long tunnel d'ennui.

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Impossible de voir autre chose le soir de la mort de Claude Brasseur.

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On a l'impression que Spike Lee se pose la même question à chaque plan, à chaque séquence : comment je vais bien pouvoir faire pour rater ce film ?

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Enième revisionnage en famille pour les fêtes.

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Enième revisionnage en famille pour les fêtes, mais le premier avec mon fils de bientôt 7 ans, dont je me souviendrai longtemps de la question : "Mais papa, pourquoi Marty, il se voit lui-même ?"

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Enième revisionnage pour les fêtes d'un film aussi agaçant qu'attachant, et qui se patine magnifiquement (le temps gommant la majeur partie de ses défauts).

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Aucun intérêt pour moi, j'aime bien visuellement la partie New-Yorkaise du film, magnifiques scènes de rues dans des couleurs automnales, mais c'est à peu près tout ce qui m'intéresse là-dedans. Ce qui n'en finit pas de m'étonner, pour ce Pixar comme les autres, c'est comment des gens que j'estime peuvent trouver ça intéressant, voire passionnant. Bref, je ne suis pas près d'en revoir un.

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Le polar français de 1985 dans toutes ses incohérences et son irréalité. A voir aujourd'hui c'est fascinant car tout semble tellement à côté de la plaque, tant les codes ont évolués.
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Un clarinettiste d'orchestre sans histoire se laisse influencer par l'un de ses collègues et, lors d'une semaine où sa femme autoritaire est absente, rend visite à l'une des choristes qui vend ses charmes pour arrondir ses fins de mois. Arrivé sur place et avant même d'avoir pu entreprendre quoique ce soit, il découvre le cadavre de la jeune femme, un couteau planté dans le dos. Et comme plusieurs personnes l'ont croisé dans l'immeuble, il devient le suspect n°1. Tourné juste après l'un de ses chefs-d'œuvre, Voici le temps des assassins, L'homme à l'imperméable est un film très réussi, qui oscille en permanence entre le thriller dramatique et la comédie satyrique, mais parvenant, notamment grâce au talent de Fernandel qui ici n'en fait pas trop, à être convaincant sur les deux niveaux, créant un drôle de film qui danse sur deux pieds. C'est sans doute aux Etats Unis que Duvivier a ainsi appris à mélanger les genres, je pense notamment à plusieurs films de Ford dont le sujet est grave mais où, par exemple, John Wayne, enchaine les vannes. On peut en revanche regretter que la fin de L'Homme à l'imperméable ne lui donne pas plus de hauteur, mais c'est tout de même une réussite.
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@Ilan : tu as eu bien raison pour le Kechiche... J'avais tout vu il y a un ou deux ans mais j'avais souffert à partir de la 2ème minute... ça ne s'améliore jamais ensuite :D
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