sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 14:04
B-Lyndon a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 13:11
L'opposition oriental/occidental à l'endroit du désir ne marche pas du tout, et ce dans les deux films.
Qu'est ce que t'en sais toi ??
Bah je regarde le film. Mon problème est que j'ai l'impression que tu intuites des choses que penserait Kechiche (et tu as peut-être raison, j'en sais rien, et le gars étant tellement infréquentable que c'est assez facile) et que tu les mets dans le film comme si elles étaient évidentes. Du genre Ophélie est filmée comme une pute et Kechiche est contre l'avortement. Ca plane totalement, car jusqu'à présent, tu n'as pas pu me le démontrer.
Je veux bien reconnaitre que les beurettes sont filmées différemment, ok. Je veux bien admettre que pour toi et Asky, le film est un peu court dans l'horizon qu'il dessine pour ses personnages. Je suis pas d'accord, mais ok, ça tient. Et donc ? En quoi ça fait d'Ophélie une pute ? Ca tu ne me l'explique pas (et je m'arrache les cheveux que je n'ai pas depuis trois jours pour essayer de le comprendre

)
sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 14:04
B-Lyndon a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 13:11C'est plutôt Tony qu'on voit coucher à tout va, c'est lui la "chaudasse" comme tu dis.
(Mais c'est un homme alors le terme ne te viendrait pas à l'esprit, comme par hasard...

)
Bien sur que ça me vient à l’esprit : c'est un
salopard ! Mais il n'est pas si mal filmé quand même, non ?

Et que je sache, ce n’est pas lui qui a failli à valider le film et a pris ses distances avec, mais bel et bien Ophélie Beau
Il n'est pas si mal filmé (quoique son plan à poil à la fin est assez glaçant, on dirait une bête traquée) et Ophélie non plus ! Tous les plans où elle apparait sont splendides. Et la mise en scène est toujours avec elle. Parlons mise en scène d'ailleurs : quand elle est sous l'olivier sur la petite colline de la ferme et qu'en bas, la mère d'Amin lui pose, de manière assez mesquine, des questions sur son mariage. Il y a un champ contrechamp où, très clairement, on sent que Kechiche se tient du côté d'Ophélie. (Elle est plein cadre, en gros plan, la caméra capte le moindre mouvement de son visage ; et la mère est reléguée assez loin dans le champ de la longue focale)
Je parle du cynisme de la mère, ça me fait aussi penser à celui de la tante jouée par Hafsia Herzi, quand elle parle derrière le dos d'Ophélie dans le 1, et de Jessica dans la cuisine ici.
Les beurettes, comme tu dis, ne sont pas épargnées par la mesquinerie.
Effectivement, Amin n'est jamais mesquin "à priori". Mais même ça, Kechiche le renverse : le voyage à Paris avec Ophélie, ce sera aussi pour lui l'occasion de déclarer sa flamme à Ophélie, comme les photos de nu dans le Canto Uno viennent autant d'un désir artistique que voyeuriste (et chez Kechiche, les deux s'entremêlent en permanence). Quand sa mère lui dit "Elle sait que toi t'es droit, elle serait capable de se servir de toi sans te prévenir", elle ne sait pas que Amin le sait déjà, et donc qu'il n'est pas "si droit" à ses yeux qu'elle. Les billets de trains à son nom, aussi. Une ruse, un calcul, pour dire sans dire ce qu'il ressent au fond de lui (tiens, comme Alexandre qui ne sait pas dire à Veronika qu'il l'aime)
Et sur la dernière partie de ta phrase, c'est périphérique au film
en soi. Le film a sa vie propre. Parce que je pourrai totalement t'opposer qu'Ophélie Bau accompagne le film en promotion, qu'elle l'a défendue à Locarno, qu'elle a déclaré qu'
"Intermezzo était du passé, et place à Canto Due".
Je ne nie pas que Kechiche est un roublard, un sale type ou quoique ce soit. J'ai toujours pensé qu'il était sans doute humainement un peu bête, ou en tout cas schématique. Mais pour moi, ses affects sont parfaitement redistribués dans le film. Je ne vois pas de personnages sauvés quand d'autres seraient condamnés, vraiment pas. Je vois des vivants et des vivantes, des gens qui font ce qu'ils peuvent avec leurs empêchements, leurs contradictions, leurs désirs.
sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 14:04
sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 12:44
Qu'est-ce qu'on peut répondre à ça ? La vie n'est pas sympa avec Ophélie, en effet. Elle n'est sympa avec personne
La vie est très, très sympa pour... Amin ! Il fait trois ans d’études de médecine, puis il arrête. Ses parents (restaurateurs, classe moyenne quand même !) lui payent tout, même ses délires de « cinéaste », juste parce qu’il a un appareil photo à la main.
Dans le premier volet, il est très clairement dit qu'Amin bosse en tant que serveur pour payer son loyer à Paris.
Mais bon, je t'accorde qu'il y a un vrai soutien familial vis à vis d'Amin. Primo, je trouve ça plutôt juste, sociologiquement parlant (et je suis content que Kechiche nous épargne le conflit parents/enfants sur la vocation artistique qu'on a vu mille fois). Deuxio, ce soutien est ambivalent : tout le monde fantasme un peu sa situation. Or, on sent que la vie d'Amin à Paris n'est précisément pas un rêve, qu'elle est un terreau de projection pour tout le monde (c'est quand même un type qui passe ses journées enfermées à regarder des films, qui sort parce que sa maman lui dit d'aller prendre le soleil, etc).
Ensuite, j'en viens à la réserve d'Asky : c'est Tony qui amène Amin à rencontrer le producteur américain, Amin lui n'en a pas branlé une. C'est Tony qui active à chaque fois les rencontres, qui guide Amin.
Et, franchement, vous pensez sérieusement que le producteur s'intéresse VRAIMENT au scénario d'Amin ? Il le fait car il sent que Jessica est stimulée par Amin et Tony, que son désir est capté par eux, et parce qu'il sent qu'il est en train de la perdre. Mais rien de tout ça n'est à prendre au sérieux.
sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 14:04
Je te l’ai déjà dit en privé : veux‑tu un film dont je n’ai pas la moindre réserve et qui filme un « regardant », comme tu dis si facilement ?
À soin image – de Peretti (Quoi de plus pertinent, pour parler d’un film, que d’en rappeler un autre ?)
Zéro voyeurisme ! Zéro parti pris !!
Très beau film mais la comparaison a ses limites :
A son image n'est pas vraiment un film sur le désir sexuel et/ou amoureux.
Forcément, c'est moins casse gueule. Tu peux au moins reconnaître à Kechiche de ne pas esquiver son sujet.
sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 14:04
sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 12:44
(le Canto Uno s'ouvre sur une double citation de la Bible et du Coran)
Tout à fait. Et le film est bien plus religieux que tu ne le crois (si j’ai mentionné le cas Cristian Mungiu avant-hier, ce n’était pas innocent)
Je suis tout à fait d'accord avec toi sur Mungiu, il est bizarre sur l'avortement.
Mais Kechiche ???
sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 14:04
sokol a écrit : ↑lun. 8 déc. 2025 12:44
Les deux heures précédentes préparent à cette fin !
Ah tiens, Kechiche a droit de "préparer cette fin". Ladj Ly non
Là tu es un peu de mauvaise foi et je sais que tu le sais
Ladj Ly a tout a fait le droit de préparer cette fin, ce n'était pas du tout mon objection ! Le dernier mouvement du Kechiche (du coup de feu à la course finale) est une série de montées d'énergies qui retombent en permanence. Ladj Ly, dès qu'on est dans l'insurrection, ça monte, ça monte, et ça ne s'arrête pas jusqu'à la fin, qui de fait paraît complètement hors-sol.
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »